Agent de joueurs extra-communautaire et exercice d'une activité en France

Publié le Modifié le 26/10/2009 Vu 6 100 fois 0
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De plus en plus d'agents de joueurs sont confrontés à la question de la faculté pour un agent étranger d'exercer son métier sur le territoire français. Nous avons donc souhaité apporter sinon des réponses au moins des éclaircissements sur la législation française en la matière dont il faut reconnaître qu'elle ne brille pas par sa clarté.

De plus en plus d'agents de joueurs sont confrontés à la question de la faculté pour un agent étranger d'e

Agent de joueurs extra-communautaire et exercice d'une activité en France

De plus en plus d'agents de joueurs sont confrontés à la question de la faculté pour un agent étranger d'exercer son métier sur le territoire français.

Nous avons donc souhaité apporter sinon des réponses au moins des éclaircissements sur la législation française en la matière dont il faut reconnaître qu'elle ne brille pas par sa clarté.

1- Le principe : l'interdiction pour un ressortissant hors UE/EEE d'exercer en France l'activité d'agent

Ce principe est posé par l'article L 222-9 du Code du sport dispose que :

"L'exercice à titre occasionnel de l'activité d'agent sportif par un ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne ou d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen non établi sur le territoire national est subordonné au respect des conditions de moralité définies aux articles L. 222-7 et L. 222-8".

Si l’exercice occasionnel de l’activité par un agent membre de l'Union Européenne ou faisant partie de l’EEE est expressément encadré, deux hypothèses sont laissées en suspens : celle d’un exercice habituel de l’activité et celle de l’exercice de cette activité d’agent par un agent extra communautaire.

Est-ce à dire que dans ces deux hypothèses, si l’on s’en fie à une interprétation à a contrario du texte, l’agent serait dispensé de respecter les dispositions du code du sport ?

Manifestement pas. Et pour cause, une telle interprétation irait à l’encontre même de l’esprit du texte, et ne peut, dès lors, être envisagée sérieusement.

Faut-il alors considérer qu’en l’absence de disposition expresse en ce sens, l’activité d’agent sportif exercée par un agent extra communautaire serait de facto interdite ?
Cette interrogation n’est pas sans conséquence puisque la violation des dispositions en la matière entraine des sanctions pénales relativement lourdes.

Ainsi, l'article L222-11 dispose que :

"Est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'exercer l'activité définie à l'article L. 222-6:

1° Sans avoir obtenu la licence d'agent sportif ou en méconnaissance d'une décision de
non-renouvellement ou de retrait de cette licence ;

2° Ou en violation des dispositions des articles L. 222-7 à L. 222-9".

Fort heureusement, face à cette incertitude, le principe d'interprétation stricte des dispositions pénales s’opposerait vraisemblablement à sanctionner pénalement l’agent étranger intervenu dans une transaction entre un club et un joueur ou entre deux clubs même lorsqu'elle aurait un lien avec la France.

A notre connaissance, la question de l'application dans l'espace de l'article L222-12 n'a pas été tranchée par la jurisprudence. Tout au plus, peut on citer le tribunal de grande instance de Paris qui considère qu'un ressortissant non communautaire doit avoir obtenu une licence délivrée par la fédération française de football pour prétendre à une commission pour l'entremise entre un joueur et un club (TGI Paris 11 septembre 2007 – Lovey c/ PSG).

Le débat semble donc encore ouvert et il n'est pas certain que l'intervention d'un agent non communautaire soit totalement prohibée en cas d'élément international dans la transaction.

2- Les difficultés d'application de la loi

Le texte de l'article L222-6 défini le champ d'intervention nécessitant la détention d'une licence d'agent :

"Toute personne exerçant à titre occasionnel ou habituel, contre rémunération, l'activité consistant à mettre en rapport les parties intéressées à la conclusion d'un contrat relatif à l'exercice rémunéré d'une activité sportive doit être titulaire d'une licence d'agent sportif. La licence est délivrée pour trois ans par la fédération délégataire compétente et doit être renouvelée à l'issue de cette période".

Si l'on doit considérer comme certains auteurs le préconisent, que la législation sur les agents sportifs constitue une loi de police d'application immédiate, cela signifierait que la loi française aurait vocation à s'appliquer très largement y compris aux situations présentant des éléments internationaux.

Prenons le cas d'un agent sénégalais qui signe un contrat de médiation avec un joueur sénégalais demeurant au Sénégal. L'agent négocie le contrat de travail du joueur avec un club de ligue 1 français. Selon cette conception extensive de l'applicabilité de la loi française, le joueur serait en droit de ne pas exécuter le contrat et pourrait refuser le paiement de la commission normalement due à l'agent au motif que l'agent a effectué une activité d'intermédiaire sur le territoire français.

Cette conception nous apparaît exagérément protectionniste et interdirait effectivement tout exercice d'une activité d'agent à un extra-communautaire régulièrement titulaire d'une licence délivrée par sa fédération après examen de compétence.

Si l'on doit considérer que la réglementation relative aux agents sportifs vise à protéger les sportifs contre les agissements d'agents ne présentant ni les qualifications morales ni les compétences, il n'y a pas de contradiction à accepter que cette activité puisse être exercée par un agent extra-communautaire dès lors qu’il dispose d’une licence.

Et ceci d’autant plus que, l'examen d'agent de joueurs, , n'est pas spécifique à la France. En matière de football, notamment, l'article 8 du Règlement FIFA des agents de joueurs impose ce type d'examen à toutes les fédérations nationales :

"L'examen a pour objet de tester les connaissances du candidat dans les domaines suivants :
a) règlements spécifiques au football, notamment en matière de transferts (Statuts et réglementation de la FIFA, des confédérations et de l’association du pays où le candidat passe l’examen) ;
b) droit civil (principes de base du droit de la personnalité) et droit des obligations (droit des contrats).
Chaque examen doit comporter vingt questions, dont quinze sur la réglementation internationale et cinq sur la réglementation nationale. Les sujets sur les questions d’ordre national seront élaborés par les associations respectives et les sujets sur les Statuts et la réglementation de la FIFA seront rédigés par la FIFA et remis aux associations".

Cela signifie donc que les agents titulaires de la licence délivrée par leur fédération nationale ont les mêmes compétences et, à tout le moins, la même légitimité pour représenter les intérêts d'un joueur ou d'un club qu'un agent titulaire d'une licence délivrée par la FFF.

En outre, la FIFA impose à tous les agents la souscription d'une assurance de responsabilité civile professionnelle ou une garantie bancaire d'un montant minimum de 100.000 francs suisses.

Enfin, la FIFA impose à tout agent, quelle que soit sa nationalité, de respecter le code de déontologie qu'elle a édicté.

En conclusion, il ne nous apparaît pas d'une évidence indiscutable qu'un tribunal français saisi d'un litige relatif à l'exercice d'une activité d'agence sportive par un agent extra-communautaire considèrera que cette activité est illicite au sens du Code du sport français.

En attendant, nous invitons dans la mesure du possible, les agents extra-communautaire à la prudence dans leurs rapports juridiques et financiers avec les sportifs et clubs dès lors qu'un élément français est impliqué dans la transaction.


Redouane Mahrach - Tatiana Vassine

Avocats à la Cour de Paris

Spécialiste en droit du sport

www.avocat-sport.fr

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