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Quai des Enfers, un polar sublime.

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Quai des Enfers, un polar sublime.

BLOG DE MAITRE VINCENT RICOULEAU

 

"Quai des Enfers" de Ingrid Astier aux éditions Gallimard.

Il y a des univers à part. La mer. L'espace. Les aéroports. Les guérillas. La liste n'est pas si infinie que cela. Il nous manquait un livre sur la brigade fluviale de Paris. La Seine devient la Scène. On ne devient pas flic par hasard dans la Fluviale. Ses flics sont des dédiés. des grenouilles. Des canotiers au sens propre. Des patrouilleurs. Des plongeurs. On n'y travaille pas seul. Pas de sectaires dans un sanctuaire. Les flics de la Fluviale sont épaulés par la BAC, les as des interpellations et les Columbo-Kojak de la Crim. Quai des Enfers est une trappe, un noeud coulant, un piège digne des Vietcongs. Vous n'y échapperez pas. Vous ne reculerez plus. Quai des Enfers est un hub littéraire. Un hub d'auteur inspiré par tout ce qu'on voit, mange, boit et respire. Une table d'hôtes et d'autopsie. Une pluie de parfums. Une apoplexie des sens. Ingrid Astier a la joie d'une écolière, la force du bûcheron, le carnet du ripeur, celui qu'on missionne sur les scènes de crimes et qui relève le détail qui fera avancer l'affaire. Quai des Enfers est inclassable. Un roman policier n'est pas un état de frais d'avoués. Une collection ne peut être monochrome. Noire. Blanche. L'heure est aux métissages. No border. No apartheid littéraire. Le livre est une polyphonie. Une polygamie. Des transfuges littéraires. Des pénétrations. Transgenre. Futuriste. Quai des Enfers condamne la taxinomie des éditeurs qui courent après cette dénomination. Chez Ingrid Astier, l'horizon est dégagé. Pas de héroïsation des personnages. Ils vivent leur vie de flic en chair et en os, aiment, et détestent. Enquêtent sur des meurtres. Repêchent les noyés. Croisent la faune vivant sur les bords de la Seine. Découvrent les originalités pas très originales de la Jet Set qui s'entretue. Il y a ce qu'on voit sur la Seine. Il y a ce qu'on voit sous la Seine. Le silure mâle qui garde les oeufs de sa femelle. L'éternel antagonisme biologique et humain. Le mâle et la femelle. La reproduction et la destruction. Chacun défend sa vie. Suit sa trajectoire coûte que coûte. Tant de ponts sur la Seine. Tant de quartiers différents. Des ponts comme des mains tendues. Celles des flics de la Fluviale qui dissuadent les candidats au suicide. Qui stopperont aussi l'assassin. qui nourriront les médias aux aguets. On ne rentrera pas dans l'intrigue. On en est captif tellement le texte est élégant et riche. Une floraison ponctuée de soupirs de surprises. Le lecteur devient acteur et lit un film. Transgenre, vous ai-dit... Ingrid Astier, showrunner, devient l'Eliot Ness de l'écriture. Aucune concession; Aucune lâcheté. Un écrivain est toujours incorruptible. Si les éditeurs étaient aussi créatifs que les écrivains, le monde serait autre...

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