I) Résidence alternée ne rime pas nécessairement avec stricte parité 50/50
L'article 373-2-9 du Code civil n'impose pas que le temps de présence de chacun des parents auprès des enfants soit de même durée. Coparentalité ne rime donc pas nécessairement avec stricte parité. La Cour de cassation (25 avril 2007, Chambre civile 1, 25 avril 2007, 06-16.886, Publié au bulletin) affirme clairement : « Attendu, que l'article 373-2-9 du code civil n'impose pas, pour que la résidence d'un enfant soit fixée en alternance au domicile de chacun des parents, que le temps passé par l'enfant auprès de son père et de sa mère soit de même durée ; que les juges du fond peuvent, si l'intérêt de l'enfant le commande, compte tenu des circonstances de la cause, décider d'une alternance aboutissant à un partage inégal du temps de présence de l'enfant auprès de chacun de ses parents ».
A titre d'illustration, la cour d'appel de Toulouse a récemment jugé que « L'intérêt de l'enfant est bien évidemment d'entretenir des relations constantes et soutenues avec chacun de ses parents ce qui n'implique pas forcément de passer avec chacun un temps arithmétiquement identique ».(CA Toulouse, 21 janv. 2021, n° 19/01992).
Sur ce point, les travaux préparatoires éclairent la volonté du législateur. Le rapport de l'Assemblée nationale sur la loi du 4 mars 2002 indiquait en effet : « L'alternance pourra prendre différentes formes, de la parité la plus stricte à des formules plus souples ».
Dans un arrêt récent, la cour d'appel de Rouen s'est d'ailleurs inspiré de ces travaux préparatoires : « il résulte des dispositions précitées [loi du 4 mars 2002], éclairée par les travaux parlementaires préalables à leur adoption (...) « que la résidence alternée, qui constitue l'une des mesures résultant de l'application du principe de coparentalité ayant inspiré la loi n°2002-305 du 4 mars 2002, peut revêtir le caractère d'une stricte parité comme la forme la plus souple pouvant privilégier l'un des parents, en tous cas, comme permettant à chaque parent de suivre quotidiennement son enfant sur plusieurs mois, voire plusieurs années et ce, sans limitation de durée dans le temps, la résidence alternée pouvant se décliner selon des modalités multiples, particulièrement pour les enfants les plus grands » (CA Rouen, 24 juin 2021, n° 19/02781).
En pratique, les magistrats estiment que jusqu'à 60/40 %, l'expression de résidence alternée demeure appropriée. Au-delà (65/35, 70-30...), ils retiennent la qualification de droit de visite et d'hébergement élargi. L'hypothèse 60/40 est assez fréquente lorsqu'un des parents a des contraintes professionnelles ou lorsqu'à l'inverse un parent a des disponibilités particulières (par exemple un parent ne travaillant pas le mercredi).
II) Résidence alternée ne rime pas nécessairement avec rythme hebdomadaire
Là encore, les travaux préparatoires révèlent la volonté du législateur. Le rapport de l'Assemblée nationale de 2002 précise ainsi : « Votre rapporteur estime également souhaitable d'envisager une alternance dans le temps, permettant à chaque parent de suivre quotidiennement son enfant pendant quelques mois, voire quelques années ».
L’étude DALLOZ réalisée en juillet 2021 montre toutefois que, en cas de désaccord des parents, les juges ordonnent le plus souvent une résidence alternée assortie d'un rythme hebdomadaire.
L'alternance en demi-semaine (dite aussi « alternance courte ») peut aussi être ordonnée en cas de désaccord des parents, notamment lorsque les enfants ne veulent pas être séparés trop longtemps de chacun des parents. En outre, l'enquête révèle également que l'alternance en demi-semaine peut être considérée par les juges comme une transition douce lorsque, en raison de l'âge de l'enfant, un DVH élargi a été mis en place au moment de la séparation.
En outre, l'alternance courte, telle que la formule « 2-2 / 5-5 » permet, en règle générale, de limiter les changements de résidence par rapport à un DVH élargi, étant précisé qu'il a pu être jugé contraire à l'intérêt de l'enfant le fait de lui imposer des changements trop fréquents de domicile. Sur ce point, tous les magistrats interrogés dans le cadre d'une étude DALLOZ de juillet 2021 ont déclaré éviter la « fragmentation » du rythme de l'enfant et privilégier la recherche d'une formule simple évitant à l'enfant d'être « balloté » d'une résidence à une autre.
Le rythme 2-2-5-5
Les cours d’appel, lorsqu’elles sont saisies d’une demande 2-2-5-5, y sont souvent favorables, en particulier lorsqu’un des parents ne travaille pas un jour fixe de la semaine.
Ainsi la cour d’appel de Besançon retient l’organisation 2-2 / 5-5 qui « présente l'avantage de permettre aux enfants de partager tous les lundis avec leur père, qui ne travaille pas ce jour-là » (CA de Besançon, 10 décembre 2020, RG 19/01819).
De même, la cour d’appel de Nancy a ordonné la résidence alternée par demi-semaine « pour tenir compte des jours de congé respectifs des parties » (CA de Nancy, 4 Juillet 2014, n°14/01666).
Les juges ordonnent-ils des rythmes plus longs que l'alternance en demi-semaine ou l'alternance hebdomadaire ? La réponse est oui mais généralement lorsque ce rythme est demandé par les deux parents. Les juges peuvent alors homologuer un rythme de deux semaines. Ainsi, dans l'étude DALLOZ précirée, la Juge aux affaires familiales du du TJ de Metz souligne qu'une « alternance moins fréquente avec un rythme 2 semaines/2 semaines présent[e] l'avantage de permettre aux enfants de se poser plus sereinement chez chacun des parents, de renouveler moins souvent leurs efforts de réadaptation lors des changements de bras. Cela peut être « envisagé notamment pour les adolescents ».
On peut même citer le cas d'un rythme totalement atypique... un an / un an. Ainsi, le juge du TJ de Sens a indiqué avoir « prononcé, avec l'accord des parents, une RA un an /un an, l'un des parents vivant en métropole, l'autre dans un DOM. »
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