Quelles institutions de garantie des salaires compétentes en cas de situation de travail transnationale ?

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Quelles institutions de garantie des salaires compétentes en cas de situation de travail transnationale ?

« Le salarié n'avait pas renoncé à solliciter à titre complémentaire la garantie de l'AGS, du seul fait qu'il avait obtenu du Fonds de fermeture des entreprises de l'Office national de l'emploi en Belgique, la garantie partielle des créances fixées au passif de son employeur, et alors d'autre part, que la garantie assurée par l'institution du pays dans lequel est établi l'employeur peut être complétée par celle du pays dans lequel s'accomplissait le travail, dans la limite du plafond de garantie qui s'y applique »

Alors que les fermetures d'entreprises se multiplient à la suite de liquidations judiciaires, la possibilité pour les salariés de voir une partie de leurs créances payées par une institution de garantie des salaires devient souvent le dernier enjeu de leur mobilisation. En la matière, l'essentiel du contentieux concerne l'étendue matérielle de la garantie accordée par l'AGS. La détermination de l'étendue géographique, ou plus exactement de la compétence territoriale des institutions est une question moins fréquente, sans doute parce qu'elle est réglée en partie pour l'Union européenne depuis que la directive 2002/74/CE s'est intéressée aux situations de travail transfrontières. Reste néanmoins le problème des procédures collectives ouvertes antérieurement à l'entrée en vigueur de ce texte. Tel est le cas traité par l'arrêt du 11 avril 2012, qui s'inscrit dans la continuité d'une série de jurisprudences nationales et communautaires explorant le sujet de la détermination de l'institution de garantie des salaires compétente, sous l'égide de la directive 1980/987 dans sa version initiale, et qui présente l'intérêt de synthétiser les solutions retenues jusque-là.

En l'espèce, le salarié d'une société de droit belge exerçait son activité de voyageur-représentant-placier exclusivement sur le territoire français lorsqu'il prit acte en 2001 de la rupture de son contrat de travail, anticipant d'un mois la liquidation judiciaire de son entreprise prononcée par un tribunal belge. Il saisit l'institution de garantie des salaires belge - le Fonds de fermeture des entreprises de l'Office national de l'emploi - en paiement des sommes dues en exécution de son contrat de travail. Parallèlement, il exerça une action en France devant un conseil de prud'hommes pour obtenir d'une part la condamnation de son employeur au paiement du solde des créances impayées par le Fonds belge et d'autre part la garantie de l'AGS pour ce reliquat. La cour d'appel de Metz le débouta de l'ensemble de ses demandes le 22 avril 2009 au motif, notamment, s'agissant de la garantie demandée à l'AGS, que l'intéressé en s'adressant prioritairement au Fonds belge avait exercé un choix et avait renoncé au droit de s'adresser à la première, le cumul des garanties n'étant pas démontré. Le salarié s'étant désisté à l'égard de son employeur, le pourvoi qu'il forma n'interrogea par conséquent la Cour de cassation que sur un seul point de droit : la compétence territoriale de l'institution de garantie des salaires d'un État membre sollicitée par un salarié pour le règlement de ses créances impayées exclut-elle la compétence parallèle de l'institution de garantie des salaires relevant d'un autre État membre ? Au visa combiné de l'article L. 3253-6 du Code du travail et de l'article 3 de la directive 80/987/CEE du Conseil du 20 octobre 1980 concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur pris dans sa version initiale, la chambre sociale casse et annule l'arrêt rendu en appel et répond en deux temps.

Elle rapporte tout d'abord dans un long attendu les termes d'un arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne, du reste non pas le 17 novembre 2010 comme indiqué de façon erronée par l'arrêt - cette date correspondant plutôt aux conclusions de l'avocat général Mengozzi - mais le 10 mars 2011(1). La CJUE a en effet été saisie à titre préjudiciel par la chambre sociale de la Cour de cassation elle-même deux ans auparavant sur un contentieux assez proche puisqu'il s'agissait de répondre à la question préalable des critères de détermination de l'institution compétente en cas de situation de travail transfrontière. Les juges se contentent ici de reproduire par copier-coller la réponse qui leur a été rendue et qui a déjà motivé l'arrêt du 21 septembre 2011(2).

Sur la base de cette interprétation, la chambre sociale conclut en l'espèce « d'une part, que le salarié n'avait pas renoncé à solliciter à titre complémentaire la garantie de l'AGS, du seul fait qu'il avait obtenu du Fonds de fermeture des entreprises de l'Office national de l'emploi en Belgique, la garantie partielle des créances fixées au passif de son employeur, et [...] d'autre part, que la garantie assurée par l'institution du pays dans lequel est établi l'employeur peut être complétée par celle du pays dans lequel s'accomplissait le travail, dans la limite du plafond de garantie qui s'y applique ».

Cette conclusion favorable au cumul de compétences et de droits (II) est le résultat d'une construction jurisprudentielle de détermination de l'institution compétente dans le régime juridique ancien sur lequel il n'est pas inutile de revenir, comme y incite la Cour elle-même (I)

I. - La détermination de l'institution de garantie des salaires compétente pour les procédures collectives ouvertes avant le 8 octobre 2005
Il faut d'emblée insister sur ce point : la solution rendue par le présent arrêt, pour ce qui concerne du moins la question de la détermination de l'institution principalement compétente, ne présentera bientôt qu'un intérêt historique. En effet, la directive 2002/74/CE du Parlement et du Conseil du 23 septembre 2002(3) est précisément venue modifier la directive « insolvabilité » originelle 80/987/CEE afin de tenir compte des situations internationales complexes, parmi lesquelles celle de travailleurs salariés d'entreprises exerçant une activité dans plusieurs États membres. Depuis, la règle est la suivante : « lorsqu'une entreprise ayant des activités sur le territoire d'au moins deux États membres se trouve en état d'insolvabilité au sens de l'article 2 §1, l'institution compétente pour le paiement des créances impayées des travailleurs est celle de l'État membre sur le territoire duquel ils exercent ou exerçaient habituellement leur travail »(4). Les États membres avaient jusqu'au 8 octobre 2005 pour mettre en oeuvre cette disposition. Dès lors, comme l'expliqua la CJUE dans l'arrêt Defossez de 2011 précité, les procédures collectives ouvertes avant l'expiration de ce délai de transposition devaient continuer d'être régies, du point de vue du droit communautaire, par la directive de 1980, le critère du lieu d'exercice du travail introduit par la directive de 2002 ne s'appliquant, soit par l'effet du texte de transposition, soit à travers un procédé d'interprétation conforme en cas de transposition tardive(5), que pour les procédures collectives ouvertes à partir du 8 octobre 2005.

Dans la présente espèce comme dans l'affaire Defossez ayant donné lieu à l'arrêt de la chambre sociale du 21 septembre 2011, il ne faisait pas de doute que l'institution compétente devait être déterminée au regard de la directive 1980/987, seul texte en vigueur au moment de l'ouverture de la procédure collective contre l'employeur. Or ce texte est muet sur la question de détermination de l'institution compétente en cas de situation de travail transnationale. Le critère de détermination de compétence fut dès lors le fruit de plusieurs interprétations jurisprudentielles de la Cour de justice dont la synthèse est reproduite par la Cour de cassation : « pour le paiement des créances impayées d'un travailleur qui a habituellement exercé son activité salariée dans un État membre autre que celui où se trouve le siège de son employeur déclaré insolvable avant le 8 octobre 2005, lorsque cet employeur n'est pas établi dans cet autre État membre et remplit son obligation de contribution au financement de l'institution de garantie dans l'État membre de son siège, c'est cette institution qui est responsable des obligations définies par cet article ». Les juges invitent par conséquent à s'intéresser à deux critères, l'un découlant de l'autre : l'existence ou non d'un établissement dans l'État membre dans lequel le travailleur exerce habituellement son activité ; le lieu de paiement de la contribution à l'institution de garantie des salaires. En l'occurrence comme dans de précédentes affaires(6), la société belge ne disposait d'aucun établissement en France(7). Il n'était du reste pas contesté que des cotisations étaient versées au Fonds belge. L'institution de garantie des salaires était par conséquent compétente à l'égard du travailleur intéressé, peu important qu'il exerçât son activité en France.

Mais finalement, cette fois-ci, tel n'était pas l'objet central de la discussion qui portait plutôt sur un possible cumul de compétence, voire sur une compétence alternative de l'institution française.

II. - La compétence complémentaire possible de l'AGS
Le pourvoi portait précisément sur le point de savoir si l'intéressé avait définitivement renoncé au droit de se prévaloir de la garantie des créances salariales offerte par l'AGS pour avoir préalablement saisi le Fonds de garantie belge. La cour d'appel avait en effet débouté le travailleur de sa demande en garantie du solde de ses créances impayées auprès de l'AGS au motif qu'il avait exercé un choix et qu'il ne démontrait pas le caractère cumulatif des garanties dues par les deux organismes. La question pouvait ainsi être résumée : la saisine de l'institution de garantie désignée compétente en vertu du droit de l'Union fait-elle obstacle à ce qu'une autre institution soit saisie par le travailleur d'une demande de garantie complémentaire ?

La réponse de la Cour de cassation prend à nouveau appui sur la décision rendue à titre préjudiciel par la Cour de justice dans l'arrêt de 2011. Selon les juges européens, la directive « ne s'oppose pas à ce qu'une législation nationale prévoie qu'un travailleur puisse se prévaloir de la garantie salariale de l'institution nationale, conformément au droit de cet État membre, à titre complémentaire ou substitutif par rapport à celle offerte par l'institution désignée comme étant compétente en application de cette directive, pour autant, toutefois, que ladite garantie donne lieu à un niveau supérieur de protection du travailleur ». Dans ces conditions, les juges de la chambre sociale cassent l'arrêt de la cour d'appel en énonçant d'une part que « le salarié n'avait pas renoncé à solliciter à titre complémentaire la garantie de l'AGS du seul fait qu'il avait obtenu du Fonds [belge] la garantie partielle des créances fixées au passif de son employeur » et, d'autre part, « que la garantie assurée par l'institution du pays dans lequel est établi l'employeur peut être complétée par celle du pays dans lequel s'accomplissait le travail, dans la limite du plafond de garantie qui s'y applique ». Cette solution appelle plusieurs commentaires qui tiennent tant à la position originale adoptée par la Cour de cassation qu'à sa portée dans le cadre des dispositions actuellement en vigueur.

On relève tout d'abord que si la Cour de cassation se fonde sur l'interprétation de la Cour de justice pour autoriser un justiciable à saisir parallèlement deux institutions, elle ne semble pas aller si loin que les juges européens le permettent puisqu'elle n'évoque pas l'hypothèse d'une compétence purement alternative de l'AGS par rapport à l'institution de garantie belge compétente. On peut se demander s'il s'agit d'une restriction délibérée de l'option ou bien si cette formule est dictée par les termes du pourvoi qui ne portaient que sur une intervention complémentaire de l'AGS par rapport au Fonds belge. Toujours est-il que la Cour de cassation semble vouloir respecter une hiérarchie de compétence instaurée par l'interprétation de la directive de 1980 en vertu de laquelle l'institution de garantie compétente, à titre principal, est celle « du pays où est établi l'employeur », laquelle « peut être complétée » par la garantie de l'institution du lieu où s'exerçait l'activité professionnelle. Cette interprétation qui n'accepterait qu'un cumul de compétences hiérarchisées et complémentaires et non pas une compétence substitutive s'agissant de l'institution française invaliderait la position adoptée par la cour d'appel de Colmar le 9 juin 2011 et les craintes de law shopping qui ont été exprimées à cette occasion(8), tant il est vrai que l'étendue de garantie des créances offerte par l'AGS est supérieure aux couvertures proposées par les autres institutions en Europe(9). Dans cette autre affaire, les juges d'appel avaient en effet estimé que l'arrêt de la Cour de justice ouvrait une véritable « option » au salarié. Or telle n'est pas du tout la position de la Cour de cassation qui estime au contraire, dans l'affaire commentée, que le salarié n'exerce pas de choix en sollicitant une institution ou une autre(10). Selon elle, il exerce un droit, auquel il ne peut renoncer. Cette analyse est parfaitement compatible avec l'esprit de la directive européenne qui ne vise qu'à offrir une protection minimale aux travailleurs, permettant aux États membres d'aller au-delà. Ainsi, la Cour considère-t-elle que l'AGS peut être sollicitée à titre complémentaire uniquement, et dans la limite de son propre plafond de garantie, pour augmenter la part des créances payées au salarié.

Cette solution est-elle amenée à perdurer sous l'empire du critère de détermination de compétence de l'institution de garantie actuellement en vigueur ? N'oublions pas en effet que l'ensemble des développements qui précèdent repose sur une interprétation du droit communautaire tel qu'il résultait de la version initiale de la directive 80/987/CEE. À l'époque, aucune règle précise de compétence n'était définie par un texte. Actuellement, l'article 9 §1 de la directive 2008/94/CE(11) détermine au contraire explicitement l'institution de garantie des salaires compétente d'après le lieu d'exercice habituel du travail. Est-ce à dire que cette compétence est désormais exclusive de toute autre ou bien la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne accueillant le cumul, voire une substitution de compétence dans un sens favorable au travailleur est-elle transposable ? Rien n'interdit de le penser. Bien au contraire, la finalité du texte demeure la même, qui consiste à procurer aux travailleurs un niveau minimal de protection en cas d'insolvabilité de leur employeur, ce qui ne devrait jamais empêcher un État d'offrir une protection supplémentaire. La cour d'appel de Colmar, dans l'arrêt précité, a du reste d'ores et déjà franchi le pas pour mettre en oeuvre l'interprétation européenne dans le cadre d'une procédure collective appréhendée au titre des règles issues de la réforme de 2002. Mais encore faut-il, selon les termes mêmes de la CJUE que la législation nationale prévoie la possibilité pour l'institution saisie d'intervenir à titre complémentaire. Or, s'agissant de l'AGS dont les prestations sont très avantageuses dans le panorama européen, il convient enfin de rechercher le fondement juridique au titre duquel elle pourrait être saisie.

Pour ce qui concerne les procédures collectives ouvertes à partir du 8 octobre 2005, l'AGS sera toujours compétente pour garantir à titre principal les créances salariales des travailleurs exerçant habituellement leur travail en France (art. L. 3253-18-1 C. trav.). Dans quelle situation pourrait-elle alors être saisie à titre complémentaire ? On pourrait penser que ce serait le cas, comme dans l'affaire traitée par la cour d'appel de Colmar, pour une entreprise établie en France dont le salarié exercerait habituellement son activité dans un autre État membre. Mais le critère de rattachement mériterait d'être précisé. Ainsi pourrait-on peut-être exiger que la relation de travail soit au moins en partie régie par le droit français(12), ou bien que la procédure collective soit ouverte en France(13). Car la loi française n'offre pas de réponse parfaitement explicite à la question. En l'espèce, la Cour de cassation vise l'article L. 3253-6 du Code du travail en vertu duquel « tout employeur de droit privé assure ses salariés, y compris détachés à l'étranger ou expatriés mentionnés à l'article L. 5422-13, contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail, en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ». Ce visa peut surprendre, en l'espèce, car le travailleur intéressé saisissant l'AGS était salarié d'une entreprise belge. Il paraissait bien plus adéquat dans l'arrêt Defossez du 21 septembre 2011 vu précédemment - dont le visa parait reproduit tel quel six mois plus tard dans l'arrêt du 12 avril 2012 - puisqu'il s'agissait alors du salarié d'une entreprise française travaillant en Belgique. L'article L. 3253-6 du Code du travail s'applique en effet à toutes les entreprises employeuses de droit privé soumises au code du travail. Il contraint ces employeurs à assurer auprès de l'AGS certains de leurs salariés qui ne travaillent pas en France : les expatriés et les détachés. Encore peut-on se demander s'il faut faire une lecture large ou bien restrictive de ces catégories de travailleurs qui renvoient à des situations bien précises. Notamment, le détachement doit par définition être temporaire, ce qui de toute évidence a du mal à s'accorder avec le fait qu'un salarié exerce habituellement son travail dans un autre État. Si la cour d'appel de Colmar a admis une interprétation large de cette disposition, il conviendrait néanmoins d'en avoir la confirmation. L'accroissement de garantie qui en résulterait pour les salariés bénéficiant d'un contrat de travail en France n'aurait du reste absolument rien de choquant. Fort heureusement, un pourvoi a été formé contre l'arrêt de Colmar, de sorte que la Cour de cassation trouvera bientôt l'occasion de se prononcer sur l'ensemble de ces points. De Paris à Luxembourg, en passant par Metz et Colmar, on ne peut qu'apprécier l'activité du dialogue entre les juges sur ce sujet sensible...

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