Rupture conventionnelle : un an de jurisprudence de la Cour de cassation

Publié le Modifié le 17/12/2015 Vu 3 201 fois 0
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La rupture conventionnelle est un mode de rupture consensuelle du CDI qui connaît un beau succès depuis son entrée en vigueur en août 2008. Le palier des deux millions de ruptures de contrat sous cette forme vient d'être franchi, selon le ministère du Travail. Attention, cependant, elle n’est pas sans générer des contentieux. Zoom sur une année de jurisprudence de la Cour de cassation.

La rupture conventionnelle est un mode de rupture consensuelle du CDI qui connaît un beau succès depuis son

Rupture conventionnelle : un an de jurisprudence de la Cour de cassation

La rupture conventionnelle est un mode de rupture consensuelle du CDI qui connaît un beau succès depuis son entrée en vigueur en août 2008. Le palier des deux millions de ruptures de contrat sous cette forme vient d'être franchi, selon le ministère du Travail. Attention, cependant, elle n’est pas sans générer des contentieux. Zoom sur une année de jurisprudence de la Cour de cassation.

  • Droit de rétractation


Le droit de rétractation dont dispose chacune des parties à la convention de rupture doit être exercé par l'envoi à l'autre partie d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception (C. trav., art. L. 1237-13, al. 3). Adresser à l'autorité administrative un courrier indiquant que l’une des parties se rétracte ne respecte pas le formalisme prévu par l’article précité. Il ne suffit pas d’exercer son droit de rétractation dans le délai de 15 jours calendaires à compter de la date de la signature par les deux parties de la convention de rupture. Encore faut-il l’adresser à l’autre partie et non à l’administration (Cass. soc., 6 octobre 2015, n° 14-17539).

Dans cette même affaire, la Cour de cassation décide qu’en l'absence de rétractation de la convention de rupture, un salarié ne peut prendre acte de la rupture du contrat de travail, entre la date d'expiration du délai de rétractation et la date d'effet prévue de la rupture conventionnelle, que pour des manquements survenus ou dont il a eu connaissance au cours de cette période.

  • Conséquence d'une demission suivie d'une proposition de rupture conventionnelle

Après la démission du salarié, la convocation à un entretien, auquel la salariée ne s’est pas rendue, en vue d’une rupture conventionnelle proposée par l’employeur, ne vaut pas renonciation à la rupture du contrat de travail résultant de la démission de la salariée (Cass. soc., 16 sept. 2015, n° 14-10.291).

Dans cette affaire, une salariée donne sa démission, puis son employeur la convoque à un entretien en vue de conclure une rupture conventionnelle. La salariée ne se présente pas à cet entretien, mais a saisi le Conseil de prud’hommes d’une demande de résiliation judiciaire, estimant qu’en la convoquant pour conclure une rupture conventionnelle, l’employeur avait accepté la rétraction de sa démission. Les juges du fond ne lui ont pas donné gain de cause, solution confirmée par la Haute juridiction.

  • Nullité de la rupture conventionnelle

Lorsque le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle est inférieur au montant prévu par l'alinéa 1 de l’article L. 1237–13 du Code du travail, cela n’entraîne pas pour autant la nullité de la rupture conventionnelle homologuée (Cass. soc., 8 juillet 2015, n°  14-10139). Dans cette affaire, le salarié estimait que diverses primes avaient été omises dans le cadre du calcul de l’indemnité spécifique de la convention de rupture. En revanche, le salarié peut demander au juge d’ordonner le versement du différentiel.

Dans cette même affaire, le salarié invoquait une erreur quant à la date de la rupture. En principe, la date de rupture du contrat de travail ne peut pas intervenir avant le lendemain du jour de l’homologation (C. trav., art L. 1237–13, al.2). Or, elle avait été fixée avant le lendemain du jour de l’homologation de la convention. La Cour de cassation décide qu’il appartient au juge de la rectifier et que cela ne peut en aucun cas emporter la nullité de la convention.

  • Clause de non-concurrence

Une clause de non-concurrence fixe la contrepartie à 25 % en cas de licenciement et à 10 % en cas de démission, de la rémunération mensuelle perçue en moyenne sur les 24 derniers mois. Les parties signent une rupture conventionnelle mais le salarié saisit ensuite la juridiction prud'homale en réclamant le paiement de la contrepartie de 25 %.

Le salarié est débouté par la Cour d’appel : le salarié qui démissionne et celui qui signe une rupture conventionnelle manifestent l'un et l'autre une même intention de quitter l'entreprise. Pour la Cour, la contrepartie financière de la clause de non-concurrence doit être égale au montant prévu en cas de démission.

 La Cour de cassation ne l’entend pas de cette oreille et déclare que : « doit être réputée non écrite la minoration par les parties, dans le cas d'un mode déterminé de rupture du contrat de travail, de la contrepartie pécuniaire d'une clause de non-concurrence. La cour d'appel, qui a refusé de faire application de la contrepartie de 25 %, laquelle n'est pas susceptible de réduction par le juge et ouvre droit à congés payés, a violé le principe et le texte susvisé" (Cass. soc. 9 avril 2015, n° 13-25.847).

  • intervient postérieurement à l'homologation par l'autorité administrative;
  • a pour objet de régler un différend relatif non pas à la rupture du contrat de travail mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture.

La transaction ne peut avoir pour objet d’éluder l'application des dispositions de l'article L. 1237-14 du Code du travail prévoyant la saisine du conseil de prud'hommes (Cass. soc., 25 mars 2015, n° 13-23.368).

La transaction n’est, en effet, considérée comme régulière que si elle a pour objet de régler un différend relatif non pas à la rupture du contrat de travail, mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture (Cass. soc, 26 mars 2014, n° 12-21.136).
 

  • Accident du travail ou maladie professionnelle

Sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, une rupture conventionnelle peut être valablement conclue en application de l'article L. 1237-11 du Code du travail au cours de la période de suspension consécutive à un accident du travail ou une maladie professionnelle (Cass. soc. 30 septembre 2014, n°13-16297).

  • Consentement libre et non équivoque

Rappelons, en guise de conclusion, que la rupture conventionnelle doit résulter d’un accord libre et non équivoque des parties, en particulier du salarié. Ainsi, un employeur ne peut pas conclure une rupture conventionnelle avec un salarié à qui il a indiqué dès le premier entretien qu’il entendait, en tout état de cause, rompre le contrat, la procédure s’étant déroulée à sa seule initiative et sans que le point de vue du salarié ne soit pris en compte ou encore dans un contexte de harcèlement moral (CA Riom, 18 janvier 2011, n° 10/00658 ; Cass. soc., 30 janvier 2013, n° 11–22.332). L’existence d’un différend ne remet pas forcément en cause la validité de la convention. En effet, si le consentement est libre et éclairé, la seule existence d’un différend n’affecte pas la validité de la convention.

Cependant, il est préférable d’être prudent dès lors que le contexte n’est pas dénué d’ambiguïté. Il convient également de ne pas se précipiter pour conclure une rupture conventionnelle. En effet, même s’il a été jugé que la signature de la convention de rupture pouvait avoir lieu le jour même de l’entretien, il est préférable de réaliser au moins deux entretiens, à tout le moins de respecter un certain délai entre le jour de l’entretien et le jour de la signature.

François Barbé

Consultant RH/ Relations Sociales

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