Affaire Baby Loup - Extraits de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 27 novembre 2013
"Une personne morale de droit privé, qui assure une mission d'intérêt général, peut dans certaines circonstances constituer une entreprise de conviction au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme et se doter de statuts et d'un règlement intérieur prévoyant une obligation de neutralité du personnel dans l'exercice de ses tâches.
Une telle obligation emporte notamment interdiction de porter tout signe ostentatoire de religion.(...)
La formulation de cette obligation de neutralité dans le règlement intérieur est suffisamment précise pour qu'elle soit entendue comme étant limitée aux activités d'éveil et d'accompagnement des enfants à l'intérieur et à l'extérieur des locaux professionnels; elle n'a donc pas la portée d'une interdiction générale puisqu'elle exclut les activités sans contact avec les enfants, notamment celles destinées à l'insertion sociale et professionnelle des femmes du quartier qui se déroulent hors la présence des enfants confiés à la crèche .
Les restrictions ainsi prévues sont, pour les raisons ci-dessus exposées, justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché au sens des articles L. 1121-1 et L. 1321-3 du code du travail.
Au vu de l'ensemble des considérations développées, elles ne portent pas atteinte aux libertés fondamentales, dont la liberté religieuse, et ne présentent pas un caractère discriminatoire au sens de l'article L. 1132-1 du code du travail.
Elles répondent aussi dans le cas particulier à l'exigence professionnele essentielle et déterminante de respecter et protéger la conscience en éveil des enfants, même si cette exigence ne résulte pas de la loi. (...)
Le comportement de Mme X, alors que la mise à pied reposait, pour les raisons ci-dessus exposées, sur un ordre licite de l'employeur au regard de l'obligation spécifique de neutralité imposée à la salariée par le règlement intérieur de l'entreprise, caractérise une faute grave nécessitant le départ immédiat de celle-ci."
CA Paris, Pôle 6, ch. 9, 27 novembre 2013