Non paiement du salaire appliqué en début de contrat : prise d'acte justifiée

Publié le 24/07/2014 Vu 3 697 fois 0
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Dans un arrêt rendu le 30 avril 2014, la Cour de cassation, permet la requalification en licenciement d'une prise d'acte d'un salarié motivée notamment par le non paiement des salaires à hauteur du temps de travail effectué durant les deux premiers mois.

Dans un arrêt rendu le 30 avril 2014, la Cour de cassation, permet la requalification en licenciement d'une p

Non paiement du salaire appliqué en début de contrat : prise d'acte justifiée

Dans cet arrêt, la Cour de cassation assimile :
 

  • le paiement d'un salaire moindre pendant un an parce que correspondant à une durée du travail mensuelle inférieure à celle effectuée durant les deux premiers mois du contrat de travail
  • au manquement tenant au non paiement du salaire justifiant la prise d'acte du salarié.


Cette décision s'inscrit dans le prolongement de la jurisprudence de la Cour de cassation qui juge classiquement que le non paiement de l'intégralité du salaire constitue un manquement suffisamment grave pour justifier une prise d'acte de la rupture du contrat de travail par un salarié.

Sur  ce point, voir par exemple, dans le sens d'une prise d'acte justifiée : Cass. soc. 7 avril 2010, n°09-40020 sur le non paiement de primes de casse-croûtes ; Cass. soc. 24 mars 2010, n°08-43.996 sur le retrait d'un véhicule de fonction durant la suspension du contrat ; Cass. soc. 12 décembre 2012, n°10-26.324 pour le non paiement du complément de salaire d'un salarié en accident du travail ; Cass. soc. 16 mars 2011, n°08-42.218 pour le non paiements d'heures supplémentaires.

 

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Cass. soc. 30 avril 2014, n°16-21.041

"LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 18 avril 2012), que Mme X..., qui était alors scolarisée en BEP agricole, option services à la personne, a, au cours des mois de juillet et août 2006 puis de décembre 2006 à août 2007, travaillé en qualité d'agent de service hôtelier (ASH) pour le compte de la société L'Ombrière (la société) qui exploite une maison de retraite ; que son horaire de travail mensuel, qui était de 82 heures au cours des deux premiers mois, a varié tous les mois à compter de décembre 2006 jusqu'à août 2007, date à laquelle elle a été engagée par contrat de travail écrit à durée indéterminée et à temps complet ; qu'elle a ainsi travaillé 26 heures en septembre, 68,5 heures en décembre, 15,5 heures en janvier, 10,5 heures en février, 53 heures en mars, 10 heures en avril, 37 heures en mai et 59 heures en juin ; qu'ayant obtenu le diplôme d'aide médico-psychologique (AMP) le 25 juin 2009, la salariée a été rémunérée comme telle à compter de juillet 2009 ; qu'elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail par lettre du 8 août 2009 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que la salariée était titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de 82 heures par mois à compter du 1er décembre 2006 et de la condamner à lui payer des sommes à titre de rappel de salaire et de congés payés afférents du 1er septembre 2006 au 31 août 2007, alors, selon le moyen :

1°/ que si l'absence de contrat de travail écrit à temps partiel fait présumer que l'emploi est à temps complet, cette présomption ne permet que la requalification d'un emploi à temps partiel en emploi à temps plein ; qu'en se fondant sur la présomption d'emploi à temps complet pour juger que la salariée était liée à la société L'Ombrière par un contrat de travail à durée indéterminée d'agent de service hospitalier à temps partiel de 82 heures par mois du 1er décembre 2006 au 31 août 2007, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L. 3123-14 du code du travail ;

2°/ que le salarié qui ne conteste pas qu'il était engagé à temps partiel ne peut voir son emploi à temps partiel requalifié en emploi à temps partiel pour une durée de travail supérieure à celle effectuée ; qu'en statuant comme elle l'a fait, quand il résultait de ses constatations que la salariée était engagée à temps partiel et qu'elle avait travaillé moins de 82 heures par mois du 1er septembre 2006 au 31 août 2007, la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail ;

3°/ que l'absence de contrat de travail écrit à temps partiel fait présumer que l'emploi est à temps complet et que l'employeur, qui conteste cette présomption, peut rapporter la preuve qu'il s'agissait d'un emploi à temps partiel en établissant que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas tenu de se tenir constamment à la disposition de son employeur ; qu'en se bornant à relever, pour faire droit aux demandes de requalification du contrat de travail et de paiement en rappel de salaire « qu'il est constant qu'en application de l'article L. 3123-14 du code du travail, un contrat de travail à temps partiel doit être écrit et qu'à défaut, il est présumé être à temps complet », la cour d'appel a violé l'article L. 3123-14 du code du travail ;

4°/ que les juges du fond sont tenus de répondre au moyen opérant des parties ; que dans ses conclusions d'appel délaissées, pour renverser la présomption de travail à temps complet, la société L'Ombrière soutenait que les périodes travaillées de Mme X... correspondaient à celles pendant lesquelles sa scolarité lui laissait du temps libre ou au cours desquelles elle ne préparait pas d'examen, de sorte qu'elle pouvait se trouver constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant de la société L'Ombrière, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel, devant laquelle la salariée revendiquait la reconnaissance non pas d'un travail à temps complet mais celle d'un horaire égal à celui des deux premiers mois d'activité, a fixé la durée du travail dans la limite de cette demande ; que le moyen, inopérant en ses première, troisième et quatrième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par la salariée s'analysait en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que la prise d'acte par le salarié de la rupture du contrat de travail suppose l'existence d'un manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations contractuelles ; que la cassation à venir sur le premier moyen, relatif à l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel de 82 heures par mois à compter du 1er décembre 2006, entraînera par voie de conséquence, la cassation sur le second moyen en application de l'article 625 du code de procédure civile ;

2°/ que l'absence de contrat de travail à temps partiel, qui ne remet pas en cause la validité du contrat, ne caractérise pas un manquement suffisamment grave de l'employeur à ses obligations contractuelles ; qu'en jugeant que l'embauche de Mme X... à temps partiel, sans contrat de travail écrit caractérise le manquement de la société L'Ombrière à ses obligations contractuelles, de sorte que la prise d'acte de la rupture du contrat de travail par Mme X... s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 1222-1 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée seulement sur l'absence de contrat de travail écrit mais aussi sur le défaut de paiement des salaires de septembre 2006 à août 2007 sur la base de 82 heures, ainsi que sur l'absence de réponse de l'employeur à la demande de régularisation de la salariée après l'obtention du diplôme d'AMP, a ainsi caractérisé des manquements de l'employeur à ses obligations empêchant la poursuite du contrat de travail ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société L'Ombrière aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société L'Ombrière et condamne celle-ci à payer à Mme X... la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente avril deux mille quatorze."

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