Prud'hommes : les nouveaux plafonds d'indemnisation sont-ils si défavorables au salarié ?

Publié le Modifié le 04/09/2017 Vu 4 132 fois 1
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

La loi habilitant le gouvernement à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social a été définitivement adoptée par le Parlement les 1er et 2 août 2017. Le gouvernement dévoile, ce jeudi 31 aout 2017, le contenu des ordonnances visant à réformer le code du travail. Elles prévoient de réformer de nombreux pans de notre droit du travail (Dialogue social, accords d'entreprise, licenciements économiques ) parmi lesquels celui de l’indemnisation du salarié licencié par le conseil de prud’hommes lorsque le licenciement est jugé abusif. Voici les annonces faites qui concernent ici uniquement la rupture du contrat de travail.

La loi habilitant le gouvernement à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue soci

Prud'hommes : les nouveaux  plafonds d'indemnisation sont-ils si défavorables au salarié ?

La loi habilitant le gouvernement à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social a été définitivement adoptée par le Parlement les 1er et 2 août 2017.
 


 Le gouvernement dévoile, ce jeudi 31 aout , le contenu des ordonnances visant à réformer le code du travail.


Elles prévoient de réformer de nombreux pans de notre droit du travail (Dialogue social, accords d'entreprise, licenciements économiques ) parmi lesquels celui de l’indemnisation du salarié licencié par le conseil de prud’hommes  lorsque le licenciement est jugé abusif.



Voici les annonces faites qui concernent  ici uniquement  la rupture du contrat de travail.

  •  La réévaluation des indemnités légales de licenciement à un quart de mois de salaire par année d’ancienneté

Aujourd’hui fixées à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, les indemnités légales de licenciement passent à 25% de mois de salaire.

C’est un bon significatif qui repend un taux parmi les plus favorables des conventions collectives existantes.

Sur ce point, incontestablement, les salariés sont gagnants. Côté employeur, le coût du départ d’un collaborateur est nettement augmenté, ce qui ne sera pas sans conséquence pour les salariés séniors  en particulier.

  •   Le plafonnement des indemnités prud’hommes selon un barème prédéfini : Indemnités prud'homales plafonnées à 3 mois de salaire jusqu'à 2 ans d'ancienneté, à 20 mois à partir de 30 ans d'ancienneté 

C'est l'un des points clés sur lequel portait le plus la crainte du salarié de voir "brader"  son préjudice au profit d'un barème obligatoire qui enlève au juge son appréciation des faits.

Exit donc le «référentiel» indicatif, prévu par la loi Macron d’aout 2016.

Le juge prud’homal perdra donc avec ce nouveau texte son pouvoir d’appréciation et ne pourra aller au-delà des planchers fixés.

  • Un plafond : Les salariés jusqu'à deux ans d'ancienneté toucheront  au maximum trois mois de salaire là où le texte de l’article 1235-5 du code du travail laissait le juge prud’homal apprécier l’indemnisation « en fonction du préjudice subi ».

Avec deux ans d’ancienneté, le plafond sera de trois mois de salaire, la ou dans les entreprises de plus de10 salariés il était jusqu’à présent à six mois de salaire.

Ce plafond augmente  ensuite progressivement à raison d’un mois par année d’ancienneté jusqu’à dix ans. Puis à partie de 10 ans,  ½ mois de salaire  par an pour atteindre 20 mois au maximum  pour 30 années d’ancienneté dans la même entreprise.

Ces indemnités augmenteront progressivement à raison d’un mois par année d’ancienneté jusqu’à dix ans, puis d’un demi-mois par an.

À partir de 30 ans d'ancienneté, un salarié licencié abusivement touchera  donc au maximum 20 mois de salaire maximum. Toutefois, avec l'ancien système il était toutefois assez rare de voir des indemnisations au-delà de 20 mois, sauf atteinte portée à l’intégrité du salarié qui n'est pas concerné avec ces nouveaux plafonds.

En  effet, ce plafond ne s'appliquera pas en cas pour les cas discrimination ou encore d’atteinte aux droits fondamentaux du salarié. On pense ici  par exemple au harcèlement moral ou sexuel. Il faudra regarder précisément les textes sur ce point.

  • Un plancher sera, lui, fixé à 15 jours de salaire dans les TPE, un mois pour les autres entreprises, et augmentera jusqu'à trois mois avec l'ancienneté.

 

  • Au final :  le salarié est- il perdant ? Pas si sûr,  en pratique...

 L’ancien système  de  "référentiel indicatif", instauré par la loi Macron de 2015 censé guider les juges prud'homaux échelonnait certes les indemnisations  d'un mois de salaire en dessous d'un an d'ancienneté jusqu'à 21,5 mois au-delà de 43 ans d'ancienneté.

Mais en pratique et pour ce qui concerne le droit commun du licenciement,et de l’avis  même des conseillers prud’homaux, ce texte  n’était quasiment pas utilisé.

La contrainte imposée au juge par les textes était d’accorder un minimum de six mois de dommages et intérêts aux employés des entreprises de plus de dix salariés qui présentaient au moins deux ans d’ancienneté. (article 1235-3 du code du travail)

Il était très fréquent de voir des conseils de prud’hommes ne pas respecter ce plafond indicatif  pour  allouer au final  des sommes INFÉRIEURES à ce plafond ...

Il ne faut pas oublier en effet que le conseil de prud'hommes, juridiction paritaire est composé de juges issus des collèges salariés et employeurs. Or, ces derniers même en cas de violation des droits du salarié sont toujours  vigilants pour ne pas allouer des condamnations trop importantes au préjudice ... de l'employeur.

Aussi, que ce soit pour les petites anciennetés ou les plus grandes, ce nouveau barème ( 1 mois d’indemnité par année d’ancienneté )  devrait conduire les juges prud’homaux à homogénéiser leurs pratiques   pour finalement conduire à un quantum d’indemnisation du salarié qu’on voyait déjà se dessiner au travers des décisions prud’homales ou des cours d’appel.

 Pas certain donc que les salariés soient  demain moins bien indemnisés qu'aujourd'hui en cas de licenciement jugé abusif... attendons de voir !

  •   Rupture conventionnelle « collective »

Autre nouveauté sur la question des ruptures de contrat,  assez audacieuse tout de même, il est annoncé « une rupture conventionnelle collective » par le biais d’une négociation dans l’entreprise.  

Sera créée la possibilité de définir un cadre commun de départ «strictement volontaire», qui devra être homologué par l’administration du Travail sur le même modèle que de la rupture conventionnelle individuelle aujourd’hui.

Contournement possible du PSE diront certains il reste à connaitre les conditions et garanties du futur texte permettant d’assurer le caractère « volontaire » du départ du salarié.

  •  Uniformisation du délai pour saisir le conseil de prud’hommes

 Le délai pour saisir les prud'hommes après un licenciement sera limité à un an pour tous les types de licenciements. Aujourd'hui, il est d'un an pour les licenciements économiques et de deux ans pour les autres licenciements.

Vosu trouverez ici les ordonnannces qui seront applicables au 22 septembre 2017.

Toute saisine du conseil de prud'hommes réalisée avant le 22 septembre ne sera pas donc impactée par cette réforme.

Les anciens articles du code du travail s'appliqueront.

http://travail-emploi.gouv.fr/actualites/presse/dossiers-de-presse/article/renforcement-du-dialogue-social-presentation-des-ordonnances-en-application-de

Ce barème obligatoire ne sera cependant pas applicable en cas de licenciement nul (harcèlement, discrimination…) ou en cas violation d’une liberté fondamentale.

Dans ce cas, l’indemnité ne pourra être inférieure aux salaires des six derniers mois.

  • Entreprises à partie de 11 salariés

Le projet de texte prévoit donc un plancher minimal spécifique applicable aux entreprises de moins de 11 salariés.

Le Conseil constitutionnel avait admis dans une decision du 13 octobre 2016 que les entreprises de moins de 11 salariés ne se voient pas appliquer l’indemnité minimale de 6 mois en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dans la lignée de cette décision, il apparaît donc possible de prévoir des planchers minimaux différents pour les TPE.

  • Entreprises de moins de 11 salariés

Ancienneté du salarié dans l'entreprise (en années complètes) Indemnité minimale (en mois de salaire)
0 -
1 0, 5
2 0, 5
3 1
4 1
5 1, 5
6 1, 5
7

2

8 2
9 2, 5
10 2, 5

Cas d’exclusion du barème. 

Ces barèmes d’indemnités ne s’appliqueraient pas en cas de licenciement nul.

Dans ce cas, le salarié, s’il ne réintègre pas l’entreprise, aurait droit à des dommages et intérêts d’au moins 6 mois de salaire.

Les cas de nullité visés seraient ceux liés à :

-la violation d’une liberté fondamentale ( discrimination / droit de grève) ;

-des faits de harcèlement moral ou sexuel ;

-l’action en justice du salarié  en matière d’égalité professionnelle ;

-au lancement d’une alerte ;

-l’exercice d’un mandat par un salarié protégé ;

-la protection attachée au congé de maternité ou de paternité, au statut de victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle ou à l’inaptitude physique du salarié.

EN SAVOIR PLUS : www.avocat-jalain.fr

Maitre JALAIN,

Avocat en Droit du Travail et de la Sécurié Sociale

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par miyako
02/09/2017 18:32

Bonjour,
Merci Maître de votre analyse ,très claire.Néanmoins attendons l'avis du conseil constitutionnel qui dans le passé avait "retoqué" le plafonnement de indemnités prud'homales.
Ces ordonnance protègent d'avantages les TPE et c'est tant mieux ,car ce sont elles les plus vulnérables,vu les charges et les loyers commerciaux .
Ce qu'il faudrait aussi simplifier ce sont les procédures CPH dans leur ensemble et notamment la durée.
Amicalement vôtre
suji KENZO

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

A propos de l'auteur
Blog de Maitre JALAIN, AVOCAT AU BARREAU DE BORDEAUX

Maître JALAIN, avocat à Bordeaux,  met à votre service depuis plus de 10 ans ses competences en droit du travail et droit commercial et  vous assiste dans le cadre de vos problématiques tant au niveau du conseil, de la négociation que dans le cadre de contentieux devant les Tribunaux.

Demande de contact
Image demande de contact

Contacter le blogueur

Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles