Les conditions d’une juste révocation d’un gérant dans une S.A.R.L et le droit aux indemnités

Publié le 08/12/2014 Vu 20 442 fois 0
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En principe, la révocation du gérant est libre selon l’article L223-25 du Code de commerce mais celui d'une société à responsabilité limitée (S.A.R.L.) est contrôlé. Le gérant peut être révoqué à tout moment par une décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte, conformément à l’article L223-29 du même code. Cependant, la révocation doit être d’une part, basée sur de justes motifs (pour agissement contraire à l’intérêt social voir Cass. com., 24 avril 1990, n˚ 88-20.18, pour atteinte au bon fonctionnement de la société voir CA Versailles, 4 mars 2004, 10/2004, …).

En principe, la révocation du gérant est libre selon l’article L223-25 du Code de commerce mais celui d'un

Les conditions d’une juste révocation d’un gérant dans une S.A.R.L et le droit aux indemnités

En principe, la révocation du gérant est libre selon l’article L223-25 du Code de commerce mais celui d'une société à responsabilité limitée (S.A.R.L.) est contrôlé.

Le gérant peut être révoqué à tout moment par une décision des associés représentant plus de la moitié des parts sociales, à moins que les statuts prévoient une majorité plus forte, conformément à l’article L223-29 du même code.

Cependant, la révocation doit être d’une part, basée sur de justes motifs (pour agissement contraire à l’intérêt social voir Cass. com., 24 avril 1990, n˚ 88-20.18, pour atteinte au bon fonctionnement de la société voir CA Versailles, 4 mars 2004, 10/2004, …).

Aux termes de l’article L223-25, si la révocation n’est pas fondée sur un juste motif alors le gérant est en droit  de demander des dommages et intérêts.

D’autre part, elle ne doit pas intervenir brutalement, dans des circonstances injurieuses ou vexatoires ou sans que le dirigeant ait été mis en mesure de faire valoir ses explications (principe du contradictoire), autrement dit la révocation doit être régulière et non abusive. 

Ici aussi, si ces conditions ne sont pas respectées, alors le gérant peut se voir octroyer des dommages et intérêts comme l’énonce la chambre commerciale de la Cour de cassation dans son arrêt du 1er  février 1994 (n˚ 92-11.1771).

Par conséquent, le gérant évincé à la possibilité d’agir en dommages-intérêts sur les deux terrains en l’absence de juste motif et de l’abus de droit. Il a en plus le droit à des indemnités conventionnellement établie, due à sa révocation.

L’arrêt du 6 novembre 2012 de la Cour de cassation (n°11-20.582) est une bonne illustration des problèmes pouvant découler de la révocation d’un gérant.

En l'espèce, les associés d’une S.A.R.L. sont entrés en négociation avec une autre société pour la vente d’un parc d’éoliennes pour plus de 22 millions d'euros.

Le gérant de la S.A.R.L. n’a cependant pas obtenu la certification nécessaire pour assurer la vente, de la part de la préfecture, car celui-ci a mis trop de temps pour faire la démarche.

Par cette négligence, le projet de cession n’a pu aboutir, l’acquéreur ayant renoncé à acheter le parc d’éolienne, entrainant la perte d’un marché de plusieurs millions pour l’entreprise, la mettant ainsi en péril

C’est donc cette faute de gestion assortie de la perte d’un marché de plusieurs millions euros révélatrice de son incompétence qui a été reprochée au dirigeant lors de la séance de l’assemblée générale des associés, au cours de laquelle il a été révoqué sur le champ par une décision unanime. Par conséquent, en dépit de ses revendications, les associés lui ont refusé toute indemnité de départ, y compris celles contractuellement prévues.

De plus, il a été obligé de rendre immédiatement les clés des locaux de la société et qu'il lui avait été formellement interdit d'accéder à l'avenir sans autorisation expresse de la gérance à la société.

En conséquence, le gérant a assigné la société en justice en faisant valoir que cette révocation, intervenue brutalement et sans justes motifs, ouvrait droit à réparation et qu'il était, en outre, créancier de l'indemnité prévue en cas de révocation, pour quelque motif que ce soit, par une convention de gérance.

La cour d’appel d’Amiens, dans son arrêt du 8 mars 2011 (n˚09/01543), va rappeler le principe de nullité de toute clause statutaire ou conventionnelle dissuasive de la révocation de tout dirigeant par les associés (Cass. com., 2 juin 1987, n˚85-16467) et rejette la demande d’indemnisation conventionnellement arrêté en cas de révocation.

La Cour de cassation confirme cette position étant donné que la somme de 66.000 euros, demandé par le gérant évincé, ne peut être considérée comme dérisoire au regard du chiffre d'affaires de la société dès lors que cette somme représentait un an de salaire de dirigeant, soit un montant exorbitant au regard des résultats d'exploitation courants, constamment déficitaires.

Il en résulte que le montant de l’indemnité contractuelle du gérant ne doit pas être disproportionné aux facultés financières de l’entreprise débitrice.

Pour une analyse plus en détail de ce point, on se référera à l’article suivant : http://www.legavox.fr/blog/maitre-joan-dray/nullite-indemnite-conventionnelle-revocation-gerant-11629.htm#.VIRlLXu9EjV

Sur le caractère justifié de la révocation, la Cour de cassation confirme la réponse apportée par les juges du fond.

Au motif que le gérant évincé était averti qu’un récent changement de législation rendait la nécessaire certification « d’un intérêt vital pour la société », et que, par son manque de diligence quant à l’obtention de celle-ci, il avait commis une faute de gestion propre à mettre en péril le fonctionnement de l’entreprise ; alors « la cour d’appel a ainsi caractérisé l’existence d’un juste motif de révocation. »

Il convient de rappeler qu’un gérant peut être aussi révoqué pour un « juste motif sans faute », lorsque son attitude son  attitude est de nature à compromettre l’intérêt social ou le fonctionnement de la société, et à entraîner une perte de confiance son encontre de la part des associés

Par exemple lorsque la mésentente entre deux dirigeants peut compromettre l’intérêt social (v. CA Paris, 5 novembre 1999, n˚1997/139) ou bien la perte de confiance des associés résultant de la transgression par le dirigeant de leurs instructions relatives au maniement des fonds sociaux et à la gestion des comptes bancaires (v.CA Paris, 24 octobre 2003, n˚ 2002/04024)

Cependant, la cour d’appel a aussi rejeté la demande en paiement de dommages-intérêts formulé par le gérant en estimant que «la révocation du gérant n’a pas été prononcée dans des conditions brutales ou vexatoires.», seulement elle ne s’est intéressée qu’au bon respect du principe de contradiction et des droits de la défense.

En effet, la défense du gérant a estimé que : « le gérant révoqué doit voir ses droits de la défense respectés ; qu’en considérant qu’il en était ainsi sans constater que M. X… avait été informé du projet de révocation avant la réunion de l’assemblée convoquée d’urgence le matin pour l’après-midi, ce que contestait l’intéressé. »

La Cour régulatrice, confirme la position des juge du fond sur ce point, en relevant « qu’ayant constaté que M. X…, qui avait eu connaissance des faits qui lui étaient reprochés, avait “bénéficié d’un délai effectif suffisant” pour assurer sa défense. »

Mais la Cour de cassation a ensuite censuré les juges d’appel pour ne pas avoir répondu aux conclusions par lesquelles le gérant soutenait, pour en déduire que sa révocation avait eu lieu de manière brutale et vexatoire, qu'il lui avait été demandé de restituer immédiatement les clés des locaux de la société et de la quitter sans délai et fait interdiction d'y accéder sans autorisation expresse de la gérance.

Ces éléments de faits semblent constituer pour la Cour de cassation autant de circonstances rendant abusives la révocation du gérant ouvrant droit à indemnisation, dont il incombe aux juges du fond d'en apprécier l'existence.

Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.

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Joan DRAY

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