Le congé pour reprise et la jurisprudence

Publié le 10/02/2014 Vu 39 524 fois 0
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L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ne reconnait au bailleur que trois motifs légitimes de congé. Il peut soit donner congé pour vendre, pour inexécution par le locataire de ses obligations ou enfin pour habiter dans le logement. Cette troisième hypothèse est également appelée « congé pour reprise ». Le législateur a encadré cette possibilité afin que le bailleur ne donne pas congé sous un faux prétexte. Néanmoins, il convient dès à présent de rappeler que le congé pour reprise ou pour vente est un droit du bailleur, ce dernier doit le justifier mais de façon minimaliste. Le contrôle du juge, le cas échéant, est beaucoup moins poussé que lorsqu’il s’agit d’un congé pour inexécution de ses obligations par le locataire.

L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ne reconnait au bailleur que trois motifs légitimes de congé. Il

Le congé pour reprise  et la jurisprudence


L’article 15 de la loi du 6 juillet 1989 ne reconnait au bailleur que trois motifs légitimes de congé. Il peut soit donner congé pour vendre, pour inexécution par le locataire de ses obligations ou enfin pour habiter dans le logement.


Cette troisième hypothèse est également appelée « congé pour reprise ».


Le législateur a encadré cette possibilité afin que le bailleur ne donne pas congé sous un faux prétexte.


Néanmoins, il convient dès à présent de rappeler que le congé pour reprise ou pour vente est un droit du bailleur, ce dernier doit le justifier mais de façon minimaliste.


Le contrôle du juge, le cas échéant, est beaucoup moins poussé que lorsqu’il s’agit d’un congé pour inexécution de ses obligations par le locataire.


I / Les conditions du congé pour reprise

Le congé donné par le bailleur au locataire justifié par la décision de reprendre le logement doit tout d'abord être notifié ou signifié dans les conditions de forme et de délai prévues à l'article 15 de la loin° 89-462 du 6 juillet 1989.


Le congé doit, à peine de nullité, indiquer les nom et adresse du bénéficiaire de la reprise.
 Il s'agit de la seule exigence de forme posée par la loi. Le congé pour reprise n'a pas à reproduire les dispositions de l'article 15, I de la loi, ni celles de l'article 15, II de la loi,
Tout d’abord le bénéficiaire du droit à la reprise n’est pas forcément le bailleur lui-même ce peut être un membre de sa famille.


L’art 15-1 alinéa 1 de la loi du 6 juillet 1989 dresse une liste des personnes pouvant bénéficier de la reprise :
-le bailleur ;
-son conjoint ;
-le partenaire auquel il est lié par un pacte civil de solidarité enregistré à la date du congé. Il faut préciser que l'article 575-8, ajouté au Code civil par la loi du 15 novembre 1999, ayant précisé que le concubinage peut concerner des "personnes de sexe différent ou du même sexe", l'homosexualité des
-concubins "notoires" ne constitue pas un obstacle ;
-son concubin notoire depuis au moins un an à la date du congé ;
-ses ascendants, ses descendants


Cette liste est limitative, ce qui signifie que la reprise ne peut bénéficier à l'ex-conjoint du bailleur, ni au beau-père ou à la belle-mère.


La seule obligation légale qui est faite au bailleur est celle d’indiquer pour quelle personne il entend effectuer la reprise.


Cette obligation permettra par la suite au locataire et le cas échéant au juge de contrôler la réalité du congé.


On notera toutefois le cas particulier d’une SCI composée uniquement de membre d’une même famille. Elle peut également donner un congé pour reprise au bénéfice d’un des associés.


Le simple fait que le bailleur n’ait pas indiquer l’adresse du bénéficiaire ne suffit pas pour caractériser le congé de frauduleux car la loi ne subordonne pas le droit de reprise à la preuve que le bénéficiaire ne dispose pas d’un autre logement.


En revanche un congé qui ne mentionne ni le nom, ni l’adresse du bénéficiaire de la reprise pourra être considérer comme frauduleux en ce qu’il ne permet aucun contrôle qu’en a la réalité de la reprise.


II/ la responsabilité du bailleur du fait de l’inoccupation des lieux


Le bailleur qui reprend le logement ne peut le faire que s’il entend faire de celui-ci son logement principal.


La jurisprudence est claire puisqu’elle précise que la reprise ne peut pas être effectuée par le bailleur ou ses proches pour une résidence secondaire. (CA Pau, 2e ch., 18 janv. 2007 : JurisData n° 2007-328854 ; Loyers et copr. 2007)


En d’autres termes, la Cour de Cassation a considéré que la reprise ne pouvait pas intervenir afin d’établir une résidence secondaire pour le bailleur ou l’un de ses proches. (Cass. 3e civ., 4 nov. 2003, Le Buan c/ Joffray et a. : Juris-Data n° 2003-020885)


Le bénéficiaire doit occuper les lieux à titre d'habitation principale (Cass. 3e civ., 13 nov. 2008 : JurisData n° 2008-045884).


La jurisprudence  a précisé ce qu’il fallait entendre par résidence principale, il doit s’agir d’une occupation effective mais pas nécessairement permanente.


Il convient de rappeler que la loi ne précise pas dans quel délai le bénéficiaire de la reprise doit occuper le bien, ni l

a durée dans laquelle il doit se maintenir dans le bien, objet de la reprise.


De façon générale le bailleur personne morale ne peut pas donner de congé pour habiter mais il peut utiliser les deux autres motifs de congé.


La Cour de Cassation ainsi que les Cour d’appel ont précisé par une jurisprudence récente les modalités du congé pour reprise.


La Cour d’Appel de PARIS a récemment rappelé que le bénéficiaire du congé pour reprise devait effectivement occupé les lieux.


Le défaut d’occupation constitue une faute que le bailleur devra réparer. La Cour précise tout de même que le bailleur pourra s’exonérer en cas de  cause légitime à son absence d’occupation.


Dans une affaire jugée par la Cour d’appel de Paris la bailleresse avait donné le congé afin de s’installer à Paris pour se rapprocher de ses filles, et dès lors que celles-ci n’ont plus déménager la demande de congé a perdue tout intérêt pour la bailleresse. Celle-ci  a aussitôt averti l’ancienne locataire en lui proposant de reprendre le logement, d’où il suit qu’il n’y avait pas d’abus dans l’exercice de son droit. (CA Paris, 4e ch., 30 oct. 2012, n° 10/24449, Roussilhe c/ Duval : JurisData n° 2012-024485 .)


Dans une affaire récente, la Cour a confirmé cette analyse. Le simple fait que l’installation du « repreneur » que ce soit le bailleur ou un tiers ne se soit pas faite immédiatement ne suffit pas à prouver le caractère frauduleux de la reprise.


En l’espèce, le bailleur était une femme âgée qui avait vécu jusqu’ici à Tarbes. Elle avait donné congé à sa locataire en 2012 et n’avait pris possession des lieux qu’en septembre 2013, soit plus d’un an après.


La Cour d’Appel de Paris a considéré qu’eu égard aux travaux importants qui ont dû être fait dans l’appartement et qui ont duré jusqu’au début 2013, plus le fait que c’était une femme âgés seule, venant de perdre son compagnon, le délai d’un an n’était pas excessif. De plus, la bailleresse prouvait qu’elle habitait bien l’appartement d’où il suit que la locataire n’était pas fondée dans sa demande. (Cour d'appel, Paris, Pôle 4, chambre 3, 23 Janvier 2014 - n° 13/01825)


Il convient d’ajouter qu’il n’est pas nécessaire que la personne ayant repris le bail habite tout le temps dans l’appartement la cour de cassation a pu admettre une occupation à temps partiel du logement dès lors qu’il y a « occupation effective »  du logement et que celui-ci n’est pas une simple résidence secondaire. (Cass. 3e civ., 13 nov. 2008, JurisData n° 2008-04588)


On constate donc que le seul contrôle du juge ce fait sur la personne qui effectue la reprise et l’effectivité de l’occupation des lieux il n’a pas le droit d’apprécier l’opportunité de la reprise.


Autrement dit il ne sert à rien de tenter de s’opposer à la reprise en faisant valoir que le bailleur dispose d’autres logements, ou que le repreneur dispose d’un logement.


Dans ce cas, il ne pourra obtenir que des dommages-intérêts.


En effet, la jurisprudence n’accorde jamais la réintégration car celle si n’ai prévue par aucun texte. (Cour d'appel, Toulouse, Chambre 3, section 1, 15 Octobre 2013 - n° 616/13, 12/00677).


Il faut toutefois préciser que le bailleur pourra toujours faire valoir qu’il existe une cause légitime ou un cas de force majeure qui s’est opposé à la reprise.


La jurisprudence a ainsi exigé du bailleur qu'il démontre que le défaut d'occupation était dû à un évènement présentant les caractères de la force majeure.


N’ont pas été retenues comme un cas de force majeure, les raisons fiscales ou financières.
En revanche, la jurisprudence est plus souple puisqu’elle a retenu comme cause légitime :
-le fait qu'en raison de la libération tardive du locataire, le bailleur n'a pu donner le logement à sa fille comme prévu, mais a été contraint de relouer (CA Bordeaux, 5e ch., 19 juin 2009 : JurisData),


- la dégradation de l’état de santé du bailleur,
- un divorce,
En définitive, le juge qui sera saisi d’une contestation sur la validité du congé et son caractère frauduleux, devra faire une appréciation in condréto des motifs et appréciait au cas par cas.


Je me tiens à votre disposition pour tous renseignements et contentieux.

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Joan DRAY
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