Contraire à son objet, le cautionnement signé par le seul gérant d'une société civile, sans vote des

Publié le Modifié le 03/06/2016 Vu 8 044 fois 0
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dans un arrêt de septembre 2015, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rappelé les conditions de validité d'un cautionnement donnée en dehors de l'objet d'une société, en reprenant des principes posés par la première chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation. (Cass. Civ 3. 15 septembre 2015, n° 14-21.348)

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Contraire à son objet, le cautionnement signé par le seul gérant d'une société civile, sans vote des

Contraire à son objet, le cautionnement signé par le seul gérant d'une société civile, sans vote des associés et portant atteinte à l'intérêt social, est nul.

Dans la vie d’une société, il est possible qu'elle soit amenée à effectuer un acte de cautionnement envers un tiers. Pour le tiers se pose la question de la validité de ce cautionnement si celui-ci n’entre pas dans l’objet social de la société.

La société immatriculée a la pleine capacité juridique et peut, comme une personne physique, contracter des obligations et posséder des droits.

Les actes pris par les gérants engagent valablement la société à l’égard des tiers si l'engagement réponde à trois conditions:

– qu'il entre dans l’objet social ;

– qu’il soit licite ;

– qu’il soit accompli au nom de la société

Il y a deux sortes de caution:

- personnelle: quand la caution s’engage à exécuter elle même, dans le cas où le débiteur principal ne remplirait pas son engagement.

- réelle: quand la caution offre en garantie une hypothèque sur un immeuble lui appartenant.

Le cautionnement est une sûreté personnelle (garantie accordée au créancier pour le recouvrement de sa créance). C’est un contrat par lequel la caution s’engage à garantir une créance individuelle.

Cependant il est possible pour une société de prendre une engagement n'entrant pas dans l'objet de la société.

Quelles sont les conditions de validité retenues par la Cour de cassation en matière de cautionnement donné en dehors de l'objet d'une société ?

A la suite d'un revirement de jurisprudence effectué par un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de Cassation du 8 novembre 2011, confirmé par un arrêt de la troisième chambre civile du 11 novembre 2012, de nouvelles conditions ont été posé écartant le raisonnement antérieur des juges.

(Un précédent article avait déjà éclairé ce revirement de jurisprudence à l'époque http://www.legavox.fr/blog/maitre-joan-dray/condition-validite-cautionnement-souscrit-societe-10148.htm#.V0MeoZGLS00 )

Dans cet arrêt de novembre 2011, il a été posé que la sureté, pour être valable, doit non seulement résulter du consentement unanime des associés, mais également être conforme à son intérêt social.

Par conséquent un cautionnement même accordé par le consentement unanime des associés n'est pas valable s'il est contraire à l'intérêt social. Ainsi une société peut se voir décharger de tout engagement et le prêteur sera dans l’incapacité de récupérer son prêt en cas d’incapacité de paiement du débiteur principal.

Ce revirement de jurisprudence fut suivi également par la première chambre civile par la suite.

Par ailleurs, dans un arrêt de septembre 2015, la troisième chambre civile de la Cour de cassation a rappelé les conditions de validité d'un cautionnement donnée en dehors de l'objet d'une société, en reprenant des principes posés par la première chambre civile et la chambre commerciale de la Cour de cassation. (Cass. Civ 3. 15 septembre 2015, n° 14-21.348)

En l'espèce, le gérant d'une société civile immobilière (SCI) qui avait loué des locaux à une agence de voyage, avait pris la décision seul de faire cautionner par la société les obligations de cette même agence de voyage envers un de ses créanciers (un organisme de garantie collective).  Cette décision avait été contestée par les associés, ayant fait observer que le gérant avait dépassé ses pouvoirs.

Cet article aura pour objet d'étudier les conditions de validité d'un cautionnement donné en dehors de l'objet d'une société, posées par les arrêts de la Cour de cassation

I. Un accord donné à l'unanimité par les associés

Au départ l'article 1849 du Code civil prévoit seulement l'engagement de la société pour des actes entrant dans son objet social, sous peine de nullité en application de l'article 1844-10 du Code civil.

Cependant la jurisprudence a permis, à condition d'une décision d'autorisation prise par l'unanimité des associés (en assemblée ou sous seing privé). (jurisprudence constant depuis notamment Cass. Civ 1. 20 octobre 1992, n°1291)

Exception: en considération d'une communauté d'intérêts avec le débiteur cautionné

Les décisions rendues ayant retenues la communauté d'intérêts avec le débiteur cautionné, étaient des situations dans lesquelles un lien contractuel existait (comme un bail) entre la société et le débiteur.

Souvent le débiteur était un associé personne physique ou morale comportant des associés communs.

Attention: l'existence d'un lien contractuel n'a jamais été posé comme suffisant ! Il est cependant nécessaire.

La relation entre un bailleur et un locataire n'est pas suffisante pour caractériser une communauté d'intérêts, la société devait avoir une contrepartie directe au cautionnement ( Déjà posé dans un arrêt de 1998: Cass. Civ 3. 25 mars 1998, n°467)

II. Ne pas porter atteinte à l'intérêt de la société

La notion d'intérêt de la société pose quelques difficultés à définir: pas définie par la loi et peut être confondue avec les notions d'objet social de la société et d'intérêt des associés.

Soumise à l'appréciation souveraine des juges du fond, cette notion semble subjective. On peut déduire qu'il faut que la société puisse trouver une contrepartie à l'acte dans lequel elle s'est engagée.

L'appréciation semble varier selon les chambres de la Cour de cassation, pour apprécier la conformité du cautionnement à l'intérêt social de l'entreprise:

-la troisième chambre civile: elle effectue un calcul "coûts/avantages",c'est-à-dire entre les inconvénients que représente le cautionnement et l'avantage qu'en retire la société

-la chambre commerciale: il n'y a pas d'atteinte à l'intérêt social si l'engagement s'il n'expose pas la société à réaliser la totalité de son actif ou s'il n'est pas resté sans contrepartie (exemple : Cass. com. 10-2-2015 n° 14-11.760).

En présence de l'atteinte à l'intérêt social de l'entreprise: La Cour de cassation prononce la nullité des suretés pour autrui consenties par la société.

En conclusion, l'arrêt du 15 septembre 2015 en est un parfait exemple où la Cour de cassation a annulé le cautionnement n'entrant pas dans l'objet social, car aucunes des conditions CUMULATIVES n'étaient pas remplies. (Cass. Civ 3. 15 septembre 2015, n°14-21. 348, Assoc. professionnelle de solidarité du tourisme c/ G.)

-l'absence d'unanimité des associés et également d'une communauté d'intérêts avec le débiteur cautionné:

Le cautionnement avait été signé seulement par le gérant sans vote des associés qui étaient en plus contre celui-ci et avaient fait observer que le gérant avait dépassé ses pouvoirs.

De plus, la relation entre un bailleur et un locataire n'était pas suffisante pour caractériser une communauté d'intérêts, la société devait avoir une contrepartie directe au cautionnement ce qui n'était pas le cas en l'espèce.

-l'atteinte à l'intérêt de la société:

Etant devant la troisième chambre civile de la Cour de cassation, le calcul "coûts/avantages" avait conclu à un défaut de proportionnalité entre les inconvénients qui en découlaient et l'avantage tiré de la garantie de l'agence. Ainsi la société avait agi contre son propre intérêt.

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Joan DRAY

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