DES PV DE STATIONNEMENT ILLEGAUX !

Publié le 31/08/2014 Vu 6 051 fois 0
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La légalité des PV de stationnement ou comment contester ses PV

La légalité des PV de stationnement ou comment contester ses PV

DES PV DE STATIONNEMENT ILLEGAUX !

DES PV DE STATIONNEMENT A L’AMENDE !

Alors que le principe même de la dépénalisation des PV de stationnement vient d’être légiféré, la juridiction de proximité de Versailles vient une nouvelle fois de censurer des PV de stationnement payant en relevant l’illégalité de l’arrêté municipal, support légal des poursuites pénales.

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En censurant de 2000 à 2014, la légalité de plusieurs arrêtés municipaux relatifs au stationnement payant, le juge de police rappelle la transversalité du droit pénal routier avec les principes du droit administratif et plus précisément du droit des collectivités territoriales.

  1. Des poursuites infondées : le cas du « non-affichage du ticket horodateur »

Pendant des décennies, les automobilistes ont été verbalisés à tort sur un motif inapproprié. A tel point que les imprimés CERFA utilisés par les forces de l’ordre pour la verbalisation contenaient la mention pré imprimée « non affichage du ticket horodateur ».

Rappelons que la jurisprudence des juridictions répressives a toujours censuré les poursuites pénales en l’absence d’acte réglementaire légalement pris. Ainsi, tout stationnement matérialisé comme gênant (Cass.crim., 24 octobre 1963, Gaz.Pal.1963.2.37 ; Cass.crim. 4 avril 2013, pourvoi 12-87802) ou payant (CA Agen 24 avril 1980, JPA 1981, p.68) ou encore réservé aux GIC-GIG (Cass.crim., 12 octobre 2005, JPA 2006, p.87) est considéré comme dépourvu de fondement légal en l’absence d‘arrêté municipal réglementairement édicté et publié ou affiché en mairie.

En faisant une stricte application du principe de légalité des peines et des poursuites, les juges répressifs ont pu relaxer dans le passé des prévenus du chef de prévention fondé sur un prétendu « non affichage du ticket horodateur ».

Faute de textes normatifs, les juridictions de police ont pu constater l’absence de toute obligation faite au conducteur d’afficher son ticket horodateur.

Aucune disposition générale du Code pénal ou du Code de la route en l’absence de disposition spéciale prise par l’autorité locale n’impose en effet l’obligation d’affichage d’un ticket horodateur valable (TP Versailles 30 juin 2000, JOSSEAUME, JPA 2002, p. 473 ; TP Saint Germain en Laye, 14 décembre 2001, JOSSEAUME, JPA 2002, p.473, JP Versailles 30 mai 2008, JOSSEAUME).

Cette jurisprudence n’a pas manqué d’être décriée par certains professionnels du droit, la qualifiant même d’épiphonème judiciaire en la rabaissant indélicatement à une simple décision de juridiction de proximité.

Ne leur en déplaise, et en les contredisant, la Cour de cassation a clairement confirmé la solution des juges de première instance en jugeant que prive sa décision de base légale la juridiction de proximité qui, dans des poursuites exercées pour défaut d'affichage du ticket horodateur, alors qu'elle y était invitée par les conclusions régulièrement déposées par le prévenu, ne recherche pas s'il existait un arrêté municipal conforme aux dispositions de l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales imposant l'affichage du ticket horodateur (Cass.crim.,4 mars 2009, Bull.crim.2009, n° 51).

  1. L’exigence de motivation des arrêtés municipaux

Le 10 septembre 2010, la juridiction de proximité censurait de nouveau l’arrêté municipal de la ville de Montigny le Bretonneux ainsi que celui de la commune de Rambouillet en constatant la violation des dispositions de l’article L.2213-2 du Code général des collectivités territoriales (JP Versailles, 10 septembre 2010, JOSSEAUME). 

Dans le respect de ces dispositions le maire peut, par arrêté motivé, eu égard aux nécessités de la circulation, réglementer l’arrêt et le stationnement des véhicules ; qu’il en va ainsi pour les arrêtes ayant pour objet la mise en place d’une règle de stationnement payant.

La jurisprudence des juridictions administratives contraignent l’autorité locale à une obligation de motivation, quand bien même l’acte en cause est un acte collectif à portée générale.

Le Conseil d’Etat a posé clairement sa jurisprudence dès l’instauration des premières zones de stationnement payant en ville (CE, 12 novembre 1975, RODES, Gaz.Pal. 76-I somm., p.115, CE, 8 juillet 1994, ASSOCIATION DES LOUEURS DE SCOOTERS SAINTOIS ; voir aussi TA Dijon, MATHIS, 15 avril 2004, 003771, TA Toulouse, CARRIERE, 15 décembre 2000, requête 96/958 ou TA Marseille, GUENOUN, 13 mars 2001, requête 99/6765).

Toute décision relative à la réglementation locale du stationnement doit ainsi faire l’objet d’une motivation en fait comme en droit, incluse dans l’acte lui-même.

Quand bien même l’acte réglementaire serait motivé, encore faut-il que l’arrêté litigieux soit motivé par les nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement (art. Article L2213-2 du Code Général des Collectivités Territoriales).

Les juges vérifient ainsi si les difficultés de la circulation dans la commune ou le stationnement anormalement prolongé de véhicules le long des voies publiques, justifient que l'autorité de police institue, tous les jours de l'année et sur la quasi-totalité de la voirie communale, un stationnement payant.

Récemment la Cour de cassation a jugé que l'arrêté municipal portant réglementation du stationnement devait être motivé non seulement eu égard aux nécessités de la circulation, mais également aux nécessités de la protection de l'environnement, comme l'énonce l'article L. 2213-2 du code général des collectivités territoriales (Crim., 20 novembre 2012, pourvoi n°12-83.339).

Une toute autre motivation ou une motivation dite « par référence » renvoyant à une autre disposition légale ou réglementaire est contraire au principe dégagé par la jurisprudence administrative.

Ainsi l’autorité locale  doit « exposer de façon complète et précise les raisons pour lesquelles la décision prohibitive, à vocation générale et collective, a été prise, de sorte que celui qui la subit puisse à « sa seule lecture » en connaître les motifs et partant en tirer les causes de sa légalité » (Conseil d’Etat, 17 novembre 1982, KAIRENGA, Droit administratif 1983 n°22).

Aussi le renvoi à d’autres textes ne satisfait pas l’exigence de motivation d’un acte administratif et à fortiori à une mesure de police restrictive par nature de libertés (CE, 1er juillet 1981, BESNAUT ; CE, 13 février 1987, MAROT, Lebon, p.348 ; CE, 16 mars 1988, QUINCAILLERIE LE GRUEL, Rec. CE 120 ; CAA Lyon, Ass. plén., 8 mars 1994, ELF FRANCE: Rec. CE T. 749 ; Conseil d’Etat, 27 avril 1994, MOREAU, dr.adm.1994, n°381 ; CAA Nantes, 28 juin 2002, Yves X... : requête 99NT02613).

  1. Les règles de fixation des tarifs de stationnement

Enfin, le 14 février dernier, la juridiction de proximité de Versailles a censuré, aux termes de deux décisions, plusieurs autres procès-verbaux de stationnement en constatant l’illégalité du mode de fixation du tarif de stationnement (JP Versailles, 14 février 2014, JOSSEAUME).

Au terme de l’article L.2333-87 du Code général des collectivités territoriales « le conseil municipal (…)  peut établir sur des voies qu'il détermine une redevance de stationnement, compatible avec les dispositions du plan de déplacements urbains s'il existe.  La délibération établit les tarifs applicables à chaque zone de stationnement payant ».

Depuis la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (loi SRU) seul le conseil municipal peut décider la création d’une taxe ou d’une redevance sur le territoire de la commune (CAA Douai, 10 février 2000, Commune d’Amiens).

Si le Conseil municipal peut déléguer cette compétence au maire en vertu de l’article L.2122-2 al.2 du Code Général des Collectivités Territoriales, cette délégation de compétence ne saurait être générale, absolue et sans limitation (TA Strasbourg, 27 octobre 2010, n°0705545, JP Versailles, 14 février 2014, JOSSEAUME).

Si nombre de moyens ont été épuisés pour faire émerger l’illégalité judiciaire des PV de stationnement payant, est-ce là pour autant l’épilogue jurisprudentiel d’un combat commencé aux débuts des années 2000… pas sûr !

Rémy JOSSEAUME

Avocat à la Cour

Docteur en Droit pénal routier

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