LA DEMISSION N’EST PAS UN JEU DE « CACHE-CACHE »…

Publié le 27/12/2013 Vu 4 657 fois 0
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« Jouer à cache-cache » c’est chercher qui s’est caché… Celui qui démissionne ne se cache jamais, il ne cache jamais sa décision derrière des apparences qui, pour le coup, sont souvent trompeuses pour les employeurs…

« Jouer à cache-cache » c’est chercher qui s’est caché… Celui qui démissionne ne se cache jamais, i

LA DEMISSION N’EST PAS UN JEU DE « CACHE-CACHE »…

La démission est un mode de rupture du contrat de travail à durée indéterminé à l'initiative du seul salarié. Il a pour inconvénient de le priver ensuite d'indemnités de chômage. La décision ainsi prise s’avère décisive sur le plan financier pour le collaborateur, c’est pourquoi, l’entreprise ne peut s’appuyer sur de simples présomptions.

Tout patron devra « ranger dans un coin de sa mémoire » les quatre caractères qui permettent de qualifier une démission :

  1. la rupture d'un contrat de travail à durée indéterminée ;
  2. le caractère unilatéral de la rupture du contrat de travail, à l'initiative exclusive du salarié ;
  3. la volonté non équivoque de rompre le contrat de travail ;
  4. une volonté de rompre le contrat de travail en raison de convenances personnelles du salarié.

« Là où le bât blesse », c’est que la démission du salarié n'est soumise à aucune condition de forme mais, à plusieurs conditions de fond essentielles à sa qualification. Le risque juridique sous-jacent provient de l'absence de tout ou partie de ces conditions qui fait encourir la requalification de la démission.

Dans une récente affaire, une salariée avait été engagée en qualité d'agent d'accueil par une société de sécurité. Un jour, après son entrée au service d’une autre société, elle ne s'était plus présentée à son lieu de travail initial et avait remis son badge. A la suite de la liquidation judiciaire de son premier employeur la société de sécurité, la salariée fût licenciée. Elle décida de saisir la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Quid : est-ce que le fait que la salariée ne se rendait plus sur son lieu de travail suffisait à caractériser sa volonté claire et non équivoque de démissionner ?

La Cour de Cassation, fidèle à sa jurisprudence, répond par la négative. Elle rappelle que la démission ne se présume pas et ne peut résulter du seul comportement du salarié à fortiori si ce comportement ne révèle pas clairement l'intention de démissionner.

En l’occurrence, le fait que la salariée ne se rendait plus sur son lieu de travail et s'était engagée dans le cadre d'un second contrat de travail ne suffisait pas à caractériser sa volonté claire et non équivoque de mettre fin au premier contrat de travail.

 La décision des hauts magistrats peut « étonner » compte-tenu de la situation de cumul de contrats de travail qui s’avère matériellement impossible puisque contrevenant aux règles régissant la durée légale du travail.  Pour autant, malgré ce constat, rien ne caractérisait une volonté claire et non équivoque de cette salariée de rompre son contrat de travail.

Pour débouter la salariée de ses demandes en rappel de salaires, le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Fontainebleau avait retenu qu'en se mettant à la disposition de l’autre société dans le cadre d'une seconde relation de travail et en remettant son badge, la salariée s'était rendue indisponible pour son employeur initial. Les juges du fond avaient relevé que le cumul de temps de travail excédant les limites légales et le fait de ne plus se présenter sur son lieu de travail impliquaient que la rupture du contrat de travail soit imputable à l’intéressée.

La Cour de Cassation infirme cet arrêt en se référant à sa jurisprudence constante qui écarte la qualification de démission chaque fois que la volonté du salarié est équivoque. En clair, la démission ne doit pas avoir été déduite par l'employeur du comportement du salarié.

Nonobstant, force est de constater que le caractère équivoque ou non de la démission reste à l'appréciation des juges. Par exemple, les juges ont déjà considéré que l'absence du salarié pendant 15 jours à la suite d'un abandon de poste traduisait une « volonté non équivoque de démissionner.

En tout état de cause, la démission du salarié ne peut se déduire :

- de l'absence injustifiée du salarié,

- du refus de continuer ou de reprendre le travail,

- de l'abandon de poste.

En revanche, ces comportements sont susceptibles de constituer des fautes pouvant justifier un licenciement pour motif personnel.

En somme, ce qui « matérialise » une démission, c’est l’expression d’une volonté claire et non équivoque. Pour ainsi dire, c’est le cas d’un collaborateur qui déciderait de partir sans pression et qui le ferait savoir en bonne et due forme…

Les directions des ressources humaines devront donc bien garder à l’esprit que toute démission d’un des membres de son personnel ne doit pas laisser de place au doute, ni être la conséquence d’un manquement de leurs obligations (exemples : paiement des salaires, obligation de sécurité de résultat etc.).

Nadia RAKIB

Dirigeante CLINDOEIL SOCIAL

www.clindoeil-social.com

Sources

Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 4 décembre 2013, 12-23.859, Inédit, n°de pourvoi 12-23859

Art. L. 1231-1 et L. 1237-1 du code du travail ; art. 1134 du code civil

Soc., 2 juillet 1985, Coursole c./Madero ; Cass.Soc., 22 septembre 1993, n°91-43.580, juris.actua. n°6933 du 8 novembre 1993 ; Cass.Soc., 10/06/97, n°95-41.178, RJS 8-9/97 n°955 ; Cass.Soc.,30/05/2000, Bull.V n° 207

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