L’INSUFFISANCE PROFESSIONNELLE : UN MANQUE DE FORMATION PROFESSIONNELLE ?

Publié le 24/03/2014 Vu 5 080 fois 0
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Quid : quels sont les risques d’une insuffisance professionnelle ? Une fois n’est pas coutume de commencer par s’interroger sur ce qui représente « le cœur » de l’inquiétude de nombreux de nos compatriotes en ces temps de crise sociale où le chômage reste encore trop élevé et où l’emploi se fait rare comme un trésor…

Quid : quels sont les risques d’une insuffisance professionnelle ? Une fois n’est pas coutume de commence

L’INSUFFISANCE PROFESSIONNELLE : UN MANQUE DE FORMATION PROFESSIONNELLE ?

Dans ce contexte, chaque salarié a conscience de l’importance du maintien de ses compétences afin de toujours faire preuve « de suffisance professionnelle »… Car, l’insuffisance professionnelle « guette » tout à chacun et peut justifier le licenciement pour motif personnel d'un employé. En revanche, l'insuffisance professionnelle ne constitue pas en elle-même une faute.

Pour que le licenciement soit fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'employeur doit invoquer des faits précis pour faire état d'une insuffisance professionnelle. Ces faits doivent pouvoir être constatés objectivement et s’avérer matériellement vérifiables.

L’employeur peut fonder son appréciation sur :

- des éléments qualitatifs : manque de compétences techniques, d'autorité ou de motivation,

- des éléments quantitatifs : efficacité insuffisante, baisse du chiffre d'affaires etc.

Quant au licenciement nul, il doit être distingué du licenciement sans cause réelle et sérieuse ou du licenciement irrégulier. Par le passé, une nullité ne pouvait exister sans texte mais, au fil du temps la jurisprudence a dégagé ce que l'on nomme « les nullités virtuelles ». Il s’agit de nullités prononcées suite à la violation d'une liberté fondamentale. Toutefois, la Cour de Cassation cantonne rigoureusement les libertés pouvant être reconnues comme des libertés fondamentales.

Quid juris : le droit à la formation de tout salarié est-il une liberté dite fondamentale ?

Dans cette affaire, une salariée avait été engagée par une société en qualité de dactylographe puis, à la suite d’une mutation avait accédé au poste de technicien supérieur administratif. Suite à la prise de différents congés dont en dernier lieu un congé parental d'éducation, la salariée avait repris son travail au sein de sa société à un poste de secrétaire/assistante au service des ressources humaines. Après un licenciement pour insuffisance professionnelle et un comportement inadapté, la salariée avait saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.

Pour condamner l'employeur au paiement des salaires à compter de la rupture et de dommages-intérêts pour licenciement illicite, les juges du fond avaient retenu que l'insuffisance professionnelle reprochée à la salariée (après 12 jours de travail effectif et une interruption professionnelle quasi-continue de plus de 11 années) s'expliquait par l'indigence de la formation professionnelle qui avait été dispensée à l'intéressée pendant ces 12 jours. Selon la Cour d’appel de Versailles, la salariée n’aurait pas été mise en mesure de faire face aux changements de techniques et des méthodes de travail intervenus pendant ces 11 années dans sa société.

Quid juris : le licenciement intervenu en violation du droit à la formation de tout salarié pouvait-il faire l’objet d’une nullité virtuelle ?

La Haute Cour ne suit pas le raisonnement des juges du second degré. Elle précise que le juge ne peut, en l'absence de disposition le prévoyant et à défaut de violation d'une liberté fondamentale, annuler un licenciement.

En effet, aucune disposition ne prévoit la nullité du licenciement d'un salarié pendant son congé parental ou après son retour de ce congé, ni la nullité du licenciement d'un salarié à l'égard duquel l'employeur n'aurait pas rempli son obligation de formation ou d'adaptation à son emploi.

Cela étant dit, la chambre sociale de la Cour de Cassation infirme l’arrêt rendu par la Cour d’appel de Versailles et ajoute que la méconnaissance par l'employeur du droit du salarié à une action de formation professionnelle ne caractérise pas la violation d'une liberté fondamentale.

Il s’en suit que le licenciement pour insuffisance professionnelle de la salariée deux mois après son retour d'un congé parental d'éducation n’était pas nul parce que la société n'aurait pas rempli à son égard son obligation légale de formation au retour d'un congé parental.

L'employeur n’avait donc pas à verser à sa collaboratrice les salaires courant de la notification de la lettre de licenciement jusqu'au jour de l'arrêt ainsi que des dommages-intérêts réparant le préjudice résultant d’un caractère illicite du licenciement.

Pour mémoire, à l'issue d’un congé parental d'éducation le salarié doit retrouver son précédent emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération au moins équivalente. De plus, quand un employé reprend son activité initiale, il bénéficie du droit à une action de formation professionnelle qui intervient le plus souvent suite à des changements de techniques ou de méthodes de travail. Ce droit peut être exercé avant l'expiration de la période pendant laquelle le collaborateur entendait bénéficier d'un congé parental d'éducation.

Il faut garder à l’esprit que le manquement de l'employeur à ses obligations en matière de formation des salariés ou d'adaptation à leur emploi n'ouvre droit pour ces derniers qu'à la réparation du préjudice résultant de cette absence de formation et qu'il appartient au juge d'évaluer.

Fin janvier, la réforme de la formation professionnelle issue de l'accord interprofessionnel du 14 décembre 2013 a institué un compte personnel de formation. Celui-ci sera valable tout au long de la vie active et mobilisable que l'on soit salarié ou demandeur d'emploi.

L’objectif poursuivi est de se préoccuper des salariés vulnérables dans une économie qui n’a de cesse de se mouvoir.

Quid juris : le compte personnel de formation va-t-il devenir un outil majeur pour le droit à la formation ?

A partir du 1er janvier 2015, chaque salarié disposera d’un véritable accès à une formation qualifiante qui lui permettra de progresser dans son emploi et sa carrière. Ce compte personnel traduit-il un pas de géant pour la sécurisation des parcours et la simplification de la formation professionnelle ? Les français vont-ils s’approprier cette grande réforme qui rend chaque travailleur responsable « de sa suffisance professionnelle »… Le temps nous le dira…

Nadia RAKIB

Dirigeante CLINDOEIL SOCIAL

www.clindoeil-social.com

Sources

Cass. soc, Audience publique du 5/3/14, n° 11-14426, publié au bulletin,cass.partielle

Arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 19 janvier 2011

Vu les articles L. 1235-1, L. 1235-3, L. 1225-55, L. 1225-59 et L. 1225-71 du code du travail

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