Les réseaux sociaux au travail

Publié le Modifié le 08/10/2015 Vu 15 306 fois 0
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Les réseaux sociaux au travail

Le développement des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) est sans doute l’un des phénomènes les plus remarquables de ces vingt dernières années. En l’espace d’une vingtaine d’années, les foyers se sont progressivement équipés de minitels, puis d’ordinateurs, et enfin de tablettes et smartphones… Si bien que l’utilisation des équipements informatiques, réservée jadis à des métiers techniques très spécialisés, s’est largement répandue. 

Cette démocratisation – et adoption massive - des outils informatiques ne s’est pas faite sans poser son lot de questions juridiques. Ont ainsi été soulevées, ces quinze dernières années, un certain nombre d’interrogations liées à des domaines tout à fait divers. Quelle valeur fallait-il accorder à une preuve informatique ? Sur quels fondements sanctionner le téléchargement illégal et les actes de cybercriminalité ? Comment garantir le respect de la vie privée lorsque les utilisateurs des NTIC remplissent sans cesse des formulaires afin de passer des commandes en ligne ?

Pour toutes ces questions, le droit a apporté des réponses, plus ou moins satisfaisantes. Mais un constat s’impose : ces réponses furent données relativement tardivement. Par exemple, l’affirmation selon laquelle l’écrit sur support électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier ne s’est faite que le 13 mars 2000[1]. Les législations sur la cybercriminalité n’auront connu de véritable essor qu’avec la convention de Budapest de 2001[2]. Ce n’est enfin qu’en 2004 que la loi “informatique et libertés” a été modifiée afin de régir efficacement les collectes de données numériques[3].

Ce « retard » du Droit sur les questions liées à l’informatique se comprend aisément. D’une part, il est patent que le processus législatif implique une certaine lenteur. D’autre part, les nouvelles technologies de l’information et de la communication se développent à une vitesse fulgurante. Difficile, donc, d’apporter immédiatement des réponses juridiques à l’ensemble des problèmes susceptibles de découler de l’utilisation des NTIC. Parfois même, les réponses à ces problèmes existent déjà, et il ne suffirait que d’appliquer à ces problématiques nouvelles des dispositions préexistantes.

Cette relative difficulté du droit à se positionner face au développement des nouvelles technologies trouve aujourd’hui une parfaite illustration avec le récent développement des « réseaux sociaux », adoptés par plus d’un milliard de personnes[4].

La notion de réseau social est difficile à cerner, en raison de sa polysémie. Force est d’ailleurs de constater que la notion a radicalement changé de sens en l’espace de quelques années. Selon Ludovic BOURSIN et Laeticia PUYFAUCHER[5], le terme de « réseau social » a été inventé par le sociologue John A. BARNES en 1954, et désignait « des liens d’amitié et de connaissance entre des individus qui se reconnaissent mutuellement un statut social à peu près égal ». Cette définition ne brille pas par sa clarté, mais donne des indices sur ce qu’est un réseau social : un ensemble de contacts humains liés par des intérêts communs.

Cette définition est à la fois proche et éloignée de la réalité actuelle des réseaux sociaux. Une définition de la notion, telle qu’entendue aujourd’hui, a été récemment donnée par le « Groupe de travail de l'article 29 » constitué de représentants des « CNIL européennes ». Ce groupe de travail a défini les réseaux sociaux comme « des plateformes de communication en ligne qui permettent à tout internaute de rejoindre ou de créer des réseaux d'utilisateurs ayant des opinions similaires et des intérêts communs ».[6]

Les réseaux sociaux d’hier et d’aujourd’hui ont donc ce point commun de permettre le rapprochement de différentes personnes. Cela dit, le réseau social désignait jadis les personnes elles-mêmes, alors que l’on a tendance à y entendre aujourd’hui la plateforme même qui permet ce rapprochement. Par abus de langage, l’on affirme d’ailleurs qu’une personne “est” sur un réseau social, afin de signifier qu’elle utilise telle ou telle plateforme informatisée.

 Ces réseaux sociaux sont, pour la plupart, bien connus. Facebook, Twitter, Copains d’Avant, MySpace, LinkedIn… Tous présentent des points communs. Ce sont des sites internet – parfois déclinés en “applications” pour les appareils mobiles – permettant à un utilisateur inscrit d’accéder à une plateforme d’échange d’informations avec ses contacts. Cet accès est soumis à la production d’un certain nombre de renseignements, tels que le nom de l’utilisateur, son âge voire son sexe.

Une fois connecté, l’utilisateur dispose d’un certain nombre d’outils pour communiquer. Il peut publier de statuts, des photos, discuter avec des amis en public, tenir des discussions privées…

De cet usage – parfois addictif pour certaines personnes[7] - peut découler un certain nombre de problèmes. Les réseaux sociaux étant, pour certains utilisateurs, des journaux intimes en ligne, l’on comprendra aisément quels peuvent être les conflits qui sont susceptibles de naître. Un utilisateur peut porter atteinte à l’image ou à la réputation d’une autre personne physique ou morale, en publiant des “statuts” ou des photos compromettantes. De la même manière, cet utilisateur peut être victime de ce procédé.

 Récemment, une affaire a défrayé la chronique : le salarié d’une grande chaîne de restauration rapide a publié sur Twitter un certain nombre d’informations dénonçant les supposées pratiques de son entreprise[8]. La société vient d’engager des poursuites judiciaires à son encontre et réfléchit à une éventuelle sanction disciplinaire. 

Ce fait divers est loin d’être isolé. Surtout, il illustre une problématique récente : la conciliation de l’impératif d’exécution de bonne foi du contrat de travail et les libertés propres du salarié. D’une part, le salarié doit être loyal vis-à-vis de son employeur[9], il a une obligation de réserve et ne peut pas dénigrer ostensiblement son entreprise. Mais d’autre part, il dispose d’une liberté d’expression, du droit au respect à sa vie privée… Ces données semblent difficiles à concilier. 

Des problématiques se posent également pour les employeurs. L’on ne s’étonne plus aujourd’hui que les employeurs prennent en compte la “e-réputation” d’un candidat pour déterminer ses chances d’intégrer l’entreprise. Mais n’y a t-il pas un évident risque de discrimination, dans la mesure où certains candidats mentionnent expressément leurs orientations politiques, religieuses, sexuelles, ethniques, etc. ?

Un employeur peut également tenter de surveiller ses salariés, afin de s’assurer qu’ils ne portent pas atteinte à l’image de la hiérarchie ou de l’entreprise ; ou qu’ils se consacrent pas abusivement leur temps de travail à leurs occupations personnelles. Si tel est le cas, comment peut-il agir ? Il est certain que la liberté d’entreprendre est un droit constitutionnel, mais le respect à la vie privée et la liberté d’expression en sont également…

Il est donc patent que les réseaux sociaux sont susceptibles d’avoir des interactions sur les relations de travail – parfois même avant qu’elle n’ait commencé. Sont susceptibles de s’affronter des libertés et droits fondamentaux propres aux deux parties de la relation de travail. Se pose naturellement la question de savoir quelle influence l’usage des réseaux sociaux peut avoir sur les relations de travail. A fortiori, comment concilier les droits de l’employeur et ceux des salariés en la matière ?

La question est d’autant plus intéressante qu’elle est délicate. Les réseaux sociaux « modernes » ne sont apparus qu’au milieu des années 2000, et n’ont véritablement pris d’ampleur que dans les années 2010. Ils sont donc un phénomène relativement nouveau, auquel le Droit d’intéresse depuis peu. C’est la raison pour laquelle il s’agira, dans le cadre de cet étude, de n’envisager que les réseaux sociaux « virtuels », accessibles en ligne – nous feront abstraction des réseaux sociaux entendus par M. BARNES (cf. supra). De même, l’Internet (réseau global) sera plus intéressant à analyser que l’intranet (réseau local), tant le contentieux y est plus fourni, les membres plus nombreux et les problématiques plus patentes. 

Connaître les incidences que l’usage des réseaux sociaux est susceptible d’avoir sur une relation de travail implique de prime abord d’en étudier l’utilisation. Celle-ci est en théorie autorisée et garantie par un certain nombre de textes nationaux et internationaux. Seulement, selon l’usage qu’en fera l’utilisateur, ces libertés et droits fondamentaux auront des contours variables (I). Espace public ou espace privé ? La chose n’est pas aisée à déterminée, et c’est la raison pour laquelle le pouvoir de surveillance de l’employeur a été encadré (II), et que la rupture est complexifiée en raison de l’incertitude du fondement à mettre en exergue.

 

 

I. La confrontation entre des principes bien établis et les réseaux sociaux

L’usage des réseaux sociaux peut interférer considérablement sur les relations de travail, qu’elles soient individuelles ou collectives. Il s’agit à la fois de nouveaux espaces de liberté (A) pour les salariés, et d’un formidable outil à disposition du chef d’entreprise. Toutefois, si l’usage des réseaux sociaux est protégé par des droits et libertés fondamentaux bien établis, il ne faut pas éluder un certain nombre de problématiques nouvelles (B) susceptibles d’impacter la relation de travail.

 

  1. De nouveaux espaces de liberté pour les travailleurs

« Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit »[10]. Le développement des réseaux sociaux offre aux individus de nouveaux moyens d’expression. Les blogs, Facebook, Twitter permettent à chacun de s’exprimer librement et facilement.

Au niveau international, la liberté d'expression est consacrée à l’article 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et par l'article 10 de la Convention Européenne de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales. Celle-ci dispose que « toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière ». L’article énonce également que « l'exercice de ces libertés [comporte] des devoirs et des responsabilités » pouvant faire l’objet de restrictions notamment pour protéger « la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ». En France, c’est l'article 10 et 11 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen qui érige cette liberté. Elle fait par conséquent partie intégrante du bloc de constitutionalité.

En tant qu’individus, les salariés ont également le droit à la liberté d’expression. Leur subordination à l’égard de leur employeur ne doit pas avoir pour conséquence de leur ôter cette liberté. La liberté d'expression ne doit pas se confondre avec le droit d'expression directe et collective des salariés sur leurs conditions de travail, applicable sur le temps et sur le lieu de travail, consacré à l'article L. 2281-1 du Code du travail. Depuis 1988, la jurisprudence a étendu le droit d’expression en considérant qu’il pouvait également être utilisé en dehors du temps et du lieu de travail dès lors qu'il ne donne pas lieu à abus[11]. C’est d’ailleurs ce même arrêt qui consacre la liberté d’expression en tant que liberté fondamentale. Par conséquent, un licenciement portant atteinte à cette liberté sera nul. C’est ainsi que la création d’un site Internet externe à l'entreprise est licite car « il n'existe aucune raison d'interdire aux salariés d'utiliser les techniques nouvelles pour l'exercice de leur droit d'expression direct et collective »[12]. Cette possibilité leur est également donnée par l’intermédiaire des blogs[13]. En outre, les salariés ont droit à la liberté d’expression et à la critique dans et hors de l'entreprise, à condition de respecter leurs obligations de discrétion et de loyauté. La liberté d’expression des salariés peut donc s’exercer à l’intérieur et en dehors de l’entreprise. Notons qu’elle n’est pas limitée au propos ayant trait au fonctionnement de l’entreprise. Les propos étrangers à l’entreprise tel que les discussions religieuses, politiques sont également protégées par la liberté d’expression.

 

La liberté d’expression syndicale peut également se manifester sur les réseaux sociaux. Il n’y a pas lieu de retirer aux syndicats ce formidable outil de communication. Au niveau international, la liberté syndicale est consacrée par l’article 22 du Pacte International relatif aux Droits Économiques, Sociaux et Culturels (PIDESC), ou encore par la convention OIT n°87. En son l’article 11, la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) dispose que « toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts ».

 Dans un arrêt du 8 décembre 2009, dit Aguilera Jimenez, la CEDH affirme que « les membres d’un syndicat doivent faire valoir devant l’employeur les revendications qui permettent d’améliorer la condition des travailleurs ». Elle ajoute que si leurs idées, propositions et actions peuvent être accueillies avec faveur, elles peuvent aussi heurter, choquer ou inquiéter. Par cette formule, la CEDH énonce le principe selon lequel la liberté d’expression syndicale peut revêtir légitimement des formes outrancières si cela s’avère nécessaire, sous-entendu pour faire aboutir les relations professionnelles. Le Code du travail énonce quant à lui en son article L.2142-5 que « le contenu des affiches, publications et tracts est librement déterminé par l'organisation syndicale, sous réserve de l'application des dispositions relatives à la presse ».

Les réseaux sociaux peuvent être dans certaines hypothèses de formidables atouts pour les syndicats. Ils constituent de nouveaux outils susceptibles de faciliter la communication et la mobilisation. On peut supposer que par crainte d’être assimilés à des syndicalistes, certains salariés préfèreront esquiver les titulaires d’un mandat syndical pour ne pas s’attirer d’ennuis de la part de la direction. Le support numérique et virtuel facilite l’accès aux informations syndicales.

 Les syndicats ont d’ailleurs tout intérêt à utiliser ce type de communication, (en supplément de leurs moyens de communication traditionnels) afin de ne pas subir une « fracture numérique ». On sait qu’en France, le taux de syndicalisation est particulièrement faible[14]. Les organisations syndicales doivent se renouveler et changer leur image. Les réseaux sociaux peuvent être un bon moyen d’y parvenir. Si les blogs syndicaux nécessitent souvent du temps dans leur administration[15], les réseaux tels que Facebook ou Twitter sont moins complexes dans leur utilisation. « Ce qui est intéressant dans les réseaux sociaux c’est le socle de confiance et de transparence nécessaire à leur fonctionnement. Ce socle gagnerait à être partagé dans la modernisation des moyens du dialogue social et un jeu d’acteur plus productif que défensif »[16]

Les sites internet ou les blogs syndicaux sont traités comme n'importe quel site personnel ou institutionnel. Un syndicat a le droit de communiquer librement des informations au public sur un site internet. Toutefois, cette liberté peut être limitée dans la mesure de ce qui est nécessaire pour éviter que la divulgation d’informations confidentielles ne porte atteinte aux droits des tiers. Il reviendra au juge de s’assurer que la communication effectuée a bien eu pour effet de porter atteinte aux droits de ces derniers[17]. Le principe reste donc celui de la libre expression des syndicats.

            La problématique de la liberté d’expression des salariés par le biais des réseaux sociaux est particulièrement liée à la question de la vie privée du salarié. Des propos tenus en public auront des conséquences différentes de ceux tenus en privé et inversement. Par ailleurs, en stockant des photos ou des vidéos de leur vie privée sur les réseaux, les individus s’exposent à des répercussions sur leur vie professionnelle. Le salarié doit pouvoir jouir pleinement de ses droits sans que cela puisse interférer sur sa sphère professionnelle. Selon Le Doyen Jean CARBONNIER, la vie privée est la revendication d’une « sphère secrète de vie d’où [l’individu] aura le pouvoir d’écarter les tiers (...) »[18].

Le droit à la vie privée est mentionné à l’article 8 de la CEDH qui dispose que « toute personne a le droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ». Au niveau interne, c’est l’article 9, alinéa 1 du Code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée ». 

La Chambre sociale de la Cour de cassation a consacré la plupart des composantes de la vie privée et ce, au profit du salarié. L’employeur ne peut s’immiscer dans la vie privée du salarié. Une fois qu’il n’est plus sous son autorité, le salarié retrouve sa pleine liberté. La vie professionnelle de l’individu implique qu’il doit remplir des obligations contractuelles. Cependant, cela ne saurait aboutir à ce que sa vie privée soit suspendue pendant l’accomplissement de ses fonctions. Il existe donc une sphère de vie privée au sein de la sphère professionnelle. En Droit du travail, le principe est qu’un fait relevant de la vie privée ne peut caractériser une faute du salarié[19].

 La protection de la vie privée implique la protection de la correspondance privée. Dans le fameux arrêt Nikon du 2 octobre 2001[20], la Cour de cassation rappelle « que le salarié a droit même au temps et au lieu de travail, au respect de l’intimité de sa vie privée », et ajoute que cela implique « le secret des correspondances ». Depuis cet arrêt il est admis qu’un salarié puisse se servir de la messagerie mise à sa disposition par son employeur à des fins personnelles. Par conséquent, l’employeur ne peut dans le cadre de son pouvoir de sanction, se fonder sur le contenu d’une correspondance privée pour sanctionner son destinataire[21].

 Si cet arrêt reste symbolique du fait qu’il est l’un des rares à faire référence à l’article 8 de la CEDH, il a était fortement amoindri par les positions postérieures de la Haute Juridiction. Aujourd’hui, les juges retiennent que « sauf risque ou événement particulier, l’employeur ne peut ouvrir les messages identifiés par le salarié comme personnels sur le disque dur de l’ordinateur mis à sa disposition qu’en présence de ce dernier ou celui-ci dûment appelé »[22]. Parallèlement, la Cour de cassation affirme que tout message non-identifié comme personnel est présumé professionnel[23], ce qui implique l’accès de l’employeur hors la présence du subordonné. Ce rappel est nécessaire pour comprendre les nouveaux enjeux qui se posent du fait de l’utilisation des réseaux sociaux par le salarié. Les différents positionnements ont permis d’identifier une ligne jurisprudentielle claire, mais qui ne s’applique qu’aux messageries électroniques. 

S’agissant des réseaux sociaux, la question devient plus complexe. Si l’utilisation de Twitter ne pose aucun problème, (toutes les publications sont considérées comme publiques étant donné qu’elles peuvent être vues par tous les contacts de l’utilisateur), il n’en va pas de même pour Facebook. Ce réseau social permet d’utiliser deux types de communication. Celles publiées sur le « mur » (avec des paramétrages de confidentialité pouvant varier), et les messages envoyés en privé sur le même modèle que les courriels électroniques. C’est d’ailleurs Facebook, qui engendre aujourd’hui le plus de contentieux. 

Dans certains arrêts, les juges considèrent que les écrits diffusés sur le « mur » d’un titulaire d’un compte Facebook, relèvent de la protection de la correspondance privée. Dans deux affaires jugées fin 2011, la cour d’appel de Rouen a considéré Facebook comme un espace privé[24], puisqu’il « ne peut être affirmé de manière absolue que la jurisprudence actuelle nie à Facebook le caractère d’espace privé, alors que ce réseau peut constituer soit un espace privé, soit un espace public, en fonction des paramétrages effectués par son utilisateur ». 

Outre les questions relatives à l’expression des salariés, d’autres problèmes peuvent être soulevés relatifs au stockage de photos (Facebook) ou de vidéos (YouTube, Dailymotion) sur les réseaux sociaux. En principe, ces espaces de vie privée ne peuvent être utilisés par l’employeur pour fonder une sanction disciplinaire. Toutefois, le salarié pourrait être licencié en cas de trouble au bon fonctionnement de l’entreprise. Il convient alors d’être particulièrement prudent.

Si les réseaux sociaux sont susceptibles d’être de véritables sources d’information pour l’employeur, cette surveillance est limitée par le principe du droit au respect de la vie privée. Outre les textes précédemment cités, il faut ajouter que toute collecte de données à caractère personnel doit faire l’objet d’une déclaration à la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL). La loi du 6 janvier 1978 dite « informatique et liberté », définit la donnée ayant un caractère personnel comme « toute information relative à une personne physique identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou indirectement, par référence à un numéro d’identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui sont propres »[25]. Par ailleurs, le Code pénal vient sanctionner « le fait de procéder à un traitement de données à caractère personnel concernant une personne physique malgré l'opposition de cette personne, lorsque ce traitement répond à des fins de prospection, notamment commerciale, ou lorsque cette opposition est fondée sur des motifs légitimes, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende »[26].

Loin de n’être qu’une source potentielle d’ennuis, les réseaux sociaux peuvent être de véritables atouts pour les individus en recherche d’emploi. Certains ont un but professionnel et peuvent ainsi être utilisés pour rechercher un emploi. Pour ne citer que lui, LinkedIn permet aux employeurs de rechercher des profils qui les intéressent. « En termes de « sourcing », les réseaux sociaux sont devenus pour les recruteurs des lieux de chasse. Le recrutement réseaux sociaux permet d’élargir nos recherches à des candidats ne répondant pas forcement à des offres d’emploi classiques »[27]. Pour le salarié c’est alors la faculté d’étendre son carnet d’adresse et d’augmenter ses chances d’embauche. C’est aussi ici la problématique de l’ « e-réputation ».  Celle-ci peut être définie comme l’image véhiculée par une personne physique ou par une entreprise sur le web. Il apparaît que les candidats potentiels à un emploi ont intérêt à soigner leur réputation sur internet.

 Les entreprises sont également friandes de ces types de réseaux, non seulement pour rechercher des profils intéressants, mais également pour marquer leur présence auprès de millions d’utilisateurs potentiels. Elles soignent ainsi leur « e-reputation ». L’utilisation des réseaux comme vitrine permet aux entreprises de diversifier leurs méthodes de marketing et d’utiliser des moyens simples, rapides et qui disposent d’une grande visibilité. Pour ne citer que quelques exemples, Apple, Coca Cola ou BNP Paribas utilisent Facebook. Twitter est utilisé par TF1 ou encore Carrefour, et MySpace par Renault[28].

 Les réseaux sociaux peuvent à l’inverse présenter des risques pour l’entreprise. Ils peuvent être de véritables armes de dénonciation de pratiques commerciales, industrielles, ou de management. Si le salarié a droit à la liberté d’expression et au droit d’expression, l’employeur peut se prémunir de toute déclaration diffamatoire en invoquant l’article 29 de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881. Ce dernier dispose que « toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. (…). Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure. » Ainsi, les salariés s’exprimant sur les réseaux sont responsables de leurs publications. Si de telles infractions sont commises, outre les éventuelles sanctions disciplinaires auxquelles ils s’exposent, leur responsabilité pénale et civile pourra être engagée.

 L’utilisation de nouveaux moyens d’expression et d’espaces de vie de privée nécessite une adaptation rapide du Droit. Cette adaptation est d’autant plus difficile que les évolutions en matière de réseaux sociaux sont particulièrement rapides. L’objectif est de maintenir les droits à la liberté d’expression et au respect de la vie privée des salariés. Toutefois, au vu des intérêts de l’entreprise, la jurisprudence et la loi viennent poser des nuances. La notion de vie personnelle est beaucoup plus perméable au pouvoir de sanction de l’employeur que la notion de vie privée. Il va sans dire que malgré les efforts de la jurisprudence pour maintenir un espace de liberté, l’utilisation de certain réseau exclu de fait le caractère privé. Un réseau social est espace sur lequel « on mène une vie sociale, et il est somme toute illusoire de pouvoir y mener une "vie privée" »[29]. Il est certain que les réseaux sociaux ont un impact direct sur les relations de travail. De nouvelles problématiques sont posées auxquelles il convient d’y apporter une réponse rapide. La jurisprudence devra concilier les droits fondamentaux des salariés, et les intérêts légitimes de l’entreprise.

 

B.   Des réalités nouvelles, vectrices de problématiques inédites 

 

Afin d’appréhender au mieux les problématiques liées à l’utilisation des réseaux sociaux, il est essentiel d’identifier les enjeux pour chacun des acteurs. Il est vrai que si les principes de droit fondamentaux viennent trouver application dans l’utilisation des réseaux sociaux, de nouvelles problématiques sont aujourd’hui posées. Des réponses ne sont pas toujours apportées clairement et d’autres questions sont susceptibles de se poser à l’avenir.

Originellement les réseaux sociaux sont des espaces créés pour permettre aux individus de communiquer et d’échanger. Pour certaines personnes, le journal intime est de devenu un journal public. Cette révolution est marquée par une augmentation exponentielle, incontrôlée et dangereuse des informations disponibles sur la toile. Les comportements et la visibilité de chacun ont été bouleversés. Ainsi nos pensées, nos mémoires, nos changements d’humeur se retrouvent matérialisés sur des plateformes à la vue de tous. Il en va de même pour nos photos. Autrefois partagées lors des réunions de famille, elles se retrouvent aujourd’hui sur des plateformes virtuelles pour être consultées par tous. Ces photos se retrouvent copiées, transférées, utilisées et même détournées par d’autres utilisateurs. Les individus recréent virtuellement leur famille, leurs amis, leurs connaissances professionnelles, et partagent avec eux ce que bon leur semble.

Les réseaux sociaux permettent à chacun de s’exprimer et de diffuser des informations tout en disposant d’une audience plus ou moins importante. Cette faculté peut se retourner contre les utilisateurs quand des informations compromettantes tombent entre les mains de la justice (l’on se souvient du fait divers récent où un jeune homme avait partagé une vidéo de lui en excès de vitesse où l’on distinguait clairement sa plaque d’immatriculation) ou de leurs employeurs (comme en témoigne la récente polémique relative aux restaurants Quick). Les enjeux sont la notion de loyauté de la preuve, la qualification du licenciement, mais également une utilisation trop importante des réseaux sociaux sur les lieux de travail (un comportement qualifié d’« always on »). Autant de questions qui découlent directement de l’utilisation des réseaux par les salariés.

 Un réseau social comme Facebook ne dégage pas de profits comme les autres sites internet. Ce n’est pas la publicité, mais l’intimité de chaque utilisateur qui y est exploitée. En effet, ils dégagent des profits en exploitant les données que les utilisateurs laissent : leurs noms prénoms, dates de naissance, formations, emplois, frères et sœurs etc. Ces informations qui semblent d’une extrême banalité sont en réalité une mine de richesse. C’est ce qu’explique en mars 2010, Dan LYONS, éditorialiste à Newsweek « Le génie de Google, Facebook et les autres, c’est d’avoir créé des services qui sont à ce point utiles ou distrayants que les gens sont prêts à céder un peu de leur intimité pour avoir le droit de les utiliser. Et chaque nouvelle érosion de l’intimité nous est vendue, paradoxalement, avec un discours vantant à quel point l’entreprise X se soucie de notre intimité. Je me demande si Georges Orwell aurait été impressionné ou consterné. Car qui aurait dit que Big Brother ne serait pas une énorme agence gouvernementale, mais une bande de gamins de la Silicon Valley ? »[30]. Les réseaux exploitent les données de chacun, les transformes en statistiques et le vendent au plus offrant. Ce système économique basé sur l’exploitation de notre vie privée conduit à se poser de nombreuses questions notamment sur le droit à l’oubli, l’e-réputation, le respect de la vie privé ou encore la liberté des correspondances. Toutes ces données en ligne, que l’utilisateur est invité à fournir, peuvent interférer avec leur relation de travail…

 Les entreprises ne sont pas restées indifférentes face à l’essor de ces réseaux sociaux, elles aussi ont voulu participer à l’aventure et bénéficier de cette immense clientèle. Ainsi, aujourd’hui la plus part des grandes entreprises se retrouvent sur les réseaux sociaux, notamment sur Twitter (65 % des grandes entreprises internationales) et sur Facebook (54 % des grandes entreprises internationales)[31]. Les réseaux sociaux s’avèrent être d’immenses vitrines pour les entreprises où la réputation est au cœur de leurs activités. Des services entiers travaillent chaque jour pour promouvoir et protéger les marques. Cette entrée sur les réseaux sociaux s’est accompagnée d’une pratique peu connue, le « username squatting ». « Cette pratique consiste à enregistrer un username reprenant le droit d’un tiers notamment un nom patronymique, une dénomination sociale ou un nom commercial, une marque ou un droit d’auteur. Ce phénomène est lié au fait que globalement il n’est pas vérifié si une demande d’enregistrement de username est susceptible de porter atteinte aux droits de propriété intellectuelle d’un tiers »[32]. Pour résumer cette pratique, il s’agit de reprendre le nom d’une marque soit afin d’exercer un chantage économique sur la marque ou alors de lui porter préjudice. A côté de cette pratique, le danger peut être issu des salariés eux-mêmes dénigrant l’entreprise ou utilisant les réseaux sociaux comme moyen pour injurier un salarié ou un membre de la direction.

La frontière entre espace public et privé semble être l’enjeu central de la problématique de l’utilisation des réseaux sociaux par les salariés. Lorsqu’ils s’expriment à propos de leur entreprise, c’est de la sphère dans laquelle seront tenus les propos dont dépendront les éventuelles sanctions de l’employeur.

 Les réseaux sociaux deviennent un magnifique vecteur d’intégration pour les salariés. Leur utilisation conduit à une intrusion du monde professionnel dans la sphère privé. L’entreprise devient un sujet de discussion, d’échanges. Un sondage de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT) explique que 3 salariés sur 4 parlent régulièrement de leurs conditions de travail dans leur entreprise, sans que ce soit négatif, mais que peu d’entre eux utilisent les réseaux sociaux pour le faire avec 11% des sondés. Ce chiffre passe cependant à 17% pour les 18-24 ans[33]. Cette utilisation des réseaux sociaux comme moyen d’expression des conditions de travail conduit à s’interroger sur la notion d’amis et par conséquent à la visibilité accordée aux propos diffusés. Le fait pour un salarié de critiquer un employeur sur Facebook entre « ami » peut-il être retenu contre lui et justifier un licenciement ?

 La notion d’ami est essentielle pour définir si une publication est privée ou publique. Si l’on s’intéresse à la définition d’ami, « être lié d’amitié avec quelqu’un »[34], cela sous-entend l’idée d’un lien entre les personnes, d’une relation forte entre ces personnes, d’une histoire commune. L’ami de Facebook semble renvoyer à une toute autre réalité, selon Jean-Emmanuel RAY, il faut l’entendre comme de simple « contact »[35]. L’ami de « Facebook » peut être un membre de la famille, des amis proches mais également des connaissances, des connaissances de connaissances pour lesquelles aucune relation réelle n’existe. Il s’agit en réalité d’un tiers, d’un « étranger », d’une connaissance professionnelle. Il est par conséquent évident que Facebook n’est pas un espace de vie privée mais un lieu public ou se rencontre un ensemble de personnes ayant des liens plus moins existant. C’est l’accès que l’on accorde à ses amis qui permettent de définir si une conversation est publique ou privée et si cette conversation peut être utilisée contre son auteur.

 Une notion d’ami vague, une intrusion de la vie professionnelle dans la sphère privée et l’incapacité de définir le périmètre de visibilité d’une conversation sont autant de problématiques ayant nécessité l’intervention des juges. Jean-Emmanuel RAY résume la problématique dans une interview accordée à Libération : « Facebook ne ressemble à rien d'existant. Jusqu'ici, la situation était simple : un espace public est accessible à tout le monde. Donc, sur Facebook, un profil ouvert aux amis d'amis, c'est moins privé tout en le restant a priori. Mais avec la chasse aux amis sur Facebook – les « amis » ne sont que de vagues connaissances- et l'aspect privé devient discutable »[36].         

 Cette délicate question se retrouve dans le contentieux relatif aux propos tenus sur Facebook. Des divergences jurisprudentielles sont apparues. Il faudra attendre une réponse de la Cour de cassation pour connaître une ligne claire sur cette question.

Dans un premier temps la cour d’appel de Reims le 9 juin 2010, confirme le jugement du Conseil de Prud’hommes (CPH) de Troyes du 16 décembre 2009 et estime que Facebook est un espace public[37]. En l’espèce il s’agissait d’un journaliste qui avait été sanctionné pour avoir écrit, sur le « mur » Facebook d’une amie des propos considérés comme injurieux et diffamatoires. Elle rappelle que « nul ne peut ignorer que Facebook, qui est un réseau accessible par connexion internet, ne garantit pas toujours la confidentialité nécessaire (...). Que le mur s’apparente à un forum de discussion qui peut être limité à certaines personnes ou non (...) » ; «(...) en mettant un message sur le mur d’une autre personne dénommée «ami», il s’expose à ce que cette personne ait des centaines d’“amis” ou n’ait pas bloqué les accès à son profil et que tout individu inscrit sur Facebook puisse accéder librement à ces informations ».

 Selon la cour d’appel, le fait de mettre un message sur le « mur » d’une autre personne revient à exposer la publication à l’ensemble des amis de cette personne. Cette démarche rend la publication ouverte puisqu’il n’est pas possible de contrôler le nombre de personnes qui y auront accès. De plus la cour d’appel de Reims précise par ailleurs que si le salarié « voulait envoyer un message privé non-accessible à d’autres personnes que le destinataire ou quelques amis choisis, il pouvait utiliser la boîte mail individuelle de Facebook ». Les juges précisent ici qu’il est possible d’échapper aux sanctions disciplinaires si la publication reste dans un cadre purement privé à travers l’utilisation de mails privés ou de conversations privées.

 Le Conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt[38] a validé le licenciement pour faute grave d’une salariée, pour avoir « porté atteinte à l’autorité et à la réputation de sa supérieure hiérarchique ». La salariée avait choisie dans le paramétrage de son compte, la possibilité de partager sa page avec « les amis de leurs amis ». Ce choix rend l’ensemble de ces publications publiques, puisqu’elle n’avait pas la capacité de contrôler l’accès au contenu de ses publications. Le Conseil considère à juste titre que « ce mode d’accès à Facebook dépasse la sphère privée ». La CNIL, le 10 janvier 2011 est venue confirmer cette position en affirmant que « les propos tenus ont perdu leur caractère privé du fait qu’ils étaient accessibles à des personnes non concernées par la discussion ». La CNIL reprend donc l’idée d’un nécessaire paramétrage du compte pour définir le caractère privé d’une conversation en refusant la consultation par « les amis des amis ».

La Cour d'appel de Besançon, le 15 novembre 2011[39], confirme le jugement du Conseil de prud’hommes de Montbéliard du 7 octobre 2010 et condamne une salariée pour avoir « tenu des propos diffamants, insultants et offensants ». Dans cette affaire, la salariée se défend en arguant que la publication était écrite sur le mur d’un salarié, et que par conséquent l’employeur ne pouvait s’en prévaloir. La cour d’appel fait observer que Facebook « doit être nécessairement considéré, au regard de sa finalité et de son organisation, comme un espace public ». Une fois encore, il appartenait à la salariée d’utiliser la fonction appropriée si elle souhaiter avoir une discussion privée.

 Enfin la Chambre correctionnelle du Tribunal de Grande Instance de Paris, en date du 17 janvier 2012 vient durcir la jurisprudence en condamnant un représentant du personnel et délégué syndical pour injure publique. En l’espèce une militante syndicale poste sur le mur Facebook de son syndicat : « journée de merde, temps de merde, boulot de merde, chefs de merde... ». Pour se défendre la militante invoque la liberté d’expression syndicale. Cependant le tribunal explique que « les expressions incriminées excèdent les limites de la critique admissible, y compris lorsqu’elle s’exerce dans un cadre syndical, par l’utilisation de mots ou de termes insultants ou injurieux voir vexatoires démontrant en eux-mêmes l’intention de nuire et portant clairement atteinte à la dignité des personnes ». Le TGI déclare donc la militante coupable d’injure publique puisqu’en publiant sur le mur, elle s’est inscrit dans une démarche de publication justifiant l’incrimination. En effet, la militante ne pouvait pas contrôler l’accès à la page rendue visible pour tous. Ce contentieux montre l’importance du paramétrage du compte afin de conserver le caractère privé d’une publication

 Toutefois il faut noter que certains arrêts sont beaucoup plus frileux à considérer le « mur » comme étant public. Dans une affaire du 15 novembre 2011 la cour d’appel de Rouen a été amené à se prononcer sur le sort de deux salariées qui échangeaient avec quatre autres collègues des propos relatifs à leur entreprise et leur hiérarchie. Elles sont licenciées pour faute grave, pour propos injurieux et calomnieux, tenus ou soutenus sur le site Facebook, vis-à-vis de la société, et de ses supérieurs hiérarchiques. Lors de cette discussion, elles invitent leurs collègues à « cracher [leur] haine sur certaine pouf de Leclerc et contre Leclerc tout court ». Une salariée indique : « marre de cette ambiance de merde, des pétasses qui parlent sur notre gueule (...) fait chier, Leclerc ». L’autre s’exprime dans les termes suivants : « des réflexions de bâtards (...), des papias d’enfants de certaines grosses connes, (...) marre de cette semi responsable qui se permet des vannes de merde (...) sale morue ».

 La cour d’appel de Rouen juge que les licenciements sont dépourvus de cause réelle et sérieuse, leurs propos ayant un « caractère de correspondance privée ». Elle ajoute qu’ici « aucun élément ne permet de dire » que le compte Facebook était paramétré de façon à autoriser le partage avec les « amis » de ses « amis » ou tout autre forme de partage à des personnes indéterminées, « de nature à faire perdre aux échanges litigieux leur caractère de correspondance privée ».

 La cour d’appel estime « qu’il ne peut être affirmé de manière absolue que la jurisprudence actuelle nie à Facebook le caractère d’espace privé, alors que ce réseau peut constituer soit un espace privé, soit un espace public, en fonction des paramétrages effectués par son utilisateur ». La Cour ajoute que les propos ont été tenus « en dehors du temps et du lieu de travail, et en usant de moyens techniques dont il n’est pas allégué qu’ils auraient été mis à leur disposition par l’employeur ». Elle semble considérer que Facebook doit être présumé comme étant un espace privé, sauf à justifier du contraire. Dès lors que le compte est paramétré de façon à autoriser l’accès au « mur » que par les « amis », Facebook est un espace privé.

Cette décision remet en cause la qualification d’espace public de Facebook et rappelle que c’est à l’utilisateur d’en définir la visibilité grâce au paramétrage disponible sur le site. C’est l’utilisateur qui définit la frontière entre le privé et le public. La nature du « mur » pose jusqu’à aujourd’hui le plus grand nombre de problèmes et nécessitera l’intervention des juges du Quai de l’horloge. Au vu de la tendance qu’ils ont à vouloir concilier la protection des intérêts de l’entreprise, il est certain que le paramétrage du compte aura une grande importance. La logique voudrait que la Cour se prononce sur le caractère public du « mur » à défaut d’un paramétrage très restreint. Les messages publiés sur le « mur » sont ceux qui font aujourd’hui l’objet du contentieux le plus fourni. Toutefois, les messages privés, de par leur nouvelle forme d’utilisation, peuvent également être sources de problèmes juridiques.

Comme il l’a été précédemment mentionné, si l’utilisation des ordinateurs par les entreprises s’est développée dans certaines grandes entreprises à la fin des années 70, il n’existait pas alors de possibilité d’interconnexion. Leur utilisation ne soulevait que peu de questions juridiques. Les années 1990-2000 ont été marquées par le développement fulugrant d’Internet dans les entreprises mais également chez les salariés. Internet marque l’entrée fracassante de la vie professionnelle à la maison. Les frontières entre les deux mondes se sont radicalement dissipées et les travailleurs ont de plus en plus de mal à se détacher de leur travail. Les deux milieux sont aujourd’hui interconnectés. L’arrivée d’Internet marque une augmentation du contentieux relatif à l’utilisation abusif d’internet sur le lieu de travail. Si le salarié en fait un usage non conforme au cadre légal ou réglementaire à l’accomplissement de sa mission, cela constituerait un manquement à l’exécution de son contrat de travail. Par conséquent, sera fautive l’utilisation « d’une connexion à des fin non professionnelles pour une durée totale de 41 heures durant un seul mois »[40].

 La distinction espace privé-public s’est cristallisée avec la démocratisation de l’utilisation des réseaux sociaux par les entreprises et les salariés. Les réseaux sociaux sont utilisés à des fins professionnelles, afin de promouvoir l’entreprise et créer un esprit d’entreprise, avec la création de groupes de discussion autour de l’entreprise.

 Si le contentieux le plus fourni concerne le « mur », un autre problème est susceptible de se poser : celui des messages privés envoyés sur Facebook. On a vu qu’un employeur peut lire les messages envoyés depuis le poste de travail, si ceux-ci ne sont pas identifiés comme étant personnels. Or, sur Facebook, il n’est pas possible d’identifier une conversation : il n’est pas possible de donner un « objet » au message… Qu’en est-il si un salarié « surfe » sur Facebook, qu’il omet de se déconnecter et que son employeur tombe sur le compte du salarié alors que celui-ci s’est absenté de son poste de travail ? Peut-il lire les messages privés envoyés via Facebook en considérant qu’il s’agit de messages envoyés par le biais du matériel de l’entreprise ? S’il s’agit d’un compte privé, la logique voudrait que l’employeur ne puisse prendre connaissance des messages de façon licite. Juridiquement, la chose est moins certaine, étant donné qu’il s’agit du matériel de l’entreprise. S’il s’agit d’un Facebook d’entreprise, il n’est pas exclu que le salarié envoie également des messages privés. Dans ce cas, l’employeur semble avoir toute la légitimité pour consulter les messages, d’autant qu’il peut accéder aux messages non identifiés comme personnels. Le problème qui se pose dans cette hypothèse est que Facebook ne permet pas à ce jour de classer les messages reçus comme personnel. Les messages sont stockés de façon indifférenciée. De plus, la notification d’un message ne permet nullement d’identifier la provenance du message avant de l’avoir ouvert. Autant de questions qui se posent et qui nécessitent des réglementations d’entreprise par le biais de charte d’utilisation, du règlement intérieur, et autres normes internes à l’entreprise. Il reviendra alors au juge saisi d’un litige d’apprécier les restrictions et les sanctions érigées par l’employeur.

 

II. De nouveaux espaces de liberté à l’épreuve du pouvoir de direction et de sanction de l’employeur

 

Les réseaux sociaux ont donc donné une nouvelle dimension à la liberté d’expression. Cependant cette dernière doit « cohabiter » avec un autre grand principe qu’est le pouvoir de surveillance de l’employeur. En effet, l’employeur peut en user (A) afin de contrôler et sanctionner les abus (B).

 

  1. A.  La surveillance encadrée des réseaux sociaux

 

Aujourd’hui, une entreprise sur trois surveille ses employés sur les réseaux sociaux selon une étude américaine[41] et en 2014, ce seront près de 30% des entreprises qui bloqueront les accès aux réseaux sociaux à leurs salariés. Le nombre d’entreprises surveillant ses employés sur les réseaux sociaux devrait se multiplier par six d’ici 2015.

Afin de légitimer cette surveillance, les employeurs invoquent le plus souvent des questions de sécurité. Ils peuvent ainsi s’assurer qu’aucune information « sensible » n’a été diffusée. De même, ils vérifient que leurs salariés ne consacrent pas outre mesure leur temps de travail à vaquer à leurs préoccupations personnelles.

A l’heure actuelle, cette surveillance des agissements des employés n’est pas interdite. Il est établi que tout employeur dispose d’un pouvoir de surveillance sur ses salariés, cela en vertu du lien de subordination qui caractérise toute relation de travail. Ce dernier a le droit de contrôler l’activité de ses salariés pendant le temps de travail à condition de respecter trois conditions. De plus l’article L.1121-1 du Code du travail permet à l’employeur de limiter l’exercice de la liberté d’expression si la mesure est justifiée par la nature des tâches accomplis et proportionnée au but recherché.

 La première est de justifier d’un intérêt légitime pour l’entreprise. Ensuite, l’employeur doit consulter le comité d’entreprise sur le projet de mise en œuvre d’un dispositif de contrôle des salariés et enfin informer les salariés des méthodes de la surveillance avant leur mise en place. Dans le cas où les outils de surveillance sont mis en place tels qu’une pointeuse ou encore un système de vidéosurveillance, l’employeur doit faire soit une déclaration soit une demande d’autorisation à la Commission nationale informatique et libertés (CNIL). Cette dernière est une institution indépendante « chargée de veiller à ce que l’informatique soit au service du citoyen et qu’elle ne porte atteinte ni à l’identité humaine, ni aux droit de l’homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques »[42]. Les formulaires de déclaration normale ou de demande d’autorisation se différencient selon les dispositifs que l’employeur souhaite mettre en place. Ces formulaires sont disponibles sur le site internet de la CNIL.

Ainsi, la surveillance du salarié par son employeur peut se manifester par différentes formes et l’introduction des nouvelles technologies dans l’entreprise ouvre une nouvelle voie à la surveillance. Cependant, ces nouvelles méthodes de surveillance ne s’utilisent pas sans limite Ce principe est repris sous l’article L.1222-4 du Code du travail qui énonce qu’ « aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collecté par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance ».

 La surveillance via les réseaux sociaux peut aussi se justifier d’un point de vue plus « travailliste ». En effet, des études se font sur l’usage des réseaux sociaux pendant le temps de travail[43]. Certaines d’entre elles montrent que leur utilisation au lieu et temps de travail peut être bénéfique comme être nuisible à l’entreprise. Dans son étude, le cabinet américain Nowsourcing montre que les interruptions des travailleurs pour se connecter sur les réseaux sociaux a engendré une perte de 650 milliards de dollars en une seule année.

 Dans un premier temps, le surf sur les réseaux sociaux peut constituer une pause dans la journée du salarié. Ainsi au lieu de sortir fumer une cigarette, le salarié reste à son poste et se donner quelques minutes pour surfer sur internet[44]. Dans un second temps, le temps passé sur les réseaux sociaux peut engendrer une baisse de productivité de la part du travailleur.

En effet, il est facilement imaginable que le salarié passe quelques heures sur les réseaux sociaux au lieu de travailler. Cela peut se traduire par une importante perte pour les entreprises. Dans une étude américaine[45] il est démontré que la moitié des travailleurs américains se connecte aux réseaux sociaux sur leur lieu de travail. Ce chiffre se traduit par une baisse de productivité d’une moyenne de 1,5%. Pour la fédération indienne des chambres de commerce et d'industrie la fréquentation des réseaux sociaux sur les lieux de travail détourne 12,5 % de la productivité des entreprises[46]. Cette baisse de productivité est d’autant plus inquiétante pour les employeurs que le réseau social Facebook propose à ses membres des jeux en ligne gratuits. Ces jeux ne nécessitent aucune installation sur l’ordinateur et sont facilement accessibles.

La surveillance par le chef d’entreprise peut se rencontrer à n’importe quel moment de la relation de travail et même avant que celle-ci ait commencé. Comme le prévoit le Code du travail aux articles L.1221-8, les candidats doivent avoir été mis au courant de « la mise en œuvre des méthodes et techniques d’aide au recrutement utilisés à son égard … » et L.1221-9 qui prévoit « [qu’] aucune information concernant personnellement un salarié ou un candidat à un emploi ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à la connaissance du salarié ou du candidat à l’emploi ». 

Il est devenu courant que les employeurs ou les chargés de recrutement cherchent sur les réseaux sociaux et observent les profils, les photos, les vidéos ou encore les commentaires des candidats au poste. D’ailleurs, de nouvelles entreprises voient le jour et leur activité principale est de se mettre au service des entreprises afin de collecter des informations sur les candidats via les réseaux sociaux. Rien n’interdit ce procédé à condition que les profils des candidats soient publics. A contrario, la recherche d’informations sur des candidats dont les profils sont privés et ce, par des moyens détournés, est illégale.

 La surveillance peut également s’opérer au cours de la relation de travail. De nombreux arrêts rappellent que dans le cadre du lien de subordination, le chef d’entreprise peut surveiller l’activité de ses salariés durant le temps de travail[47]. Ainsi, il est possible pour l’employeur de surveiller l’activité de ses salariés via les ordinateurs. Ces outils de travail sont des biens appartenant à l’entreprise et mis à la disposition des salariés. L’employeur peut en vérifier certains contenus et les connexions qui sont présumées avoir un caractère professionnel. S’agissant des contenus, et notamment des mails ou des fichiers, la question a été réglée depuis un arrêt rendu par la Chambre sociale de la Cour de cassation en date du 2 octobre 2001[48]. Dans cet arrêt, la Cour impose à tout employeur qui souhaite vérifier le contenu d’un ordinateur utilisé par un salarié que ce dernier soit mis au courant préalablement au contrôle et présent lors de celui-ci mais également qu’il a droit au respect de sa vie privée sur son lieu de travail. Cependant, cette jurisprudence a été manifestement mise à mal dans une série d’arrêts récents.

 En effet, de nouveaux arrêts permettent à l’employeur, dans certaines circonstances que sont le risque ou un évènement particulier, d’ouvrir les messages de son salarié même ceux identifiés comme personnels[49]. Pour preuve l’arrêt Klajer en date du 17 mai 2005. Dans cette espèce, la Cour de cassation admet que la vérification du contenu de l’ordinateur mis à disposition peut être faite en présence du salarié ou si celui-ci a été dûment appelé, dans l’hypothèse d’un risque ou d’un évènement particulier.

Dans la même optique, la Chambre sociale a rendu un arrêt le 10 mai 2012 dans lequel elle permet de comprendre qu’est un fichier identifié comme personnel. Elle affirme ainsi « les fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels. Et la seule dénomination "mes documents" donnée à un fichier ne lui conférant pas un caractère personnel, la cour d'appel qui a jugé qu'il ne pouvait être ouvert en dehors de la présence du salarié a violé les articles 9 du code civil et 9 du code de procédure civile »[50]. Elle reprend ainsi le principe qu’elle avait posé dans un arrêt en date du 18 octobre 2006[51].

L’employeur a également le droit de contrôler les historiques de connexions. A ainsi pu être licencié pour faute grave un salarié qui avait passé près de quarante-et-une heures sur des sites sans lien avec son activité professionnelle et ce, en l’espace d’un seul mois[52]. De plus ce contrôle par l’employeur peut désormais s’effectuer alors même que le salarié n’est pas présent[53], dans la mesure où les juges estiment que « les connexions établies par un salarié sur des sites internet pendant son temps de travail grâce à l’outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l’exécution de son travail sont présumées avoir un caractère professionnel de sorte que l’employeur peut les rechercher aux fins de les identifier, hors de sa présence ». 

L’arrêt rendu le 9 février 2010 par la Chambre sociale de la Cour de cassation apporte une précision s’agissant des sites internet contenus dans le dossier « Favoris ». En l’espèce le salarié a été licencié pour faute grave suite à l’utilisation de son ordinateur professionnel pour visiter des sites internet à caractère pornographique. Ces derniers étaient répertoriés dans ses favoris. Ainsi, le salarié doit également faire attention aux sites internet qu’il consulte. Pour que cela relève de la vie privée, il faut qu’il soit identifié comme personnels[54].

Pour qu’elle soit licite, la surveillance des salariés par les réseaux doit remplir trois conditions essentielles[55]. Tout d’abord, la surveillance doit être proportionnée au but recherché. Cette première condition est celle qui pose le plus de problème. Tout comme la liberté d’expression, le but recherché peut se retrouver partout comme par exemple la sécurité des informations de l’entreprise, la volonté de prévenir d’éventuels insultes suite à une décision disciplinaire etc. Ensuite, les salariés doivent avoir être mis en courant de celle-ci et enfin, le comité d’entreprise doit avoir donné son avis sur cette question.

De plus, la surveillance par l’employeur de ses salariés via les réseaux sociaux n’est pas sans limite. Il doit veiller à respecter l’article 9 du Code civil qui énonce le droit au respect de la vie privée. Pour pouvoir exercer son pouvoir de surveillance l’employeur ne doit donc pas porter atteinte à la vie privée et aux libertés individuelles des salariés. Le chef d’entreprise ne peut donc pas utiliser des photos ou des commentaires publiés sur les réseaux sociaux, mais relevant de la vie privée pour sanctionner le salarié. Cependant une exception est à soulever. L’employeur est en droit de sanctionner le salarié dès lors que celui tient des propos qui causent un trouble manifeste à l’entreprise. Depuis quelques années, les juridictions sont amenées à traiter de ces problèmes liés à l’utilisation des réseaux sociaux pour exprimer un mécontentement ou encore injurier ses supérieurs hiérarchiques.

Cependant, il faut faire attention quant à la surveillance des publications et des commentaires sur les profils des salariés même postés depuis son ordinateur personnel. En effet, comme on a pu le voir la frontière entre la vie privée et la vie professionnelle est mise à mal en raison des réseaux sociaux. Comment dire qu’un commentaire ou une photo publiée sur un profil est privé quand des milliers de personnes peuvent y avoir accès ?

Afin d’éviter des contentieux qui sont désormais de plus en plus médiatisés, les entreprises ont tendance à insérer des clauses dans les contrats de travail prévoyant la surveillance des salariés via les réseaux sociaux mais également l’interdiction pour eux de publier des commentaires sur l’entreprise ou même ses clients. 

Par ailleurs, le chef d’entreprise peut également mettre en place une charte informatique qui aurait pour but de réguler l’usage de l’internet[56]. Cette charte est annexé au règlement intérieur et permet par exemple l’encadrement de l’usage des moyens tels que les ordinateurs, les téléphones portables ou encore l’internet mis à dispositions des salariés. Elle peut également interdire l’accès aux réseaux sociaux ou du moins en limiter l’accès. Elle doit également sensibiliser les salariés à leurs responsabilités notamment lorsqu’ils publient des commentaires ou des photos et que ces données sont à la vue de tous. Cette charte peut faire l’objet d’une déclaration à la CNIL.

Cette dernière rappelle, le 10 septembre 2012, qu’il est important que les réseaux sociaux mettent en place les mesures essentielles afin de protéger les données de leurs utilisateurs[57]. Elle reprend ainsi les recommandations émises par les 29 CNIL européennes (G29), le 12 juin 2009. Ainsi, afin d’user au mieux des réseaux sociaux, le G29 préconise certaines pratiques comme par exemple : la définition des paramètres par défaut limitant la diffusion des données, la suppression des comptes restés inactifs pendant une longue période, la possibilité ouverte aux personnes non-membres des réseaux sociaux de supprimer des données les concernant ou encore proposer aux internautes d’utiliser un pseudonyme plutôt que leur réelle identité. La CNIL est particulièrement attentive à cette problématique des réseaux sociaux et de la surveillance des employeurs. Elle prodigue d’ailleurs de nombreux conseils sur son site internet. Le dernier date du 12 décembre 2012 et explique comment partager des photos notamment sur les réseaux sociaux sans se surexposer[58].

Au-delà même du pouvoir de surveillance, l’employeur peut par « inadvertance » tomber sur un profil ou encore recevoir des photos ou impressions des contenus partagés sur les réseaux sociaux et rapportés par des collègues. De ce fait, un salarié doit faire attention à ce qu’il publie sur les réseaux sociaux afin qu’aucun abus ne soit commis de sa part et que celui-ci ne soit rapporté à la direction. En effet, cette dernière peut prendre des sanctions allant jusqu’au licenciement si l’abus est caractérisé.

  

  1. B.   Les réseaux sociaux comme cause possible de rupture du contrat de travail

Il est acquis que l’employeur puisse avoir un contrôle sur les communications professionnelles ou publiques que peut émettre un salarié et ce, dans le respect de la liberté d’expression du salarié et de son droit au respect de la vie privée.

L’on sait également que l’employeur ne peut porter atteinte au secret des correspondances privées du salarié[59]. Toutefois, des brèches à l’inviolabilité de cette liberté fondamentale sont rapidement apparues notamment du fait de l’usage, par la Cour de cassation de la présomption de professionnalité des fichiers non identifiés comme étant personnels[60]. Par suite, la Cour de cassation jugeait, par trois arrêts du 2 février 2011 que des courriers électroniques « en rapport avec l’activité professionnelle », ne revêtaient pas un caractère privé : « le courriel litigieux était en rapport avec l’activité professionnelle du salarié, ce dont il ressortait qu’il ne revêtait pas un caractère privé et pouvait être retenu au soutien d’une procédure disciplinaire »[61]. Il s’agit effectivement de concilier les intérêts légitimes de l’employeur et notamment la protection de l’image de son entreprise avec la protection des libertés fondamentales du salarié.

L’apparition et le développement des réseaux sociaux est source de nouvelles problématiques inhérentes à leur qualification d’outils hybrides, bouleversant les moyens d’expression des salariés de par leur importante audience. A ce titre, leur nature juridique est en cours de construction. En effet, pour reprendre l’exemple de Facebook, on dénote, à travers l’étude des différentes décisions rendues par les juridictions du fond que cet outil peut être regardé soit comme un espace public soit comme un espace privé, en fonction des faits d’espèce soumis à leur analyse (cf. supra). Une unification par la Cour de cassation serait, à ce titre, la bienvenue.

La question qui se pose alors est celle de savoir si un employeur peut valablement sanctionner un salarié pour des propos que ce dernier aurait tenu sur Facebook. Comme sus exposé, il semble que les juridictions du fond s’attacheraient, en premier lieu, à déterminer si Facebook devrait être considéré comme un espace de vie publique, auquel cas l’employeur pourrait sanctionner un salarié, sous réserve que ce dernier ait violé son obligation de loyauté en caractérisant un abus à sa liberté d’expression. En revanche, si le compte Facebook est apparenté à un espace privé, alors le salarié serait protégé par le secret de ses correspondances et de sa vie privée tel que le serait par exemple son domicile, un fichier identifié comme personnel ou même un fichier identifiable comme personnel.[62

Cette solution n’est pas nouvelle. Elle a été appliquée à plusieurs reprises dans des cas de limites à la liberté d'expression individuelle ou collective du salarié, notamment lorsque le salarié exerce une liberté publique dans son espace privé traditionnel et relate des informations sur son entreprise à la « Une » d'un journal à grand tirage ou par voie de sa boîte mail. Il s’ensuit très logiquement que cette articulation est aujourd'hui appliquée au réseau social Facebook, comme elle le sera sans doute pour tous les autres réseaux sociaux.

Comme vu précédemment, la jurisprudence est assez fluctuante, quant à savoir ce que recouvrent l’espace privé et l’espace public. Au surplus, cette distinction du caractère privé ou public de la communication devrait se retrouver également au niveau du principe de loyauté dans l’administration de la preuve qui interdit à l’employeur notamment d’avoir recours à tout stratagème ou procédés frauduleux pour obtenir un moyen de preuve. En effet, peu important le contenu de la publication ou du propos contenu, il est impératif que l’employeur l’ait obtenu de manière loyale, du moins dans le cadre d’une procédure civile. 

Reste encore à déterminer, eu égard à la nouveauté de ce type d’outils, ce que pourra être qualifié de loyal dans la collecte d’une page internet comme mode de preuve. D’autant qu’il importe de préciser, comme l’a rappelé la CA de Rouen[63], que la charge de la preuve de la faute grave pèse sur l’employeur. En effet, La Cour a pu souligner tout d'abord que les échanges litigieux s’étaient déroulés « en dehors du temps et du lieu de travail, et en usant de moyens techniques dont il n'est pas allégué qu'ils auraient été mis à leur disposition par l'employeur ». Au surplus, la Cour estime que l’employeur n'apportait pas de preuve du fait que les échanges entre les employées s’étaient déroulés dans un espace public du site, accessible aux autres utilisateurs et faisant perdre ainsi aux correspondances leur caractère privé. Ainsi, des commentaires dont la diffusion serait limitée à « ses amis » relèveraient de correspondances privées empêchant l’employeur de s’en prévaloir. A contrario, l’accessibilité de ces commentaires « aux amis de ses amis » voire à « tout public » permettrait à l’employeur de sanctionner le salarié au titre d’un abus dans sa liberté d’expression. Très concrètement, les hypothèses dans lesquelles un employeur pourrait obtenir une information diffusée via le réseau social Facebook par un de ses salariés sont soit que l’employeur fasse partie des amis de ce même salarié, soit que le profil du salarié soit « ouvert », soit qu’un tiers lui communique une capture d’écran, soit par le biais de la réalisation de manœuvres ou de stratagèmes.

De plus la Cour d’appel de Paris dans un arrêt du 2 juillet 2010 énonce que la preuve consistant en une capture d'écran, ou d’un élément issu d'internet doit faire l’objet d’un constat par un huissier ou par un organisme agréé. Ces derniers ont alors la charge d’établir le bienfondé de la preuve issue d'internet. Dans le cas contraire la preuve ne sera pas recevable[64]

Or, en principe, il est acquis que les salariés doivent être informés de l’existence des moyens de la surveillance dont ils font l’objet. Cette exigence d’information se fonde sur l’article L.1222-4 du Code du travail qui dispose : « Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance. » Finalement, en se livrant à une interprétation stricte de cet article, l’on pourrait considérer que l’employeur soit dans l’obligation d’informer préalablement ses salariés que lui-même ou un tiers puisse prendre une capture d’écran de sa page personnelle Facebook et l’utiliser dans le cadre d’une procédure de licenciement à son encontre. S’il semble que cela soit difficilement envisageable lorsque les propos ou la communication litigieuse revêt un caractère public, cela serait tout à fait possible pour ce qui est de ce qui relève de l’espace privé des salariés sur ces réseaux. 

Toutefois, il semble qu’une telle argumentation des parties n’ait pas encore réellement été développée. En tout état de cause, il apparait que le point commun des décisions relatives à des licenciements en raison de propos tenus sur Facebook réside dans l’argument des parties, qui prônent une violation de leur vie privée. Or, au vu des diverses positions adoptées par la jurisprudence il apparait que le mode d’accès à Facebook dépasse la sphère privée, notamment au vu de la large audience qui caractérise cet outil.

Actuellement, et en attendant une clarification par la Cour de cassation, c’est donc le critère de paramétrage du compte qui est pris en compte, le seul moyen de considérer cet espace comme un espace privé étant de limiter l’accès de son compte à un cercle fermé d’amis. Toutefois, il ne saurait être plus conseillé au salarié d’être extrêmement vigilant dans la mesure où rien n’est actuellement figé et les jurisprudences sont assez divergentes ce dont il résulte une absence totale de sécurité juridique. D’autant que le terme « amis » est détourné de sa définition primaire, un salarié pouvant compter des centaines voire des milliers d’ « amis », un paramétrage du compte réservé aux seuls amis pourrait très bien conférer à la page Facebook un caractère public eu égard au nombre considérable de personnes ayant accès à ladite page. Par exemple, la cour d’appel de Paris a estimé que « la diffusion de propos diffamatoires sur le réseau internet, à destination d’un nombre indéterminé de personnes nullement liées à une communauté d’intérêt constituait un acte de publicité »[65]. Les destinataires doivent alors constituer un groupement suffisamment fermé pour ne pas être considérés comme des tiers à l’égard de l’auteur.

Au-delà, et partant du postulat que l’employeur pouvait valablement avoir accès aux propos litigieux, ces derniers devront caractériser un abus, par le salarié, de sa liberté d’expression, ce qui conférera à ce comportement, une violation, par le salarié, de son obligation de loyauté. En effet, le contrat de travail, comme toute convention doit être exécuté de bonne foi. En outre, la loyauté implique de ne pas tenir des propos injurieux. C’est ce que rappellent notamment les juges de la cour d’appel de Reims quand ils posent que : « son employeur qui soutient qu’il a injurié un membre de la direction, ce qui constituerait un abus de la liberté d’expression au motif que les salariés cadres ont une obligation de loyauté et de réserve »[66]

En revanche, il est important de noter que répondre de manière grossière et insultante à son employeur ne constitue pas nécessairement une faute grave justifiant le licenciement comme l’a jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 29 février 2012[67]. Très concrètement, son devoir de loyauté impose au salarié de ne pas tenir de propos injurieux ou diffamatoires, de ne pas dénigrer son employeur, de ne pas porter d’accusations mensongères et de ne pas tenir de propos excessifs. En cas de non-respect de cette obligation de loyauté, le salarié pourra se voir licencier pour un motif disciplinaire.

En tout état de cause, la délimitation de la liberté d’expression sur les réseaux sociaux ainsi que le caractère public ou privé des informations contenus sur ces réseaux sont très incertains et difficiles à résoudre eu égard à l’absence totale de décisions de la Cour de Cassation. Il s’ensuit que l’on ne peut qu’inciter les salariés à faire preuve d’une grande prudence dès lors qu’il s’agit de publier des informations sur son entreprise, ses supérieurs hiérarchiques et ses conditions de travail sur ces réseaux sociaux au sein desquels, les salariés n’ont manifestement pas que des « amis ».

De plus, s’il est patent que la qualification d’espace privé confère au salarié un premier bouclier de protection contre l’utilisation par l’employeur de son pouvoir disciplinaire, cette protection n’est pas absolue. On a d’ailleurs pu le constater notamment en matière de courrier personnel ou de boite mail. Pour illustration, en vue de faire obstacle à la rupture de son contrat de travail, un salarié avait cru suffisant d'invoquer que le licenciement envisagé par l'employeur était attentatoire à une liberté publique, en particulier à sa sphère privée. La réponse de la Cour d'appel fut claire : « il ne s'agit pas d'une atteinte à la sphère privée au regard de tous les individus, amis ou non, qui peuvent voir le profil d'une personne et accéder à son mur et aux messages qu'elle écrit ou qui lui sont adressés ; qu'au surplus, la violation d'une correspondance privée suppose qu'un échange écrit ne puisse être lu par une personne à laquelle il n'est pas destiné, sans que soient utilisés des moyens déloyaux »[68]

En effet, on sait que le salarié qui envoie un courriel en dehors de son temps de travail se trouve bien dans son espace de vie privée au même titre que lorsqu’il communique via un réseau social. Pour autant, les juges ont déjà pu valider des licenciements pour ces motifs manifestement tirés de la vie privée du salarié dans la mesure où cela caractérisait une violation par le salarié de son obligation de loyauté. On peut donc valablement se demander si le vrai débat se situe bien sur la distinction entre espace privé et espace public et non sur la violation par le salarié de ses obligations contractuelles, la vie privée ne pouvant valablement s’ériger en droit de nuire aux intérêts de l’entreprise. 

En marge de ce qui précède, il est désormais de jurisprudence constante qu’un salarié peut se faire sanctionner pour des faits relevant de sa vie personnelle dès lors que ces derniers ont causé un trouble objectif au bon fonctionnement de l’entreprise. En effet, après quelques ajustements la règle a définitivement été posée dans l’arrêt Painsecq : « il peut être procédé à un licenciement dont la cause objective est fondée sur le comportement du salarié qui, compte tenu de la nature de ses fonctions et de la finalité propre de l'entreprise, a créé un trouble caractérisé au sein de l'entreprise »[69].En effet, l'arrêt Painsecq27 a posé le principe selon lequel certains faits de la vie personnelle pouvaient entrainer un licenciement non-disciplinaire dès lors qu'ils provoquaient, compte tenu des fonctions du salarié et de la finalité de l'entreprise, un trouble caractérisé au sein de celle-ci. On ne reproche donc pas au salarié une mauvaise exécution du contrat de travail mais la violation, par un acte de sa vie personnelle, de l'image de l'entreprise.

Le trouble causé à l'entreprise est apprécié in concreto. Les juges prennent alors en compte les fonctions du salarié et la nature de l'entreprise mais aussi par exemple sa notoriété ou sa finalité. L'employeur n'a d’ailleurs pas à établir un préjudice subi, le trouble relève plus de la menace que du dommage. Le trouble fait donc partie des causes réelles et sérieuses de licenciement étant précisé que « le trouble est une situation de désordre, d'indignation dont la cause semble sans incidence ».[70] Le trouble doit donc présenter un risque de perte de clientèle ou de démissions massives par exemple. On peut se réjouir que la Cour de Cassation exige une certaine intensité dans le trouble, dans la mesure où celui-ci est souvent caractérisé par une réaction vive des tiers, ce qui peut s'avérer dangereux sur le terrain des droits et libertés de la personne. A cet égard, le simple désagrément ou la désapprobation modérée constituent des motifs de licenciement insuffisants. De plus, comme dit précédemment, le licenciement n'est pas disciplinaire. Cependant, quelques arrêts de la Cour de Cassation ont été à l'origine d'inquiétudes[71] en retenant la faute dans le cadre d'un licenciement pour trouble caractérisé. Heureusement, la Cour réaffirme le caractère non-disciplinaire de ce type de licenciement en 2007[72]

A ce titre, on peut légitimement penser que cette articulation s’appliquera également aux réseaux sociaux. Et ce dans la mesure où il sera démontré qu’une publication, ou des propos publics sur un réseau social, en dehors de toute violation de l’obligation de loyauté, puissent justifier un licenciement pour cause réelle et sérieuse dès lors que ces propos ou publications, auront créé un trouble caractérisé au sein de l’entreprise.

 

Finalement, le seul moyen pour le salarié de se prémunir contre toute mesure de licenciement est, d’une part, de rester extrêmement vigilant quant aux informations qu’il publie ou que les autres sont susceptibles de publier à son égard. D’autre part, il ne peut que lui être conseillé de respecter son obligation de loyauté, et d’éviter au maximum de commenter ses conditions de travail, son entreprise ou ses supérieurs hiérarchiques, d’autant que l’appréciation des juges du fond quant à ce type de contentieux apparait très casuistique.

 



[1] Loi n°2000-230, art.1316-1 du Code civil

[2] Conseil de l'Europe - Convention sur la cybercriminalité (STE n° 185)

[3] Loi n°2004-801 du 6 août 2004, relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés

[4] Le Monde du 4 novembre 2010, « Facebook franchit la barre du milliard d’utilisateurs »

[5] Ludovic Boursin et Laeticia Puyfaucher ; Le média humain - dangers et opportunités des réseaux sociaux pour l’entreprise, Eyrolles, 2011

[6] Définition proposée dans un avis référencé 5/2009 du 12 juin 2009

[7] http://sante.lefigaro.fr/actualite/2012/10/16/19304-plus-4-utilisateurs-sont-addicts-facebook

[8] http://bigbrowser.blog.lemonde.fr/2013/01/03/sur-le-gril-quick-poursuit-en-justice-un-salarie-decrivant-son-travail-sur-twitter/

[9] Cette exigence de loyauté découle directement de l’obligation générale d’exécuter le contrat de travail de bonne foi posé notamment à l’article L.1222-1 du Code du travail

[10] Article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme

[11] Cass.soc, 28 avr. 1988 : Bull. civ. 1988, V, n° 257 ; Dr. ouvrier 1988, p. 252,

[12] TGI Paris, ord. référé, 17 nov. 1997 : TPS 1998, comm. 204

[13] TGI Paris, 16 oct. 2006, n° 06-8820

[14] Selon la DARES, « la part des salariés syndiqués tend à se stabiliser autour de 8 % » (chiffre de 2008)

[15] Un blog doit être actif pour maintenir le nombre de visites et sa visibilité.

[16]http://www.conseilwebsocial.com/index.php/2011/reseaux-sociaux-management-rapport-au-travail-et-relations-sociales/ « Réseaux sociaux, management, rapport au travail et relations sociales »

[17] Soc., 5 mars 2008, Bull. 2008, V, no 55, pourvoi no 06-18.907

[18] J. CARBONNIER, Introduction. « Les personnes. La famille, l’enfant, le couple », PUF, 2004, n° 278, p. 518

[19] Cass.soc, 17 avril 1991, n° 90-42.636 Bull. civ. 1991, V, n° 201

[20] Cass.soc, 2 octobre. 2001, n° 99-42.942 Bull. civ. 2001, V, n° 291, p. 233

[21] Cass.ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-40.803, P+B+R+I. Juris-Data n° 2007-038898

[22] Cass.soc. 17 juin 2009, n° 08-40.274, JCP G 2009, n° 39, 263

[23] Cass.soc. 18 octobre 2006, n° 04-48.025, J CP S 2006, n° 48, 1946

[24] CA Rouen, 15 novembre 2011, n°11.01827 et n°11.01830

[25] Article 2 de la loi du 06 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

[26] Article 226-18 du Code pénal

[27] http://www.ideasrh.fr/recrutement-reseaux-sociaux/

[28] C. FEL, E. FORDET « L’utilisation des réseaux sociaux par l’entreprise et ses collaborateurs » La semaine juridique édition sociale n°29 20 juillet 2010 p.19

[29] http://bugbrother.blog.lemonde.fr J-M MANACH « Facebook et le « paradoxe de la vie privée » 25 septembre 2012

[30]Extrait de Jean-Emmanuel RAY. Little Brothers are watching you. Semaine sociale Lamy- 20111477 supplément

[31] http://bmfrance.bursonmarsteller-online.eu

[32] Propos de Nathalie DREYFUS, colloque organisé le 8 juillet 2011, organisé par la Lettre des juristes d’affaire.

[33] AFP pour liaisons sociales

[34] Dictionnaire LAROUSSE

[35] Jean Emmanuel RAY. Little Brothers are watching you Semaine sociale Lamy

36 Jean Emmanuel Ray, «Il y a une porosité croissante entre vie privée et vie professionnelle», Libération, 20 novembre 2010

[37] CA Reims, 9 juin 2010, no 09-3205.

[38] CPH Boulogne-billancourt. 19 nov.2010, n° 10.853

[39] CA Besançon, 15 nov. 2011, n° 10/02642

[40] Cass.soc. 18 mars 2009, no 07-44.247

[41] Etude menée par GARTNER du 07 mars 2012, cabinet de conseil et de recherche américain.

[42] www.cnil.fr/la-cnil/qui-sommes-nous/

[43] Infographie, « It’s alive ! The social media monster », B. WALLACE & Nowsourcing, 24 septembre 2009

[44] http://www.techniques-ingenieur.fr/actualite/informatique-electronique-telecoms-thematique_193/les-reseaux-sociaux-d-entreprise-transcendent-la-hierarchie-et-ont-tendance-a-aplatir-la-pyramide-article_71665/article_71665_2.html

[45] Etude de Nucleus Research, « Facebook, mesure the cost to business of social working », juillet 2009, www.nucleusresearch.com

[46] REUTERS « Les jeux sur réseaux sociaux, nouveau fléau des entreprises », 28 décembre 2009, www.01net.com

[47] Cass.soc 20 novembre 1991 n°88-43.120 Bull. 1991 V n°519 p.323, Recueil Dalloz 1992 p 73 note Y.CHAUVY ; Cass.soc 14 mars 2000 n°14 mars 2000 n°98-42.090, Bull. 2000 V n°101 p 78, RTD civ. 2000 p. 801, note J.HAUSER

[48] Cass.soc 2 octobre 2001 NIKON, n°99-42.942, Bull. V, n°291 ; D. 2001. 3148, note P-Y GAUTIER

[49] Cass.soc 17 mai 2005 n°03-40.017, Bull. 2005 V n°165 p.143, Recueil Dalloz 2005 p.1873, note R. DE QUENAUDON

[50] Cass.soc 10 mai 2012 n° 11-13.884, RDT 2012 p. 428, obs. M. KEIM-BAGOT La détermination du caractère personnel des fichiers informatiques du salarié,

[51] Cass.soc, 18 oct. 2006, n° 04-48.025 : JurisData n° 2006-035418 ; Bull. civ. 2006, V, n° 308 ; JCP S 2006, 1946, note J.-Y. FROUIN

[52] Cass.soc 18 mars 2009 n°, D. 2009. AJ 1093, obs. DECHRISTE

[53] Cass.soc 9 juillet 2008 n°06-45.800, D. 2008. AJ. 2228, obs. B. INES, Dr. soc. 2008. 1082, note Ray; JCP S 2008. 1638, note BOUBLI ; Cass.soc 9 février 2010 n°08-45.253, RJS 5/10 n°399

[54] Cass.soc 9 février 2010, n°08-45.253, JCP S 2010, 1243, note B.BOSSU

[55] T. DU MANOIR DE JUAYE & E.PONS, Les réseaux sociaux, un droit émergent, Global Security Mag, décembre 2009

[56] M. POTTIE, Charte d’utilisation des réseaux et moyens informatiques : mode d’emploi, Revue Lamy Collectivités territoriales 2012, n°84 novembre 2012

[57] Des réseaux sociaux plus protecteurs de la vie privée, Revue Lamy Droit civil 2012 n°97

[58] http://www.cnil.fr/la-cnil/actualite/article/article/publication-des-photos-sur-internet-comment-partager-sans-se-sur-exposer/

[59] Cass.soc, 2 octobre 2001 no 99-42.942, Bull. V, no 291

[60] Cass.soc, 18 octobre. 2006, no 04-48.025, Bull. V, no 308

[61] Cass.soc, 2 février. 2011, nos 09-72.449, 09-72.450 et 09-72.451, RLDI 2011/69, no 2283

[62] Cass.ch. mixte, 18 mai 2007, n° 05-40.803

[63] CA Rouen, ch. soc. 15 novembre 2011, n° 11/01827

[64] CA Paris, Pôle 5 deuxième chambre 09/12757

[65] CA Paris, 9 mars 2011, no 09/21478

[66] CA Reims, 9 juin 2010, no 09-3209

[67] Cass.soc, 29 février. 2012, no 10-23.669

[68] CA Reims, 9 juin 2010, n° 09-3205

[69] Cass.soc, 17 avr. 1991 : Dr. soc. 1991, p. 485, note J. SAVATIER

[70] Chantal MAHIEU- GENIAUT « l'immunité disciplinaire de la vie personnelle du salarié en question » Dr.soc septembre octobre 2006.

[71] Cass.soc 3 décembre 2002; Soc 25 janvier 2006

[72] Cass.ch mixte 18 mai 2007

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A propos de l'auteur
Blog de Valentin GUISLAIN

Maître Valentin GUISLAIN,
Avocat associé au barreau de Béthune (droit civil ; droit du travail ; droit commercial)
Membre du Conseil de l'Ordre

 

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