La viabilité économique du projet : Critère primordial de l’exercice d’un activité industrielle, commerciale ou artisanale par l’étranger en France

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La viabilité économique du projet : Critère primordial de l’exercice d’un activité industrielle, commerciale ou artisanale par l’étranger en France

Un récent arrêt de la Cour administrative appel de Paris en date du 6 juillet 2012 rappelle les critères à satisfaire pour un demandeur de la carte de séjour permettant l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale. En effet, dans cette affaire, malgré des attestations, notamment du Pôle emploi qui considérait que « ce projet mérite d’être soutenu », et les compétences attestés de l’étranger en matière de gestion, la Cour administrative d’appel a confirmé le refus du Préfet d’octroyer la carte de commerçant à la demanderesse dans la mesure où aucun élément n’était susceptible de venir attester de la viabilité économique et financière du projet.

Cet arrêt est l’occasion de rappeler le critère de la viabilité économique d’un projet prévu au 2° de l’article L313-10 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers, pour une demande de carte de commerçant.

 

Dans un souci de maîtrise du flux migratoire sur le territoire français, la demande d’autorisation de l’étranger qui souhaite résider en France et y exercer une activité de nature industrielle, commerciale ou artisanale, relève d’une seule et même procédure qui passe par l’obtention d’une carte de séjour temporaire.

Les conditions de son obtention sont définies au 2° de l’article L313-10 du Code de l’entrée et du séjour en France en tant qu’il dispose :« La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : […] 2o A l'étranger qui vient exercer une profession commerciale, industrielle ou artisanale, à condition notamment qu'il justifie d'une activité économiquement viable et compatible avec la sécurité, la salubrité et la tranquillité publiques et qu'il respecte les obligations imposées aux nationaux pour l'exercice de la profession envisagée. Elle porte la mention de la profession que le titulaire entend exercer. »

Cette disposition a été complétée par les articles R313-16 et suivants du CESEDA, par un Arrêté du 12 septembre 2007 relatif aux documents à produire pour la délivrance de la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale  et les modalités pratiques d’examen ont été précisées par une circulaire du 29 octobre 2007.

De l’ensemble de ces textes, il ressort que la viabilité économique de l’activité est le critère primordial pour obtenir la carte de séjour afin d’exercer cette activité.

 

Selon que la demande s’effectue en France ou depuis l’étranger, les services instructeurs seront la préfecture du département du lieu de résidence ou le consulat français du pays de résidence. En pratique, la plupart des demandes seront effectuées auprès du préfet dans la mesure où prouver la viabilité d’un projet d’activité depuis l’étranger s’annonce comme une tâche particulièrement ardue.

 

Le critère premier est d’apporter à sa cause tout les documents utiles prouvant cette viabilité.

C’est l’Arrêté du 12 septembre 2007 relatif aux documents à produire pour la délivrance de la carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale qui définit la liste des documents utiles à fournir afin de prouver la viabilité économique de l’activité.

Les documents demandés visent essentiellement à prouver l’effectivité du projet à court terme en démontrant son état d’avancement (ex : business plan, cautionnement bancaire, promesse ou contrat de bail, de vente d’un fonds de commerce, de location gérance, statuts de société le cas échéant, etc.). Ainsi, dans l’arrêt de la Cour administrative d’appel du 6 juillet 2012, l’absence d’élément prouvant l’installation à court terme de l’entreprise ne permettait pas de remplir le critère de la viabilité du projet.

Par ailleurs, dans le cadre de l’appréciation de la viabilité de l’activité effectuée par le préfet, une distinction est à faire entre la première demande et la demande de renouvellement de la carte.


I) L’appréciation de la viabilité de l’activité dans le cadre d’une première demande

Il est à distinguer entre deux hypothèses la création ex nihilo d’une activité et la reprise d’une activité existante. Selon la jurisprudence, la création ex nihilo d’une activité correspond au cas où l’intéressé fait une demande de titre de séjour avant la déclaration de création de l’entreprise, quand bien même celle-ci aurait existée de facto, avant.

 

  • S’agissant de la création d’une activité ex nihilo

Dans le cadre de la création d’une activité ex nihilo, l’intéressé devra prouver la viabilité économique de son projet par l’intermédiaire d’un projet d’entreprise qui regroupera notamment une présentation du projet, une étude d’impact et un budget prévisionnel annuel, etc.

A cet égard, on relèvera que la jurisprudence s’attache à ce que ce projet d’entreprise révèle une étude de marché approfondie réalisée par le demandeur.

L’ensemble de ces documents seront inclus dans le dossier de demande de carte auprès du préfet qui le transmettra auprès du trésorier-payeur-général du lieu d’établissement de l’activité. Ce dernier émettra un avis en tant qu’expert technique qui, toutefois, ne s’imposera pas dans la décision du préfet.

 

  • S’agissant de la reprise d’une activité

En revanche, dans le cadre de la reprise d’une activité, l’appréciation de la viabilité économique du projet sera nettement plus contraignante dans la mesure où l’intéressé devra prouver que l’activité pourra lui procurer des ressources au moins équivalentes à un SMIC à temps complet.


II) L’appréciation de la viabilité économique de l’entreprise dans le cadre d’une demande de renouvellement de la carte de commerçant étranger

Le principe, est l’existence d’un revenu au moins équivalent au SMIC pour l’intéressé. Cette appréciation tient compte de l’ensemble des revenues de l’intéressé provenant de cette activité.

Cependant, il est à noter que deux situations sont également à distinguer entre celui qui a crée son activité et celui qui l’a repris.

 

  • S’agissant d’une demande de renouvellement suite à une création d’activité

Le préfet peut faire preuve de souplesse dans la mesure où la création est précoce et les perspectives d’évolution de l’entreprise sont bonnes. La nécessité d’avoir un revenu équivalent au SMIC pourra être repoussé d’une, voire trois années lors des prochaines demandes de renouvellement.

Ainsi, la jurisprudence a pu considérer que, malgré la création de l’entreprise depuis 3 ans, le fait de seulement avoir un salaire supérieur au SMIC depuis 5 mois suffit à justifier du renouvellement du titre de séjour permettant une activité commerciale, industrielle ou artisanale.

 

  • S’agissant d’une demande de renouvellement suite à la reprise d’une activité

L’appréciation des ressources dégagées par l’activité sera beaucoup plus stricte. Non seulement, il sera nécessaire que l’activité en cause procure un revenu équivalent au SMIC mais il faudra que les perspectives de maintien de ce revenu soient élevées.

Dans tous les cas, dès que l’activité aura plusieurs années, la condition d’un revenu au moins égale au SMIC est une condition quasi-automatique pour renouveler son titre de séjour afin d’exercer une activité commerciale, industrielle ou artisanale. La jurisprudence est quasi-constante à ce sujet.

Une exception est à relever dans un arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille du 13 mars 2012 qui a reconnu la viabilité économique d’une entreprise dans la mesure où malgré des déficits, cette dernière avait deux salariés et était à jour de ses obligations sociales et fiscales.

 

En définitive, toute demande, première ou de renouvellement, concernant la carte de séjour pour l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale, nécessitera d’apporter une expertise complète de son activité.

Par suite, il importe de pouvoir demander l’aide de tiers pour justifier de la viabilité économique de son activité et notamment d’un expert comptable dans le cadre d’un renouvellement. Le passage par des associations comme l’ADIE, France Active, France Initiative ou le Réseau Entreprendre sont un bon moyen de prouver la viabilité d’une activité.

Enfin, on soulignera que dans le cadre d’une activité professionnelle règlementée, le requérant qui ne détient pas la qualification nécessaire n’obtiendra pas sa carte quand bien même l’activité serait viable. Dans ce cas précis, la seule possibilité est d’embaucher un salarié détenant cette qualification.

 

PS : A titre informatif, on rappellera que les détenteurs de la carte de résident ou de la carte de séjour vie privée et familiale peuvent exercer les activités commerciales, industrielles ou artisanales sans avoir besoin de demander la carte de commerçant. Il est seulement nécessaire de remplir les obligations nécessaires pour l’exercice de ces activités.

 

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