Aperçu de la décision : Cass.soc., 03 mai 2018

Publié le Modifié le 20/08/2018 Vu 3 051 fois 2
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Aperçu du sens de la décision de la chambre sociale de la Cour de cassation (03 mai 2018, pourvoi n° 16-20.636)

Aperçu du sens de la décision de la chambre sociale de la Cour de cassation (03 mai 2018, pourvoi n° 16-20.

Aperçu de la décision : Cass.soc., 03 mai 2018

Fiche de jurisprudence :  Cass.soc., 03 mai 2018, pourvoi n° 16-20636

Un EPIC avait engagé pendant plus de 3 ans une laborantine en ayant recours à plusieurs  CDD de remplacement.

Ce contrat nommé ne comprenait pas les mentions obligatoires (nom et qualification du salarié remplacé).

Le salarié précaire a saisi la juridiction prud’homale d’une requalification de son CDD en CDI.

Un appel a été interjeté.

La CA de Montpellier a fait droit à cette demande de  requalification par un arrêt rendu le 18 mai 2016.

Saisie d’un pourvoi, la Cour suprême a cassé et annulé l’arrêt rendu pour violation de la loi.

Le salarié soutenait à l’appui de sa demande que les contrats conclus violaient les règles prescrites par l’article L.1242-12 du code du travail.

Les mentions obligatoires relatives aux fonctions du salarié qui doivent figurer dans un contrat à durée déterminée peuvent elles être précisées en dehors du contrat par renvoi à la convention collective ?

La Cour de cassation a saisi l’opportunité de ce pourvoi pour faire évoluer sa jurisprudence. Elle précise en effet que le renvoi à la convention collective de l’indication de la qualification professionnelle, alors qu’était uniquement mentionnée sur le contrat de travail le titre de l’emploi du salarié remplacé ne permet désormais plus de justifier les sanctions visées par le code du travail.

Antérieurement, l’arrêt de la chambre sociale du 01 juin 1999 avait confirmé sa jurisprudence (Cass.soc., 06 mai 1997), rappelant l’existence d’une présomption irréfragable de requalification en cas d’omission dans le contrat du nom et de la qualification du salarié remplacé. En effet, ce qui justifiait cette sanction, était que le salarié se trouvait dans l’ignorance de ces éléments personnels. Il ne pouvait ainsi distinguer si le recours au CDD de remplacement n’était pas en l’espèce discriminatoire à son égard. Cela permettait en outre, aux juridictions du fond d’exercer leur examen formel du respect des conditions visées par l’article L.1242-12 du code du travail.

Ainsi, la jurisprudence considérait-elle ce manquement, comme relevant d’une absence d’écrit, entraînant derechef la requalification du contrat à durée déterminée en CDI (Cass.soc., 13 mars 2013, pourvoi n° 11-28687).

La cour suprême avait cependant posée certaines limites à cette automaticité, ainsi, il a été jugé que l’omission de la convention collective dans le contrat n’ouvrait pas droit à une requalification automatique (Cass.soc., 26 octobre 1999).

L’évolution tient cependant à l’abandon par les ordonnances n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et à la sécurisation des relations de travail du caractère irréfragable de la présomption (loi du 12 juillet 1990). Le simple fait de manquer à l’obligation de transmettre au salarié son contrat de travail dans les 48 heures ne peut plus justifier la requalification de ce dernier en CDI mais une amende équivalente à un mois de salaire (L.1245-1 et L.1245-40 du code du travail).

L’idée est en effet d’apporter de la souplesse au régime automatique de la sanction et de redonner au juge une marge d’appréciation plus large.

En l’espèce, il nous semble que la Cour de cassation en son arrêt du (03 mai 2018, pourvoi n° 16-20636) offre aux juridictions du fond cette légitimité.

Ils trouvent ainsi dans cet arrêt aux faits en apparence anodins, un nouveau cadre juridique pour exercer leur pouvoir souverain d’appréciation.

Les employeurs quant à eux y trouveront nécessairement une nouvelle souplesse et selon le pari des ordonnances MACRON, une volonté d’embaucher en cas de besoin sans avoir à risquer le paiement d’une indemnité financière parfois lourde de conséquences.

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1 Publié par miyako
19/08/2018 22:02

Bonsoir,
Rappelons que la cour de cassation n'a absolument pas le droit de modifier un texte de loi ,en l'occurrence l'article L1242-12 du code du travail,ce serait inconstitutionnel.
Cet arrêt reste un cas d'espèce,applicable à tous les cas identiques à ce dernier,mais ne constitue ,en rien une nouvelle loi.
Si l'employeur , donne la même qualification,le même salaire au CDD qu'à celui ou celle qu'il remplace il est en règle vis à vis du L1242-12 du CT et dans le cas d'espèce soulevé par cet arrêt,le salarié ,à fait preuve d'une certaine mauvaise foi,ce que la haute cour a sanctionné.
Ce que je ne comprends pas c'est le renvoi devant la cour de Nîmes.
Puis certainement un nouveau pourvoi .
Je suis curieux de connaître la suite .
Cette affaire risque de coûter finalement très cher au salarié par la condamnation aux dépens .
Cordialement
Suji KENZO

2 Publié par chatoon
20/08/2018 07:50

Bonjour,

Je voudrais apporter une précision tout de même à ce commentaire en ce qu'il indique que le simple fait de ne pas transmettre au salarié son CDD au plus tard dans les deux jours ouvrables n'est plus un motif de requalification.
Mais cela ne signifie pas que le salarié soit dans l'obligation de signer son CDD au-delà de ce délai de deux jours ouvrables, l'absence d'écrit à compter de l'expiration de ce délai étant toujours sanctionné par la requalification du CDD en CDI, et l'employeur ayant toujours l'obligation de transmettre le CDD au salarié dans ce délai, désormais sous peine d'une indemnité ne pouvant excéder un mois de salaire.

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