Nouvelle application du caractère onéreux du bail rural (à propos de la livraison de fumier)

Publié le 14/06/2018 Vu 2 786 fois 0
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Au titre des éléments constitutifs du bail rural figure l'onérosité de la relation contractuelle. Cette contrepartie onéreuse n'est pas forcément en argent. Nouvel arrêt à propos de la livraison de fumier.

Au titre des éléments constitutifs du bail rural figure l'onérosité de la relation contractuelle. Cette c

Nouvelle application du caractère onéreux du bail rural (à propos de la livraison de fumier)

ACTUALITÉS JURISPRUDENTIELLES - JUIN 2018

BAIL RURAL – EXISTENCE

Caractère onéreux du bail rural

  • Cass. 3ème civ. 21 décembre 2017, n° 16-18439 :

En vertu de l'article L411-1 du code rural et de la pêche maritime, toute mise à disposition à titre onéreux d'un immeuble à usage agricole en vue de l'exploiter pour y exercer une activité agricole est un bail rural.

Cet arrêt de la Cour de Cassation illustre une nouvelle fois la détermination du caractère onéreux nécessaire à la qualification du bail rural et à l'obtention du statut du fermage avec les conséquences associées à celui-ci (droit au renouvellement, encadrement des cessions, encadrement des congés, réglementation du prix du bail, droit de priorité du preneur en cas de cession, indemnités de sortie en cas d’amélioration).

On sait que la contrepartie onéreuse n'est pas nécessairement en argent.

Elle peut être réalisée en nature (obligation d'hébergement ou de soins, fourniture de bois, de volailles, de fumier, entretient d’un jardin appartenant au bailleur, préparation d'une serre et d'une canalisation…).

En l'espèce une SCEA revendiquait le statut du fermage sur le fondement d'un document écrit, non daté et signé de la bailleresse au terme duquel celle-ci donnait l'autorisation à la gérante de la société de clôturer les parcelles dont elle était propriétaire. Ce contrat stipulait néanmoins qu'il était consenti à titre gracieux sous condition que le preneur nettoie la parcelle et la maintienne en parfait état.

En l'espèce cette condition n'a pas été considérée comme la contrepartie onéreuse nécessaire mais comme de simples dépenses pour l'usage de la parcelle auquel elle était destinée.

Rappelons qu'en vertu de l'article 1875 du Code civil, le prêt à usage (ancien commodat) est un contrat par lequel l'une des parties livre une chose à l'autre pour s'en servir, à charge pour le prêteur de la rendre après s'en être servi.

En application de l'article 1876 du même code, le prêt à usage est essentiellement gratuit.

Des lors le nettoiement de la parcelle et son maintien en parfait état constituaient non pas une contrepartie onéreuse nécessaire à la qualification de bail rural mais de simples dépenses réalisées pour user de la chose selon l'emploi auquel elle était destinée.

L'article 1886 du Code civil interdit d’ailleurs à l'emprunteur de réclamer au prêteur le remboursement de dépenses faites pour user de la chose prêtée.

Également par cet Arrêt, la SCEA cherchait également à se voir reconnaître preneuse à bail rural pour l'utilisation d'autres parcelles, au regard de la livraison de fumier de cheval à ses bailleurs qu’elle soutenait constituer la contrepartie financière à l'occupation des parcelles.

Cependant la Cour de Cassation a estimé que la Cour d'appel avait souverainement retenu que les livraisons de fumier alléguées par la SCEA en contrepartie de la jouissance des parcelles n'étaient pas établies :

« Attendu, d’autre part, que la cour d'appel a souverainement retenu que la livraison de fumier allégué par la SCEA en contrepartie de la jouissance des parcelles n'était pas établie et que cette mise à disposition n'avait pas été consentie à titre onéreux ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ».

Le caractère onéreux de la mise à disposition n’étant pas établi, la SCEA ne pouvait légitimement revendiquer le Statut du fermage.

C’est donc à juste titre que la Cour d’Appel avait ordonné la libération des parcelles à la demande des propriétaires.

Toulouse, le 14 juin 2018

Isabelle GAYE

Avocat à la Cour

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