Rappelons que la décision rendue hier par la 11ème chambre correctionnelle du TGI de Paris est la suivante :
- Dominique de Villepin relaxé du chef de complicité de dénonciation calomnieuse, complicité d'usage de faux, recel de vol et d'abus de confiance.
- Denis Robert est relaxé du chef de recel de bien obtenu à l'aide d'un abus de confiance, recel de vol
- Gergorin est reconnu coupable de dénonciation calomnieuse, usage de faux en écriture et recel de bien obtenu à l'aide d'un abus de confiance. Il est condamné à 3 ans, dont 21 mois avec sursis et 40.000 euros d'amende.
- Lahoud est reconnu coupable de complicité de dénonciation calomnieuse, faux, usage de faux en écriture et recel de bien obtenu à l'aide d'un abus de confiance. Il est condamné à : 3 ans, dont 18 mois avec sursis et mise à l'épreuve, et 40.000 euros d'amende.
Nicolas Sarkozy, partie civile, obtient un euro de dommages et intérêts.
Qui pouvait faire appel de cette décision ?
L'article 497 du cpp précise qui peut faire appel du jugement :
- chaque prévenu condamné, pour sa propre condamnation pénale (l'action publique, menée par le parquet) et la condamnation à indemniser la victime (l'action civile, menée par la partie civile), ou une seule de ces condamnations.
- le parquet, pour la seule action publique.
- la partie civile, pour la seule action civile.
Dominique de Villepin n'est pas recevable à faire appel : il a été relaxé et ne peut rien demander de plus.
Une précision s'impose suite au communiqué de presse du Président Sarkozy, partie civile dans cette affaire, qui indiquait hier ne pas vouloir faire appel de la décision : M. Sarkozy aurait sans doute été déclaré irrecevable dans la mesure où il a obtenu la condamnation qu'il demandait (MM. Gergorin et Lahoud étant condamnées à lui payer 1 euro de dommages et intérêts symboliquement demandé), avec une petite réserve dans la mesure où M. Sarkozy demandait la condamnation solidaire de MM. Gergorin, Lahoud et Galouzeau de Villepin.
Le parquet ayant décidé d'interjeter appel, Dominique de Villepin sera finalement rejugé.
Hypothèse d'un appel de la partie civile sur la seule action civile :
Dans l'hypothèse où Nicolas Sarkozy, partie civile, aurait interjeté appel et pas le parquet, l'action publique aurait été éteinte à l'encontre de M. De Villepin.
La Cour d'Appel n'aurait été saisie que des intérêts civils : sans déclarer le prévenu coupable, la Cour aurait pu condamner le prévenu à indemniser la victime.
Conséquences de l'appel :
Les conséquences de l'appel dépendent de la déclaration d'appel : l'appelant peut préciser sur quelles dispositions du jugement il entend limiter son appel.
La cour d'appel est saisie dans ces limites.
Faute de précision dans l'acte d'appel, la cour est saisie de l'ensemble du dossier.
En l'espèce, si le parquet se contente de dire qu'il fait appel, tous les prévenus qui ont comparu devant la 11ème chambre correctionnelle, y compris Denis Robert qui a bénéficié d'une relaxe en première instance, seront rejugés.
L'appel incident :
MM. Gergorin et Lahoud ont déclaré immédiatement leur intention de faire appel.
Le parquet aurait de toute façon formé un appel incident.
L'appel principal est formé dans le délai de dix jours à compter du jugement ou de sa signification par huissier si le prévenu était absent à l'audience.
L'appel incident est un appel en riposte : il peut être formé dans le délai de dix jours ou dans un délai de cinq jours qui court à compter de la déclaration d'appel.
L'appel incident, contrairement à l'appel principal qui est définitif, tombe automatiquement si l'appelant principal se désiste dans les trente jours (article 500-1 du cpp).
Procédure devant la Cour d'Appel :
La cour d'appel voit ses pouvoirs limités par les appels dont elle est saisie :
- sur le seul appel du parquet, la cour ne peut que confirmer la peine ou l'aggraver dans la limite du maximum légal.
Elle ne peut pas relaxer.
- Sur l'appel du seul prévenu, la cour ne peut que confirmer la peine, la diminuer ou relaxer. Donc quand des prévenus font appel, le parquet fait toujours un appel incident pour que la cour soit pleinement saisie de l'action publique et puisse le cas échéant aggraver.
Dans l'affaire Clearstream, la Cour d'Appel pourra confirmer la relaxe, ou déclarer M. de Villepin coupable et prononcer une peine. Si M. Sarkozy ne fait effectivement pas appel, il ne sera pas partie au procès et ne pourra donc formuler aucune demande.