Roman Polanski a été arrêté samedi à son arrivée en suisse, alors qu'il se rendait au Festival du film de Zurich où il devait recevoir un prix pour l'ensemble de sa carrière.
Tout le monde s'interroge sur cette arrestation alors que Polanski se rend très régulièrement en Suisse, et ce depuis de nombreuses années.
Il y possèderait même un chalet situé à Gstaad, le plus officiellement du monde.
Juridiquement, la réponse est pourtant assez simple.
Polanski a été mis en cause dans une affaire de viol du mineur en Californie en 1977.
Arrêté, il passe 47 jours au pénitencier de Chino, où il est placé sous observation psychiatrique.
Il fait à l'époque l'objet de six chefs d'inculpation, et notamment de viol, pour avoir eu une relation sexuelle avec une jeune fille de 13 ans.
Polanski conteste le viol, mais plaide coupable pour « relations sexuelles illégales », faits pour lesquels il encourt une peine de 4 ans de prison (en Californie, juridiquement, un rapport sexuel avec une mineure est une relation sexuelle illégale, même si la jeune fille est consentante).
Il obtient ensuite une libération sous caution, mais quitte le territoire américain avant l'ouverture du procès.
Réponse judiciaire classique : un mandat d'arrêt international est délivré en 1978.
Le mandat d'arrêt vise à le faire comparaître pour prononcer la peine, la comparution personnelle étant obligatoire pour la loi californienne.
La victime a été indemnisée et a retiré sa plainte, mais cela ne fait pas obstacle à la poursuite de l'action publique.
Depuis cette date, Roman Polanski, qui a la double nationalité polonaise et française, vivait en France.
S'agissant de ses déplacements à l'étranger, soit il ne se déplaçait que dans des pays n'ayant pas de conventions d'extradition avec les Etats-Unis, soit il organisait des voyages discrets.
Logiquement, il ne s'était pas présenté à Los Angeles en 2003 pour recevoir l'Oscar du meilleur réalisateur qui lui avait été décerné pour son film « le Pianiste ».
Rappelons qu'un Traité d'extradition a été conclu entre la Suisse et les Etats-Unis le 14 novembre 1990.
Polanski s'était déjà rendu en Suisse à plusieurs reprises, mais cette fois-ci, son séjour était connu à l'avance par le District Attorney du Conté de Los Angeles (parquet de Californie) qui a ainsi pu délivrer un ordre d'arrestation, que le gouvernement de Berne se devait d'exécuter.
Ces dernières années, le district attorney du comté de Los Angeles aurait déjà fait plusieurs tentatives pour exécuter le mandat d'arrêt de 1978, quand Polanski voyageait dans des pays ayant passé un traité d'extradition avec les Etats-Unis, tentatives que le cinéaste aurait déjouées en annulant ses déplacements.
Roman Polanski est donc actuellement en détention provisoire en attente d'extradition.
Il a 10 jours pour contester sa mise en détention, mais en Suisse, en matière d'extradition, le maintien en prison est la règle durant la procédure.
Les autorités américaines ont, quant à elles, 40 jours pour adresser à Berne une demande formelle d'extradition, délai qui peut exceptionnellement être prolongé de 20 jours.
Le cinéaste pourra faire appel de l'éventuelle décision d'extradition auprès du Tribunal criminel fédéral, puis en dernier recours auprès du Tribunal suprême fédéral.
La règle est donc claire, et il était d'une imprudence folle que de se rendre, pour un grand festival, dans un pays lié par une convention d'extradition avec les Etats-Unis.