L'ISF, un casse-tête pour les chefs d'entreprises ? (2/3)

Publié le Modifié le 12/05/2010 Vu 9 018 fois 0
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Les parts et actions de sociétés holdings peuvent-elles être qualifiées de « biens professionnels », exclus de plein droit de l’assiette de l’ISF ?

Les parts et actions de sociétés holdings peuvent-elles être qualifiées de « biens professionnels », exc

L'ISF, un casse-tête pour les chefs d'entreprises ? (2/3)

1. Si les sociétés « holdings» (sociétés dont l’actif se compose uniquement de titres d’une ou plusieurs autres sociétés) sont avant tout conçues comme un instrument de gestion de titres de participation, elle sont, en raison des avantages de l’effet de levier financier et fiscal des opérations de LBO, devenues un instrument privilégié d’ouverture du capital ou de transmission d’entreprises familiales.

Il en résulte que les groupes de sociétés occupent aujourd’hui une place prépondérante dans le paysage des petites et moyennes entreprises familiales.

Or, si cette structuration obéit à des choix économiques, financiers et fiscaux bien connus, elle ne permet pas toujours aux associés dirigeants de réunir, d’emblée, les conditions d’exonération d’ISF des parts ou actions de sociétés assujetties à l’impôt sur les sociétés.

2. On rappellera ici que les parts et actions de sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés peuvent être considérées comme des « biens professionnels » exonérés d’ISF :

Si la société exerce une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (CGI, art. 885 O ter) ;

Et si leur propriétaire :

-       Exerce au sein de cette société une fonction de direction lui procurant plus de la moitié de ses revenus professionnels (CGI, art. 885 O bis 1°);

-       Et détient avec son groupe familial au moins 25 % du capital de cette société, directement ou par l’intermédiaire d’une société dans la limite d’un seul niveau d’interposition ; Ce seuil n’étant pas exigé si la valeur des parts ou actions qu’il détient avec les membres de son foyer fiscal excède 50% de la valeur brute de son patrimoine taxable à l’ISF (CGI, art. 885 O bis 2°).

3. L’exigence d’une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, autrement dit opérationnelle, exclut de la catégorie des biens professionnels les parts ou actions de société ayant pour activité principale la gestion de leur propre patrimoine mobilier ou immobilier (CGI, art. 885 O quater).

Cette exclusion vise essentiellement les sociétés dont l’actif se compose uniquement de participations financières dans une ou plusieurs autres sociétés (sociétés holdings).

Il en résulte que les parts ou actions de sociétés holdings sont, en principe, exclues du champ de l’exonération applicable aux biens professionnels.

4. Toutefois, s’agissant de ces dernières, des dérogations ont été admises par l'administration, laquelle distingue selon que la société est une holding passive ou une holding animatrice :

5. Lorsque la société est une holding passive, c’est-à-dire une société ne faisant qu’exercer les prérogatives usuelles d’un actionnaire (exercice du droit de vote - lorsque l’importance de la participation le permet - et des droits financiers), les parts et actions de cette société « dont l’activité principale est la gestion de leur patrimoine » ne peuvent constituer des biens professionnels.

Elles peuvent toutefois, selon l’administration, faire l’objet d’une exonération partielle si la société holding détient une participation dans une société exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale au sein de laquelle le redevable exerce des fonctions de direction lui procurant plus de la moitié de ses revenus professionnels (DB7 S 3323 n° 16).

L’exonération est alors accordée dans la proportion suivante :

Valeur de la participation détenue par le redevable dans la société interposée x Valeur de la participation détenue par la société interposée dans la société dans laquelle le redevable exerce des fonctions de direction rémunérées / Valeur réelle de l’actif brut de la société interposée

Exemple :

M. X détient 78 % de la SAS H, laquelle détient une participation de 100 % dans la SAS P, valorisée à 3 M€, et de 100 % dans la SAS C, valorisée à 1 M€. M. X est président rémunéré de la SAS P et n’occupe aucune fonction de direction au sein de la SAS C. Sa participation dans la SAS P sera exonérée à hauteur de 78 % x 4 M € x (3 M€ / 4 M€) = 2 340 000 €. Sa participation dans la SAS C ne constitue pas un « bien professionnel » et devra donc être déclarée à hauteur de 78 % x 4 M€ x (1 M€ / 4 M€) = 780 000 €.

6. La holding passive est traitée comme une simple « société interposée » étant ici rappelé qu’il n’est tenu compte des participations indirectes par le biais de sociétés interposées que dans la limite d’un seul niveau d’interposition (CGI, art. 885 O bis 2°).

Ainsi, un contribuable qui aurait acquis à travers une holding « de rachat » (passive) les titres de la holding « historique » (non animatrice) d’un groupe de sociétés, ne peut - sauf à fusionner les deux structures - bénéficier de l’exonération applicable aux biens professionnels.

7. En outre, un contribuable qui serait simultanément dirigeant de plusieurs sociétés ne peut bénéficier de l’exonération que pour les titres de la seule société dans laquelle ses fonctions de direction lui procurent une rémunération représentant plus de la moitié de ses revenus professionnels (DB7 S 3322/A/II/2/B n° 21).

Or une société holding n’a généralement pas qu’une seule filiale, mais plusieurs. Dès lors, les parts et actions de celle(s) des sociétés filiales au niveau desquelles l’ensemble des conditions d’exonération -notamment de rémunération - ne sera pas réuni, ne pourront, en principe, pas bénéficier de l’exonération.

8. Toutefois, à ce principe « d’unicité » de l’exonération, déroge le cas où les filiales exercent des activités soit similaires, soit connexes et complémentaires :

Dans ce cas, les parts ou actions détenues par un même redevable dans plusieurs sociétés sont présumées constituer un seul et même bien professionnel lorsque, compte tenu de l’importance des droits détenus et de la nature des fonctions exercées, chaque participation, prise isolément, satisfait aux conditions prévues pour avoir la qualité de biens professionnels (CGI, art. 885 O bis 2°).

Dès lors, l’exonération est susceptible de s’appliquer si l’ensemble des rémunérations perçues de ces sociétés représente plus de la moitié des revenus professionnels de l’intéressé (DB7 S 3322/A/II/2/B n° 22).

9. Lorsque la société est une holding animatrice effective du groupe, c’est-à-dire une société participant activement à la conduite de sa politique et au contrôle de ses filiales et rendant, le cas échéant et à titre purement interne au groupe, des services spécifiques administratifs, juridiques, comptables, financiers ou immobiliers, il est admis qu’elle « utilise sa (ses) participation(s) dans le cadre d’une activité industrielle ou commerciale qui mobilise des moyens spécifiques » (DB7 S 3323 n° 16).

En d’autres termes, la holding animatrice est pleinement assimilée à une société opérationnelle, c’est-à-dire à une société ayant elle-même une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale.

Il en résulte que c’est au niveau de la holding, cette fois, que l’ensemble des conditions d’exonération devra être réuni.

Il en résulte également qu’à supposées ces conditions réunies, l’exonération sera, cette fois, totale.

10. Toutefois il est admis que si les fonctions de direction exercées par le redevable dans la holding animatrice ne sont pas ou peu rémunérées, ses parts ou actions peuvent cependant être exonérées à la double condition que :

-       L’intéressé exerce simultanément des fonctions de direction dans une ou plusieurs filiales dont la société mère détient 50 % ou 25 % selon que cette dernière poursuit une activité industrielle ou commerciale propre ou qu’elle limite son activité à l’animation de son groupe ;

-       Le montant cumulé des rémunérations qu’il perçoit dans la holding et dans sa (ses) filiale(s) représente plus de la moitié de ses revenus professionnels (DB7 S 3323/A/III/2/C n° 21).

11. En conclusion, en présence d’un groupe de sociétés, bien que l’associé redevable soit dirigeant de l’entreprise, les conditions de l’exonération applicable aux biens professionnels ne seront pas toujours réunies de manière automatique pour la totalité de sa (ses) participation(s).

La recherche d’une exonération d’ISF pourra rendre nécessaire certaines modifications au sein du groupe, voire une restructuration de ce dernier.

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