Loi Rebsamen et l'avenir du comité d'entreprise

Publié le Modifié le 08/02/2017 Vu 7 804 fois 0
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Les députés ont définitivement voté la réforme du dialogue social le 23 juillet 2015. Les changements pour les comités d'entreprise et le CHSCT sont importants. Il faudra toutefois attendre les décrets d'application. Les dispositions les plus marquantes prendront effet à partir de janvier 2016.

Les députés ont définitivement voté la réforme du dialogue social le 23 juillet 2015. Les changements pou

Loi Rebsamen et l'avenir du comité d'entreprise

Le comité d’entreprise en 2016 va connaître une profonde refonte de son fonctionnement. La loi Rebsamen met fin à des avancées sociales obtenues par les syndicats depuis les lois emblématiques de l’ère Jean Auroux de 1982. Passée quasiment inaperçue dans les médias contrairement à la loi Macron qui a créé la polémique avec encore récemment 18 articles retoqués par le Conseil constitutionnel, cette loi relative au dialogue social et à l’emploi n’en est pas moins importante pour l’avenir des institutions représentatives du personnel.

La délégation unique du personnel s’élargit

Le gouvernement a frappé un grand coup avec cette première évolution juridique. La Délégation Unique du Personnel appelée DUP, a été créée en 1993 pour offrir la possibilité aux entreprises dont l’effectif se situait entre 50 et 199 salariés, de regrouper en une seule instance, les obligations relevant du comité d’entreprise, de celles rattachées aux délégués du personnel. Cette faculté demeure mais elle est même renforcée. D’une part, le seuil d’effectif passe sans accord d’entreprise de 199 à 300 salariés (faculté de l’employeur uniquement), d’autre part, il faudra compter avec l’entrée du CHSCT au sein de cette délégation. L’employeur n’aura plus qu’une seule élection professionnelle à organiser contre 3 possiblement auparavant (élection concomitante CE/DP et élection du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail). Il y aura très certainement encore un peu moins d’élus comme c’était déjà le cas avec la précédente configuration de la DUP. Ce qui ne change pas en revanche, c’est que ce regroupement n’affectera pas l’autonomie des instances ; bien qu’elles soient regroupées au sein  de la DUP, les instances du CE et du CHSCT et les DP, conservent l’ensemble de leurs attributions respectives. Il n’y a donc pas de fusion des compétences.

Le secrétaire-adjoint est légalement prévu

Avant la loi Rebsamen, le code du travail prévoyait l’obligation de désigner un secrétaire au CE (et depuis janvier 2015, celle du trésorier au CE est devenue obligatoire). À compter de 2016, il faudra inclure la désignation du secrétaire-adjoint, jusqu’alors facultative. La délégation unique va donc renforcer son fonctionnement en obligeant l’instance a se structurer davantage au travers de ces désignations. Ainsi, la désignation d’un secrétaire et d’un secrétaire adjoint permettra que puisse s’exercer respectivement les fonctions du secrétaire du CE et du secrétaire du CHSCT ; l’arrivée du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail au sein de la DUP n’ôte pas la nécessité de disposer d’un secrétaire pour organiser les travaux relevant de cette instance importante. Reste que l’on peut s’interroger sur les limites des missions du secrétaire adjoint ; pourra t’il œuvrer à des missions CE en support du secrétaire du CE comme il faisait avant cette loi ?

Le nombre de réunions diminue

Les employeurs sont certainement satisfaits. Le nombre de réunions est divisé par 2,5 avec l’entrée en vigueur de la loi Rebsamen. Avant cette loi, les entreprises qui avait fait le choix d’avoir une DUP, devait organiser une réunion mensuelle du comité d’entreprise (et des délégués du personnel). Au total, cela portait le nombre de réunions pour la seule instance du CE à 12. Ensuite, il fallait compter sur les 12 réunions annuelles des DP et sur les 4 réunions trimestrielles du CHSCT ; sans compter, les réunions extraordinaires obligatoires et celles pouvant être facultativement demandées par les élus ou l’employeur. Le nombre de réunions du CE passent de 12 à 6 et on supprime les 4 réunions distinctes trimestrielles du CHSCT ; à la place, à l’occasion des réunions du CE, l’employeur doit au moins lors de 4 réunions annuelles ouvrir le débat avec les élus sur des sujets relevant des attributions du CHSCT. La loi ne précise pas en revanche, si les 12 réunions des délégués du personnel sont maintenus en l’état. La préparation des réunions devient essentielle pour les élus de la délégation unique du personnel tant la multiplication des sujets et leur complexité constituera un nouveau challenge à ne pas ignorer.

L’ordre du jour est commun

Les réunions du comité d’entreprise ou du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail impliquent la mise en place d’un ordre du jour. Auparavant, les secrétaires respectifs du CE ou du CHSCT élaboraient conjointement l’ordre du jour attenant à leur instance. Désormais, un seul ordre du jour est requis, il est donc commun au traitement des sujets relevant des deux institutions. Reste que plusieurs questions demeurent ; quel secrétaire sera en charge cet ordre du jour compte tenu de la nouvelle configuration du bureau de la DUP ? L’envoi de l’ordre du jour 3 jours au moins avant la réunion du CE semble disparaitre ? En effet, la loi précise que l’ordre du jour devenu commun sera établi par l’employeur et le secrétaire et communiqué 8 jours au moins avant la séance ; ce délai semble être un compromis avec le délai de 15 jours qui s’imposait pour l’ordre du jour du CHSCT avant son intégration au sein de la DUP. Précisons que le PV de réunion (tant le procès-verbal de la réunion du CE que celui du CHSCT) ne fera plus qu'un. En effet, un ordre du jour unique ne peut pas donner lieu à deux PV distincts. Là aussi, des précisions sont attendues.

Les consultations du CE sont remises en cause

La partie la plus importante de la loi se situe très certainement à ce niveau. En effet, le nombre de consultations annuelles du CE obligatoires passe de 17 à 3 ; la loi a en réalité regroupé ces consultations jusqu’alors distinctes en 3 grandes familles. Pour l’employeur, c’est donc une avancée majeure et très certainement un gain de temps. Les élus du comité d’entreprise seront donc consultés sur à l’occasion de 3 volets d’informations : 1/ les orientations stratégiques de l’entreprise et les orientations de la formation professionnelle (et la GPEC pour les entreprises concernées) ; 2/ la situation économique et financière de l’entreprise, ainsi que la politique de recherche et de développement et l’utilisation du CICE et 3/ la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail et l’emploi incluant notamment la formation, la durée et l’aménagement du temps de travail, le bilan social et l’égalité professionnelle. Certaines consultations trimestrielles demeurent en revanche dans les entreprises de 300 salariés et plus ; pour les autres, vous l’aurez compris, elles sont supprimées. Il va de soi que les représentants du personnel devront se professionnaliser davantage pour que les avis rendus à l’occasion de ces consultations plus exigeantes et plus engageantes ne soient pas inconsistants.

L’avenir du CE est-il compromis ?

C’est une question légitime que se posent de nombreux élus de CE. La diminution du nombre de réunions, le regroupement des consultations en 3 temps forts par an, la suppression de la consultation sur les accords collectifs du travail, l’élargissement de la DUP, tout cela contribue sans doute à ce sentiment. Reste que beaucoup de questions vont apparaître lors de la publication des décrets et très certainement à l’usage. Comme souvent, c’est la Cour de Cassation qui apporte des éclairages précis lorsque les lois manquent de lisibilité, entrainant au passage des conflits nécessitant des procès pour être tranchés.

Affaire à suivre.

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A propos de l'auteur
Blog de INGENIUM CONSULTANTS

Fabrice ALLEGOET est juriste en droit social et des affaires. Il a été formé à la gestion RH, formation suivie de 14 années d'expérience en tant que RRH (6 ans) et DRH (8 ans). Formateur, il s'est spécialisé dans le droit collectif. Formé au coaching professionnel (Process Com), il met ses compétences en oeuvre au service de la performance des collaborateurs. 

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