(Commentaire de CJUE 24 mai 2012 C-196/11)
La société Formula One Licensing BV, filiale du groupe Formula One, est titulaire de diverses marques "F1".
Le 13 avril 2004, une chaîne de sport, Global Sports Media (GSM), a effectué une demande d'enregistrement d'une marque communautaire "F1-Live".
Formula One a donc souhaité faire opposition à cet enregistrement sur le fondement de l'article 8 du règlement 40/94, en se basant sur des marques nationales antérieures (ainsi qu'internationales et communautaires), dont la renommée n'est plus à prouver.
En 2007, la division de l'OHMI a fait droit à cette opposition.
Mais pourtant, la chambre de recours de l'OHMI (2008) et le Tribunal de l'UE (2011) ont rejeté cette opposition aux motifs que l'élément dominant des marques antérieures "F1" invoquées était descriptif, générique et possédait un faible caractère distinctif.
I) Présentation de l'arrêt
Dans son arrêt du 24 mai 2012, la CJUE annule la décision du Tribunal pour "erreur de droit".
Si le Tribunal de l'UE a reconnu qu'il ne pouvait pas mettre directement en cause la validité des marques nationales et internationales antérieures invoquées dans le cadre d'une procédure d'opposition à enregistrement d'une marque communautaire, il n'en a pas tiré toutes les conséquences.
En effet, il est constant que la validité d'une marque nationale ne peut être mise en cause que dans le cadre d'une procédure de nullité engagée dans l'Etat membre concerné, et non pas lors d'une procédure d'enregistrement d'une marque communautaire (voir en ce sens, TUE 12 novembre 2008, Shaker/OHMI – Limiñana y Botella (Limoncello della Costiera Amalfitana shaker), T-7/04, point 26).
Malgré ce qui précède, le Tribunal a toutefois relevé la présence de motifs absolus de nullité (descriptivité, caractère générique et donc absence de distinctivité), ce pourquoi la CJUE annule l'arrêt rendu par le Tribunal.
La CJUE renvoie donc l'affaire au Tribunal de l'UE pour juger à nouveau si la demande d'enregistrement d'une marque "F1-live" porte atteinte aux droits du groupe Formula One, mais lui refuse le droit de procéder à l'examen de la distinctivité des marques nationales sur lesquelles est basée l'opposition.
II) Conséquences
Dans son arrêt, la CJUE ne remet pas en cause l'appréciation du TUE, ni de l'OHMI qui ont tous deux retenu la descriptivité, le caractère générique et la faible distinctivité du signe "F1".
Le reproche de la CJUE au Tribunal et à l'Office est qu'il ne leur revenait pas de faire une telle analyse dans le cadre d'une opposition à enregistrement communautaire.
En conséquence, il est évident que la marque "F1" est en sursis, et risque de disparaître à la suite d'une action nationale en nullité devant les juridictions allemandes ou britanniques.
A mon sens, la marque "F1" était distinctive en ce qu'elle remplissait pleinement sa fonction de marque, en rattachant les produits et services couverts à la société Formula One.
Mais le groupe Formula One a laissé devenir générique le terme "F1" en ce qu'il est aujourd'hui le terme usuel pour désigner à la fois des voitures et des compétitions.
Il est également descriptif en ce qu'il est l'abbréviation de "formule un" qui est l'appellation de courses automobiles bien déterminées.
En témoignage du caractère générique du terme F1, il est éloquent de relever que la société GSM avait précisé dans chaque classe du libellé de la marque "F1-live" que "tous ces [produits/services] [concernent] le domaine de la formule un".
En conclusion, la marque "F1" en dégénérescence rejoindra bientôt la longue liste des marques devenues génériques...