Cameroun : Travaux de fin d'exercice - Traitement fiscal des frais d'assistance technique

Publié le Modifié le 04/01/2016 Vu 13 195 fois 11
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En cette fin d’exercice 2015 et en vue des travaux afférents à la préparation de la liasse fiscale 2015, à transmettre à l’administration fiscale au plus tard le 15 mars 2016, nous vous proposons un tour d’horizon de quelques retraitements fiscaux nécessités par la loi fiscale camerounaise. Cette première partie porte sur les retraitements fiscaux des frais d'assistance technique.

En cette fin d’exercice 2015 et en vue des travaux afférents à la préparation de la liasse fiscale 2015,

Cameroun : Travaux de fin d'exercice - Traitement fiscal des frais d'assistance technique

En cette fin d’exercice 2015 et en vue des travaux afférents à la préparation de la liasse fiscale 2015, à transmettre à l’administration fiscale au plus tard le 15 mars 2016, nous vous proposons un tour d’horizon de quelques retraitements fiscaux nécessités par la loi fiscale camerounaise.

Première partie : Traitement fiscal des frais d’assistance technique

1. Principe de plafonnement de la déductibilité fiscale des frais d’assistance technique

1.1. Principe proprement dit

Conformément à l’Article 7.A.1.d§3 du code général des impôts (CGI), sous réserve de l’application des conventions fiscales conclues par le Cameroun, les « frais généraux de siège pour la part incombant aux opérations faites au Cameroun et les rémunérations de certains services effectifs (études, assistance technique, financière ou comptable) rendus aux entreprises camerounaises par les personnes physiques ou morales étrangères », sont fiscalement déductibles du résultat imposable à l’Impôt sur les Sociétés dans la limite des taux ci-après :

  • 5% du bénéfice imposable avant déduction des frais en cause, pour les entreprises soumises au régime général ;
  • 2,5% du chiffre d’affaires, pour les entreprises du secteur des Travaux Publics ;
  • 7,5% du chiffre d’affaires, pour les bureaux d’études et d’ingénieurs-conseils.

1.2. Portée du principe

La circulaire interprétative des dispositions fiscales de la loi de finances 2013 indique que toute prestation de service concourant à l’accroissement du rendement ou de la production de l’entreprise camerounaise qui en bénéficie, constitue une prestation d’assistance technique, lorsqu’elle est rendue par une entreprise relevant du périmètre de consolidation de la société mère de la société camerounaise en cause.

Ce faisant, l’administration entend soumettre à ce plafond de déductibilité l’ensemble des prestations de services rendues par des entités apparentées. Cette interprétation extensive a récemment suscité une vaste campagne de contrôles sur pièces initiés par la direction des grandes entreprises de la direction générale des impôts, lesquels ont donné lieu à des débats sur l’appréhension de la notion d’assistance technique.

A cette occasion, nous avions eu l’occasion d’exposer que le concept d’Assistance Technique induit toujours une part de transfert ou à tout le moins de complément à un savoir-faire ou à une technologie, que l’on ne saurait retrouver dans tout type de prestation, fût-elle rendue par une Société apparentée.

En effet, l'assistance technique peut être définie par son contenu et englobe :

  • la mise à disposition de techniciens spécialisés ;
  • les contrats de soutien technologique.

A titre d’illustration, la doctrine de la compagnie nationale des conseils en propriété intellectuelle[1] définit l’assistance technique comme un « Complément de savoir-faire destiné à aider à la réalisation, à la mise en œuvre, au développement d’un produit ou d’une technique ».

Les Nations Unies identifient cinq (5) types d'assistance technique[2] :

  • les conseils techniques ;
  • la formation des techniciens ;
  • les démonstrations en vue d'améliorer et de répandre les techniques ;
  • les entreprises pilotes ayant pour but la recherche des méthodes et des outillages qui conviennent le mieux aux conditions du milieu ;
  • la vulgarisation de l'information technique.

Ici encore, apparaît de manière plus ou moins explicite la notion de savoir-faire, de technique, qui ne saurait se rattacher à des prestations de service de toute nature.

D’ailleurs la définition fournie par la Circulaire du 08 Février 2013 précise que les prestations visées doivent être rendues à la Société bénéficiaire « en vue de renforcer ses capacités de production ou d’accroître son rendement ». Il s’agit donc de prestations qui doivent être liées directement au cœur de métier de l’entreprise, lesquelles ont vocation à influer sur l’outil de production : leur finalité étant de renforcer les capacités de production ou d’accroître le rendement.

A contrario, les charges externes de toute nature à l’instar du fret ou du transit n’ont pas cette finalité et ne sauraient donc être assimilées à de l’Assistance Technique, même au regard de la définition de la Circulaire du 08 Février 2013.

A titre d’illustration, s’il en était autrement, une prestation de nettoyage des bureaux rendue à une Société spécialisée dans la conception de logiciels, constituerait de l’assistance technique ; uniquement parce qu’elle serait rendue par une entité apparentée. Une telle acception serait absurde, du point de vue de la notion économique d’Assistance Technique telle que définie ci-dessus.

Au regard des définitions de l’Assistance Technique admises par la pratique des affaires, les Services de l’Administration Fiscale ne sauraient décider, en l’absence d’un élément légal concordant, que toute prestation de service constitue une prestation d’Assistance Technique, pour la simple raison qu’elle serait rendue par une Société apparentée.

En conclusion, les entreprises devraient distinguer entre les prestations rendues :

  • par des entités relevant du périmètre de consolidation de leur société-mère et correspondant à des opérations d’assistance technique à plafonner en fonction des taux prévus par l’article 7.A.1.d du code général des impôts ;
  • par des entités relevant du périmètre de consolidation de leur société-mère, mais ne correspondant pas à des opérations d’assistance technique, selon les critères définis ci avant. Cette dernière catégorie de prestations ne saurait être soumise à la limite de déductibilité fiscale de l’article 7.A.1.d du code général des impôts ;
  • par des entités ne relevant pas du périmètre de consolidation de leur société-mère, lesquelles ne sont non plus soumises à cette limite.

2. Traitement fiscal de la quote-part non déductible des frais d’assistance technique

Une fois déterminés les frais d’assistance technique à plafonner, il convient de les réintégrer au tableau 22 de la déclaration statistique et fiscale (liasse fiscale), puis de les déduire dans la partie basse du même tableau, à concurrence des taux prévus à l’article 7.A.1.d du CGI.

Concernant la limite de déductibilité basée sur le bénéfice fiscal intermédiaire, en cas de résultat fiscal intermédiaire[3] négatif, il convient de prendre en compte le résultat fiscal intermédiaire positif du dernier exercice non prescrit.

2.1. Principe

La quote-part non déductible des frais d’assistance technique est soumise aux retraitements fiscaux suivants :

  • réintégration au résultat imposable en vue d’un assujettissement à l’impôt sur les bénéfices, calculé au taux de 33 % (sauf cas de soumission au minimum de perception calculé sur la base d’un pourcentage du chiffre d'affaires)[4] ;
  • assimilation à une distribution de revenus, sous déduction du montant de l’impôt sur les bénéfices rappelé[5] et, à ce titre, taxation à l’impôt de distribution (IRCM) au taux de 16,5 % s'agissant d'un bénéficiaire domicilié à l'étranger. Ce taux est de 15% lorsque le bénéficiaire est domicilié en France ;
  • imputation de la taxe spéciale sur les revenus antérieurement acquittée, au titre de la quote-part non déductible des frais d'assistance technique, sur l’impôt calculé ci-dessus ;
  • la requalification en distribution de revenu de la quote-part non déductible des frais d’assistance technique entraîne l’absence d’exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) d’aval et corrélativement l’absence du droit à déduction de la TVA d’amont. La collecte/récupération de TVA effectuée initialement est donc neutre et ne devrait pas nécessiter de régularisation de TVA amont déduite.

2.2. Exemple d’application

Au cours de l’exercice 2015, l’entreprise de négoce GEBRYNG présente un résultat fiscal intermédiaire d’un milliard (1 000 000 000) de francs CFA et a supporté des frais d’assistance technique d’un montant de cent millions (100.000.000) de francs CFA facturés par une entité domiciliée à Saint Vincent –et Les Grenadines, relevant du périmètre de consolidation de sa société-mère G2G.

Elle devrait procéder au retraitement extracomptable suivant, aux tableaux 22 et 23 ou 24 de sa liasse fiscale :


[1] Personne morale de Droit Français regroupant les Conseils en Propriété Intellectuelle.

[2] Technical Assistance for Economic Development, United Nations, E/1327/Add. 1 О949), pp. 32-35.

[3] Il s’agit du résultat comptable auquel on rajoute l’ensemble des réintégrations de charges, y compris celles afférentes aux frais de siège.

[4] Concernant l’exercice 2015, les taux vont de 2,2% à 5,5% selon les régimes d’imposition.

[5] Application du principe dit de la cascade complète.

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1 Publié par Visiteur
04/01/2016 13:33

Très bon article cher Paco, je sais que le débat avec l'Administration fiscale sera long, parce qu'au moment d'inclure les entreprises locales dans le champ du plafonnement de déductibilité des frais d'AT, l'Administration fiscale avait une définition très extensive de cette notion. Toute prestation immatérielle pour elle relève du domaine d'assistance technique. Je pense que c'est le moment de donner à cette notion sa véritable nature historique c'est-à dire des prestations nécessitant des techniques particulières.
Ce sera également le moment de bien cerner les autres notions: Etudes, Assistance financière ou comptable, afin d'éviter les interprétations extensives et préjudiciables.
J'ai quelques observations à faire sur ton article: Au point 2.1 quand j'ai lu le retraitement du troisième tiret, j'ai eu des doutes qui se sont estompé en examinant le cas pratique. Pour être plus clair, je pense qu'au lieu de dire "Imputation de la taxe spéciale sur le revenu antérieurement acquittée sur l'impôt calculé ci-dessus" il serait mieux de dire "Imputation sur l'impôt calculé ci-dessus, la TSR antérieurement acquittée sur la quote-part non déductible des frais d'AT"

2 Publié par pgbahanag
04/01/2016 14:55

Bonjour SPM,

Merci pour ces observations, qui permettent de souligner l'intérêt de la démarche de cet espace et d'améliorer le contenu proposé.

Concernant la confrontation avec l'Administration, elle est inévitable, à partir du moment où sa position se situe aux antipodes de la logique économique et juridique de l'assistance technique. Cela étant, je relève que certaines entreprises ont fait valoir avec succès l'argumentaire exposé, dans des espèces récentes.

Le troisième tiret du point 2.1 a été modifié pour tenir compte de ton commentaire sur l'équivoque qui semblait en résulter.

A bientôt sur le forum.

Bonne année !

3 Publié par Visiteur
05/01/2016 19:07

Slt Paco,
Tres bon article de par son contenu et par la simplicite du language utilise.

Nous esperons lire d'autres articles tels que ci-dessus sur des points saillants de la fiscalite des entreprises afin de nous edifier.

Bon courage.
PS: Desole pour l'absence d'accent. J'utilise un clavier anglais.

4 Publié par pgbahanag
06/01/2016 08:32

Bonjour Serge,

Que veux-tu, t'es un anglo-saxon désormais...lol
Merci pour ce retour et à nous retrouver bientôt sur ce forum, pour d'autres échanges.

Bonne année !

5 Publié par Visiteur
09/01/2016 11:40

Slt Paco,

Merci pour ton article
je souhaite aussi avoir une analyse sur l'autre volet de l'assistance technique qui reste toujours dans les contrats de soutien technologique, mais avec cette particularité qui est que ce soutien est accompagné de logiciel téléchargés( sans support). Car, au vu des contrôles de douanes, les droits sont réclamés, et le contrôle fiscal lui va l’aligner comme étant soumis à la TSR. La notion de double imposition ne risque-t-elle pas ressortir ici

6 Publié par pgbahanag
11/01/2016 08:43

Bonjour M. Thierry,

Tu évoques l'épineux problème du traitement douanier et fiscal des logiciels au Cameroun, y compris les logiciels téléchargés.
En effet, le Ministère des Finances à travers deux de ses émanations, à savoir la direction générale des douanes et celle des impôts, traite les logiciels à la fois comme des marchandises d'où l'application de droits de porte et comme une prestation de service, générant l'exigibilité d'un impôt sur le revenu (TSR). Cette situation entraîne un surenchérissement indu du coût d'acquisition des logiciels.
En réponse à ta demande, une analyse développée du sujet sera établie dans cet espace.

7 Publié par Visiteur
20/03/2016 16:54

Deux préoccupations sur l'enregistrement comptable des contrats ou non dans l'espace ohada:
Première:
un contrat de location d'un immeuble professionnel est signé pour six ans. une seule année est payé à la signature

Deuxième: Dans le cadre d'un projet une société X vient de signer avec une Sté en BTP un contrat de main d'œuvre d'un montant de 400 Millions réglable suivant l'avancement des travaux.

Quel conduite tenir du point de vu comptable face à cet acte? dois je ou non constater comptablement les engagements liés à ces contrat en utilisant le compte charge à payer???

8 Publié par Visiteur
24/02/2018 14:06

Bonjour M. PACO,
je trouve très intéressant votre article. Mais j'ai un petit soucis. le principe de la cascade complète dont vous faites état ici est il reconnu par le droit fiscal camerounais? si oui j'aimerais avoir ses références.
Merci d'avance

9 Publié par Visiteur
28/06/2018 01:36

Bonjour,
j'ai un souci avec la base de calcul de l'IRCM sur la quote part de l'AT non déductible. Pourquoi déduire l'IS avant ce calcul?

10 Publié par Visiteur
12/08/2018 15:02

Bonjour @menjes
Désolé pour ce retour tardif.
La justification de la déduction d'IS part de l'idée que l'IRCM s'applique en l'espèce en raison de l'assimilation du flux à une distribution de revenu. Or, une distribution de revenu, en d'autres termes un dividende procède du bénéfice net (après déduction de l'IS).
Je demeure disponible pour toute clarification.

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A propos de l'auteur
Blog de CWA Legal&Tax News

Conseil Juridique et Conseil Fiscal Stagiaire au Cabinet FITAXIA, Paco bénéficie d’une expérience de neuf ans dans les domaines du Droit des Affaires OHADA et du Droit Fiscal en CEMAC, au service des entreprises intervenant au Cameroun et en zone CEMAC.

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