Dettes souveraines et conséquences juridiques

Publié le 16/02/2018 Vu 3 962 fois 0
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Le débat portant sur les moyens à mettre en œuvre pour résoudre de façon plus ordonnée les crises de dette souveraine n’est pas nouveau.

Le débat portant sur les moyens à mettre en œuvre pour résoudre de façon plus ordonnée les crises de det

Dettes souveraines et conséquences juridiques

Introduction :

La dette souveraine a pour fonction première d’aider l’État à se financer. Les budgets publics ne sont pas toujours à l’équilibre, et ils ne doivent d’ailleurs pas forcément l’être. La dette souveraine constitue le problème de politique publique le plus urgent et le plus difficile que les économies avancées aient à affronter. La dette est un héritage du passé et, d’une certaine manière, elle empêche d’envisager positivement l’avenir. Héritage du passé car à titre d’exemple, l’Etat Français a déjà connu ce genre de crise notamment pendant la période révolutionnaire ou encore sous le Directoire 1797. Ce n’est pas un problème qui existe depuis peu. Des niveaux de dette élevés exercent un effet corrosif sur le tissu social, alimentent l’anxiété et érodent la confiance. La dette amplifie aussi les préoccupations existantes vis-à-vis de l’équité et de la distribution des revenus. Il devient alors plus difficile de trouver des compromis politiques sur les ajustements budgétaires et, au total, la volonté de rembourser la dette diminue. Les éléments des crises précédentes, aujourd'hui encore, sont présents dans la crise de la dette souveraine déclenchée dans le monde au cours de l'année 2008. En effet, à l'image de la France de la fin du XVIIIème siècle, la grande majorité des Etats du monde ont actuellement un besoin important voire vital de liquidités et, au même titre que l'Etat français issu de la Révolution de 1789, l'hypothèse d'un défaut de remboursement de la dette souveraine paraît aujourd'hui envisageable et ce, même pour des Etats traditionnellement considérés comme solvables, à l'instar de ceux de la zone euro comme la Grèce, l’Irlande. Ce risque de défaut de remboursement concernait aussi les pays des autres régions notamment l’Equateur ou encore l’Argentine. A la suite de la crise financière de 2007 les enjeux liés au règlement des crises des dettes souveraines vont ainsi prendre une nouvelle dimension. En 2007 le système financier international était menacé. C’est pour éviter un écroulement de ce système et une profonde dépression que les Etats ont organisé d’importants transferts financiers du public vers le privé. Mais ces transferts ont conduit à des dérapages conséquents des déficits publics et des niveaux de dettes publiques, déjà souvent élevés. Dans l’Union européenne et plus particulièrement dans la zone euro cette dérive de l’endettement public conduit à une crise de la dette dans certains pays membres dont l’incapacité vraisemblable à rembourser leur dette souveraine et à financer leurs dépenses sur les marchés, va par un effet de contagion menacer toute la zone euro. Le point de départ de cette crise est sans doute l’annonce, le 21 octobre 2009 que le déficit public de la Grèce ne représenterait pas, 3,7 % du PIB mais plus de 12,5 % du PIB. Il devint alors évident que la Grèce, qui avait laissé filer sa dette publique, était confrontée à une situation économique insoutenable et qu’elle ne serait pas en mesure de rembourser sa dette ou de continuer à se financer sur les marchés alors que ceux-ci exigeaient des taux de plus en plus élevés pour lui faire crédit. En plus de l’exemple de la Grèce, nous pouvons aussi citer l’Italie, le Portugal, l’Espagne, la Chypre, l’Irlande, l’Argentine. Dans ce contexte, il convient de s’interroger sur les dettes souveraines et ses conséquences juridiques. Autrement dit, existe-il un encadrement de la dette souveraine au niveau international ? Avant de nous intéresser à l’aspect juridique (II), nous allons d’abord avoir une approche globale (I).

I) Approche globale de la notion de dette souveraine

A) Les fondamentaux de la dette souveraine

La dette souveraine est l’ensemble des emprunts réalisés par un Etat : les crédits bancaires, les emprunts à d’autres Etats, et les titres émis par le trésor public. Ces derniers peuvent être échangés sur le marché des obligations. Leur valeur est alors soumise à la loi de l’offre et de la demande, la majorité des acheteurs et des vendeurs se basant, pour déterminer le juste prix sur la capacité des Etats à rembourser. Cette information est donnée par la note de la dette de l’Etat.

Une dette souveraine peut être décomposée en dette domestique et en dette extérieure selon que les créanciers sont des résidents ou des non résidents. Elle peut être bilatérale c'est-à-dire entre deux Etats ou multilatérale. Les possibilités de remboursement sont étroitement liées à la capacité fiscale des pays émetteurs et donc aux performances économiques et à la bonne gestion budgétaire de ces pays.

*Fonction

La dette souveraine à pour fonction première d’aider l’Etat à se financer. Les budgets publics ne sont pas toujours équilibrés et ils ne doivent d’ailleurs pas toujours l’être. Il n’est pas irrationnel de laisser le budget fluctuer en fonction du cycle économique en laissant jouer les stabilisateurs économiques. Ces fluctuations introduisent un élément cyclique, qui finit par s’auto-annuler. Lorsque le budget est structurellement équilibré, le montant nominal de la dette ne varie pas sur le cycle et le ratio dette /PIB décroit au fil du temps. Pour sa part la zone euro a « sanctuarisé » la règle de l’équilibre structurel dans le nouveau traité. Ce traité prévoit explicitement une réduction régulière des ratios dette/PIB à long terme et représente pour les acteurs du marché une assurance solide concernant la soutenabilité de la dette dans la zone euro.

*Soutenabilité et stabilité financière

La dette atteignant des niveaux sans précédent, les questions relatives à la soutenabilité dominent les débats. Récemment, ce sont la Grèce et d’autres membres de la zone euro qui ont été au centre des préoccupations, mais les débats internes sur les perspectives budgétaires font également rage dans d’autres pays.

La dette publique d’un pays est soutenable si la politique budgétaire menée peut être maintenue sans ajustement excessif dans le futur. La soutenabilité de la dette suppose à la fois que l’Etat soit considéré comme solvable, c'est-à-dire que les créanciers aient un jugement positif sur sa capacité à rembourser sa dette à long terme, et liquide c'est-à-dire qu’il soit en mesure de refinancer la dette venant à échéance. Ces éléments reposent largement sur la confiance des créanciers et la crédibilité des autorités.

La soutenabilité est largement endogène à la politique mise en œuvre par les autorités. A l’évidence, la crédibilité de l’assainissement des comptes publics joue un rôle vital en période de fort endettement. D’autres mesures comme le traitement juridique de la dette et la volonté de rembourser déterminent toutefois la manière dont les fondamentaux de la dette interagissent avec les marchés financiers pour produire ou pas un équilibre stable et soutenable. En cas de déséquilibre, cela risque d’aboutir à une crise de la dette souveraine.

B) Crises de la dette souveraine

Une crise de la dette souveraine survient quand un pays, trop endetté est dans une telle situation économique qu’il n’est plus en mesure d’honorer les engagements attachés à sa dette et d’en assurer le remboursement intégral. De nombreuses crises de dette souveraine ont été observées à partir du milieu des années 1990. La Russie en 1998, l’Équateur, le Pakistan en 1999, l’Ukraine en 2000, l’Argentine en 2001 et le Nigeria en 2002 se sont déclarés dans l’incapacité d’honorer leurs engagements financiers vis-à-vis de leurs créanciers extérieurs. D’autres pays comme le Mexique (1995), le Brésil (1998, 2001, 2002) ou la Roumanie (1998), sans parler du Pérou ou de l’Uruguay, ont été eux aussi confrontés à des risques sérieux de défaut de paiements.

La mise en défaut d’un État sur sa dette souveraine est coûteuse pour l’ensemble de la communauté internationale. Au premier chef, les conséquences sur l’économie du pays sont lourdes :

— Risque de répudiation des marchés financiers avec perte d’accès aux financements futurs. Si les négociations qui suivent le défaut s’engagent sur une base favorable et volontaire et ne sont pas trop longues, les conditions du retour du pays sur les marchés financiers peuvent néanmoins s’avérer moins pénalisantes ;

— Baisse des échanges avec l’extérieur du fait de l’interruption des crédits commerciaux. Selon Rose (2002), cet impact est significatif et persistant (8 % par an en moyenne pendant 15 ans). De plus, en réduisant les recettes en devises tirées des exportations, les difficultés financières du pays sont amplifiées ;

— Perte de production du fait de la difficulté à négocier rapidement avec les créanciers et de l’impossibilité à trouver de nouveaux financements pendant cette période, les nouveaux prêts potentiels n’étant pas prioritaires au regard des prêts contractés antérieurement ;

— Une perte de légitimité politique des autorités du pays qui peut se traduire par la non-reconduction de leur mandat.

La crise financière et économique d’un pays en défaut peut se transmettre aux autres pays par différents canaux notamment par le biais des échanges commerciaux. C’est le cas notamment lorsque les régions sont intégrées commercialement comme en Asie ou en Amérique latine, mais aussi par les taux d’intérêt du fait d’un climat de défiance vis-à-vis de l’ensemble des zones émergentes, indépendamment des risques « pays ». Dans ce cas, les pays les plus dépendants des marchés financiers internationaux risquent d’entrer à leur tour en crise.

Pour les banques ou institutions financières qui détiennent une part importante de leurs actifs sur ces pays, la détérioration de la qualité de leurs créances qui suit le défaut peut provoquer une crise systémique du système financier international.

Le défaut de l’Argentine sur sa dette publique en décembre 2001, d’une ampleur sans précédent, a accéléré les réflexions sur la nécessité de réformer le mode de résolution des crises de dettes souveraines. La crise grecque, dix ans après la crise argentine, est venue rappeler que l’insolvabilité des Etats peut avoir des conséquences économiques et humaines dramatiques. Des données montrent en effet que les pays qui ont appliqué les mesures de restrictions budgétaires les plus drastiques ont vu leurs dettes publiques augmenter de manière très importante. En Grèce, elle a explosé, pour passer de 136% du PIB au premier trimestre 2012, à 160% du PIB, son niveau d'avant restructuration. Ces derniers sont coupés de leurs sources de financement et conduits à mener des politiques d’austérité. Or ces politiques d’austérités ont, au contraire, augmenté ces dettes. Cela a provoqué dans certains cas, un désordre monétaire profond qui amplifie les récessions et provoque des transferts de richesses. Disposer d’un cadre à l’intérieur duquel organiser la restructuration des dettes souveraines représente donc un enjeu majeur.

II) Encadrement juridique de la dette souveraine

A) Encadrement au niveau européen

Depuis le début de la crise financière, certains pays européens ont connu une très forte progression de leur dette publique, liée notamment à l’augmentation de leurs dépenses pour soutenir leur économie ou venir en aide à leur système bancaire (Grèce : 175% du PIB en 2013 contre 103% en 2007 ; Italie : 128% contre 100% en 2007).  

En Europe, la crise de la dette éclate en 2010 lorsque le déficit et la dette publique grecs affolent les marchés. Cette panique est aggravée par la spéculation de certains investisseurs qui parient sur un défaut de paiement de l’Etat grec. Les marchés se mettent à exiger de la Grèce, pour son refinancement, des taux si élevés que son économie ne peut les assumer. Le risque est celui d’un défaut de paiement grec, d’un éclatement de la zone euro, et d’une propagation de la tempête financière aux autres économies de la périphérie de la zone euro (Grèce, Italie, Portugal et Espagne)

En mai 2010, les pays européens et le FMI refinancent la dette grecque en échange d’un plan d’austérité budgétaire drastique. Les Etat de la zone euro et la Banque centrale européenne imaginent en un temps record des mécanismes permettant de ramener les marchés des dettes souveraines à des comportements plus mesurés. Ces actions permettent de créer des conditions stables pour entamer les réformes structurelles, parfois très lourdes, qui sont nécessaires dans les pays touchés.

Le pacte de stabilité et de croissance, entré en vigueur en 1997 est l’instrument dont les pays de la zone euro se sont dotés afin de coordonner leurs politiques budgétaires nationales et d’éviter l’apparition de déficits budgétaires excessifs. Il prévoir une surveillance multilatérale, disposition préventive : les Etats de la zone euro présentent leurs objectifs budgétaires à moyen terme dans un programme de stabilité actualisé chaque année. Puis il prévoit également une procédure des déficits excessifs, disposition dissuasive : elle est enclenchée dès qu’un Etat dépasse le critère de déficit public fixé à 3% du PIB sauf circonstances exceptionnelles.  Le pacte sera réformé en 2005 et renforcé en 2011 par le « six-Pack » (ensemble de 5 règlements et d’une directive)

L’union européenne va se doter par la suite du mécanisme européen de stabilité pour protéger son union monétaire et pour faire face à la crise qui touche plusieurs Etats de l’Union. Le MES entre en vigueur le 27/09/2012. Il a pour but de fournir une aide financière aux Etats membres qui connaissent ou risques de connaitre de graves problèmes de financement. C’est un outil de gestion des crises pour les pays de la zone euro afin de maintenir sa stabilité financière.

Pour financer ses politiques publiques, un Etat emprunte de l’argent auprès de différents investisseurs, le plus souvent sous forme d’obligations. En situation normale, il contracte ainsi auprès de ces derniers en dette, assortie d’intérêts, et doit régulièrement contracter de la dette nouvelle pour rembourser l’ancienne. Aujourd’hui les taux d’intérêts de ces emprunts dépendent en grande partie de la note accordée par les agences de notation Moody’s, Standard and Poor’s et Fitch Ratings. Il arrive comme en Grèce que ces taux deviennent si élevés que le pays accumule les dettes et ne parvienne plus à les rembourser. Le MES a été créé pour enrayer cette spirale négative et rassurer les marchés financiers.

B) La restructuration

L'ensemble des règles de droit applicables aux emprunts d'Etat, notamment les règles de compétence, de procédure, qui encadrent l'émission d'emprunt, peut résulter de diverses sources.

L'émission d'emprunt, comme toutes les activités de l'Etat dans un « Etat de droit », obéit à des règles de droits et d'obligations de l'Etat emprunteur, des prêteurs ou des intermédiaires, qui même résultent selon les pays, de la constitution et/ou d'une loi organique, de la loi, de décrets, des règles librement posées. En droit international, il existe un principe qui règle les relations internationales : sur la base de la continuité de l'Etat, celui-ci est obligé de respecter et d'honorer les obligations internationales qu'il a consenties. Lorsqu'un accord est signé entre un Etat et une banque multinationale ou un groupe bancaire privé, en conformité avec les conditions de forme et de fond requises, nous nous trouvons devant l'existence d'une dette, qui constitue un contrat international soumis aux règles des contrats internationaux. Par contre, lorsqu'un accord d'emprunt est conclu entre deux Etats ou entre un Etat et une Institution Economique Internationale (Banque Mondiale, FMI etc.), il s'agit d'un accord international (contrat d'emprunt) régit exclusivement par le Droit des Traités. Ceci a des conséquences sur le choix du tribunal (CIRDI ou ordinaire).

Les exemples argentin ou grec montrent qu’il urge de bâtir un droit international pour la restructuration des dettes souveraines. Cela afin de préserver l'équité des parties et d'éviter les récessions prolongées. En juillet dernier, lorsque le juge fédéral américain Thomas Griesa a prononcé sa décision au sujet de l'Argentine stipulant que cette dernière devait rembourser intégralement ce que l'on a appelé les « fonds vautours », qui avaient racheté sa dette souveraine à un prix imbattable, la nouvelle a plongé le pays dans une quasi-faillite, dite « faillite Griesa ». L’Argentine a donc vécu les plans d’austérité exigés par le FMI aggravant ainsi la pauvreté pour finir en défaut de paiement fin 2001. Le pays avait été poursuivi à l’initiative des fonds spéculatifs, détenteurs de 7 % de sa dette, refusant tout allégement contre 93 % qui avaient accepté. Les tribunaux américains ont condamné comme dit auparavant l’Argentine à payer près de 7 milliards de dollars.

Cette décision a eu de profondes répercussions, suggérant ainsi que la justice américaine imposait sa règle sur les contrats exécutés dans d'autres pays. Récemment, la Grande-Bretagne a apporté un peu de clarté sur cette question, en affirmant que le remboursement des intérêts payés sur les obligations émises en Grande-Bretagne est couvert par la loi britannique et non par les décisions de la justice américaine. Mais, surtout, le fait que les négociations sur la dette argentine ont été préemptées par une cour américaine - avant que celle-ci soit contredite par une cour de justice britannique - rappelle que les solutions basées sur le marché pour gérer les crises liées aux dettes souveraines engendrent généralement le chaos. Avant la décision de Griesa, et ses conséquences, il était possible de penser que les solutions aux problèmes de remboursement de la dette souveraine devaient être trouvées par le biais de négociations décentralisées, en l'absence d'un cadre légal fort. Même après, la communauté financière et le FMI espéraient rétablir l'ordre par un simple réajustement des contrats d'emprunt, particulièrement les termes des clauses dites d'« action collective ». Mais de simples modifications, comme les amendements aux contrats, ne suffiront pas à surmonter les déficiences du système. Les conséquences de ces dysfonctionnements ne sont pas de simples inconvénients. Tarder à convenir des restructurations des dettes peut entraîner des récessions économiques plus profondes et durables, comme l'illustre le cas de la Grèce.

Dans le cadre de la restructuration, des avancées pourraient être réalisés dans différentes voies : amélioration des clauses contractuelles des émissions obligataires ; introduction de nouvelles clauses de reprofilage automatique des dettes ; utilisation des financements internationaux comme levier. En un an, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté trois résolutions visant à créer un « cadre multilatéral » applicable à la restructuration des dettes souveraines.

-           le 10 septembre 2014, elle a décidé « d'élaborer [...] un cadre juridique multilatéral applicable aux opérations de restructuration de la dette souveraine » (résolution 68/304)

-           le 29 décembre 2014, elle a créé un comité spécial pour élaborer ce cadre juridique (résolution 69/247)

-           le 10 septembre 2015, elle a défini les « principes fondamentaux qui doivent guider les opérations de restructuration de la dette souveraine ». Il est notamment précisé que « tout État a le droit, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, d'élaborer sa politique macroéconomique, et notamment de restructurer sa dette souveraine, droit dont nulle mesure abusive ne saurait empêcher ou gêner l'exercice. La restructuration doit être un dernier recours et préserver d'emblée les droits des créanciers. » (résolution 69/319).

A ce niveau nous pouvons remarquer une ambiguïté entre le principe d’honorer ses obligations et ces résolutions. Nous pouvons constater alors que l’ONU milite pour un droit international en terme de restructuration. Il est important de noter que concernant la dernière résolution, aucun pays de l’Union Européenne n’a voté en faveur de cette résolution. Ceci s’explique en grande partie par la volonté de garder un contrôle total sur les pays débiteurs. C’est aussi parce que les prêts sont accordés soit pour des raisons géostratégiques (ce fut le cas de la réduction de la dette allemande en 1953), soit en contrepartie de l’application de politiques néolibérales. C’est pourquoi l’UE mais aussi les États-Unis, le Japon, Israël, le Canada opposés à la résolution affirment, pour justifier leur vote, qu’il appartient au FMI et au Club de Paris de gérer ces questions de dettes souveraines et non à l’Assemblée générale de l’ONU où chaque État dispose d’une voix.

Autre point important à préciser est que cette résolution a été proposée par l’Afrique du Sud et la Chine.  Cet aspect ainsi que le vote démontrent la séparation entre le nouveau monde des pays émergents réunis autour de la BRICS et le monde de la Wall Street. L'Afrique du Sud agissait au nom du Groupe des 77. Sachant que le Groupe des 77 compte actuellement 134 pays sur les 193 votants à l'ONU, il est plus facile de comprendre pourquoi les autres pays contestent ces résolutions. Selon les Etats ayant voté en faveur de la résolution, elle devrait permettre d’apporter plus de cohérence au système financier international et de combler un vide juridique qui permet aux fonds « vautours » de sévir et de menacer nos sociétés. Par contre, il faut savoir que les résolutions de l'Assemblée Générale n'ont aucun pouvoir juridique contraignant, contrairement à celles du conseil de sécurité.

Néanmoins cette résolution légitime le droit des pays de mettre en place une restructuration de dettes qui leur permette de retrouver la croissance et garantisse aux investisseurs de bonne foi de ne pas être affectés par les actions sévères du système financier.

On ne s’étonnera donc pas que l’Argentine fût le premier pays à suivre la recommandation de l’ONU de transcrire cette résolution dans son corpus législatif, même en période électorale, car c’est une avancée de poids à mettre au bilan du gouvernement en place. C’est une reconnaissance internationale de la voie choisie par l’Argentine. La résolution ainsi transcrite dans la loi argentine exige aussi « l’impartialité » de toutes les institutions et intermédiaires impliqués dans l’opération, « y compris au niveau régional », qui doivent s’abstenir d’exercer une influence déplacée dans le processus ou de mener des actions générant des conflits d’intérêts ou de la corruption.

De même, les Etats ne doivent pas arbitrairement discriminer les créanciers, à moins que la différence de traitement soit justifiée, conforme au droit, raisonnable, répondant aux règles du crédit, garantisse l’égalité et soit examinée par tous les créanciers. Bonne foi, durabilité des accords, transparence, impartialité des parties, respect des immunités souveraines, et traitement équitable entre les créanciers en sont les lignes directrices.

En clair, les créanciers ne pourront plus profiter de l’absence de cadre international. Avec cette résolution, Etats et créanciers ont des obligations mais aussi des droits, étant essentiel que les pays puissent restructurer leur dette souveraine sans mettre en danger la sécurité politique, sociale ou leur souveraineté et sans obérer leur avenir.

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