kondjohenoc

Je crois en la force transformatrice de l'intelligence (TL)

Le contreseing du 1er ministre en Droit congolais : étude penchée sur le conflit entre le président TSHISEKEDI et son 1er ministre ILUNGA ILUKAMBA

Publié le 09/03/2023 Vu 1 188 fois 2
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

D'entrée de jeu, cet article explique l'étendue du pouvoir du contreseing en rapport avec la fonction du premier ministre en cas d'intérim,et de sa légalité voire faisabilité.

D'entrée de jeu, cet article explique l'étendue du pouvoir du contreseing en rapport avec la fonction du pre

Le contreseing du 1er ministre en Droit congolais : étude penchée sur le conflit entre le président TSHISEKEDI et son 1er ministre ILUNGA ILUKAMBA

PAR HENOC KONDJO WEMBOLENGA

 

INTRODUCTION

En droit constitutionnel, la production scientifique portant sur le Président de la République semble devenue excessivement volumineuse. Du moins, c’est la conclusion à laquelle est parvenu Massimo Luciani dans un essai mettant en lumière les difficultés rencontrées par la doctrine lorsqu’il s’agit de systématiser les rapports juridiques entre le chef de l’État et les autres organes constitutionnels.(1) 

En effet, Il est dangereux qu'un organe incontrôlable dirige la politique nationale. En démocratie, le pouvoir implique la responsabilité.(2) Dans certains pays francophones en Afrique, c'est toujours le Chef du Gouvernement, à savoir le chef de la majorité, qui dirige la politique, jamais le Président, même quand il est élu directement par le peuple (c'est le cas dans la moitié des États de l'UE). Et cela justement parce qu'il est contrôlable.(3)  

En France, dans la Constitution d’octobre 1946, le président dispose des prérogatives réduites. Les constituants sont ainsi fidèles à la conception républicaine d’un chef d’Etat amoindri, fruit de l’histoire des institutions dont une subite inflexion en 1958 aurait transformé la tradition.(4) Depuis la 3e République française, l'avènement des toutes les constitutions concernant cette État a essayé de réduire le totalise au chef du président de la République française. 

Par conséquent, la plupart de ses pouvoirs lui permettent seulement de surveiller que la constitution est respectée. Ils sont soumis au contreseing du premier ministre et des ministres responsables.(5)

Par sa signature, le président peut seulement attester du fait que la constitution est respectée. Par le contreseing, les ministres endossent la responsabilité de l'acte et donc le pouvoir de décision sur cet acte.(6) Ces pouvoirs appartiennent formellement au président mais réellement aux ministres.(7) En République démocratique du Congo, plus précisément au 1er  ministre. 

Cependant, il eut naissance d'un  conflit entre le président de la République , Mr Antoine TSHISEKEDI TSHILOMBO contre le 1er ministre Me sylvestre ILUNGA ILUKAMBA du fait que ce dernier, en mission par autorisation du président de la République(8) à Lubumbashi, demande de rencontrer le président au sujet des nominations faites à son insu et sans son contreseing , tirer au clair cette situation qu'il qualifie de préoccupante, révèle son porte-parole. 

Le 1er ministère affirme avoir donné à son vice premier ministre, ministre de l'intérieur , la sécurité et affaires coutumières Mr Gilbert KANKONDE MULAMBA (9) qui joué son intérim, et qui est du parti politique lequel le président est ressortissant, la mission de se contenter de la réalisation du traitement des affaires courantes et non à la signature des actes de haute portée juridique voire institutionnel et politique; plus précisément la mission de recevoir tout courrier qui lui sera adressé et/ou lui adressé et de le contacter en cas de nécessité. Celui-ci ne l'ayant pas respecté a contresigné les décisions (ordonnances) du président de la République portant sur la nomination au sein de l'armée. Et déclare en outre, que le contreseing est un acte de très grande et haute  portée juridique et politique dont la compétence est exclusivement attachée à la qualité du premier ministre et que le contreseing constitue un gage de l'équilibre politique du gouvernement que se partagent le CACH et le FFC(10) du président honoraire Joseph KABILA KABANGE. 

En revanche, Le contreseing doit souligner la cohérence politique entre les vues du président de la République irresponsable et celles du gouvernement responsable devant le Parlement.(11) La nécessité de l'accord du 1er ministre ou des ministres responsables explique l'idée du fait que les ministres doivent consentir aux termes des ordonnances du président de la République. Mais comme l'écrit BULMER, En période de cohabitation (lorsque le président d'une part, et la majorité législative et le gouvernement d'autre part, ne sont pas issus du même parti politique ou de la même coalition), il est très peu probable que le Premier ministre accepte de contresigner la décision du président.(12)Conséquence, même dans le régime de la coalition, il est toujours très difficile de contresigner une décision vu les intérêts et objectifs poursuivis. 

Ainsi, le président ne dispose pas d'un réel pouvoir de décision, le pouvoir du président dépend du système configuratif politique prôné par le texte fondateur. 

 

 

 LE CONTRESEING DU 1ER MINISTRE INTERIMAIRE ETAIT FONDE ? 

En regard de la situation bouleversante sur le contreseing, il sied d'abord de préciser sur l'intérim et même le sens du contreseing. Suivant le principe de la continuité des services publics et l'interprétation que tout le monde a su se faire du contreseing, qui certains ont vu dans ce pouvoir un pouvoir d'opposition, et d’aucuns, une compétence partagée. Il serait mieux d'en donner un net bref éclairage.

1. L'intérim est une situation administrative dans laquelle est placée une autorité administrative appelée à remplacer le titulaire désigné à un poste déterminé lorsque celui-ci se trouve soit absent de son poste, soit empêcher d'exercer sa fonction (cas de maladie, suspension, de décès, de mutation, des missions de services, etc...)(13) Le professeur Félix VUNDUAWE TE PEMAKO en donne une brève et précise définition lorsqu'il écrit en ce terme,  en touchant tous les paramètres que : « l'intérim est la situation dans laquelle une autorité administrative agit en lieu et place d'une autre autorité administrative qui lui est supérieur en vertu d'une décision d'intérim ayant pour fondement soit un texte légal ou réglementaire, soit le principe de la continuité et régularité des services publics. »(14) Il ressort de l'intérim que son pouvoir peut être organisé dans un acte (texte).  

2. Le principe de la solidarité gouvernementale ou ministérielle pour certains implique aussi le pouvoir du contreseing, ce dernier est compris comme une seconde signature qui sert d'authentifier la signature principale et marque son engagement en s'en déclarant solidaire.(15)C'est l'action de signer un acte et valider ainsi une autre signature. (16)Pour CORNU, le contreseing est une signature opposée par une autorité sur acte déjà signé par une autre autorité, auteur de l’acte, afin d'authentifier cette signature et marquer la collaboration des autorités signataires.(17) La  contresignature ne fait du contresignataire coauteur de l'acte qu'il a contresigné; la contresignature est une règle formelle mais aussi de compétence telle que voulu par le constituant. 

3. Le fondement de la contresignature du 1er ministère intérimaire fut l'objet d'un grand débat entre le courant politique et juridique de sa validité voire même sa faisabilité. De ce controverse, nous tirons la question majeure qu'il faut y répondre : est-ce le premier ministre intérimaire pouvait-il contresigner les ordonnances présidentielles ? Pour y parvenir à donner satisfaction à la préoccupation, il faut l'argumenter selon qu'il s'agit du pouvoir d'intérim d'après la Loi ou le texte qui l'organise d'une part ; et d'autre part, selon le principe de continuité des services publics.  En effet, du point de vue du texte, l'intérim est organisé par l'acte établissant le pouvoir d'intérim. Par contre, ni dans la constitution voire même la loi organique sur le gouvernement en collaboration avec le président, ni un texte spécial, il est mentionné la limite du pouvoir de l'intérimaire. Conséquence, en vertu d'un principe de Droit qui dit : ce qui n'est pas interdit, est permis. Il ne s'est pas créé légalement les limites du pouvoir de l'intérim en Droit positif congolais et à ce fait, l'agissement d'une contresignature est acceptables tout au moins. Et suivant le principe de la continuité des services publics, lorsqu'un individu est en déplacement on ne doit pas l’attendre, le service doit fonctionner. Et par fonctionner il faut l'entrevoir selon toute son étendue possible. Enfin, le pouvoir d'intérim en République démocratique du Congo n'est pas limité et l'interventionnisme de la contresignature par un 1er ministère intérimaire est valable, pour des affaires à haute ou moyenne portée politique et même juridique. 

 LE CONTRESEING, UN POUVOIR FONCTIONNEL OU INSTITUTIONNEL ? 

Le contreseing est un acte de haute portée juridique et politique dont le comprendre mérite une approche considérable.

 En effet, le pouvoir public est un pouvoir impersonnel, à l'occurrence qui ne dépend pas d'un particulier. La dépersonnalisation de ce pouvoir fait de lui un pouvoir institutionnel. Et donc, le pouvoir institutionnel ou institutionnalisé est un pouvoir dissocié de la personne et transféré à une institution juridique stable et permanente...(18)

Par opposition, le pouvoir fonctionnel est un pouvoir dont est investie une catégorie des personnes en regard des fonctions qu'elles remplissent ou occupent. 

Une tendance peut bien soutenir que le contreseing soit un pouvoir fonctionnel étant donné que la constitution le confère expressément au 1er ministère. Mais c'est mal comprendre son étendue. Le contreseing est à la fois un pouvoir fonctionnel et institutionnel, pourquoi, en raison de sa plus haute portée juridique. Le contreseing est un acte qui permet ou entraîne la collaboration entre les institutions de l'État voire entre les deux institutions qui forment l'un des pouvoirs dans un État, le pouvoir exécutif. Et par cette occasion, le contreseing est un acte d'institution et non de l'individu. 

En revanche, il est aussi à la fois fonctionnel, parce que la personne qui engage la responsabilité coopérative avec la décision du président de la République, c'est le 1er ministre de la République(19) dont la compétence est dévolue expressément. En outre, il est à la fois fonctionnel parce que le contreseing revient à la fonction du 1er ministre. 

LE CONTRESEING UNE COMPETENCE LIEE ? 

Le pourvoir lié souvent opposé au pouvoir  discrétionnaire, sont des compétences que détiennent des autorités administratives voire même politiques se trouvant dans une situation laquelle elles sont appelées à intervenir.  Considérer le contreseing comme un pouvoir lié tout comme discrétionnaire serait ambivalent.

C’est de ce fait qu’Anne COHET paraphrase Michel troper lorsqu'elle écrit : « Michel Troper revient sur la question relative à leur signature par le Président de la République. En particulier, le débat doctrinal de l’époque se focalisait essentiellement sur la portée normative de l’article 13 de la Constitution. Il s’agissait, plus précisément, de déterminer si le contreseing présidentiel était l’expression d’une compétence liée du chef de l’État ou, à l’inverse, l’expression d’une prérogative discrétionnaire de ce dernier. À ce sujet, Michel Troper défend l’idée selon laquelle ni l’une ni l’autre thèse ne saurait être validement prouvée uniquement à partir de la lettre de la Constitution. En effet, l’adhésion à une thèse « présidentialiste », en faveur d’une compétence discrétionnaire, plutôt qu’à une thèse « parlementariste », en faveur d’une compétence liée, ne dépendrait que des prémisses conceptuelles posées par l’interprète lui-même ainsi que de la méthode interprétative choisie.(20) 

En somme, la qualification de la nature du contreseing comme pouvoir discrétionnaire-pouvoir lié, dépend du contexte dont  l’interprète se fait de la situation. Le contreseing peut-être compris à la fois, comme un pouvoir lié étant donné la situation qu’obligent certaines matières lorsqu’elles font objets d’adoption. Il peut en outre, à la fois être compris comme étant un pouvoir discrétionnaire, car, il ne revient qu’à la fonction du 1ER ministre en RDC lorsqu’il y a seing du président de la république.

CONCLUSION 

La question de la contresignature du 1er ministre intérimaire a fait longuement objet d’un grand débat. La question de sa possibilité et validité au moment de l’intérim furent d’un grand impact selon différents courants. Pour certains, le contreseing est un pouvoir exclusif à la fonction du premier ministre ; pour d’autres, le contreseing est un pouvoir institutionnel dans la mesure où, même en cas d’absence, le 1er ministre peut contresigner les ordonnances du président soumis à contreseing. 

A cet effet, l’entendue du pouvoir du 1er ministre intérimaire n’est aucunement organisée par un texte. Mais en vertu d’un des principes majeurs des services de l’état, celui de la continuité des services publics, la contresignature du 1er ministre est  fondée. Et par conséquent, les ordonnances du président contresignées par un 1er ministre à intérim sont bel et bien valables. Cet angle justifie en plus, non seulement que le contreseing soit un pouvoir institutionnel dont l’imperium est détenu par le 1er ministre ; mais il est d’amblé exercé par la fonction de ce dernier.

En somme, la compétence du contreseing en Droit congolais  revient à la fonction du 1er ministre, qu’elle soit celle permanente ou celle intérimaire, et qui engage toute institution, gouvernement de la république. 

BIBLIOGRAPHIE

1.  FRANCESCO NATOLI, L'INTERPRÉTATION PRÉSIDENTIELLE DE LA CONSTITUTION DANS LES RÉGIMES PARLEMENTAIRES : COMPARAISON FRANCO-ITALIEN, REVUE INTERNATIONALE DES DROITS DE L'HOMME, N°21 , P.1 

2. Marie-Anne COHENDET, rétablir le lien entre pouvoirs et responsabilité et donc le contrôle du chef de l'exécutif, silogora, p.1 

3. IDEM 

4. Le président de la quatrième République et l'Union Française : remarques sur l'étude de la fonction présidentielle,  par Violaine CHATELAIN-CADIOU. P.1 

5. Marie-Anne, OP cit, p.1

6. IDEM

7. IBIDEM 

8. Le premier ministre sollicite au préalable l’accord du président de la république lorsqu’il projette d’effectuer des missions officielles et des déplacements privés à l’intérieur ou extérieur du pays. ART.34  de l’ordonnance N 20/016 DU 27 mars 2020 portant organisation et fonctionnement du gouvernement, modalités de collaboration entre le président de la république et le gouvernement ainsi que qu’entre les membres du gouvernement 

9. Le gouvernement est composé du premier ministre, de ministres, de vice-ministres et, le cas échéant, de vice premier ministres, de ministres d’Etat et de ministres délégués. ART.90 de la constitution du 18 février 2006.

10. CACH (CAP POUR LE CHANGEMENT), FCC (FRONT COMMUN POUR LE CONGO)

11. Le président de la quatrième République et l'Union Française : remarques sur l'étude de la fonction présidentielle, par Violaine CHATELAIN-CADIOU, p.7; G.tedeshi, le contreseing ministériel sous les différentes constitutions françaises et étrangères, dans la revue de Droit public et science politique en France et à l'étranger, 1945, p.146

12 Elliot BULMER, le pouvoir de veto présidentiel, guide introductif à l'élaboration d'une Constitution  n° 14, institute for democracy and electrol assistance, P.28

13. MBOKO, droit administratif, support du cours, p.103

14. VUNDUAWE TE PEMAKO, traité de droit administratif, larcier, éditions Afrique, 2007, P. 681 

15. Le contreseing, la toupie 

16. Pierre LERAT, vocabulaire du juriste débutant, Ellipses, 2007, p.62, au Vo 

17. Gérard CORNU, vocabulaire juridique, PUF, 12e édition mise à jour 2018

18. Dictionnaire de français 

19. ART. 79 alinéas 4 de la constitution du 18 février 2006

20.  Francesco NATOLI, l’interprétation présidentielle de la constitution dans les régimes parlementaires : une comparaison franco-italienne, la revue des droits de l’homme, 21/2022, N°21, p.2;    Michel TROPER, « La signature des ordonnances. Fonctions d’une controverse », Pouvoirs, n° 41,1987, pp. 83 et ss.

Vous avez une question ?

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Malick pombo
09/03/2023 14:26

Je salue ton œuvre cher maître

2 Publié par Pf des universités
10/03/2023 00:43

Merci cher confrère

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

A propos de l'auteur
Blog de kondjohenoc

Bienvenue sur le blog de kondjohenoc

Rechercher
Dates de publications
Commentaires récents
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles