DROIT DE REPONSE : QUELLES CONDITIONS POUR OBTENIR L’INSERTION D’UNE REPONSE DANS LA PRESSE ECRITE ?

Publié le Modifié le 12/04/2024 Vu 2 618 fois 0
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L'exercice du droit de réponse dans la presse écrite est complexe, de nombreuses conditions tenant au délai et à la forme de la demande, au destinataire et au contenu de la réponse peuvent justifier le refus d'insertion.

L'exercice du droit de réponse dans la presse écrite est complexe, de nombreuses conditions tenant au délai

DROIT DE REPONSE : QUELLES CONDITIONS POUR OBTENIR L’INSERTION D’UNE REPONSE DANS LA PRESSE ECRITE ?

La Loi du 29 juillet 1881 est le fondement de nombreuses actions judiciaires qui permettent à une personne de solliciter, la condamnation des abus dans l’exercice de la liberté d’expression commis par un tiers (diffamation, injure…).

 

Cependant, certaines situations ne permettent pas d’engager une action judiciaire qui aurait pour objet la sanction des propos litigieux. Ainsi, parfois lesdits propos ne permettent pas de caractériser une infraction de presse, d’autres fois la personne visée ne cherche pas à faire sanctionner l’auteur des propos mais souhaite uniquement y apporter une réponse.

 

Dans ces situations, le législateur a prévu qu’il était possible de solliciter l’insertion d’un droit de réponse, dont le régime de droit commun est fixé par l’article 13 de la Loi du 29 juillet 1881.

 

Notons que ce régime de droit commun, applicable à la presse écrite périodique, est adapté selon le support au sein duquel l’insertion de la réponse est sollicitée : 

 

  • L’article 6 de la Loi du 29 juillet 1982 et un décret du 6 avril 1987 prévoient un droit de réponse spécifique en matière audiovisuelle ;
  • L’article 6 IV de la Loi du 21 juin 2004 et un décret du 24 octobre 2007 régissent les conditions et modalités d’insertion d’un droit de réponse en ligne.

S’agissant de la presse écrite périodique, l’article 13 de la Loi du 29 juillet 1881, prévoit que le directeur de publication d’un journal ou d’un écrit est tenu d’insérer « les réponses de toute personne nommée ou désignée dans le journal ou écrit périodique » sous peine de 3 750 euros d'amende.

 

Plusieurs conditions de forme et de fond doivent être remplies afin que l’insertion du droit de réponse puisse avoir lieu :

 

  • Le support doit être un écrit ou un journal publié selon une certaine périodicité (quotidien, hebdomadaire, mensuel…) ;
  • La réponse dont l’insertion est sollicitée doit provenir d’une personne nommée ou désignée au sein de l’article contenant les propos auxquels il est répondu ;
  • La demande d’insertion de la réponse doit être adressée au directeur de la publication du journal dans un délai de trois mois après la date de publication de l’article auquel il est répondu ;
  • La taille de la réponse dont l’insertion est demandée doit, en principe, être limitée à la longueur de l’article qui l’a provoqué.

Précisons que le calcul de la taille de la réponse s’effectue par lignes et que la réponse pourra toujours être de 50 lignes si la taille de l’article auquel il est répondu est inférieure à 50 lignes. Inversement, si la taille de l’article est supérieure à 200 lignes, la réponse ne pourra pas excéder ce maximum.

 

Une dernière condition, tenant au contenu de la réponse, doit être remplie, afin de pouvoir solliciter l’insertion d’un droit de réponse sur le fondement de l’article 13 de la Loi du 29 juillet 1881.

 

En effet, s’agissant du contenu de la réponse, il est acquis que le principe est la liberté et que celui qui sollicite l’insertion d’une réponse est seul juge de la teneur et de l’utilité de la réponse dont il requiert l’insertion.

 

Toutefois, ce principe de liberté est considérablement amoindri par de nombreuses exceptions, récemment rappelées par un rendu par la Cour de cassation.

 

En effet, dans un arrêt rendu le 3 novembre 2020, la Chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé que :

« L’insertion d’une réponse présentée dans les conditions de forme que prévoit l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ne peut être refusée que si ladite réponse est contraire aux lois, à l’intérêt légitime des tiers, n’est pas en corrélation avec l’article auquel il est répondu et met en cause l’honneur du journaliste ou de l’organe de presse de façon disproportionnée à la teneur de l’article initial. »

 

On relève ainsi, l’insertion de la réponse peut être refusée par le directeur de la publication si le contenu de la réponse, alternativement :

 

  • Est contraire aux lois ;
  • Est contraire à l’intérêt légitime d’un tiers ;
  • N’est pas en corrélation avec l’article auquel il est répondu ;
  • Met en cause l’honneur du journaliste ou de l’organe de presse de façon disproportionnée en comparaison de la teneur de l’article initial.

Notons que la Cour de cassation a jugé récemment, à deux reprises, que : « ne porte pas atteinte à l’honneur du journaliste, auteur de l’article auquel il est répondu, la réponse qui se contente de critiquer, dans des termes proportionnés à cet article, la légitimité du but poursuivi par celui-ci, le sérieux de l’enquête conduite par son auteur, sa prudence dans l’expression ou son absence d’animosité personnelle » (Cass. Crim. 3 nov. 2020, n° 19-85.276 ; Cass. Crim. 1er sept. 2020, n° 19-81.448).

 

Ce n’est que dans l’hypothèse où la réponse dont l’insertion est sollicitée remplie toutes les conditions précitées, tant de forme que de fond, que le directeur de la publication est contraint de procéder à l’insertion de ladite réponse dans les conditions prévues par l’article 13 de la Loi du 29 juillet 1881.

 

En cas de refus injustifié de faire droit à la demande d’insertion de la réponse, le directeur de la publication se rend coupable du délit prévu par l’article 13 de la Loi du 29 juillet 1881 et il est possible d’engager une action judiciaire aux fins d’insertion forcée de la réponse dans un délai de trois mois à compter du refus.

 

Appréciations :

 

On le voit, l’insertion d’un droit de réponse dans la presse écrite n’est pas un droit absolu et les conditions à remplir afin d’obtenir cette insertion sont nombreuses et complexes.

 

Or, le respect des conditions de forme et de fond est impératif dans la mesure où il conditionne les perspectives de succès d’une action judiciaire qui viserait à obtenir l’insertion forcée du droit de réponse.

 

La multiplicité et la complexité des conditions à remplir oblige, de fait, la personne qui sollicite l’insertion d’une réponse dans un journal à se faire accompagner par un professionnel habitué à ces démarches et pratiquant le régulièrement le droit de la presse.

 

Maître Ludovic BINELLO

Avocat au Barreau de PARIS

9 Place Adolphe Max 75009 PARIS

Courriel : lbinello@ybd-avocats.fr

Téléphone : 06.51.92.69.99

 

Référencement : Droit de réponse – Presse écrite – Conditions – Mise en cause du journaliste

 

Sources : 

Cass. Crim. 3 nov. 2020, n° 19-85.276, Bull. crim. 2020 no 9 p. 81 : D. 2020. 2174 ; AJ pénal 2021. 36, obs. N. Verly ; Légipresse 2020. 588 et les obs. ; ibid. 2021. 112, étude E. Tordjman et O. Lévy 

Cass. Crim. 1er sept. 2020, n° 19-81.448, Bull. crim. 2020 no 7 p. 171 : D. 2020. 1680 ; Dalloz IP/IT 2020. 701, obs. E. Derieux ; Légipresse 2020. 468 et les obs. ; ibid. 608, étude B. Domange ; ibid. 2021. 112, étude E. Tordjman et O. Lévy

 

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