Les précautions à prendre lorsqu'on décide "d'enjoliver" son CV

Publié le 16/06/2016 Vu 1 627 fois 0
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Il est fréquent que les candidats à une offre d’emploi tentent de maximiser leurs chances d’obtenir cet emploi, surtout en période de crise. Si votre mensonge passe inaperçu et que vous êtes embauché, est-ce que la découverte ultérieure de ce mensonge peut conduire à votre licenciement ?

Il est fréquent que les candidats à une offre d’emploi tentent de maximiser leurs chances d’obtenir cet

Les précautions à prendre lorsqu'on décide

La règle que semble affirmer la jurisprudence est que le mensonge sur votre CV peut justifier votre licenciement si ce mensonge constitue un dol. Le dol est une notion d’origine civiliste et non travailliste, il est défini comme « l'ensemble des agissements trompeurs ayant entraîné le consentement qu'une des parties à un contrat, qu’elle n'aurait pas donnée si elle n'avait pas été l'objet de ces manœuvres. Les manœuvres dolosives doivent avoir causé un préjudice à celui qui réclame l’annulation du contrat » (Ch. mixte 8 juin 2007).
 

En droit du travail, cette « annulation du contrat » signifie que l’employeur aura une cause réelle et sérieuse pour licencier son salarié, tel est par exemple le cas lorsque ;

Les fonctions du salarié exigent de sa part une honnêteté et une loyauté irréprochable, tel est le cas d’un employé de banque qui était notamment chargé de contrôler et de sanctionner les éventuelles dérives déontologiques, voire les malversations, et devait devenir gérant privé du patrimoine des clients. Cet employé avait menti sur ses diplômes sur son CV, difficile après cela d’être crédible lorsqu’on contrôle les dérives déontologiques, c’est pourquoi son licenciement était justifié.

Ne pas avoir un diplôme que le salarié a prétendu avoir, est par exemple justifié le licenciement d'une biologiste dès lors qu'elle est incapable de produire à son employeur son doctorat  (Cass. soc., 13 avr. 1999, no 96-44.217). Toutefois, l’employeur doit être vigilant, il ne doit pas invoquer comme motif dans la lettre de licenciement le mensonge sur le CV car celui-ci est précontractuel. En revanche, une fois le contrat signé, l’employeur doit demander à la salariée de lui fournir une copie de son diplôme, si celle-ci est dans l’incapacité de lui fournir alors l’employeur pourra fonder le licenciement sur cette incapacité à fournir le diplôme, et non pas sur le mensonge présent dans le CV.

Ne pas avoir les compétences nécessaires, alors que vous avez prétendu les avoir sur votre CV. En effet la jurisprudence considère que le simple fait de mentir sur ses compétences peut paraître « léger » pour justifier un licenciement pour faute. La Cour de Cassation considère donc que sera justifié le licenciement se fondant sur le mensonge d’une salariée concernant ses diplômes, dès lors qu’il est avéré qu’elle n'avait pas les compétences effectives pour exercer les fonctions pour lesquelles elle a été recrutée. (Cass Soc 30 mars 1999, 96-42.912, publié au bulletin).

Toutefois, le fait de simplement enjoliver son CV sans que ceci n’ait eu une réelle incidence sur les fonctions du salarié ne peut pas justifier son licenciement pour faute, par exemple ;

La mention dans un CV d’une expérience professionnelle imprécise et susceptible d’une interprétation erronée, c’était le cas d’une employée qui avait fait figurer dans son curriculum vitae la mention " 1993 assistance de responsable de formation, à Renault pour une durée d’un an", alors qu'en réalité il ne s'agissait que d'un stage de formation de 4 mois. L’employeur considérait qu’il s’agissait d’un dol  ayant vicié son consentement car la salariée n’avait donc pas autant d’expérience qu’elle ne le prétendait. Ce que la Cass Soc 16 février 1999, 96-45.565 réfute au motif que cette information est simplement imprécise et ne constitue pas une manœuvre frauduleuse.

L’absence d’informations relatives à son état de santé ou handicap, en l’espèce une salariée est embauchée en tant que « garde à domicile » et ne mentionne pas qu’elle souffre d’un handicap à son employeur. Une fois la visite médicale d’embauche effectuée, l’employeur se rend compte du handicap puisque le médecin du travail considère qu’il faut adapter le poste de la nouvelle salariée sinon celle-ci ne serait pas apte à exercer le poste, compte tenu de son handicap. L’employeur décide de la licencier pour dol. Or la Cour de Cassation considère, à juste titre, ce licenciement nul car fondé sur l’état de santé. (Cass Soc 21/09/2005 n°03-44855)

En fait, toutes les informations précisées à l’article L1132-1 du Code du Travail n’ont pas à être mentionné dans le CV, et vous n’êtes pas obligés de répondre à votre employeur qui vous questionnerez sur l’un de ces sujets. (Voir http://www.legavox.fr/blog/paul-burdel/quelles-sont-%C2%AB-questions-interdites-21265.htm#.V2Jw2xIXi4I).
Si l’employeur fonde son licenciement sur le fait que vous lui avez caché un renseignement mentionné à l’article L1132-1 C. Trav, ce licenciement sera nul de plein droit. Les conséquences de la nullité du licenciement sont plus favorables que celle d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, vous pouvez par exemple demander votre réintégration. A défaut, vous bénéficiez des 6 mois de salaires minimum d’indemnité même sans avoir 2 ans d’ancienneté, ce qui risque souvent d’être le cas en cas de mensonge sur votre CV car votre employeur s’en rendra souvent compte rapidement.

En conclusion, il est possible d’enjoliver son CV sans que cela ne puisse constituer une faute une fois la relation contractuelle établie. Toutefois, il faut le faire avec précaution, il faut notamment être prudent quant au poste que vous allez occuper, si celui-ci requiert de grandes capacités techniques (par exemple être titulaire d’un doctorat), ou alors des fonctions éthiques (par exemple si vous êtes ministre délégué au budget, il est préférable de ne pas faire de fraude fiscale, même si cela n’entre pas dans le champ du licenciement…) alors les juges pourront considérer que votre « mensonge » constitue une manœuvre dolosive à l’encontre de l’employeur.

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