France – Suisse : comment structurer efficacement son patrimoine ?

Publié le 27/08/2025 Vu 216 fois 0
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Gérer un patrimoine entre la France et la Suisse est souvent un véritable casse-tête. Nos astuces et nos conseils sont dans cet article.

Gérer un patrimoine entre la France et la Suisse est souvent un véritable casse-tête. Nos astuces et nos co

France – Suisse : comment structurer efficacement son patrimoine ?

Gérer un patrimoine entre la France et la Suisse est souvent un véritable casse-tête. Étant à la croisée de deux systèmes juridiques et fiscaux, les particuliers s'exposent à des risques de double imposition et à des transmissions complexes.

 

Déteterminer la résidence fiscale : le point de départ impératif

 

Avant toute chose, il faut clarifier où se situe votre résidence fiscale. C'est ce critère qui détermine l'étendue de vos obligations dans chaque pays. En France, l'article 4 B du Code général des impôts (CGI) est très clair : vous êtes considéré comme résident fiscal français si vous remplissez un seul des critères suivants :

  • Votre foyer (famille) ou votre lieu de séjour principal est en France.

  • Vous exercez en France votre activité professionnelle principale.

  • Le centre de vos intérêts économiques (investissements, siège social, etc.) se trouve en France.

Il peut arriver qu'une personne soit considérée comme résidente par les deux pays simultanément. Dans ce cas, la convention fiscale de 1966 a prévu des critères pour trancher le conflit, dans cet ordre précis : le foyer d'habitation permanent, le centre des intérêts vitaux (où vos liens personnels et économiques sont les plus forts), le lieu de séjour habituel, et enfin la nationalité. Clarifier ce point est le socle de toute stratégie patrimoniale.

 

La fiscalité du patrimoine immobilier transfrontalier

 

Pour l'immobilier, la règle posée par la convention fiscale est simple : l'imposition se fait dans le pays où le bien est situé.

Si vous êtes résident suisse avec un bien en France

  • Revenus locatifs : ils sont imposables en France, selon les règles des revenus fonciers.

  • Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) : si la valeur nette de votre patrimoine immobilier français dépasse 1,3 million d'euros, vous êtes redevable de l'IFI.

  • Plus-value en cas de vente : la plus-value est taxée en France à 19 %, plus les prélèvements sociaux. Des abattements s'appliquent selon la durée de détention, menant à une exonération totale après 30 ans.

Si vous êtes résident français avec un bien en Suisse

  • Revenus : les loyers sont imposés en Suisse, selon les règles du canton. Pour éviter une double taxe, la France exonère ces revenus mais les prend en compte pour calculer le taux d'imposition appliqué à vos autres revenus français (système du taux effectif).

  • Fortune : le bien est soumis à l'impôt sur la fortune cantonal suisse.

 

La gestion des actifs financiers et des dividendes

 

Ici aussi, la convention fiscale joue son rôle, mais les démarches peuvent être techniques.

  • Dividendes : le traité limite la retenue à la source à 15 % dans le pays de la société qui verse le dividende.

Exemple concret : vous êtes résident français et recevez un dividende de 10 000 € d'une société suisse comme Nestlé. La Suisse va d'abord prélever sa taxe standard de 35 % (3 500 €). C'est à vous d'entamer une procédure auprès du fisc suisse pour récupérer le trop-perçu (20 %, soit 2 000 €), car la convention limite la taxe à 15 %. Ces 15 % restants (1 500 €) vous donneront ensuite droit à un crédit d'impôt en France.

  • Comptes bancaires : oubliez toute idée de discrétion. Avec l'Échange Automatique d'Informations (EAI), la transparence entre les deux pays est totale. Chaque année, les administrations fiscales s'informent mutuellement de tous les comptes détenus par leurs résidents respectifs.

 

Structuration juridique : le choix des enveloppes de détention

 

Bien choisir comment détenir ses actifs est une décision stratégique. La complexité des règles fiscales France-Suisse rend souvent l'accompagnement par des professionnels indispensable. Des avocats fiscalistes France-Suisse peuvent par exemple réaliser un audit complet pour proposer les montages les plus sûrs et adaptés.

  • La Société Civile Immobilière (SCI) : très utile pour un résident suisse investissant en France, elle facilite la gestion et la transmission. Attention, elle ne protège pas de l'IFI.

  • L'assurance-vie : c'est l'outil de planification successorale par excellence. Un contrat (français, suisse ou luxembourgeois) offre une grande souplesse. Son régime fiscal successoral en France (article 990 I du CGI) est son principal atout, avec un abattement de 152 500 € par bénéficiaire avant une taxation modérée.

 

Le cas particulier de l'exit tax au départ de France

 

Si vous êtes un résident fiscal français et que vous déménagez en Suisse, vous pourriez être concerné par l'Exit Tax. Ce dispositif, prévu par l'article 167 bis du CGI, vise à taxer vos plus-values latentes (non encore réalisées) sur vos portefeuilles d'actions au moment de votre départ. Il s'applique si vous avez été résident français pendant au moins 6 ans sur les 10 dernières années et que votre portefeuille dépasse 800 000 €.

Heureusement, en déménageant en Suisse, vous bénéficiez d'un sursis de paiement automatique. L'impôt ne sera dû que si vous vendez réellement vos titres plus tard.

 

Anticiper sa succession, un enjeu majeur sans convention dédiée

 

C'est le point noir. Depuis 2015, il n'y a plus de convention successorale entre la France et la Suisse. Le risque de double imposition est donc très élevé.

Exemple de double imposition : un père, résident suisse, décède. Il lègue à sa fille, résidente française, un chalet et un portefeuille d'actions, tous deux en Suisse. Le canton suisse va taxer l'ensemble de la succession. En parallèle, la France, se basant sur la résidence de l'héritière (article 750 ter du CGI), va également taxer tous les biens qu'elle reçoit, y compris ceux situés en Suisse. L'héritière se retrouve taxée deux fois sur le même héritage.

Pour éviter ce scénario catastrophe, il faut absolument anticiper. La donation de son vivant est une solution pour profiter des abattements fiscaux qui se renouvellent. Et comme mentionné précédemment, l'assurance-vie est une stratégie redoutable, car les capitaux sont transmis "hors succession" et échappent à ce champ de mines fiscal.

Structurer un patrimoine franco-suisse ne s'improvise pas. Cela exige une analyse fine de votre situation personnelle, une connaissance pointue de la convention fiscale et une planification successorale rigoureuse. C'est à ce prix que vous assurerez une gestion sereine et efficace de vos actifs entre ces deux pays.

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