1. Les personnes concernées.
La procédure de placement en redressement judiciaire concerne :
- toute personne exerçant une activité commerciale ;
- les sociétés ;
- les associations ;
- les artisans ;
- les professions libérales ;
- les agriculteurs.
2. Comment placer votre entreprise en liquidation judiciaire ?
Pour bénéficier de la procédure de placement en liquidation judiciaire, il faut se trouver en état de cessation des paiements.
Il faut également que le redressement de l’entreprise soit inenvisageable.
a) La notion de cessation des paiements.
L’article L 631-1 du Code de commerce définit la cessation de paiements comme l’impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible.
Il faut être dans l’impossibilité de payer ses dettes telles que :
- le loyer ;
- les mensualités d’un emprunt ;
- les salaires et les charges sociales ;
- les frais de fonctionnement de l’entreprise ;
- des dommages et intérêts découlant d’une condamnation ;
- des dettes fiscales ;
- etc.
Si votre entreprise n’a plus les moyens de régler ses charges, quelle qu’en soit la nature, vous êtes en état de cessation des paiements.
b) L’impossibilité d’un redressement de l’entreprise.
À la différence de ce qu’il se passe dans le cadre d’un redressement judicaire, la situation de l’entreprise doit ici être totalement obérée : il est donc impossible d’envisager une amélioration à court ou à long terme.
Le redressement est donc impossible.
Exemple : une entreprise qui aurait un passif de plusieurs millions d’euros alors que son chiffre d’affaires annuel ne dépasserait pas 100.000 euros.
Nous sommes là dans le cadre d’une situation catastrophique où aucune solution raisonnable ne peut être trouvée pour permettre la survie de l’entreprise.
Il faut donc mettre un terme à l’existence même de cette entreprise afin d’éviter une augmentation de ses dettes.
3. La procédure devant le tribunal.
Il faut déposer votre requête de placement en liquidation judiciaire devant le tribunal et présenter un dossier complet.
a) La saisine du tribunal.
Si vous êtes commerçant, gérant d’une entreprise commerciale ou artisan, vous devrez saisir :
- le tribunal de commerce ;
- la chambre commerciale du tribunal judiciaire si vous résidez en Alsace Moselle.
Si vous êtes profession libérale ou représentant d’une association, vous devrez saisir le tribunal judiciaire du lieu de votre exercice professionnel.
Vos créanciers peuvent également saisir le tribunal afin de demander la liquidation judiciaire de votre entreprise si vous ne réglez pas vos dettes.
Mais dans la majorité des cas, le tribunal est saisi par le débiteur lui-même qui souhaite “tirer un trait” sur une situation inextricable.
b) la requête en placement sous liquidation judiciaire.
Votre requête devra présenter votre entreprise et les difficultés rencontrées.
Il faut donc faire un inventaire des dettes exigibles.
Il faut également faire un inventaire des actifs et de l’activité en cours.
Votre requête écrite devra être accompagnée de toutes les pièces nécessaires, dont notamment :
- une déclaration de cessation des paiements ;
- l’état du passif exigible et de l’actif disponible ;
- un extrait d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés ;
- l’état chiffré des créances et des dettes avec l’indication du nom et du domicile des créanciers et, pour les salariés, le montant global des sommes impayées ;
- la liste des sûretés (c’est-à-dire les garanties accordées aux créanciers pour le recouvrement de leurs créances) ;
- l’inventaire sommaire des biens du débiteur ;
- l’extrait Kbis de votre entreprise ;
- les statuts ;
- les contrats de travail en cours ;
- les bons de commande et comptes rendus de livraisons effectuées au profit de vos clients ;
- les factures en attentes de paiement auprès de vos clients ;
- les factures que vous devez payer et les éventuels rappels que vous avez reçus ;
- le bilan comptable de l’année passée et un bilan provisoire de l’année en cours ;
- la liste des membres responsables solidairement des dettes sociales.
La rédaction de votre requête et la compilation des pièces pourront être faites par votre avocat qui sait comment présenter ce type de dossier.
Une fois la requête rédigée et votre dossier complet, votre avocat le déposera au greffe du tribunal.
Vous serez convoqué devant le tribunal pour que vous puissiez donner vos explications et présenter votre dossier.
Si vous êtes assisté d’un avocat, celui-ci le fera pour vous.
c) Le jugement de liquidation judiciaire.
Si le tribunal estime que la situation de votre entreprise est effectivement irrémédiablement compromise, il prononcera la liquidation judiciaire.
Un liquidateur et un juge commissaire seront nommés pour s’occuper de la liquidation de l’entreprise.
4. Les personnes nommées par le tribunal pour la liquidation judiciaire.
Le tribunal va nommer deux personnes essentielles, à savoir :
- le liquidateur ;
- le juge commissaire.
a) Le liquidateur.
Le liquidateur va prendre la place du chef d’entreprise et prendre toutes décisions utiles à la liquidation.
Il va notamment :
- procéder aux licenciements des salariés ;
- procéder à la vente des actifs de l’entreprise ;
- vérifier, avec le chef d’entreprise, l’état des créances déclarées par les créanciers afin de vérifier si celles-ci ne sont pas contestables ;
- engager toutes actions nécessaires, y compris en justice, pour recouvrer les montants dus à l’entreprise par ses débiteurs.
b) Le juge commissaire.
Le juge-commissaire doit veiller au bon déroulement des opérations de liquidation en tenant compte des intérêts de chacun.
5. Les effets du jugement de liquidation judiciaire.
a) Cessation de l’activité de l’entreprise.
L’entreprise ne peut plus exercer son activité.
Celle-ci doit cesser immédiatement.
Le tribunal peut exceptionnellement autoriser la poursuite de l’activité pour une durée de 3 mois, renouvelable une fois, soit 6 mois maximum.
b) Le chef d’entreprise est dessaisi des ses pouvoirs de gestion.
Dès que le jugement est rendu, vous perdez tous pouvoirs dans la gestion de votre entreprise.
C’est désormais le liquidateur qui va vous remplacer pour accomplir tous les actes nécessaires à la liquidation de votre entreprise.
c) Les contrats de travail sont rompus.
C’est la conséquence logique et inévitable.
À compter du jugement, le liquidateur a un délai de 15 jours pour rompre les contrats de travail en cours.
Il s’agira d’un licenciement pour motif économique.
Si exceptionnellement le tribunal a autorisé la poursuite de l’activité, la rupture des contrats de travail devra intervenir dans les 15 jours qui suivront l’expiration de l’autorisation de poursuite de l’activité.
Ce délai de 15 jours passe cependant à 21 jours si un plan de sauvegarde de l’emploi a été établi au sein de l’entreprise.
Les salaires, primes, congés payés, charges sociales seront pris en charge par l’AGS c’est-à-dire l’assurance de garantie des salaires à laquelle cotise obligatoirement tout employeur.
d) Les poursuites sont interrompues.
Vos créanciers ne peuvent plus vous poursuivre en justice pour obtenir le paiement de leurs créances.
Les mesures d’exécutions prises en application de jugements déjà rendus sont stoppées net.
De votre côté, vous ne devez plus rien régler à qui que ce soit.
C’est en effet au liquidateur de procéder au règlement des créances de votre entreprise en fonction de leur nature et de leur montant.
e) Le cours des intérêts est interrompu.
Les intérêts, conventionnels ou légaux, ainsi que toutes majorations sont stoppés net.
f) Les créanciers doivent se manifester.
Les créanciers de votre entreprise doivent se manifester dans un délai de 2 mois auprès du liquidateur afin de déclarer leur créance.
Si la créance n’est pas déclarée dans le délai requis, celle-ci cesse d’exister et le créancier ne peut plus rien réclamer, ce qui va alléger le passif de l’entreprise.
Le liquidateur examinera les créances déclarées afin de vérifier leur exigibilité et leur sérieux.
Tout désaccord se réglera au tribunal.
6. La fin des opérations de liquidation.
Ne pas oublier : l’objectif de la procédure de liquidation judiciaire est de permettre le remboursement des créanciers avant la disparition complète de l’entreprise.
Le liquidateur va donc effectuer toutes opérations nécessaires pour cela.
Le produit de la liquidation (très souvent obtenu par la vente des actifs restants) sera donc réparti entre les créanciers.
Tous les créanciers ne seront pas payés de la même manière.
Viennent en premier lieu les créanciers dits “privilégiés” tels que :
- les créanciers dont la créance est née postérieurement au jugement de liquidation judiciaire ;
- certains frais de justice ;
- les créanciers garantis par des sûretés immobilières ;
- les créanciers munis de sûretés mobilières spéciales.
Pour les autres créanciers, c’est-à-dire ceux qui ne sont titulaires d’aucune garantie, la répartition se fait proportionnellement à leur créance, s’il reste encore quelque chose à répartir…
En effet, il ne faut pas se leurrer : la liquidation d’une entreprise tient au fait qu’il n’y a plus de quoi régler les dettes.
Dans ces conditions, les créanciers non garantis ont peu de chance de recouvrer quoi que ce soit !
Lorsque toutes les opérations de liquidation sont achevées, le liquidateur adresse un rapport au tribunal pour faire l’état de la situation.
Ces opérations sont achevées lorsque :
- toutes les dettes ont pu être réglées (nous avons vu que cela est rarement le cas)
- ou :
- lorsqu’il n’existe plus d’actif suffisant pour rembourser les créanciers restants de telle sorte qu’il est inutile de continuer.
Le tribunal rend alors un jugement dans lequel il prononce la clôture des opérations de liquidation judiciaire.
En principe, les créanciers restants ne peuvent plus se retourner contre le débiteur sauf quelques rares exceptions :
- fraude fiscale ;
- dissimulation d’actifs.
Conclusion et réflexion sur la liquidation judiciaire :
La liquidation judiciaire d’une entreprise marque donc la fin de celle-ci.
Elle est le résultat d’une accumulation de dettes que l’entreprise ne peut plus régler.
Il faut cependant comprendre qu’elle ne marque pas forcément une mauvaise gestion.
Une crise économique peut conduire à cette situation sans que la gestion soit remise en cause.
Elle peut aussi traduire pour le chef d’entreprise la volonté d’amorcer quelque chose de nouveau en faisant table rase des problèmes passés.
Quelles que soient les raisons qui poussent à ce type de décision, il n’y a pas de jugement de valeur.
Il ne faut donc pas hésiter à prendre ce genre de décision quand le moment est venu.
Mais cela s’accompagne d’une réflexion préalable sur le redressement possible de l’entreprise.
Didier REINS
Avocat
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