Contrat de travail : effets de la requalification de plusieurs CDD successifs en CDI

Publié le Modifié le 16/12/2013 Vu 11 545 fois 2
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

Le 6 novembre 2013, la Cour de cassation a précisé les conséquences de la requalification de plusieurs CDD en CDI.

Le 6 novembre 2013, la Cour de cassation a précisé les conséquences de la requalification de plusieurs CDD

Contrat de travail : effets de la requalification de plusieurs CDD successifs en CDI

Le 6 novembre 2013, la Cour de cassation a jugé que le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée puis un contrat à durée indéterminée est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche et est en droit d'obtenir la reconstitution de sa carrière ainsi que la régularisation de sa rémunération. (Cass. soc., 6 novembre 2013, n° 12-15953)

*****

Le contrat de travail à durée indéterminée (CDI) étant « la forme normale et générale de la relation de travail », le contrat de travail à durée déterminée (CDD) fait figure d’exception et est à ce titre soumis à des conditions légales tenant notamment à sa forme, à sa durée et aux cas de recours autorisés.

Ainsi, l’article L1242-1 du code du travail dispose qu’« un contrat de travail à durée déterminée, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. »

Le non-respect de ces règles est généralement sanctionné par la requalification du contrat de travail à durée déterminée (CDD) en contrat à durée indéterminée (CDI).

En effet, l’article L1245-1 du code du travail prévoit la requalification en CDI de tout CDD conclu en méconnaissance de certaines dispositions parmi lesquelles figurent notamment celles de l’article L1242-1 précité.

Dès lors, tout salarié dont le contrat de travail à durée déterminée (CDD) est irrégulier pourra demander la requalification de celui-ci en contrat de travail à durée indéterminée (CDI).

Le salarié peut solliciter cette requalification, alors même que son contrat de travail à durée déterminée a été poursuivi après l'échéance du terme ou qu’il a été, après l'arrivée du terme, engagé par contrat à durée indéterminée. (Cass. soc., 1er février 2000, n° 98-41624).

En l’espèce, un salarié a travaillé au service de La Poste pendant 5 ans dans le cadre de 52 contrats à durée déterminée (CDD).

Un an plus tard, le salarié a été engagé par contrat à durée indéterminée (CDI).

Le salarié a ensuite saisi la juridiction prud'homale d'une demande en requalification de l'intégralité de la relation contractuelle en un contrat à durée indéterminée (CDI) et en paiement de diverses sommes, en invoquant une reprise d’ancienneté à compter du premier jour du premier CDD.

La cour d’appel a débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire et d'indemnité de congé payé afférente en jugeant que le salarié ne pouvait prétendre à une reprise d'ancienneté depuis le premier jour du premier contrat de travail.

D’après les juges d’appel, une telle reprise d'ancienneté ne pouvait intervenir qu’en cas de succession ininterrompue de contrats à durée déterminée ou si le salarié, en cas d'interruption, établissait qu'il s'était tenu à la disposition de l'entreprise.

Or, dans le cas présent, il y avait eu plusieurs interruptions entre certains des CDD et le salarié ne démontrait pas s’être tenu à la disposition de l’employeur durant ce laps de temps.

Dès lors, il s’agissait de savoir si les interruptions existant entre certains des CDD pouvaient faire obstacle à une reprise intégrale d’ancienneté en cas de requalification en CDI.

Cette question était loin d’être dépourvue d’intérêt dans la mesure où le montant de la rémunération dans une entreprise comme La Poste varie en fonction de l’évolution de la carrière et de l’ancienneté et qu’ainsi une reprise intégrale d’ancienneté aurait permis d’obtenir un salaire plus élevé.

La Cour de cassation a répondu par la négative en cassant et annulant l’arrêt d’appel qui avait exclu la reprise d’ancienneté du fait des interruptions intervenues entre certains des CDD.

Pour la Haute juridiction, « par l'effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié était réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche au sein de La Poste et qu'il était en droit d'obtenir la reconstitution de sa carrière ainsi que la régularisation de sa rémunération. »

En conséquence, dans le cadre d’une requalification de plusieurs CDD en CDI, le salarié est en droit de prétendre à une rémunération tenant compte de l’ancienneté déjà acquise depuis le premier jour du premier CDD, sans avoir à démontrer qu’il s’est tenu à la disposition de l’entreprise durant les périodes d’inactivité entre certains des CDD.

Contrairement à ce qu’a prétendu la cour d’appel, cette preuve selon laquelle le salarié s’est tenu à la disposition de l’employeur ne semble devoir être rapportée que si le salarié prétend à des rappels de salaires pour les périodes situées entre chaque CDD.

Or, l’arrêt commenté se prononce uniquement sur le droit à reprise d’ancienneté pour déterminer le montant de salaire à accorder lors de l’embauche ultérieure en CDI, mais ne dit rien sur le droit à rémunération durant les  périodes séparant les CDD.

Cette carence est fort heureusement palliée par un arrêt du 24 avril 2013 qui, statuant sur une affaire similaire concernant la même entreprise, a retenu que « le salarié engagé par plusieurs contrats à durée déterminée non successifs et dont le contrat de travail est requalifié en un contrat à durée indéterminée, peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat s'il s'est tenu à la disposition de l'employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail. » (Cass. soc., 24 avril 2013, n° 12-12274)

En d’autres termes, le paiement des périodes intermédiaires entre les CDD est subordonné, malgré la requalification de la relation contractuelle en CDI, à la preuve que le salarié s’est tenu à la disposition de l’employeur.

En définitive, il résulte de l’arrêt commenté que le salarié, dont les CDD ont été requalifiés en CDI, est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de sa première embauche et son ancienneté doit dès lors se calculer à compter de cette même date.

En conséquence, avec l’assistance d’un avocat spécialisé en droit social, un salarié peut se prévaloir des irrégularités de plusieurs CDD pour obtenir leur requalification en CDI ainsi que la reconstitution de sa carrière et la régularisation de sa rémunération qui devra alors tenir compte du niveau d’ancienneté ainsi atteint.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

PS : Pour une recherche facile et rapide des articles rédigés sur ces thèmes, vous pouvez taper vos "mots clés" dans la barre de recherche du blog en haut à droite, au dessus de la photographie.

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris
Tel : 01 40 26 25 01

Email :
abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1426 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Visiteur
25/07/2015 00:05

Bonjour, lors d'une d'une demande de requalification de plusieurs cdd en cdi, est ce que l ex salarié qui fait intente en justice et qui ne fait plus partis de l'effectif lors de sa demande re-integre l entreprise en cdi ou non? Merci

2 Publié par Visiteur
19/12/2015 19:43

Bonjour. La cour d appel m a requalifie mes cdd en cdi avec 17 annees d anciennete. En plus elle ordonne a mon employeur de payer la caisse des cadres depuis mon premier jour d embauche. Celle ci ne veut payer que 5 ans en arriere. Reponse?? Merci

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1426 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles