Dans le sillage des réformes engagées pour diversifier l’économie algérienne et stimuler la dynamique de l’investissement en Algérie,les pouvoirs publics ont décidé de modifier en profondeur la législation relative à l’investissement étranger qui était trop rigide.C’est le rôle dévolu à la nouvelle loi n° 16-09 du 13 août 2016 relative à la promotion de l’investissement publiée au journal officiel du 03 août 2016.
Cette novelle loi abroge les dispositions de l’ordonnance n° 01-03 du 20 août 2001 relative au développement de l’investissement.
La nouvelle loi recèle des avancées significatives et remarquables en matière d’incitation à l’investissement autant national qu’étranger notamment au matière fiscale et d’accélération des procédures.Il est utile de relever que la nouvelle loi bien que relativement libérale a laissé telles quelles certaines anciennes mesures qui ont négativement influé sur le flux d’IDE en Algérie,il s’agit de la fameuse règle des 51/49 ( plafonnement du taux de détention des sociétés algériennes par des actionnaires étrangers à 49 ℅ ) et l’institution d’un droit de péremption de l’Etat et des entreprises publiques sur les cessions de titres de participation par ou au profit d’actionnaires étrangers.
Hormis ces deux réserves,la nouvelle loi sur l’investissement devrait assurer un environnement des affaires plus souple en adéquation avec la nouvelle constitution notamment son article 43 qui énonce que :« l’Etat œuvre à améliorer le climat des affaires.Il encourage sans discrimination l’épanouissement des entreprises au service du développement économique et sociale ».
Champ d’application de la nouvelle loi
La nouvelle loi contient des dispositions qui s’appliquent aux investissements tant nationaux qu’étrangers réalisés dans les activités économiques de production de biens et de services.Il est entendu par investissement suivant l’article 2 et 6 de la loi :
- les acquisitions d’actifs entrant dans le cadre de création d’activités nouvelles, d’extension de capacités de production et /ou de réhabilitation.
- les participations dans le capital d’une société.
- les biens ,y compris rénovés,constituant des apports extérieurs en nature entrant dans le cadre d’opérations de délocalisation d’activités à partir de l’étranger.
- les biens faisant l’objet d’une levée d’option d’achat,par le crédit preneur,dans le cadre de leasing international à la condition que ces biens soient introduits sur le territoire national à l’état neuf.
Les articles 2 et 6 de la loi n° 16-09 excluent donc de la définition , les acquisitions d’actifs entrant dans le cadre d’opérations de restructurations ainsi que les reprises d’activités dans le cadre d’une privatisation partielle ou totale.
Il est indéniable que les pouvoirs publics visent par cette large définition de l’investissement éligible au régime préférentiel à favoriser les activités de production de biens et de service .
Le régime des avantages
Le nouveau code de l’investissement a prévu divers avantages dont pourraient bénéficier les investissements éligibles.Ces avantages sont divisés en trois catégories :1-les avantages communs aux investissements éligibles 2-les avantages supplémentaires au profit des activités privilégiées et/ou créatrices d’emplois 3-les avantages exceptionnels au profit des investissements présentant un intérêt particulier pour l’économie nationale.
- les avantages communs aux investissements éligibles
Contenus dans les articles 12 à 14 de la loi n° 16-09 relative à la promotion de l’investissement,ces avantages s’adressent à tous les investissements. Ces avantages sont modulés suivant l’avancement de l’investissement.
Au titre de la phase de réalisation , les avantages concernent l’exonération de droits de douanes pour les biens importés et entrant directement dans la réalisation de l’investissement,la franchise de la TVA,l’exemption de droits de mutation des biens immeubles bâtis et non bâtis destinés à la réalisation du projet d’investissement ,l’abattement de 90℅ sur le montant de la redevance locative annuelle pendant la période de réalisation de l’investissement,l’exonération de la taxe foncière sur les propriétés immobilières entrant dans le cadre de l’investissement pour une période de dix ans à compter de la date d’acquisition et enfin l’exonération des droits d’enregistrement frappant les actes constitutifs de sociétés et les augmentations de capital.
Dans l’ancienne législation , l’article 9 bis de la loi N° 01-03 du 20 août 2001 relative au développement de l’investissement ( disposition ajoutée par la loi de finance complémentaire pour l’année 2009) subordonnait l’octroi les avantages du régime général à l’engagement écrit du bénéficiaire à accorder la préférence aux produits et services d’origine algérienne et le bénéfice de la franchise de la TVA est limité aux seules acquisitions d'origine algérienne. Cette disposition a été abrogée par la nouvelle loi.
Au titre de la phase d’exploitation, les avantages octroyés ont trait à une exonération de l’IBS, de la TAP et à l’abattement de 50 ℅ sur le montant de la redevance locative annuelle fixée par les services des domaines.
Quant l’investissement est réalisé dans les localités relevant du sud et des hauts plateaux fixés par voie réglementaire ,d’autres avantages sont octroyés au titre de la phase de réalisation et d’exploitation.
2- les avantages supplémentaires au profit des activités privilégiées et/ou créatrices d’emplois
Conformément à l’article 15 alinéa 1 de la loi n° 16-09, les avantages susmentionnés ne sont pas exclusifs des incitations fiscales particulières instituées par d’autres textes en faveur des activités touristiques, industrielles et agricoles.En dehors de ces cas particuliers, la cœxistence d’avantages de même nature institués par d’autres textes avec ceux prévus par le code de l’investissement ne donne pas lieu à application cumulative des avantages considérés, mais dans cette éventualité l’investisseur bénéficie de l’incitation la plus avantageuse.
3- les avantages exceptionnels au profit des investissements présentant un intérêt particulier pour l’économie nationale.
Ces avantages exceptionnels sont pratiquement les mêmes que ceux institués par la loi 01-03 du 20 août 2001 relative au développement de l’investissement.La nouvelle loi n’a pas fixé à titre exclusif les avantages exceptionnels dont pourrait bénéficier l’investisseur portant un projet d’intérêt particulier pour l’économie nationale.L’article 18 dispose que : « les avantages exceptionnels …peuvent porter… » ce qui laisse la porte ouverte à d’autres avantages exceptionnels non visés par cet article.Ces avantages exceptionnels sont établis par voie de convention négociée entre l’investisseur et l’agence agissant pour le compte de l’Etat et ce après approbation de Conseil national de l’investissement.
Les avantages exceptionnels peuvent suivant l’article 18 porter :
- sur un allongement de la durée des avantages d’exploitation pour une période pouvant aller jusqu’à 10 ans.
- sur l’octroi des exonérations ou réduction de droits de douane,impôts,taxes et toutes autres impositions à caractère fiscal,de subventions,aides ou soutiens financiers,ainsi que toutes facilités susceptibles d’être consenties,au titre de la réalisation pour la durée convenue avec l’agence .
En outre il est fait application du principe d’exonération pour une période maximum de 5 ans des exemptions ou réduction des droits,impôts et taxes y compris la TVA appliquée aux prix des biens entrant dans le cadre des activités industrielles naissantes.D’autre part et en application de l’article 18-3 les biens et matières entrant dans la production des biens bénéficiant de l’exemption de cette TVA bénéficient du régime d’achats en franchise.
Anticipant sur d’éventuelle difficultés d’interprétation du dispositif , l’article 18-3 précise que les avantages de réalisation peuvent être transférés aux contractants de l’investisseur bénéficiaire chargés de la réalisation de l’investissement pour le compte de ce dernier mais seulement après accord de conseil national de l’investissement (CNI).
La procédure d’octroi des avantages
Sous l’ancien régime ( article 4 de l’ordonnance n° 01-03). ,les investissements ayant bénéficié d’avantages font l’objet ,préalablement à leur réalisation ,d’une déclaration d’investissement auprès de l’Agence nationale de développement des investissements (ANDI) .La nouvelle loi prévoit dans son article 4 un simple enregistrement des investissements auprès de l’ANDI.
L’octroi des avantages pour les investissements enregistrés conformément à l’article 4 est de droit sauf pour les investissement soumis à l’accord préalable du CNI ou les investissements bénéficiant des avantages devant faire l’objet d’une convention spéciale avec l’ANDI.
La formalité d’enregistrement est matérialisée suivant l’article 8 alinéa 2 par une attestation délivrée séance tenante autorisant l’investisseur de se prévaloir auprès de toutes les administrations et tous les organismes concernés des avantages auxquels il ouvre droit.
Garanties accordées aux investissements
- le traitement juste et équitable
La nouvelle loi sur l’investissement n’a pas reconduit le principe du traitement national des investisseurs étrangers consacré par l’ordonnance n° 01-03 du 20 août 2001.Sous le régime de l’ancienne législation l’investisseur étranger reçoit un traitement similaire au traitement dont peut se prévaloir un investisseur national. Desormais et en vertu de l’article 21 de la nouvelle loi , l’investisseur étranger ( personne physique ou morale) ne bénéficie plus que d’un traitement juste et équitable au regard des droits et obligations attachés à son investissement.Toutefois le principe du traitement national des investisseurs étrangers retrouve son application s’il existe une convention bilatérale ,régionale ou multilatérale signés par l’Etat algérien.
Ainsi l’investisseur ressortissant d’un pays avec lequel l’Algérie a signé une convention de protection réciproque des investissements peut se prévaloir de cette convention pour revendiquer un traitement égal à celui octroyé à l’investisseur algérien.
Pour pérenniser les avantages octroyés par la nouvelle loi et donner des gages à la stabilité juridique du nouveau dispositif , l’article 22 dispose que les effets des révisions ou des abrogations de la nouvelle loi susceptibles d’intervenir à l’avenir ne s’appliquent pas à l’investissement réalisé sous l’empire de cette loi sauf si l’invetisseur ne le demande lui-même.
- l’expropriation ou la réquisition
La nouvelle loi sur l’investissement si elle n’interdit pas l’expropriation ou la réquisition par voie administrative des investissements engagés elle pose par contre le principe de l’indemnisation juste et équitable ( article 23).
- le libre transfert du capital investi et de ses revenus.
Conformément à l’article 24 de la loi n° 16-09 , les investissements réalisés à partir d’apports en capital sous forme de numéraires ,importés par le canal bancaire et libellés dans une monnaie librement convertible régulièrement cotée par la Banque d’Algérie et cédées à cette dernière,dont le montant est égal ou supérieur à des seuils minima,déterminés en fonction du coût global du projet selon des modalités fixées par voie réglementaire,bénéficient de la garantie de transfert du capital investi et des revenus qui en découlent.Sont admis comme apports extérieurs les réinvestissements en capital des bénéfices et dividendes déclarés transférables.
La garantie de transfert ainsi que les seuils minima s’appliquent aux apports en nature mais à condition qu’ils soient d’origine externe et qu’ils fassent l’objet d’une évaluation conformément aux règles et procédures régissant la constitution des sociétés.Cette garantie porte également sur les produits réels nets de la cession et de la liquidation des investissements d’origine étrangère,même si leur montant est supérieur au capital initialement investi .
le règlement des litiges
La règle générale est que tout différend né entre l’investisseur étranger et l’Etat algérien ,résultant du fait de l’investisseur ou d’une mesure prise par l’Etat algérien à l’encontre de celui-ci,sera soumis aux juridictions algériennes territorialement compétentes .Il n’en est autrement que s’il existe une convention bilatérale ou multilatérale relatives à la conciliation et à l’arbitrage conclues par l’Etat algérien ou un accord conclu avec l’investisseur stipulant une clause particulière de règlement du différend.