Similairement à l’action en exequatur, l’action en inopposabilité du jugement étranger permet le contrôle de la régularité d’un jugement étranger par la voie principale.
La différence entre les deux procédures tient au fait que la première a pour objet de faire constater la régularité du jugement étranger en France, tandis que la seconde tend à demander à ce qu’un jugement étranger soit déclaré irrégulier, et donc inopposable, sur le territoire français.
L’action en inopposabilité, dont la finalité sera donc de priver un jugement étranger de tout effet en France, a été consacrée de façon explicite par la Cour de cassation dans son arrêt Bielski (Civ. 1re, 10 février 1971, RC 72.123).
La Cour de cassation a dans cet arrêt posé le principe de l’intérêt à agir, et donc de la recevabilité de la demande d’une partie tendant à se prémunir contre les effets d’un jugement étranger : « M. X. pouvait avoir intérêt à se prémunir contre les effets que le jugement étranger pouvait avoir, sans être déclaré exécutoire. »
Cet intérêt à agir dans l’action en inopposabilité, et donc son régime juridique propre, ont été confirmés par la Cour de cassation (Civ. 1re, 4 octobre 2005, n° 02-20258).
L’action en inopposabilité, dite encore action « dénégatoire », est donc « antithétique » à la procédure d’exequatur (Civ. 1re, 19 décembre 1995, n° 93-18082).
En dépit de ce régime juridique indépendant, le bien-fondé de l’action en inopposabilité est déterminé par la vérification des conditions de l’exequatur.
C’est en ce sens que s’est prononcée la Cour d’appel de Paris (CA Paris, 16 octobre 2003, RG n° 2002/15712) : « Considérant que l’action en inopposabilité, qui tend à faire déclarer irrégulier un jugement en France au regard des conditions d’efficacité exigées des décisions étrangères dans notre pays, est admise dans les mêmes conditions que l’exequatur. »
Dans l’hypothèse où aucune convention de coopération judiciaire ne lierait la France avec l’Etat étranger dont émane le jugement, les conditions (de l’exequatur et donc) de l’inopposabilité en France du jugement étranger seront celles du droit commun de la jurisprudence Cornelissen (Civ. 1re, 20 février 2007, n° 05-14082) : « Pour accorder l'exequatur hors de toute convention internationale, le juge français doit s'assurer que trois conditions sont remplies, à savoir la compétence indirecte du juge étranger, fondée sur le rattachement du litige au juge saisi, la conformité à l'ordre public international de fond et de procédure et l'absence de fraude à la loi ; le juge de l'exequatur n'a donc pas à vérifier que la loi appliquée par le juge étranger est celle désignée par la règle de conflit de lois française. »
Ainsi, si une seule des conditions requises pour l’exequatur du jugement étranger fait défaut (compétence, conformité à l’ordre public, absence de fraude), celui-ci sera déclaré inopposable en France.
Dans le cas où l’Etat étranger en question aurait ratifié une convention de coopération judiciaire avec la France (ces Etats étant assez nombreux), le défaut d’une seule des conditions (généralement au nombre de cinq ou six, contre trois en droit commun) entraînera l’inopposabilité du jugement en France.