Quels défis est confronté l’administration publique comorienne ?

Publié le 23/07/2010 Vu 5 123 fois 0
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Depuis son accession à l'indépendance en 1975, les Comores n'ont pas connu de stabilité politique susceptible de créer les conditions nécessaires pour le développement socioéconomique. Aujourd'hui en vue d'accroitre la maitrise de l'évolution des dépenses publiques, le gouvernement entend réduire le poids relatif à la masse salariale pour lui permettre de gérer efficacement la dette publique et de rationaliser les dépenses publiques. C'est ainsi que la reforme de l'Administration publique reste une priorité pour le gouvernement de l'Union des Comores qui a inscrit dans son plan d'action pour le premier semestre 2006 la mise en application des textes d'application de la loi portant le statut de la fonction publique et l'opérationnalisation du système de gestion des ressources humaines.

Depuis son accession à l'indépendance en 1975, les Comores n'ont pas connu de stabilité politique susceptib

Quels défis est confronté l’administration publique comorienne ?

Depuis les années 80, l’Union des Comores n’a jamais été à la hauteur  de réfléchir à une stratégie ou une  reforme pour son administration.  Malgré les recommandations suggérées par les institutions  internationales, l'administration comorienne reste silencieuse quant aux reformes formulées. Ce qui témoigne que l'action de l'administration et son mode de fonctionnement font l'objet de critiques tant de la part de ses usagers que de la part de la société civile. L'organisation, le rôle et les missions des administrations comoriennes doivent en effet être repensés et adaptés à un contexte politique, économique et social en pleine mutation.

L’administration comorienne est désormais appelée à rendre ses services à des populations de plus en plus exigeantes et informées de leurs droits et obligations. Par ailleurs, les orientations économiques qui s'inscrivent désormais dans le cadre de l'ouverture et du libre échange, impliquent le développement d'autres modes d'intervention de l'Etat dans la vie économique et une approche plus dynamique en matière de soutien aux entreprises et à l'investissement privé. Dans ces nombreux domaines, le rôle et les missions de l'administration restent encore à définir.

En effet, depuis l’indépendance des Comores, l'Etat s'est moins progressivement identifié à l'Etat-providence. Cependant, dans les dernières décennies, l'apparition de déséquilibres macro-économiques auxquels sont venues se superposer des difficultés de financement des dépenses publiques ont poussé à la contestation de l'action de l'Etat à tous les niveaux: fiscalité, réglementation, activité productive etc. Ainsi, la montée en force des problèmes que constituent le chômage de longue durée, l'exclusion sociale, la déstabilisation de pans entiers de l'économie confrontée à la concurrence et les déficits budgétaires ont mis en évidence la nécessité de moderniser l'Etat. Les défis de l'ère de la mondialisation, les besoins de la décentralisation et de la déconcentration exprimée tant par les pouvoirs locaux que par les usagers, la consolidation des fondements d'un Etat de droit, constituent autant d'éléments qui appellent à la reconsidération du rôle et des missions de l'Etat et par conséquent à la modernisation de son mode de fonctionnement.

Celle-ci se présente donc comme la recherche d'une nouvelle légitimité administrative.

Sans être tenté par les grands débats idéologiques qui ont depuis longtemps opposé les partisans du « tout Etat » et les ultra-libéraux qui préconisent un recentrage du rôle de l'Etat sur sa mission d'ordre public, il convient de rechercher, une troisième voie qui prône une révision périodique des missions du secteur publie afin de s'adapter à l'évolution de la société et aux attentes des citoyens et de l'entreprise. L’Etat ne doit par conséquent être ni trop ambitieux, ni trop modeste.

A ce propos, quelques principes directeurs peuvent être retenus:

Il apparaît indispensable que l'Etat accorde la priorité à ses responsabilités particulières en matière de gestion des services considérés comme essentiels :

  • Le maintien de l'ordre public;
  • La garantie de solidarité entre les collectivités, les groupes et les individus;
  • L’édiction des normes et le contrôle de leur application.

Le rôle de l'Etat ainsi redéfini autour des responsabilités majeures doit s'accompagner d'une mission générale de préservation de la cohésion sociale. Le maintien d'équilibres sociaux et territoriaux fondamentaux, le fonctionnement continu et égalitaire de services collectifs essentiels, la lutte contre l'exclusion, la protection des ressources naturelles relèvent, dans cette optique, de la responsabilité de l'Etat.

Sur ce, afin d'améliorer les conditions sociales des Comores en général et celles des populations les plus vulnérables en particulier, l'administration comorienne doit également être un facteur de régulation en accordant plus d'intérêt aux aspirations sociales, emploi, santé, éducation, logement, culture et loisir.

 

Les Défis économiques et la mondialisation

 

L’administration comorienne doit agir sur plusieurs fronts à la fois : face aux contraintes financières croissantes et au poids de la dette publique, il lui est demandé de faire mieux et plus avec moins de ressources. Dans un environnement économique où désormais, le changement devient la règle et la stabilité l'exception, il lui est également demandé d'ajuster ses missions et ses structures au nouveau rôle de l'Etat, de maîtriser les incidences de la politique de libre échange et de la mondialisation et de contribuer à l'amélioration des performances de l'économie nationale. Améliorer les performances de l'économie, cela veut dire procurer aux entreprises comoriennes les moyens de croître en leur offrant l'appui financier, le conseil et l'information sur les opportunités d'affaires sur le plan local, national et international.

Pour cela, l’administration comorienne est appelée à repenser son infrastructure organisationnelle d'encadrement des entreprises, selon une approche stratégique, avec un accent particulier sur le développement de nouveaux modes de prestations de services, l'investissement dans les réseaux d'entreprises, l'établissement de rapports nouveaux de confiance et de progrès entre les entreprises et les institutions bancaires et financières et une définition plus précise de ce que doit être la valeur ajoutée des administrations dans l'aide qu'elles apportent aux entreprises.

A cet égard constatons que l’administration comorienne est handicapée par :

  • Une centralisation excessive des compétences et des moyens ;
  • Une gestion routinière et un personnel pléthorique ;
  • Un mécanisme inefficace de répartition des emplois ;
  • Un système de rémunération opaque et inégalitaire ;
  • Une démobilisation du personnel en raison de l'absence de délégation et de circulation de
  • L'information ;
  • Un système de contrôle et d'évaluation inopérant;
  • Un processus législatif lent.

En d’autre terme, les relations de l'Administration avec les citoyens et les entreprises souffrent de Difficultés multiples :

  • Complexité des circuits et procédures;
  • Absence de proximité;
  • Difficulté d'accès à l'information ;
  • Mauvais accueil;
  • Agissements contraires à l'éthique.

Le système judiciaire n'est pas, en outre, adapté aux exigences du développement économique et aux attentes des investisseurs : formation quasi inexistante  en droit commercial, maritime, bancaire... absence de publication de la jurisprudence; manque de personnel de secrétariat pauvreté de l'équipement matériel.

 

Les défis sociaux

 

L’administration comorienne devra jouer un rôle de plus en plus important en matière de cohésion sociale. Instrument de régulation, l'administration peut aussi intervenir directement pour veiller à l'égalité des chances entre les citoyens, combattre les inégalités sociales et protéger les plus faibles. L'essor de la société civile et des organisations associatives ne peut, dans une période de crise, à lui seul servir de solution ou de prétexte pour le désengagement des services publics lorsqu'il s'agira de lutter contre les effets du chômage, l'exclusion des catégories sociales fragiles ou la lutte contre l'analphabétisme et 1a pauvreté.

 

Les défis politiques

 

La protection des droits du citoyen dans ses rapports avec l'administration est une action de longue haleine dont le rythme et l'aboutissement dépendent surtout de la tradition et la culture comorienne. Passer du stade du simple administré pour accéder au rang de citoyen bénéficiaire de nouveaux droits est un véritable saut qualitatif qui appelle un changement en profondeur des mentalités, tant du côté des fonctionnaires que des citoyens usagers eux-mêmes. Les uns doivent s'interdire de se réfugier dans les comportements régaliens, les autres doivent sortir de leur attitude passive pour devenir des partenaires à part entière.

Cette transformation dans les rapports administration - citoyen est à elle seule un défi majeur pour les services publics comoriens dans la mesure où elle dépend de leur capacité à promouvoir dans leur quotidien, les valeurs d'éthique et de transparence, l'équité et le respect de la légalité.

 

Les défis technologiques

 

Les tendances à travers le monde montrent que dans le troisième millénaire, l'intelligence et le savoir seront la principale source de richesse économique des personnes, des collectivités et des entreprises. C'est pourquoi, il est important que l’administration comorienne tire le meilleur profit possible des nouvelles technologies de l'information et de leurs applications dans les domaines de la gestion et des services rendus aux entreprises et aux citoyens.

La maîtrise des technologies nouvelles passe nécessairement par une plus grande valorisation des ressources humaines.

Ainsi, recentrer la puissance publique sur ses fonctions essentielles, relève aujourd'hui d'un pragmatisme prudent. Cela peut arrêter la tendance naturelle à l'expansion des services publics. Cette mesure s'impose également pour réduire les déficits publics.

 

Appuyer la relance de l'économie nationale

 

La politique économique que le gouvernement de l'Union des comores compte mener dans les années à venir se base en priorité sur la relance de l'économie par l'investissement privé qui demeure, à moyen et long termes, le principal facteur pouvant générer la croissance économique et l'emploi.

Dans cette perspective, l'appui à l'entreprise privée appelle des réformes qualitatives dans lesquelles les administrations publiques et les organismes placés sous leur tutelle doivent jouer un rôle capital. C'est le cas notamment de la promotion de l'investissement et de l'épargne, la participation du secteur privé au financement des infrastructures dans le cadre de concessions, le développement du marché des capitaux et la mise à niveau du tissu productif.

 

Garantir le respect des droits et libertés des citoyens, (I ‘Administration citoyenne)

L'Administration publique, étant un ensemble d'institutions et d'organismes au service des citoyens constituant sa raison d'être doit absolument être garante des droits et libertés des personnes physiques et morales et veiller à ce que tout un chacun puisse s'épanouir dans une société de bien-être et contribuer au développement de la Nation. A cet effet, l'Administration publique doit être:

  • Une administration de proximité : Afin que les citoyens sentent réellement que les services publics sont très proches d'eux et leurs sont facilement accessibles, le gouvernement de l'Union des comores devra s'engager dans une politique de relance de la décentralisation et de la déconcentration.
  • Respectueuse de la légalité : La loi étant l'expression de la volonté de la Nation, l'Administration ne doit en aucun cas s'écarter de l'application de ses dispositions obligatoires aussi bien pour elle que pour les citoyens. A cet effet, les gouvernements devront prendre les mesures nécessaires pour que l'ensemble des services publics respectent le principe de la légalité et se soumettent aux décisions de justice sans aucune réticence.
  • Au service du publie : L’administration doit se conformer en permanence aux principes de service public qui garantissent à tous les citoyens, l'égal accès aux prestations publiques, la continuité du service et son adaptation aux besoins des usagers.
  • Simple et transparente : L’Administration comorienne reste, en dépit des efforts accomplis, une administration complexe sur le plan des circuits et procédures. Il importe dans ce domaine de développer une politique rigoureuse de simplification des procédures et de rationalisation des méthodes de travail évitant ainsi aux citoyens les tracasseries administratives et leur garantissant l'accès facile à l'information.

L'Administration publique doit, par ailleurs, être transparente dans sa gestion interne et vis à vis de ses partenaires et des citoyens. Ses agents doivent observer les règles d'éthique et de déontologie administrative et être professionnellement et personnellement responsables de leurs actes. Toute décision susceptible de porter préjudice aux droits et intérêts des citoyens et des entreprises doit être motivée et soumise le cas échéant au contrôle juridictionnel.

Mieux gérer les services et les biens publics

Face à la rareté des ressources et à l'accroissement des besoins, et compte tenu de la volonté des pouvoirs publics de réduire le poids de la dette et la pression fiscale tout en continuant à honorer les engagements pris vis-à-vis des différents partenaires, l'Administration comorienne est appelée, pour ce qui la concerne, à optimiser et à rationaliser la gestion publique:

A cet effet, il convient de:

  • assurer la maîtrise des coûts, en recourant aux plus efficaces des modes de gestion, à l'initiation de formes nouvelles de partenariat avec les entreprises privées et enfin à l'établissement de liens durables de coopération avec les organisations non gouvernementales ;
  • développer les opérations d'audit organisationnel et d'analyse institutionnelle en vue de restructurer l'Administration ;
  • veiller à la publication des rapports de vérification et d'audit dans le but de tenir les citoyens informés quant à la manière dont l'Administration s'acquitte de ses missions et utilise les deniers publics ;
  • renforcer les compétences et moderniser les modes de gestion des ressources humaines en veillant à l'adéquation postes / profils ;
  • instituer un système adéquat de contrôle et d'évaluation des performances des agents et des services.

 

Valoriser les ressources humaines

La richesse de l’Administration comorienne réside essentiellement dans la qualité de ses ressources humaines. La qualification de ces ressources, leur motivation et leur capacité d'exprimer dans le travail quotidien toutes leurs possibilités, constituent un gage fondamental de l'efficacité des services publics. A cet égard, il est manifeste que les politiques de gestion des ressources humaines demeurent dans l'ensemble incohérentes et inadaptées.

Sur ce plan, l'objectif doit viser la mise en place d'une véritable stratégie de valorisation du potentiel humain de notre Administration. A cet effet, il convient de mettre en place au sein des administrations publiques une gestion prévisionnelle moderne et performante des effectifs, des emplois et des carrière de nature à garantir une cohérence entre l'évolution des missions de l'administration e les qualifications du personnel et la mobilité de ce dernier.

Par ailleurs, la formation continue et le perfectionnement du personnel doivent jouer pleinement leur rôle d'instruments privilégiés de valorisation des ressources humaines et de garantie de leur rendement et de leur performance.

Aussi, importe-t-il de déterminer dans chaque collectivité publique les priorités et les objectifs dans ce domaine à partir d'une réflexion sur l'évolution des missions et des fonctions et de l'analyse des besoins exprimés par les fonctionnaires et agents eux-mêmes. En outre, des formations-actions orientées vers des objectifs pratiques et des transformations concrètes de situations de travail doivent être développées en fonction des besoins.

Enfin, toute politique crédible de valorisation des ressources humaines ne saurait négliger la nécessité d'une motivation réelle et appropriée de ces ressources sur la base d'une politique cohérente et rationnelle de promotion professionnelle, de rémunération équitable et de participation au processus de prise de décision dans le cadre d'un système adéquat de responsabilisation et de délégation.

 

Plan d’action

 

Après avoir exposé la vision et la stratégie qui constituent le cadre global dans lequel s'inscrivent les grands chantiers des défis de l'administration comorienne, ce présent article dégage un Plan d'action qui précise le contenu des mesures proposées dans une perspective de court et moyen terme. Ces mesures doivent être menées parallèlement aux actions visant l'amélioration de la gestion quotidienne des services publics. Penser à une  réforme qui devrait reposer sur une démarche pragmatique globale et cohérente, mue par des principes d'action de portée générale, initiée et négociée par les acteurs qui seront responsables de sa mise en œuvre (administrations, fonctionnaires, partenaires économiques et sociaux ).

La mise en œuvre d'une politique volontariste de réforme administrative doit répondre à une triple exigence : une définition commune des objectifs, une démarche globalisée et participative et une vision stratégique.

A ce titre, l’éventuelle réforme administrative comorienne  relève d'un domaine de responsabilité partagée, nécessitant des interventions à deux niveaux :

  • D'une part, il importe que le pourvoir politique comorien arrête la vision stratégique et assure une action d'impulsion de la volonté de réforme et d'animation du processus engagé à cet effet.
  • D'autre part, il appartient aux administrations concernées d'engager des programmes de modernisation autour des axes fixés par les pouvoirs publics, tout en ayant la latitude de mener de façon permanente des actions d'autorégulation en vue d'améliorer le fonctionnement de leurs services.

 

Loin de réduire le rôle des administrations dans le processus de réforme, une telle conception, accroît leurs responsabilités dans les actions menées en vue de leur adaptation à leur propre contexte, ouvrant ainsi la voie,  à des processus sectoriels durables et auto-entretenus de réforme.

 

par ISSA SAID

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