Déchéance de crédit pour défaillance conditionnée à l'envoi d'une mise en demeure particulière

Publié le Modifié le 25/07/2018 Vu 85 107 fois 130
Légavox

9 rue Léopold Sédar Senghor

14460 Colombelles

02.61.53.08.01

La procédure de saisie immobilière peut-elle être annulée malgré les retards de remboursement des mensualités du prêt ?

La procédure de saisie immobilière peut-elle être annulée malgré les retards de remboursement des mensual

Déchéance de crédit pour défaillance conditionnée à l'envoi d'une mise en demeure particulière

Il est fréquent de constater que, suite à des mensualités de remboursement d’un prêt impayées, les banques prononcent la déchéance du terme et mettent en suite en demeure l'emprunteur de payer la totalité du crédit et non pas seulement les échéances de retard impayées. 

Le 3 juin 2015, la cour de cassation a jugé qu'une banque ou un établissement de crédit ne peut valablement demander le remboursement intégral du prêt à l'emprunteur que si elle lui a préalablement envoyé une mise en demeure restée sans effet, précisant le montant des échéances de retard impayées et le délai dont il dispose pour empêcher la déchéance du terme (Cour de cassation, 1ere chambre civile, 3 juin 2015, N° de pourvoi: 14-15655). 

Les établissements de crédits et les banques ne sont pas exempts de griefs dans le cadre de leur gestion du remboursement de leurs crédits.  

La jurisprudence leur impose de plus en plus le respect de formalités qui sont autant de fautes que les clients peuvent faire valoir à leur encontre pour échapper à la déchéance du terme de leur crédit. 

La déchéance du terme entraîne en effet une obligation de remboursement intégral et immédiat du crédit par l'emprunteur. 

En l'espèce, la célèbre société de crédit Laser Cofinoga a consenti à l'un de ses clients un prêt personnel, remboursable par mensualités, authentifié par acte notarié. 

L'emprunteur ayant cessé de payer ses échéances mensuelles, la société de crédit s'est prévalue de la déchéance du terme par lettre recommandée avec avis de réception puis l'a assigné en justice aux fins de remboursement du total du capital emprunté. 

Les juges d'appel ont accueilli favorablement la demande de paiement et condamné l'emprunteur au remboursement du total du solde de l'emprunt. 

Cependant, la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt d'appel en raison de l'absence de stipulation expresse dans le contrat de prêt dispensant la société de crédit d'adresser préalablement une mise en demeure de paiement à l'emprunteur. 

Comme dans le cas présent, les contrats de prêt stipulent en général qu' « en cas de défaillance de l'emprunteur, dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date de règlement effectif les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre le prêteur pourra vous demander une indemnité égale à x % du capital restant dû ». 

De plus, s'agissant de la défaillance, les contrats de crédit stipulent classiquement que : « la défaillance sera constituée par le non-paiement à bonne date d'une échéance ». 

Cependant, ces seules clauses contractuelles ne sont pas suffisantes. 

En effet, les juges de cassation ont considéré qu'il ne résultait pas des stipulations conventionnelles que le prêteur s'exonérait d'avoir à mettre en demeure l'emprunteur préalablement au constat de la déchéance du terme. 

Ainsi, aux termes de cette décision, la haute cour a posé le principe selon lequel : 

« si le contrat de prêt d'une somme d'argent peut prévoir que la défaillance de l'emprunteur non commerçant entraînera la déchéance du terme, celle-ci ne peut, sauf disposition expresse et non équivoque, être déclarée acquise au créancier sans la délivrance d'une mise en demeure restée sans effet, précisant le délai dont dispose le débiteur pour y faire obstacle ». 

Il en résulte que la banque n'est dispensée d'adresser une mise en demeure avant de prononcer la déchéance du terme d'un prêt que si le contrat prévoit expressément une résiliation de plein droit. 

Par conséquent, à défaut de précisions contractuelles quant à l'absence d'envoi d'une mise en demeure, la déchéance du terme ne sera pas acquise et l'établissement de crédit ne pourra pas valablement exiger le paiement intégral des sommes dues en cas de défaillance de l'emprunteur, initier de procédure de saisie vente immobilière, ni mettre en œuvre quelque procédure d'exécution que ce soit. 

Dans le cadre des prêts immobiliers, les banques qui bénéficient d’un titre exécutoire au travers d'un acte authentique de prêt passé devant notaire ne peuvent pas prononcer automatiquement la déchéance du terme comme bon leur semble pour pouvoir après procéder à la vente du bien immobilier financé.  

La défaillance de l'emprunteur suppose donc concrètement que l'établissement de crédit envoie une mise en demeure par lettre recommandée avec avis de réception d'un genre particulier. 

Cette missive doit demander le paiement d'une somme, mais cette somme doit correspondre au montant des échéances impayées seulement.

Elle ne peut être du total montant du crédit restant du.

Cette lettre adressée en LRAR doit aussi préciser le délai dont dispose l'emprunteur pour éviter la déchéance du terme mais aussi et surtout être restée vaine et sans effet

La demande de paiement total du crédit ne constitue donc pas cette mise en demeure préalable. 

Elles se distinguent par leurs montants, la première est celle où la déchéance du terme a été unilatéralement prononcée par  l'établissement de crédit qui demande tout le capital restant dû, la seconde demande le paiement des échéances de retard. 

Autrement dit, la délivrance d'une vaine mise en demeure avant le constat de la déchéance du terme conditionne donc la validité de la demande de remboursement intégral du crédit par la banque ou l'établissement de crédit. 

A défaut d'envoi de cette mise en demeure préalable, la banque ne peut pas valablement se prévaloir de la déchéance du terme du prêt et saisir le tribunal de grande instance par voie d'assignation pour obtenir le paiement de l'intégralité des sommes dues. 

Le cas échéant, l'action de la banque sera abusive et le débiteur pourra obtenir la sanction de l'abus en sollicitant sa condamnation au versement d'une amende civile outre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi. 

Par ailleurs, il convient de garder en mémoire qu'en matière bancaire, la prescription est de deux ans à compter du premier incident de paiement non régularisé et que les saisies immobilières qui ont vocation à s’appliquer aux prêts immobiliers peuvent être contestées lorsque ce délai est dépassé. 

Concrètement, lorsque la banque pêche par inaction et engage des poursuites après plusieurs années de carence, celle-ci perd son droit d'agir en justice et son droit au remboursement. 

Or, afin d'éviter le jeu de cette courte prescription, certaines banques ont tendance à prononcer trop rapidement la déchéance du terme et à initier une procédure de saisie immobilière à la suite d’une ou de deux échéances impayées en faisant signifier un commandement de payer valant saisie immobilière, oubliant l'envoi de cette mise en demeure préalable. 

Le débiteur dispose donc d'un argument de défense efficace grâce à la contestation de la validité et de l'existence de la déchéance du terme. 

Le cas échéant, le débiteur pourra :

- faire annuler la procédure de saisie vente immobilière initiée à son encontre ;

- faire jouer la prescription bancaire de deux ans ;

- contester les intérêts du prêt lorsque le TEG est erroné ;

- solliciter la condamnation de la banque au paiement de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de l’irrégularité de la déchéance du terme et de l’ensemble des procédures d’exécution qui s’en seraient suivies ;

- imposer à la banque de mettre en place un nouvel échéancier de remboursement du crédit. 

Le recours aux services d’un avocat spécialisé peut s'avérer précieux puisqu'il permettra d'analyser les vices, fautes et carences de la banque mais aussi de négocier éventuellement amiablement le sort de la dette selon les situations. 

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris

01 40 26 25 01
abem@cabinetbem.com

www.cabinetbem.com

Vous avez une question ?
Blog de Anthony BEM

Anthony BEM

249 € TTC

1428 évaluations positives

Note : (5/5)

Posez gratuitement toutes vos questions sur notre forum juridique. Nos bénévoles vous répondent directement en ligne.

1 Publié par Maitre Anthony Bem
03/07/2016 17:19

Bonjour saturnin,

Je ne pense pas que le juge puisse valablement considérer que le dépassement du delai de 8 jours que la banque vous a donné vaille tacitement déchéance du terme.

Il faut que la banque vous adresse un courrier qui expressément fasse état de la déchéance du terme.

Cordialement.

2 Publié par Visiteur
03/07/2016 18:01

merci Maître,
Mais j'ai oublié de vous dire que dans la mise en demeure de payer sous 8 jours, la banque disait qu'elle prononcera la déchéance du terme à défaut de paiement.

En vous remerciant.

3 Publié par Visiteur
19/07/2016 21:03

Bonsoir Maitre.
Le tribunal d'instance ou m'avait assigné ma banque a rejeté la demande de résolution judiciaire du contrat (prêt à la consommation), déclare irrecevable la demande au titre du solde restant dû sur le montant total du prêt, rejette la demande de capitalisation, déboute la "banque" de toutes demandes plus amples de paiement. condamne la "banque" aux dépends.
Mon prêt existe t il toujours ?
Avec mes remerciements.

4 Publié par Maitre Anthony Bem
19/07/2016 21:45

Bonjour diogene,

Afin de me permettre de prendre connaissance de votre situation personnelle en détail et de disposer de toutes les informations nécessaires pour vous répondre en toute connaissance de cause, je vous propose de me contacter en privé pour une consultation.

A cet égard, je vous invite à choisir l'une de mes différentes modalités de consultation en cliquant sur "services" en haut de cette page.

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
10/08/2016 13:43

Bonjour
Je dois une mensualité de crédit immobilier celle de juin
J'ai honoré celle de juillet ainsi que celle de Août
Suite à un mail le conseiller me donne jusque fin septembre pour régulariser la situation
Mais la banque à prévenu la société d'assurance
Quel sont les risques
Je vais payer la somme demandé pour fin septembre
Merci de me renseigner et surtout avoir l'esprit tranquille
Cordialement

6 Publié par Maitre Anthony Bem
10/08/2016 15:20

Bonjour Lulu,

Si vous payer en septembre le solde de votre échéance mensuelle de crédit il ne se passera rien.

A moins que votre banquier ne vous accorde aucun delai de retard et vous signifie la déchéance du terme du crédit avant septembre.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
05/09/2016 19:22

Bonjour Maître,
Il y a un point qui m'échappe.
La nouvelle jurisprudence précise que les mensualités d'un prêt se prescrivent différemment du capital.
La déchéance du terme (cette lettre particulière que vous évoquez), semble devenir l'acte de naissance du litige de la dette en capital.
Mais alors, une question me vient immédiatement à l'esprit.
Il n'est pas rare, que la banque envoie plusieurs lettres recommandées à son client en difficultés. vous en convenez?
Imaginons qu' au cours de la procédure judiciaire qui suit logiquement l'envoie de cette lettre, l'emprunteur démontre par par voie de conclusions trois ans après l'envoie de cette fameuse lettre, que cette lettre est bancale.
Alors, la banque peut avoir la tentation, d'affirmer dans ses conclusions suivantes, que c'est une autre lettre qui doit faire office de déchéance du terme (cette autre lettre étant mieux
rédigée que la première.
Peut-on invoquer dans ce cas, la prescription biennale en disant que cette lettre est excipé plus de deux ans après le litige?
et dire par exemple qu'il s'agit d'un autre fait générateur qui lui, est prescrit puisqu'il n'a pas été invoqué dans les temps.

En vous remerciant par avance.

8 Publié par Maitre Anthony Bem
05/09/2016 21:03

Bonjour jules76,

La déchéance du terme ne peut être multiple et est unique.

Si cette lettre est "bancale", la banque n'a pas la faculté de décider quelle lettre doit faire office de déchéance du terme.

Le cas échéant, le délai de la prescription biennale de l'action peut utilement être invoqué si la lettre excipée à titre de déchéance du terme est vielle de plus de deux ans avant la date de l'acte introductif d'instance, à savoir l'assignation.

La possibilité de communication de la pièce n'est pas prescrite en tant que telle.

Cordialement.

9 Publié par Visiteur
06/09/2016 03:49

Merci Maître,
Donc,
d'une part: la possibilité de communiquer la pièce n'est pas prescrite
d'autre part: avec la nouvelle jurisprudence (cas 13-11636 du 2/07/14)une simple lettre suffit et aucune confirmation de déchéance du terme n'est nécessaire (question que se posait saturnin).

On peut donc dire que la banque a la possibilité en absolu, d'effectuer de multiples essais erreurs au cours de la procédure si elle a envoyé au moment du
litige une kyrielle de lettre comme c'est souvent le cas.

Elle peut donc, exciper une LRA en tant que déchéance du terme, tester la sagacité du client à contester sa validité,et en exciper une autre aux prochaines conclusions.
On pourrait même envisager que la banque perde en
première instance avec une lettre recommandée, puis
en excipe une autre en appel et gagne?

Avec mes remerciement.

10 Publié par Visiteur
06/09/2016 07:10

oups, petit correctif,
La décision de cassation qui semble préciser que la
confirmation de déchéance du terme est nécessaire et
que la mise en demeure est insuffisante est la suivante: 12-27127 du 19/12/13).
Effectivement la décision 13-11636 semble être un autre revirement et accréditer le fait qu'une confirmation de déchéance du terme est nécessaire.
La jurisprudence est instable, c'est évident.
Je reste dans mon questionnement, dans le cas où la
simple mise en demeure est suffisante, la banque peut-elle effectuer des essais erreurs successifs?

Merci

Publier un commentaire
Votre commentaire :
Inscription express :

Le présent formulaire d’inscription vous permet de vous inscrire sur le site. La base légale de ce traitement est l’exécution d’une relation contractuelle (article 6.1.b du RGPD). Les destinataires des données sont le responsable de traitement, le service client et le service technique en charge de l’administration du service, le sous-traitant Scalingo gérant le serveur web, ainsi que toute personne légalement autorisée. Le formulaire d’inscription est hébergé sur un serveur hébergé par Scalingo, basé en France et offrant des clauses de protection conformes au RGPD. Les données collectées sont conservées jusqu’à ce que l’Internaute en sollicite la suppression, étant entendu que vous pouvez demander la suppression de vos données et retirer votre consentement à tout moment. Vous disposez également d’un droit d’accès, de rectification ou de limitation du traitement relatif à vos données à caractère personnel, ainsi que d’un droit à la portabilité de vos données. Vous pouvez exercer ces droits auprès du délégué à la protection des données de LÉGAVOX qui exerce au siège social de LÉGAVOX et est joignable à l’adresse mail suivante : donneespersonnelles@legavox.fr. Le responsable de traitement est la société LÉGAVOX, sis 9 rue Léopold Sédar Senghor, joignable à l’adresse mail : responsabledetraitement@legavox.fr. Vous avez également le droit d’introduire une réclamation auprès d’une autorité de contrôle.

Rechercher
A propos de l'auteur
Blog de Anthony BEM

Avocat contentieux et enseignant, ce blog comprend plus de 3.000 articles juridiques afin de partager mes connaissances et ma passion du droit.

Je peux vous conseiller et vous représenter devant toutes les juridictions, ainsi qu'en outre mer ou de recours devant la CEDH.

+ 1400 avis clients positifs

Tel: 01.40.26.25.01 

En cas d'urgence: 06.14.15.24.59 

Email : abem@cabinetbem.com

Consultation en ligne
Image consultation en ligne

Posez vos questions juridiques en ligne

Prix

249 € Ttc

Rép : 24h max.

1428 évaluations positives

Note : (5/5)
Retrouvez-nous sur les réseaux sociaux et sur nos applications mobiles