la responsabilité de l’organisateur sportif à l’encontre des membres relève du domaine contractuel

Publié le 09/04/2013 Vu 6 553 fois 1
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La cavalière et le centre équestre sont liés par un contrat. La responsabilité consécutive à un accident survenu en promenade suppose que la cavalière – victime démontre un manquement à l’obligation de prudence, de diligence ou de surveillance. En effet, le principe en la matière est que l'organisateur d'une promenade équestre n'est astreint qu'à une obligation de moyens et qu'il appartient à la victime qui se prévaut d'un manquement à cette obligation d'en faire la démonstration. La victime considère qu’un tel manquement est caractérisé en ce que le parcours était trop difficile et inadapté pour une cavalière débutante. Le sentier était étroit et dangereux, le cheval n’était pas aussi doux que ce qu’il paraissait. Elle faisait également valoir que la monitrice n’était pas très expérimentée et se trouvait en tête de la marche alors que la victime la fermait. Les juges, s’appuyant sur de nombreuses attestations et une correspondance du mari de la victime à l’assureur, rejette l’ensemble de ces propos.

La cavalière et le centre équestre sont liés par un contrat. La responsabilité consécutive à un accident

la responsabilité de l’organisateur sportif à l’encontre des membres relève du domaine contractuel

Cass., 1ère civ., 19 février 2013, n°11-23.017 AFSP c/ CPAM et a.

Une remise au point nécessaire : la responsabilité de l’organisateur sportif à l’encontre de l’un de ses membres relève du domaine contractuel

Une élève a été blessée au visage par son instructeur pendant un cours de pencak silat (art martial pratiqué sous forme de combat rythmique).

Elle a assigné son éducateur, l’association, les assureurs et la CPAM en référé afin d’obtenir une mesure d’expertise destinée à évaluer son préjudice ainsi que le paiement d’une provision de 25.000€.

La Cour d’appelappliqua le principe de la responsabilité du commettant du fait de ses préposés (art 1384-5 du Code civil). Ainsi, le commettant est, de plein droit, responsable du dommage qui a été causé, sauf démonstration que le coup porté aurait été étranger aux attributions [du préposé] et à d'autres fins que l'esquive enseignée lors du cours.

Dans le cas de l’espèce, elle a conclu que l’enseignant ne pouvait être tenu de réparer en l’absence de démonstration évidente de ce qu'il a excédé les limites de ses fonctions ou agi à des fins étrangères.

Ainsi la Cour d’Appel a appliqué la responsabilité du commettant du fait de son préposé à un accident intervenu entre l’enseignant instructeur de la discipline sportive et un élève de cette même association.

Cette application de l’article 1384 al 5 du Code civil a été écartée assez sévèrement par les juges de la Cour de cassation. Ils rappellent, au visa de l’article 1147 du Code civil, que « la responsabilité de l'organisateur d'une activité sportive est de nature contractuelle et suppose, lorsque le créancier a un rôle actif, la faute prouvée du débiteur ».

Cette solution, faisant une application du célèbre principe de non cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, est juridiquement incontestable.

En effet, le pratiquant d’une activité sportive licencié auprès d’une association est lié par un contrat avec cette association : la licence. De par l’existence de cette licence il est donc tout à fait naturel qu’il fonde son action en réparation sur la responsabilité contractuelle. Dès lors, c’est l’ensemble du régime de la responsabilité contractuelle qui doit trouver à s’appliquer.

L’accident survenu doit être analysé à l’aune de l’obligation de sécurité de l’association à l’égard de ses pratiquants.

Or, comme le précise la Cour de cassation, le pratiquant a un rôle actif.
Cela implique que la victime doit prouver l’existence d’une faute de l’association dans la mise en œuvre de son obligation de sécurité.
Concrètement, l’organisateur d’une activité sportive n’ayant qu’une obligation de sécurité de moyens, le pratiquant blessé doit prouver que l’association n’a pas mis en œuvre tous les moyens à sa disposition pour assurer sa sécurité, manquant à un devoir de prudence et de diligence.

Ainsi, nous constatons que cette décision oblige la victime à mettre en œuvre une responsabilité pour faute prouvée, rendant l’indemnisation plus incertaine. En effet, la responsabilité de l’article 1384 al 5 du Code civil est une responsabilité de plein droit du commettant (nul besoin de prouver une faute du commettant) dès lors que le préposé a commis, dans le cadre de sa fonction, une faute (sans faute ?).

La mise en œuvre de cette responsabilité permet alors une indemnisation quasi automatique de la victime par l’assurance de l’association.

Aussi nous noterons que cela est d’autant plus vrai que depuis le 4 novembre 2010 – et l’abandon par la Cour de cassation de la théorie de l’acceptation des risques pour la responsabilité du fait des choses – il est possible de s’interroger sur l’abandon général de cette théorie. Cela pourrait avoir un impact sur la mise en œuvre de l’article 1384 al 5 du Code civil puisque si jusqu’à présent il fallait un comportement fautif du préposé allant au-delà de ce que permet l’activité sportive pour engager la responsabilité du commettant, il pourrait en être autrement dans l’avenir.

L’abandon de la théorie de l’acceptation des risques permettant une indemnisation plus facile des victimes d’accidents sportifs, cela aura un impact certain sur le montant des cotisations d’assurance.

Dès lors nous pouvons nous demander si la stricte application du principe de non cumul des responsabilités n’est pas également motivée par la prise en compte de l’impact de l’abandon de cette théorie sur l’économie du sport.

En effet, les juges de la Cour de cassation cassent de plus en plus les arrêts de Cour d’Appel qui mettent en œuvre la responsabilité délictuelle en lieu et place de la responsabilité contractuelle. Cela est étonnant car elle a elle-même par le passé mis en œuvre la responsabilité délictuelle alors qu’il était possible d’appliquer la responsabilité contractuelle, à l’image du fameux arrêt Majorettes de 2002 .

Note : Les juges de la Cour de cassation avaient profité de l’affaire pour préciser le régime de la responsabilité des associations sur l’article 1384 al 1 du Code civil alors que c’était une licenciée qui mettait en œuvre la responsabilité de l’association et de sa camarade.

Les juges ont il enfin mesuré les conséquences que la décision d’abandonner la théorie de l’acceptation des risques pouvaient avoir sur l’économie du sport ? Se sont ils rendus compte que l’indemnisation quasi automatique pouvait constituer un risque pour la survie même des associations les plus modestes ?

Il faudra attendre les prochaines décisions, mais aussi analyser le rapport sur la responsabilité en matière sportive qui devrait sortir en juillet 2013, pour connaitre l’avenir de la responsabilité civile en matière sportive.

 

 

Laura Nowak

Juriste en droit du sport

 

Sous la direction de Redouane Mahrach

Avocat en droit du sport

Cabinet RMS Avocats

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1 Publié par Pelissigo
08/07/2013 13:41

Merci pour ces éclaircissements.

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