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Harcèlement au travail : pourquoi les services RH et les dirigeants doivent sécuriser leurs enquêtes internes

Publié le 01/09/2025 Vu 67 fois 0
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Une enquête interne incomplète fragilise l’employeur : dirigeants et RH doivent agir avec rigueur face au harcèlement au travail.

Une enquête interne incomplète fragilise l’employeur : dirigeants et RH doivent agir avec rigueur face au

Harcèlement au travail : pourquoi les services RH et les dirigeants doivent sécuriser leurs enquêtes internes

La responsabilité accrue des employeurs face aux risques psychosociaux

La lutte contre le harcèlement moral, sexuel et les agissements sexistes ne relève pas seulement d’une obligation morale : elle constitue un devoir juridique pour l’employeur.
L’article L. 4121-1 du Code du travail rappelle que l’entreprise doit assurer la santé physique et mentale de ses salariés, en prenant toutes les mesures de prévention nécessaires. Les articles L. 1152-1 et L. 1153-1 renforcent cette obligation en prohibant expressément le harcèlement moral et sexuel.

Concrètement, cela signifie que le chef d’entreprise et son service des ressources humaines doivent mettre en place des dispositifs permettant de détecter rapidement les situations à risque et d’y apporter une réponse adaptée.


L’enquête interne, un outil de gestion des risques

Même si la loi ne l’impose pas, l’enquête interne est aujourd’hui incontournable dès qu’un signalement est formulé. Elle permet :

  • d’objectiver les faits rapportés,

  • de protéger immédiatement les salariés concernés,

  • de décider en connaissance de cause d’une éventuelle sanction disciplinaire,

  • de démontrer, en cas de litige, que l’employeur a agi avec diligence et sérieux.

Pour les ressources humaines, elle représente aussi un levier de dialogue avec les partenaires sociaux et une preuve de transparence vis-à-vis du personnel.


Une jurisprudence exigeante envers les employeurs

Dans une décision récente, la Cour de cassation a rappelé que si une entreprise produit un rapport d’enquête, celui-ci doit être complet et cohérent. Un rapport lacunaire ou tronqué perd toute valeur probante et ne peut fonder un licenciement disciplinaire.

Dans l’affaire jugée le 18 juin 2025, plusieurs témoignages recueillis n’avaient pas été versés au dossier, certains avaient été modifiés ou anonymisés sans justification claire. Conséquence : le licenciement a été considéré comme dépourvu de cause réelle et sérieuse, le doute profitant au salarié conformément à l’article L. 1235-1 du Code du travail.

Cette jurisprudence illustre un principe simple : une enquête mal conduite fragilise non seulement la décision disciplinaire, mais aussi la crédibilité de l’entreprise face à ses salariés et aux juges.


Les bonnes pratiques pour les services RH

Pour éviter de tels écueils, les services RH et les dirigeants doivent adopter une méthodologie rigoureuse :

  • Préparer le cadre de l’enquête : définir les objectifs, rappeler les règles de confidentialité et désigner une personne ou un comité impartial pour la mener.

  • Auditionner toutes les parties : victime présumée, salarié mis en cause, témoins directs ou indirects.

  • Conserver l’intégralité des témoignages : recourir à l’anonymisation si nécessaire, mais éviter tout caviardage qui nuirait à la transparence.

  • Documenter la démarche : rédiger des comptes rendus détaillés et dater chaque étape.

  • Respecter le contradictoire : offrir au salarié mis en cause la possibilité de s’exprimer et de présenter des éléments de défense.

En adoptant ces pratiques, l’employeur démontre son impartialité et protège l’entreprise contre un risque contentieux.


L’équilibre entre droit à la preuve et protection des salariés

Les services RH se trouvent souvent confrontés à un dilemme : comment protéger l’anonymat des témoins tout en produisant un rapport complet devant le juge ?
La jurisprudence rappelle que si l’anonymat est possible, il ne doit pas justifier l’absence de production d’éléments essentiels. La traçabilité et l’exhaustivité demeurent prioritaires.

Le rôle des RH est donc de trouver un équilibre entre la protection de la vie privée et la sécurité juridique de la procédure.


Les risques pour l’entreprise en cas de manquement

Une enquête interne jugée insuffisante ou biaisée peut entraîner :

  • la reconnaissance d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec obligation de verser des indemnités parfois conséquentes,

  • une atteinte à l’image de l’entreprise, soupçonnée de ne pas protéger ses salariés,

  • une perte de confiance interne et une détérioration du climat social.

Ces conséquences dépassent le cadre juridique : elles impactent directement la performance et la réputation de l’organisation.


L’apport des conseils extérieurs

Pour garantir l’impartialité et la qualité d’une enquête, les dirigeants peuvent recourir à des cabinets spécialisés ou à des avocats en droit du travail. Leur intervention permet :

  • d’apporter une expertise méthodologique,

  • de sécuriser les décisions prises,

  • d’éviter tout soupçon de partialité de la part des RH internes.


Un enjeu stratégique pour les RH et les dirigeants

La jurisprudence récente en matière de harcèlement au travail impose une vigilance accrue aux employeurs.
Pour les chefs d’entreprise et les responsables RH, il ne s’agit plus seulement de gérer un risque juridique : la manière dont l’enquête interne est conduite reflète la culture managériale et la politique sociale de l’entreprise.

 

Une enquête menée avec rigueur, transparence et respect des droits de chacun protège l’organisation, sécurise les décisions et renforce la confiance des salariés. À l’inverse, une enquête lacunaire met en péril non seulement la validité d’un licenciement, mais aussi l’image globale de l’entreprise.

 

 
 
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