La preuve du harcèlement moral des agents et fonctionnaires dans la fonction publique

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Quel est le régime juridique de la preuve du harcèlement moral des agents et fonctionnaires dans la fonction publique ?

Quel est le régime juridique de la preuve du harcèlement moral des agents et fonctionnaires dans la fonction

La preuve du harcèlement moral des agents et fonctionnaires dans la fonction publique

Le harcèlement moral des agents dans la fonction publique est une réalité masquée pour plusieurs raisons.

Sauf rares exceptions, ce qui se passe dans la fonction publique entre fonctionnaires restent dans la fonction publique, à l'instar de l'armée appelée à juste titre "la grande muette". 

Les rapports d'enquête administrative orientés ou tronqués, réalisés en interne, ne servent en réalité qu'à l'administration pour tenter de se dédouaner, en réglant au passage des sommes exorbitantes auprès de prétendus experts objectifs. 

De plus, la loi du silence ou un "effet de meute" est souvent constaté, peu importe que le harcèlement moral provienne d'un supérieur hiérarchique ou de collègues de travail.

L'autre originalité du harcèlement moral des fonctionnaires est que les juges font preuve d'une réticence à sanctionner leurs auteurs et l'administration responsable du harcèlement moral. 

La quatrième originalité tient dans les conséquences pratique de ce type de faute. 

En effet, à la différence du harcèlement moral au travail subi par un salarié dans le secteur privé, le fonctionnaire victime dans la fonction publique sera systématiquement étiquetée comme procédurier, mis au placard et d'une certaine manière sanctionné pour avoir alerté des problèmes et souhaité faire respecter ses droits. 

Enfin, la dernière originalité du harcèlement moral des fonctionnaires et agents publics tient en ce qu'ils bénéficient en principe de la "protection fonctionnelle", alors que cette aide leur est quasi systématiquement refusée. 

La protection fonctionnelle consiste en l'assistance juridique, psychologique et financière des fonctionnaires et des agents victimes de préjudices dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions tels que des faits de violence, harcèlement moral ou sexuel, dénonciation calomnieuse, etc ....

Conscient de l'ensemble de ces difficultés, le législateur a entendu protéger les fonctionnaires et les agents victimes de harcèlement moral au travail en consacrant un régime de protection spéciale.

Ainsi, l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale dispose que :

« Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ». 

Il résulte de ce texte que le harcèlement moral au travail des agents et fonctionnaires dans la fonction publique suppose la réunion de plusieurs conditions cumulatives.

La première condition posée par le texte de l’article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 est l’existence d’« agissements répétés de harcèlement moral »

A cet égard, il convient de relever l’imprécision du législateur, qui n’indique pas en quoi de tels « agissements » peuvent consister, de sorte qu'il n'existe pas de liste limitative d'actes ou de comportements constitutifs d'harcèlement moral mais au contraire une possibilité quasi infinie d'actes constitutifs de harcèlement moral. 

A titre d'exemple, il est jugé que le harcèlement moral est constitué en cas de :

  • diminution des tâches confiées,
  • privation de tout travail effectif, 
  • changement d’affectation injustifié, 
  • mesures visant à isoler l’agent, 
  • réflexions désobligeantes ou même injures, dénigrement, brimades,
  • pressions psychologiques diverses,
  • etc ...

Ces agissements doivent présenter un caractère répétitif. 

Ainsi, une succession d’agissements qui, envisagés isolément, ne présenterait pas nécessairement un caractère de gravité peut participer d’un processus de déstabilisation constitutif d’un harcèlement.

Par ailleurs, le harcèlement moral peut être vertical ou horizontal en ce que les agissements peuvent être le fait d’un supérieur hiérarchique ou provenir d’un ou plusieurs collègues, voire de personnes extérieures au service telles que des usagers. 

En outre, le harcèlement moral suppose une dégradation des conditions de travail de l’agent ou du fonctionnaire telles que :

  • la dégradation des moyens matériels nécessaires à l’exercice des fonctions,

  • la dégradation des locaux,

  • la diminution voire la privation des tâches confiées,

  • l’altération des relations entre la victime et sa hiérarchie,

Enfin, le harcèlement moral nécessite une atteinte particulière portée à l'agent ou le fonctionnaire victime du harcèlement à savoir : 

  • une atteinte aux droits, 

  • une atteinte à la santé mentale ou physique, 

  • une atteinte à la dignité, 

Par ailleurs, la preuve du harcèlement moral est allégée et facilitée pour le fonctionnaire ou l'agent qui en est victime qu'il doit doit rapportée la preuve non pas de l'existence d'un harcèlement moral mais simplement de l'existence de faits permettant de présumer l’existence d’un harcèlement. 

Il appartient en pratique à l'auteur du harcèlement moral de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement. 

Il appartient donc à l'auteur du harcèlement moral de prouver qu'il n'est pas responsable.

Le juge apprécie au cas par cas les éléments de preuve des faits tendant à faire présumer l’existence du harcèlement moral (CE, section, 11 juillet 2011, N°321225).

En défense, l’administration devra présenter « une argumentation de nature à démontrer » que les agissements en cause n'établissent pas un harcèlement moral. 

L'avantage de la plainte pénale en la matière est que le juge pénal dispose d'une enquête réalisée par les enquêteurs de la police ou de la gendarmerie qui lui permettra de se forger sa conviction pour prendre sa décision de condamnation le cas échéant.

Le juge administratif peut aussi ordonner, si besoin, toute mesure d’instruction utile afin de lui permettre de juger. 

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
Avocat à la Cour
27 bd Malesherbes - 75008 Paris

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1 Publié par Visiteur
08/07/2016 17:33

Bonjour,
Je suis agent administratif pour une mairie sur un site touristique. Sur la saison (avril à octobre)je travaille 6jrs sur 7 tous les après-midis y compris samedi dimanche.
Mon employeur refuse que je prenne des congés sur cette période. Les conditions se sont de plus en plus dégradées. Je suis amenée à effectuer des taches qui n'ont rien a voir avec ma fonction (vider poubelles, entretien fleurissement, ménage, soulever des choses lourdes...)
Mon employeur tient des propos parfois insultants à mon égard mais s'arrange toujours pour que se soit lorsque nous sommes seuls ou devant des touristes (personnes que l'on ne revoit jamais). Ce sont parfois des allusions à double sens.
J'ai essayé de lui en parler mais il me dit que je me fais des idées et que j’interprète mal les choses.
Cela devient de plus en plus difficile et je me sens de moins en moins bien moralement. Je vais travailler à reculons. Il y a quelques jours des douleurs à l'estomac sont apparues : gastrite dûe au stress.
L'équipe municipale ne me soutient pas du tout, certains s'en moquent d'autres s'amusent à faire courir le bruit que je ne travaille pas, que je coute cher à la commune...et le maire semble attiser ce climat.
Je ne sais plus quoi faire. Je n'ai de soutien de personne dans mon milieu professionnel et trop peu de preuves ou témoins pour pouvoir déposer une plainte.
Pouvez-vous me conseiller une solution ?
Par avance, merci.

2 Publié par Visiteur
08/07/2016 19:17

Je rente d'un congé longue maladie pour un cancer (tumeur cérébrale). J'avais un poste à responsabilité dans la mairie, et percevait une prime pour le secrétariat de 2 syndicats. Lors de ma reprise, je n'ai pas récupéré mes fonctions, donc suppression du régime indemnitaire correspondant, la personne qui me remplaçait a conservé mon poste, celle qui a été recruté en CDD à l'accueil est toujours là et moi la première chose que l'on me demande à mon retour c'est de faire le plan de cimetière à jour, à l'échelle et j'ai du pour cela mesurer toutes les tombes. Je suis rédacteur principal 1ère classe et j'ai fait le boulot d'un gestionnaire de cimetière. On me demande de travailler de nouveaux pour les 2 syndicats mais sans les primes car c'est compris maintenant dans mon temps de travail. Ils gardent la personne en CDD, toujours sous contrat et du coup, il faut répartir le travail en 3, mais de façon inégale. Il faut croire qu'une tumeur cérébrale rend débile !

3 Publié par Visiteur
13/07/2016 17:25

Bonjour,
Voici mon cas ma mère est "femme de ménage" c'est à se titre qu'on l'a nomme chaque jour depuis plus d'une dizaine d'années.
Son contrat est à temps partiel depuis toutes ces années, bien évidemment aucune reconnaissance pour son travail.
Elle subit plusieurs brimades depuis tout ce temps mais il y a quelques temps ça a empiré avec la venu d'un nouveau supérieur hiérarchique. En effet celui-ci passe son temps à la rabaisser et à la convoqué a des réunions pour tout et n'importe quoi, de plus il refuse de lui donner des équipements pour la sécurité de son travail. Cela constitue clairement un harcèlement moral,portant atteinte à sa dignité car on l'oblige à nettoyer des murs remplis de matières fécales en revanche on refuse de lui payer un vaccin lui évitant une infection en présence de ces extrements.J'ajoute encore qu'elle a bien évidemment peur de porter plainte à cause des représailles. Vers quelles institutions doit-elle se tourner pour cesser enfin ces comportements plus qu'inacceptable?
Merci pour votre réponse

4 Publié par Visiteur
01/08/2016 14:58

Bonjour,
Je suis un homme et depuis plus de 2 ans j'ai une collègue qui de manière délibérée, refuse de me dire bonjour, refuse d'aller dans mon bureau (de 3 personnes) pour le travail quand j'y suis, refuse toute continuité de service quant à la reprise de dossiers desquels je serais à l'origine mais ne pourrais poursuivre (absence congés, maladie, etc...) Plusieurs personnes ont été témoins de la volonté délibérée de ne pas dire bonjour en entrant dans le bureau, d'ignorer nettement ma présence, et de volontairement esquiver tout sujet me concernant. Peut on parler de harcèlement moral ? (A noter que je travaille dans l'administration d'état)
Je vous remercie

5 Publié par Maitre Anthony Bem
01/08/2016 17:25

Bonjour Dark ,

Je crains qu'aucun harcèlement moral ne puisse valablement être invoqué dans votre cas eu égard aux seuls refus de votre collègue de vous dire bonjour, d'aller dans votre bureau, ou de reprendre des dossiers de travail.

Il me semble qu'il y aurait plus une faute professionnelle sur ce denier point.

Cordialement.

6 Publié par Visiteur
06/09/2016 22:12

Bonjour
Je travaille au département du 27 et notre directrice du territoire et des pratiques managériales se traduisant par un comportement agressif et dévalorisant envers son équipe, qui se traduit notamment par de nombreux propos menaçantes, insultants et injurieux déresponsabilise son équipe,et par l’instauration d’une mauvaise ambiance de travail (peur) au sein de l’équipe qui lui était confiée
Si nous voulons prévenir elle va nous "péter la gueule" ou elle nous le "ferra payer" (les " sont ces dires"
Aucun soutien de sa part
Nous avons prévenu la Drh qui prends "note" de nos dires mais rien n'est fait sauf de lui tenir au courant et cela est pires pour nous tous par la suite
Actuellement en réorganisations de services elle profite pour nous rabaisser et faire des changements selon ses envies

7 Publié par Visiteur
06/09/2016 22:17

Suite du message noemat

Que faire pour changer cette situation qui est invivable
Nous avons peur d'allerau boulot
Des qu'elle se montre nous avons mal à l'estomac et nous évitons de discuter dans le couloir ou entre nous
Etc etc
Je vous en remercie
Cordialement

8 Publié par Maitre Anthony Bem
06/09/2016 23:02

Bonjour Noemat,

Vous pouvez déposer une plainte auprès du procureur de la république contre votre directrice du territoire pour harcèlement moral au travail.

Votre employeur est responsable au titre de son obligation de sécurité de résultat et il conviendrait qu'un avocat lui rappelle ses obligations afin de faire évoluer la situation en interne.

Une action devant le juge administratif permettrait aussi d'obtenir une indemnisation au titre des préjudices subis si vous disposez d'un dossier complet.

La protection fonctionnelle doit aussi être accordée par votre employeur afin que vos frais d'avocat soient pris en charge pour partie par celui-ci.

Cordialement.

9 Publié par Visiteur
12/09/2016 23:34

Peut on porter plainte contre un président de l'université pour n avoir rien fait suite à un harcèlement moral d une personne alors que je le est demander à plusieurs reprise de me protéger.

10 Publié par Visiteur
16/09/2016 03:29

De nombreux cas de harcèlement moral à la Direction Générale de l'Aviatiin Civile, dans plusieurs services, les chefs de service étant des ingénieurs des ponts, la marge de manoeuvre est limitée et de nombreux agents sont condamnés à subir, les syndicats n'intervenant pas.

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