Annulation de la déclaration de nationalité française par mariage : le gouffre juridique

Publié le 18/09/2015 Vu 60 489 fois 229
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La déclaration de nationalité française par mariage peut être contestée dans le cadre d'une procédure défavorable au justiciable en raison de l'imprécision des délais d'action et le poids de la présomption de fraude. Une amélioration des droits du déclarant s'est faite grâce à l'intervention du Conseil Constitutionnel et du contrôle par la cour de Cassation de la manière dont le juge du fond apprécie les faits.

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Annulation de la déclaration de nationalité française par mariage : le gouffre juridique

Des lois successives modifiant les conditions  d’acquisition de la nationalité française se sont multipliées ces deux dernières décennies. Malgré l’alternance et le changement  habituel de la couleur politique du gouvernement, la tendance est  vers le durcissement.

C’est ainsi que le contentieux de la nationalité s’est alimenté considérablement et s’est vu s’alourdir par des procédures  juridictionnelles longues et épineuses.

Nous allons nous intéresser au cas particulier de l’acquisition de la nationalité française par mariage, premier moyen d’accès à la nationalité française.       .

Plusieurs étrangers  mariés à des ressortissants français choisissent la voie de l’acquisition de la nationalité française par déclaration en raison de la simplicité de sa procédure et de ses conditions. Ce choix de la facilité peut s’avérer regrettable.

Et pour cause, obtenu par mariage, le bénéfice de la nationalité française risque de rester  intimement  lié au sort du dit mariage.

Or,  autant que n’importe quel couple, les époux, dont l’un a dû acquérir  la nationalité française par déclaration, sont susceptibles de se séparer et d’engager des procédures de divorce.

A l’initiative de l’époux mécontent ou de l’administration mise au courant  de la séparation du couple, une procédure d’annulation de la déclaration de nationalité en vue de la constatation de l’extranéité du déclarant pourrait être engagée.

C’est le troisième alinéa de l’article 26-4 du code civil qui traite de l’annulation de l’enregistrement après séparation des époux : «  L'enregistrement peut encore être contesté par le ministère public en cas de mensonge ou de fraude dans le délai de deux ans à compter de leur découverte. La cessation de la communauté de vie entre les époux dans les douze mois suivant l'enregistrement de la déclaration prévue à l'article 21-2 constitue une présomption de fraude. »

Deux questions se posent :

  • Comment l’action en nullité est –elle engagée ?
  • Quelles sont les conséquences de la décision définitive de nullité sur la situation du déclarant redevenu étranger ?

  • Les enjeux de l’action en nullité de l’enregistrement de la déclaration de nationalité par mariage

L’annulation de l’enregistrement de la déclaration de nationalité sur le fondement de l’article 26-4 du code civil, pose plusieurs problèmes juridiques donnant lieu à une jurisprudence abondante :

  • le point de départ de la prescription biennale de l’action

Après des années de confusion, il est décidé définitivement que le point de départ du délai d’agir en nullité de l’enregistrement est la connaissance par le Ministère public, à l’exclusion de tout autre administration de l’Etat , de l’existence de la fraude ou du mensonge. Cette connaissance est appréciée par les juridiction au cas par cas : transcription du divorce, diligence d’une enquête.. Avec l’arrêt du 5 juillet 2012, la Cour de Cassation a nuancé sa position en faveur du justiciable : il ne s’agit plus uniquement de déterminer la date à laquelle le ministère public a eu une connaissance effective de la fraude ou du mensonge, mais d’apprécier la date à laquelle il a pu en avoir connaissance. D’ailleurs, à ce titre les juridictions de fond  n’ont plus le bénéfice de appréciation souveraine de ce point de départ.

  • La notion de mensonge et de fraude : le mensonge ou la fraude est une notion objective, indépendante de l’intention de son auteur. Constituent ainsi des cas de fraude ou de mensonge le fait d’invoquer la persistance d’une communauté de vie (Civ. 1re, 11 juin 2008, Bull. civ. I, n° 167 ; RLDC 2008/52, n° 3117, obs. Marraud des Grottes) ou encore le fait de produire un acte de naissance apocryphe (Civ. 1re, 23 juin 2010, n° 08-19.854, D. 2010. 1708  ; ibid. 2868, obs. O. Boskovic, S. Corneloup, F. Jault-Seseke, N. Joubert et K. Parrot  ; Rev. crit. DIP 2010. 689, note S. Corneloup et F. Jault-Seseke ).

  • la mise en jeu de la présomption de fraude : La présomption de fraude instituée par l’article 26-4 du code civil a été  longtemps un outil déterminant pour le Ministère public dans ses procédures d’annulation. La charge de la preuve étant inversée, le juge avait pour mission d’apprécier si les éléments apportés par le déclarant étaient de nature à contrecarrer l’état de fraude préalablement établi à son encontre grâce au simple fait de la séparation de son conjoint dans les douze mois de l’enregistrement.

Or, le Conseil constitutionnel en sa décision  (n° 2012-227 QPC) du 30 mars 2012, et tout en déclarant conforme à la Constitution l'article 26-4 du code civil , il a émis une importante réserve au considérant 14, aux termes de laquelle la présomption prévue par la seconde phrase du troisième alinéa de ce texte ne saurait s'appliquer que dans les instances engagées dans les deux années de la date de l'enregistrement de la déclaration et que, dans les instances engagées postérieurement, il appartient au ministère public de rapporter la preuve du mensonge ou de la fraude invoqués ;

Aussi, depuis cette décision, la Cour de Cassation sanctionne les arrêts des Cours d’appel persistants à considérer que le bénéfice de la présomption est acquis au Ministère Public malgré l’engagement de l’action plus de deux ans après l’enregistrement de la déclaration de nationalité.  Le dernier arrêt de la Cour  suprême date du 9 septembre 2015, Pourvoi 14-20410.

  • La situation administrative du déclarant après la nullité de l’enregistrement de sa déclaration de nationalité.

La décision définitive prononçant la nullité de la déclaration de nationalité française par mariage a pour effet de constater l’extranéité du déclarant. Ce dernier n’est plus  français et reprend au regard de l’Etat français son statut d’étranger.

Mais dans quelle situation administrative serait cet étranger sur le sol français ? Régulière ou irrégulière ?

La question n’a pas de réponse législative et sombre de ce fait dans le gouffre du vide juridique, pourtant assez rare de nos jours.

En effet, rien n’est prévu par les textes pour traiter des cas de ceux qui perdent la nationalité française en général et qui avaient restitué leur titres de séjour ( souvent de dix ans) à l’administration française en contre partie du « sésame » bleu.

            On pourrait tout de suite dire que le droit commun s’applique : toute nullité a pour effet de rétablir les parties dans l’état où ils étaient avant l’acte annulé. Pourtant cette solution n’est pas d’application directe et n’est guère considérée par celui à qui incombe la restitution du seul titre restant à priori valable. En effet, le déclarant, désormais étranger est sommé par tous les moyens de restituer aux services de l’Etat la carte d’identité et passeport français sans pour autant qu’il soit en mesure de se faire restituer son ancien titre de séjour.

Les préfets considèrent souvent que la personne est, depuis la perte de la nationalité française, sans titre sur le sol français comme si la décision judicaire vaut annulation de tout son parcours en France. Je me souviens du cas d’un étranger ayant vécu régulièrement en France depuis son entrée sur notre territoire et qui s’est vu annuler sa déclaration de nationalité française après 17 ans de résidence en France dont 8 ans en qualité de français. La demande de titre de séjour a été traitée comme étant une première demande de régularisation et non la restitution d’un droit  déjà acquis. Forte heureusement, le demandeur étaient le parent d’enfants français encore mineurs  (nés de l’union ayant été à l’origine de l’acquisition de la nationalité). Mais quid de ceux qui ne rentre dans aucun des cas d’obtention de plein droit de titre de séjour prévus par le CESEDA ?

En résumé, il faut que les prétendants de la nationalité française optent plutôt pour la démarche administrative de  naturalisation plutôt que de faire dépendre leur statut administratif  des aléas de la vie de coulpe.

Ceux préméditant la séparation de leurs conjoints français, doivent savoir que le risque ne se limite pas à l’annulation de la déclaration de nationalité mais peut atteindre également le droit même de demeurer en situation régulière sur le sol français. L’article 46-4 du code civil est prévu justement pour sanctionner leur fraude.

Malheureusement, le recours à un Conseil est rarement envisagé en amont. Ce n’est qu’en aval, à la réception de l’assignation en justice qu’on s’aperçoit qu’il y avait matière à se poser les bonnes questions !

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1 Publié par Perezmercedes
05/08/2019 14:47

Bonjour maître
J’ai un cas un peu particulier, je suis marié avec un français depuis 7 ans, mais le problème c’est que on s’est séparé et j’ai demandé le divorce après d’avoir eu le 4 ans de mariage et que j’avais déjà envoyé la demande de nationalité par mariage. Maintenant qu’est-ce qui il se passe ? J’ai contacté la préfecture est j’ai annulé ma demande, pour montrer ma bonne foi. Finalement au bout de deux ans on s’est remis ensemble et le divorce n’a pas été prononcé car je lui est dis à mon avocat de demander le désistement du divorce. Bref maintenant je veux à nouveau essayer d’envoyer la demande de nationalité mais mon petit bémol est, est-t’il possible de renvoyer cette demande ?
On est toujours marié est ensemble depuis presque un an. J’att Votre réponse maître et merci d’avance.

2 Publié par sami59100
07/08/2019 14:29

Bonjour,

Voila j'ai déposé une demande de naturalisation par décret et je me suis rendu compte de mon driot de l'obtenir par une demande par déclaration fraternelle d'un frère ou une soeur Française.

Ma question :
Est il possible d'annuler ma demande par décret pour ensuite déposer une autre demande par déclaration d'un frère ou une soeur fraternelle ?
Si oui quel est la procédure?

3 Publié par Baggio 79
25/08/2019 17:12

Bonjour Maître, la justice vient d'annuler ma nationalité française est ce que je peut voyager a l'étranger pendant le procédure de recours ?

Merci d'avance

4 Publié par Ysmkbl
19/09/2019 23:13

Bonjour,

Je m’explique, j’ai acquis la nationalité par déclaration (fratrie) en juillet. Je souhaites me marier à quelqu’un vivant en Algérie mais je lis un tas de choses sur internet disant que On px me retirer la nationalité car on considère que le centre de mes intérêts ne sont pas en France.
J’aurais aimé être rassuré? Ce serait embêtant de me voir retirer la nationalité :/
Dans l’attente d’une réponse de votre part.
Bien à vous.

Yasmine

5 Publié par Malandy
02/02/2020 08:17

Bonjour je viens de voir sur un jugement rendu par le tribunal administratif de Nantes pour les visas des mes enfants, que le ministère de la l'Intérieur a déposé une demande d'annulation auprès de garde de saux de ma déclaration possession d'état nationalité française en raison de caractère frauduleux que j'ai obtenu depuis 2013 auparavant il y avait du jugement en 1994 annulant ma nationalité française que j'avais obtenu avec des papiers frauduleux soi-disant la possession d'état est opposable même après 2 ans ? pour la possession d'état j'ai déposé ma carte d'identité nationale française plus de 10 ans j'ai déposé le jugement rendu à 1994 mon extrait de naissance et le justificatif de domicile je ne vois pas où il y a des fraudes je ne savais pas qu'il y avait un jugement d'annulation de ma nationalité en 1994 que je continue à utiliser j'avais ma carte d'identité le passeport pour jusqu'au jour là où j'ai demandé pour mes enfants et c'est de là que le tribunal m'a fait savoir comment nationalité est annulé depuis 1994

6 Publié par mungam
09/03/2020 17:12

Bonjour maitre j'aimerais savoir si dans le cas d'une d'une nationalité acquis par mariage et annule car mon ex époux a fraudé sur sa nationalité et le ministère public a saisi le tribunal de grande instance qui a annulé ma nationalité. J'ai divorcé d'avec l'ex époux. j'ai pris un avocat pour suivre mon cas mais ce dernier bien qu'ayant pris l'argent n a pas suivi le dossier et n'a pas pris la peine de faire appel de la décision du tribunal. j'ai perdu définitivement la nationalité Française que dois je faire?
ma carte française périme en 2022 que dois- je faire pour régulariser ma situation?
retourner à la préfecture pour quel demande.
Merci d'avance.

7 Publié par Céline oubel
25/11/2020 15:28

Voilà mes parents ont demandé la nationalité française en 2002à ce moment-là J’avais15ans En 2004 on a eu un avis favorable on est sorti au Journal officiel 28 juin 2004 je me suis marié à l’étranger en février 2004 mon père n’a pas déclaré mon mariage Suite à ça deux ans après je reçois un courrier M’a nationalité française a été annulé. Ma question est est-ce que je peux réintégrer La nationalité française ?

8 Publié par atef512
12/12/2021 10:08

bonjour, j'ai une demande de naturalisation par mariage en cours un enfant de 5 ans mon père est naturalisé , moi et ma femme on c'est séparés 3 mois après le dépôt de mon dossier . je viens de recevoir la convocation pour l'enquête je les est appelés pour leurs dire qu'on est plus ensemble le policier ma dit qu'il va informer la préfecture et il a contacté mon ex femme aussi. ma question est ce que je peux refaire une demande par décret et je voulais savoir si vous avez une idée sur la suite de cette demande .merci

9 Publié par ADOLPH
03/09/2023 18:52

Je vis en France depuis 2015 avec mon épouse, nous vivons toujours en parfait en harmonie, elle, mon beau fils (l'enfant à mon épouse) jusqu'à ce jour. J'ai eu un enfant avant notre mariage, elle nous a rejoint en France dans le cadre d'un rapprochement familial depuis le mois d'octobre 2021.
Sa venue est d'un commun accord avec mon épouse et sa mère biologique (nous nous mon sommes déplacés tous les deux mon épouse et moi au consulat de France dans notre pays d'origine pour signer des documents autorisant la venue de notre foyer).
Depuis 2ans aujourd'hui après l'arrivée de ma fille, mon épouse multiplies des crises de jalousie à mon égard et menace de quitter le foyer au motif que j'accorde beaucoup d'attention à ma fille que elle, alors j'essaie juste de jouer mon rôle de père afin de permettre à mon enfant de bien s'intégrer que ça soit sur plan scolaire, et de vie sociale. Et cela se passe très bien.
Ma question est de savoir conserverai-je ma nationalité française obtenue en 2021 par mariage si je divorce d'elle? Une autre question, elle me menace de poursuivre pour un mariage en vue de papier, elle voulait mettre en avant la différence d'âge entre nous, aurai-je gain de cause si elle mettra sa menace à exécution ? Cela fait 9ans que nous sommes mariés. Merci d'avance de vos réponses.

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