La SARL en RDC : une réglementation subsidiaire nationale novatrice

Publié le 09/01/2015 Vu 2 633 fois 0
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La RDC vient de se doter d'une réglementation nouvelle très novatrice sur la SARL. Le présent article y est consacré et explicite le contenu de l'arrêté interministériel du 30 décembre déterminant la forme des statuts et le capital social de la SARL.

La RDC vient de se doter d'une réglementation nouvelle très novatrice sur la SARL. Le présent article y est

La SARL en RDC : une réglementation subsidiaire nationale novatrice

La SARL en RDC : une réglementation subsidiaire nationale novatrice

Don José MUANDA NKOLE wa YAHVE

Docteur en Droit

Professeur de droit des affaires

Universités congolaises (ESURS).

http://jdadrc.blogspot.com/2015/01/larrete-interministeriel-du-ministre-de.html

Introduction

Suite aux appels à l’amélioration du cadre des affaires en RDC et pour répondre positivement à l’esprit des innovations qu’éprouve le législateur de l’OHADA, le Ministre de la justice, Garde des Sceaux et de Droits Humains et le Ministre des Finances, congolais, répondant au besoin de l’amélioration du climat des affaires, de la sécurisation et de l’assouplissement des normes relatives à la création des entreprises en RD Congo, ont procédé à la prise d’un arrêté touchant le domaine de la SARL dans le sens de l’innovation et de l’attraction des investissements directes étrangers (IDE) et nationaux.[1]

Le quel arrêté intitulé :

ARRETE  INTERMINISTERIEL N°002/CAB/MIN/JGS&DH/014 ET

N°243/CAB/MIN/FINANCES/2014 DU 30 DECEMBRE 2014 DETERMINANT LA FORME DES STATUTS ET LE CAPITAL SOCIAL DE LA  SOCIETE  A RESPONSABILITE LIMITEE, a rencontré l’approbation de tous les opérateurs économiques congolais, des juristes et professionnels du droit des affaires. Les experts en droit des affaires, ont été le plus contents.

A titre d’exemple, nous, personnellement avions en son temps, réfléchi sur la question estimant que le législateur congolais devait  sous réserve de la liberté contractuelle des associés, fixer un montant plus bas que celui de certains Etats Parties au Traité OHADA, qui avaient dérogé à la détermination du législateur communautaire à cause de la configuration économique et de la prépondérance du secteur informel dans l’économie congolaise.

Certes il  était temps que la RDC se dote d’une législation plus souple pour une forme de société la plus répandue et la plus convoitée à cause de ses caractéristiques favorisant l’esprit d’initiative et d’entreprise dans un pays où les personnes physiques ou morales préféraient se réfugier dans les méandres de l’informel à cause du capital social trop élevé exigé par le législateur de 1887 et des textes légaux épars et anachroniques complétant la législation sur les sociétés commerciales en droit congolais avant l’OHADA (aussi abrogés)[2],  mais faut-il le rappeler l’on s’interroge sur « pourquoi, c’est le pouvoir exécutif qui a pris un arrêté alors qu’il ressort pour certains spécialistes du droit parlementaire, que c’est le pouvoir législatif qui devait prendre une loi en la matière ?  Vu la nature des Actes uniformes.[3]

En effet, notre contribution ne tend pas à répondre à cette problématique : « la répartition nette entre les compétences réglementaire et législative ».

Parce qu’on a souvent vu que le règlement a souvent résolu un problème juridique de société lors que le pouvoir législatif pouvait être accusé de paresse ou d’inertie à faire son travail dans un délai imparti par la constitution.[4] Même si le Sénégal, et le Cameroun (pour n’en citer que ceux-là), ont réagi dans le même domaine par des lois, donc par le biais du pouvoir législatif, il n’en demeure pas moins que l’arrêté est tout à fait conforme à la Constitution congolais de 2006 telle que complétée à ce jours.

Nous pouvons nous l’affirmer en scrutant le contenu de l’article Article 10 de l’AUSDCGIE-R, qui dispose :

« Sauf dispositions nationales contraires, les statuts sont établis par acte notarié ou par tout acte offrant des garanties d'authenticité... »

Les dispositions contraires à notre sens peuvent être de nature réglementaire ou législative car le législateur de l’OHADA n’a compétence à dicter aux Etats membres la nature du texte légal subsidiaire à prendre en application d’un Acte uniforme.

I. La RD Congo réglemente la SARL issue de l’OHADA

Enfin la RDC rejoint l’esprit du législateur communautaire dans l’effort de moderniser et d’assouplir l’initiative privée ! C’est en ces mots que nous nous sommes exclamés à la nouvelle de la prise de l’arrêté interministériel du Ministre de la Justice et du Ministre des Fiances du 30 décembre 2014 déterminant la forme des  statuts et le capital social de la société à responsabilité limitée.

En toute sincérité, le mérite est à reconnaître car, le Gouvernement de cohésion nationale s’est démarqué par sa diligence et par sa volonté à compléter les Actes uniformes  quand le législateur de l’OHADA lui-même, demande aux Etats membres de la zone OHADA, de légiférer sur le plan national.[5]

Rappelons que certains Etats africains membres de la zone OHADA, comme le Sénégal, la Guinée (...) avaient déjà par le biais des élus du peuple (par le parlement), pris une loi fixant le capital social de la SARL à un minimum de 100.000 FCFA (200 dollars) contre 1 million FCFA (2000 dollars initialement).[6]

1. La nouvelle forme des statuts de la SARL en RD Congo dans la zone OHADA

Considérant l’article 10 de l’AUSDCGIE-R qui dispose : 

« Sauf dispositions nationales contraires, les statuts sont établis par acte notarié ou par tout acte offrant des garanties d'authenticité dans l'État du siège de la société déposé avec reconnaissance d'écritures et de signatures par toutes les parties au rang des minutes d'un notaire. Ils ne peuvent être modifiés qu'en la même forme ».

L’arrêté interministériel congolais en la matière dit que les statuts de la société à responsabilité limitée unipersonnelle ou pluripersonnelle sont établis par acte notarié ou par acte sous seing privé.

On dénote dans l’acte réglementaire la précision sur variante de la forme de la SARL considérée de la volonté bilatérale ou multilatérale (deux ou plusieurs associés).[7]

L’acte réglementaire du 30décembre 2014 brille par sa précision. Sachant que la SARL peut être crééé par un seul associé tout comme en principe par deux ou plusieurs associés.

2. La SARL en droit de l’OHADA, cas de la RD Congo : capital social[8]

Cet arrêté interministériel a officiellement répondu au contenu de l’article 65 de l’AUDSCGIE-R du 30 janvier 2014 qui dispose que[9] :

« Le montant du capital social est librement déterminé par les associés.
Toutefois, le présent Acte uniforme peut fixer un capital social minimum en raison de la forme ou de l'objet de la société ».

L’article 2 de l’arrêté interministériel sous examen dispose :

« Le capital social de la société à responsabilité limitée unipersonnelle ou pluripersonnelle est librement fixé par les associés en tenant compte de l'objet social de la société ».

Le droit congolais de la SARL, a voulu reconnaître la consécration du principe de « la liberté contractuelle », une des plus grandes innovations introduites par l’AUDSCGIE-R du 30 janvier 2014, juste une année après, cette coïncidence démontre les efforts du Gouvernement congolais, qui semblait, - on pouvait le croire à tort-, lanternait en peu plus. L’assouplissement créé, permet aux acteurs économiques qui opéraient dans la souterraineté (secteurs de l’économie informelle), de pouvoir s’exposer à la lumière de la loi enfin d’être formalisés, encadrés ; fiscalisés de manière la plus adaptée (une fiscalisation favorable ; souple et appropriée à l’épanouissement  de leurs acticités économiques et commerciales.

Cette liberté contractuelle, qui reste le socle positif du droit des affaires, contribue à la suscitation des épargnants qui se muent en associés à investir d’avantage, car ils se trouvent face à une cadre juridique dont ils ont l’impression d’être les maîtres puisque la puissance publique doit en principe dans cette optique intervenir le moins possible mais sauvegarder l’ordre public économique.[10]

2.1. Le maintien de l’article 66 de l’AUDSCGIE-R.

« Si le capital de la société en cours de formation n'atteint pas le montant minimum fixé par le présent Acte uniforme, la société ne peut être valablement constituée. Si, après la constitution de la société, son capital est réduit à un montant inférieur au minimum fixé par le présent Acte uniforme, pour cette forme de société, la société doit être dissoute, à moins que le capital soit porté à un montant au moins égal au montant minimum, dans les conditions fixées par le présent Acte uniforme ».

De toute évidence, la RD Congo a choisi la voie de la consécration du principe de « La liberté contractuelle »,[11] mais n’a pas dérogé à l’article 66 de l’Acte uniforme sous examen. Rejoignant ainsi la volonté du législateur commun et celle des autorités congolaises à assouplir et améliorer le cadre juridique des affaires tout en le modernisant. Nous sommes en droit d’affirmer que ce paradigme congolais d’affaires, est à louer à tous points égards.

2.2. Les statuts de la SARL dans la zone OHADA : cas de la  RDC

L’article 1 de l’arrêté interministériel sous examen arrête :

« Les Statuts de la Société à responsabilité limitée unipersonnelle ou pluripersonnelle sont établis par acte notarié ou par acte sous seing privé ».

Alors que le législateur de l’OHADA dispose :

« La société à responsabilité limitée est une société dans laquelle les associés ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits sont représentés par des parts sociales » (Article 309). Elle peut être instituée par une personne physique ou morale, ou entre deux ou plusieurs personnes physiques ou morales. « Elle est désignée par une dénomination sociale qui doit être immédiatement précédée ou suivie en caractères lisibles des mots : « société à responsabilité limitée » ou du sigle : « S.A.R.L. » (Article 310) ».[12]

La comparaison de deux dispositions, laisse comprendre que  la RD Congo a repris essentiellement la définition du législateur de l’OHADA  quant à la forme des statuts de la SARL.

Avec comme innovation, « la clarté » sur la SARL unipersonnelle ou pluripersonnelle, le texte réglementaire congolais, a voulu être précis pour éviter de l’obscurité dans la compréhension de la forme de la SARL tant unipersonnelle ou pluripersonnelle. C’est une innovation on ne peut plus meilleure en droit congolais interne des affaires.

3. L’habilité des institutions à recevoir les fonds provenant des parts sociales

L’article 3 de l’arrêté interministériel dispose :

« Les fonds provenant de la libération des parts sociales peuvent être logés  en compte bancaire ouvert par les associés ou leur (s) mandataire dans établissement de crédit ou dans une institution de micro finances dûment agréée.

Le bordereau de versement dûment acquitté par l'établissement de crédit ou l'institution de micro-finances vaut preuve de la libération et de dépôt desdits fonds ».

Le Gouvernement congolais, a innové en habilitant et les banques et les institutions de microcrédits à loger des fonds provenant des parts sociales...[13]

A votre  humble avis, car les SARL congolaises munies des capitaux sociaux les plus faibles ne se verront pas refuser par des banques commerciales privées qui en demandent un peu trop, grâce aux institutions de micro-finances.

L’importance des institutions de micro-finances, se trouve accrue dans cet élan de réforme sur les sociétés commerciales et c’est une bonne politique que de favoriser ces institutions face à des banques trop exigeantes vis-à-vis des clients moins nantis.[14]  

Et le bordereau de versement vaut preuve en la matière.

3.1. Conclusion

Les associés de la SARL n’ont pas obligatoirement la qualité de commerçant, ainsi même les mineurs peuvent être des associés (Sous tutelle bien sûr). Sur la question des mineurs, il faut se référer à la loi congolaise et au code de la famille actuellement en examen au Parlement congolais.

Notez que l’époux et son épouse peuvent être associés dans une même société à responsabilité limitée (SARL) car dans celle-ci, les associés ne sont responsables qu’à concurrence de leurs apports.[15]

C’est donc la structure sociétale idéale pour la protection du patrimoine de l’associé. Et les investisseurs congolais et étrangers se trouvent désormais face à un cadre juridique favorable aux différentes bourses ou capitaux sociaux (moyens financiers). Sans oublier que la SARL comporte une possibilité de libération progressive des parts souscrites en numéraire.

C’est à notre sens, d’une réglementation très efficace contre l’économie informelle mais une incitation faite aux épargnants à se muer en associés en vue de fructifier leurs épargne. L’arrêté interministériel ne comporte que 4 articles dont le dernier abroge toutes les dispositions antérieures contraires.[16]

Ici, les dispositions contraires ne sont pas celles de l’OHADA, mais celles nationales allaient dans le sens contraire au contenu de l’arrêté interministériel du 30 décembre 2014.

 

[1] Lire MUANDA NKOLE wa YAHVE D.J. (2014), Droit des affaires, 3ème édition revue, Cerda, Franceville.

[2] Voir le décret du 27 février 1887du Souverain Roi belge, abrogé, spécialement dans ses dispositions sur les sociétés commerciales.

[3] Voir le professeur Jacques DJOLI, le professeur ESAMBO et autres spécialistes du droit public.

[4] Voir le professeur VUNDWAWE te PEMAKO sur la question (2010 ?), Droit administratif,  Université de Kinshasa. Léon CONSTATIN (1968), Droit pénal de sociétés par actions, PUF, Paris.

[5][5] MUANDA NKOLE wa YAHVE D.J (2013), Droit commercial, université Joseph KASA-VUBU, p.56.

[6] Le cas du Sénégal qui semble être le précurseur dans le domaine de subsidiarité des textes légaux devant compléter la législation communautaire.

[7] Article 4 :« La société commerciale est créée par deux (2) ou plusieurs personnes qui conviennent, par un contrat, d'affecter à une activité des biens en numéraire ou en nature, ou de l'industrie, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui peut en résulter. Les associés s'engagent à contribuer aux pertes dans les conditions prévues par le présent Acte uniforme ».

[8] En ce sens « Quel avenir pour le capital social « ? 28 Octobre 2003, Colloque au Centre de Recherche en Droit Financier Dalloz, C'M'S Bureau Francis LEFEBRE, présidé par Mr Pierre BÉZARD, président honoraire de la chambre commerciale de la cour de cassation.

[9] Lire l’article 311-1 :

« Les parts sociales doivent être souscrites en totalité par les associés. Elles doivent être intégralement libérées lorsqu'elles représentent des apports en nature.

Les parts représentant des apports en numéraire sont libérées lors de la souscription du capital de la moitié au moins de leur valeur nominale.

La libération du surplus intervient en une ou plusieurs fois dans un délai de deux (2) ans à compter de l'immatriculation de la société au registre du commerce et du crédit mobilier, selon les modalités définies par les statuts ».

[10] Lire GERMAIN M. (1994), Droit fiscal des affaires, 3e vol., 3e éd., LGDJ.

[11] Lire MUANDA NKOLE wa YAHVE D.J. (2014), Les Contrats commerciaux, université catholique au Congo, pp.45-56.

[12] Lire également LE CANNU et PARLEANI (2005), « Le financement du capita », Rev.soc.

[13] Lire GAVALDA et STOUFFLET ( ?), Droit du crédit, LITEC, Paris.

[14] Il s’agit d’une véritable innovation et d’un renforcement des pouvoirs des institutions de micro-finances en RDC, qui longtemps, étaient demeurées sous-estimées alors que leur rôle dans le développement est sans conteste, très indispensable en Afrique. Lire à ce sujet, NDELA K. (2012), Droit financier, université Protestante au Congo.

[15] Lire l’article 309 : La société à responsabilité limitée est une société dans laquelle les associés ne sont responsables des dettes sociales qu'à concurrence de leurs apports et dont les droits sont représentés par des parts sociales.
Elle peut être instituée par une personne physique ou morale, ou entre deux ou plusieurs personnes physiques ou morales ».

Lire Article 310 :

« Elle est désignée par une dénomination sociale qui doit être immédiatement précédée ou suivie en caractères lisibles des mots : « société à responsabilité limitée » ou du sigle : « S.A.R.L. ».

[16] Article 4

La société commerciale est créée par deux (2) ou plusieurs personnes qui conviennent, par un contrat, d'affecter à une activité des biens en numéraire ou en nature, ou de l'industrie, dans le but de partager le bénéfice ou de profiter de l'économie qui peut en résulter. Les associés s'engagent à contribuer aux pertes dans les conditions prévues par le présent Acte uniforme.

La société commerciale est créée dans l'intérêt commun des associés.

Article 5

La société commerciale peut être également créée, dans les cas prévus par le présent Acte uniforme, par une seule personne, dénommée « associé unique », par un acte écrit.

Article 6

Le caractère commercial d'une société est déterminé par sa forme ou par son objet.

Sont commerciales à raison de leur forme et quel que soit leur objet, les sociétés en nom collectif, les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée, les sociétés anonymes et les sociétés par actions simplifiées.

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