Soufiane JEMMAR, Avocat en droit fiscal
Auteur de l’ouvrage « L’évaluation des biens et services en droit fiscal », L’Harmattan, Coll. Logiques Juridiques, 548 pages
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Madame F. propriétaire avec son fils pour moitié indivise d'emplacements de stationnement à Paris qu'elle considérait comme ayant la nature de biens professionnels, a omis, malgré plusieurs mises en demeure, de déposer les déclarations d'ISF pour les années 1989 à 1991. En conséquence, qu'elle a fait l'objet d'une procédure de taxation d'office.
Après le rejet de sa réclamation, elle a assigné le directeur des services fiscaux de Paris Ouest devant le TGI pour obtenir le dégrèvement des droits et pénalités mis à sa charge.
Madame F. faisait grief au jugement d'avoir retenu certaines valeurs pour les emplacements de stationnement situés Passage de la Bonne graine à Paris XIe, en s'écartant des conclusions de l'expert, alors, selon le pourvoi, que la valeur à retenir pour la liquidation de l'ISF est la valeur vénale réelle du bien.
Il était soutenu, en outre, que la valeur vénale des immeubles doit obligatoirement être déterminée par comparaison avec des cessions de biens intrinsèquement similaires en fait et en droit, hormis dans le cas où toute comparaison serait impossible. Le jugement attaqué a fixé la valeur des biens en cause pour 1990 et 1991 en écartant les appréciations de l'expert et en retenant les termes de comparaison proposés par l'administration. Or, ces termes de comparaison n'étaient pas intrinsèquement similaires, dès lors qu'ils ne portaient que sur des cessions d'emplacements isolés et libres d'occupation alors qu'il ressort des propres énonciations du jugement que les biens en cause ne constituent pas chacun un lot de copropriété, mais des plateaux comprenant chacun plusieurs dizaines d'emplacements.
Ainsi, la requérante considérait qu'en procédant de la sorte sans rechercher si la comparaison était possible bien que la similitude des éléments proposés par l'administration ait été expressément contestée par le contribuable, le tribunal n'a pas légalement justifié sa décision au regard des exigences des articles 885 S et 666 du CGI et L 17 du LPF.
Sur ce premier grief, la Cour de Cassation a rejeté les prétentions de la requérante en observant qu’ « ayant relevé que les trois exemples de cessions d'emplacements de stationnement intervenues dans le même quartier à l'époque des impositions, fournies par l'administration fiscale, ne pouvaient être écartés sur le fondement d'une « incohérence » dès lors que l'expert n'étayait ses affirmations sur aucune vente de locaux comparables ni aucune étude de vente d'emplacements de stationnement, le tribunal a ainsi fait ressortir que Mme Ferrière ne rapportait pas la preuve qui lui incombait, en application de l'article L 193 du LPF, s'agissant d'une imposition établie par voie de taxation d'office, d'éléments de comparaison de nature à remettre en cause les évaluations de l'administration ; qu'il a, dès lors, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ».
En revanche, la Haute juridiction a statué en faveur du contribuable qui reprochait au jugement d’avoir limité à 10 % l'abattement à appliquer à la valeur vénale des biens litigieux pour tenir compte de leur état d'indivision au motif, irrecevable selon la requérante, que l'indivision entre Madame F. et son fils ne résulte pas d'une succession mais du choix délibéré des indivisaires.
A cet égard, le Cour de cassation a considéré qu'en se déterminant ainsi, par un unique motif inopérant pour limiter l'influence sur la valeur vénale des biens de leur caractère indivis, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision.
Pour en savoir plus
Cass. com. 22 février 2000, n° 486 P, Ferrière.