Caution bancaire : effets et vices du cautionnement personnel et solidaire des dirigeants de société

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Le cautionnement souscrit par un dirigeant en garantie des dettes de la société qu’il dirige entraîne des risques mais comprend de nombreux vices.

Le cautionnement souscrit par un dirigeant en garantie des dettes de la société qu’il dirige entraîne des

Caution bancaire : effets et vices du cautionnement personnel et solidaire des dirigeants de société

La pratique du cautionnement, qui consiste pour une personne à s’engager à garantir le remboursement de la dette d’un débiteur principal en cas de carence de sa part, est particulièrement répandue dans la vie des affaires.

En effet, il est très fréquent qu'un dirigeant se porte caution envers une banque du remboursement des dettes de l’entreprise qu'il dirige (crédit ou compte courant). 

Mais ce n'est pas la seule situation où un engagement de cautionnement peut lier un dirigeant à la société qu’il dirige.

Il en est ainsi également lorsqu’un dirigeant, agissant en tant que tel, consent à des tiers des garanties au nom de la société, ou encore lorsqu’un dirigeant entend obtenir de la société qu'il dirige qu'elle cautionne ses dettes personnelles.

Derrière leur banalité, ces trois cas de figure comportent tous des risques dont la caution ne prend conscience que très tardivement en général, quand elle est appelée en paiement.

Pour comprendre en quoi consistent ces risques, il importe dès lors d’envisager le cas où un cautionnement est souscrit par un dirigeant pour garantir les dettes de la société qu’il dirige.

Ce cas de figure est très répandu dans la mesure où les banques consentant des prêts aux sociétés exigent quasi systématiquement des garanties de la part de leurs dirigeants et parfois même des membres de leur famille (époux ou épouse, père, mère, belle-mère, beau-père du dirigeant, etc...). 

Les dirigeants sont alors contraints de souscrire un cautionnement au profit des banques afin que celles-ci octroient un prêt ou une autorisation de découvert du compte bancaire de leur société.

Le cautionnement souscrit par le dirigeant en garantie des dettes de la société qu’il dirige l’engage à titre personnel, de sorte qu’il peut être appelé à payer personnellement les dettes de celle-ci en cas de défaillance.

En outre, si le cautionnement est en principe un contrat civil, le cautionnement souscrit par un dirigeant de société revêt généralement un caractère commercial.

Une telle solution s’explique par le fait que la jurisprudence considère un cautionnement comme commercial dès lors que la caution a un intérêt patrimonial personnel dans l’opération qu’elle garantit, ce qui semble être le cas pour la plupart des dirigeants dont l’engagement est souvent motivé par l’obtention de financements nécessaires à l’activité ou au développement de la société.

Cette précision est importante dans la mesure où le caractère commercial du cautionnement emporte des conséquences pratiques importantes.

Ainsi, si le cautionnement donné par un dirigeant de société revêt un caractère commercial, il sera alors considéré comme un cautionnement solidaire, de sorte qu’à l’échéance le créancier pourra demander le paiement indifféremment à la société (le débiteur principal) ou au dirigeant (la caution). (Cass. Com., 28 avril 1966)

Lorsque le cautionnement est commercial et, donc, solidaire, le dirigeant caution poursuivi en paiement ne pourra faire jouer ni le bénéfice de discussion ni celui de division.

Pour mémoire, le bénéfice de discussion est la possibilité pour la caution de contraindre le créancier à poursuivre d’abord le débiteur, à saisir et faire vendre ses biens, avant de l’obliger elle-même au paiement.

Quant au bénéfice de division, il permet à la caution poursuivie en paiement de demander au créancier de diviser ses poursuites entre les différentes personnes qui se sont portées garantes de la société. 

Il est à noter que si le cautionnement souscrit par un dirigeant de société est accompagné d’un engagement similaire de son conjoint, le cautionnement du conjoint reste en principe civil, car la qualité de conjoint ne suffit pas à conférer un caractère commercial à l’engagement de ce dernier.

Cependant, le fait que le cautionnement revête un caractère commercial ne signifie pas que ce cautionnement puisse se prouver par tous moyens.

En effet, le principe de la liberté de la preuve en matière commerciale ne joue que si l’acte en cause a été accompli par un commerçant agissant dans l’exercice ou dans l’intérêt de son commerce.

Or, la qualité de dirigeant de société ne suffit pas à conférer la qualité de commerçant.

De même, le caractère commercial du cautionnement, à lui seul, ne confère pas la qualité de commerçant à la caution.

Ainsi, il a été jugé que la règle de la liberté de la preuve est inapplicable à un cautionnement donné par le gérant d’une société à responsabilité limitée (Cass. com., 21 juin 1988, n° 86-10.128) ou par le président d’une société anonyme (Cass. com., 26 novembre 1990, n° 89-12.277).

Il faut donc établir la preuve du cautionnement conformément aux règles du droit civil qui exigent un écrit en bonne et due forme. 

En effet, les règles civiles de preuve en matière de cautionnement sont assez strictes.

A titre d’exemple, lorsque la caution s'est engagée pour un montant déterminé, la preuve de ce cautionnement suppose l'établissement d'un acte écrit sur lequel figurent la signature de la caution et la mention manuscrite de la somme garantie en toutes lettres et en chiffres.

En revanche, lorsque la caution s'est engagée pour un montant indéterminé, la preuve de cet engagement passe par un acte écrit et signé et comportant une mention exprimant de manière explicite la connaissance que la caution a de la nature et de l'étendue de son obligation.

Il est à noter que l'absence ou l'insuffisance de la mention de la somme garantie ou de celle exprimant la connaissance que la caution a de la nature et de l'étendue de son engagement n’affecte pas la validité de l'acte, mais seulement sa valeur probante.

En d’autres termes, en cas d’absence ou d’insuffisance de la mention de la somme garantie ou de celle exprimant la connaissance que la caution a de la nature et de l'étendue de son engagement, l’acte de cautionnement constitue néanmoins un commencement de preuve par écrit devant être complété par des éléments extérieurs à l’acte lui-même.

A cet égard, la jurisprudence considère que la qualité de dirigeant de la caution constitue un élément extérieur pouvant compléter un contrat de cautionnement incomplet et rendre parfaite la preuve de celui-ci.  

Cette solution s’explique par le fait qu’en raison de sa qualité de dirigeant, la caution a nécessairement connaissance de la nature et de l’étendue de son engagement.

On voit par là que la qualité de dirigeant de la caution peut entrainer une réduction de la protection offerte par les règles de preuve telles que les exigences de l’article 1326 du code civil.

En contrepartie, la jurisprudence tend à imposer de plus en plus aux banques le respect d'obligations de bonne foi, d'information et de renseignement. 

Ainsi, lorsque la caution est assignée en paiement par la banque devant le tribunal, elle peut invoquer en défense, au cas par cas :

- l'incompétence matérielle du tribunal saisi (en cas de cautionnement mixte, c'est à dire de nature civile et commerciale) ;

- les vices de forme de la mention manuscrite légale obligatoire sur le contrat de cautionnement ;

- l'annulation du cautionnement en raison de la disproportion des engagements bancaires de la cation par rapport aux revenus et patrimoine de cette dernière ;

- la déchéance du droit aux intérêts pour la banque à défaut de preuve de l'envoi de l'information annuelle de la caution sur l'étendue de ses engagements ;

- le défaut de preuve des renseignements préalables pris par la banque sur la situation personnelle de la caution ;

- l'absence d'information sur les effets de la garantie Oseo.

La jurisprudence plus favorable aux cautions depuis quelques années leur confère de solides arguments juridiques pour faire annuler ou limiter leurs engagements bancaires.

Il est donc vivement recommandé aux cautions de consulter un avocat spécialisé dans ce domaine avant d'envisager de payer ou non la banque. 

Une analyse de la situation financière et patrimoniale de la caution au jour de la conclusion de la garantie permettra souvent de conclure à un cautionnement disproportionné compte tenu du fait que le taux d'endettement de la caution est dans de nombreuses situations au delà du taux de 33% fixé par le jugement définitif rendu contre la Banque Populaire par le Tribunal de commerce de Versailles, le 4 décembre 2013, au profit de clients du cabinet Bem. (Tribunal de commerce de Versailles, 4 décembre 2013)

NB : Afin d'approfondir le sujet des moyens de défense dont disposent les cautions poursuivies en paiement par la banque, je vous invite à lire mon article publié ICI.

Je suis à votre disposition pour toute action ou information (en cliquant ici).

Anthony Bem
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1 Publié par Maitre Anthony Bem
09/04/2016 08:13

Bonjour Lions704,

En cas de vente de parts sociales de société, la caution n'est pas libérée et ne peut pas obtenir le remboursement de de la caution quand la société a déposé le bilan.

Cordialement.

2 Publié par Maitre Anthony Bem
09/04/2016 08:19

Bonjour Lili,

Une fois la procédure devant le tribunal passée et qu'un jugement a été rendu, il n'est plus possible pour la caution de revenir sur la dette et la condamnation.

Le seul recours était de faire appel du jugement de condamnation devant la cour d'appel, mais il semble que le délai d'un mois à compter de la signification du jugement par voie d'huissier ait été largement dépassé dans votre cas.

Vous pouvez cependant tout à fait encore proposer un échéancier, même ridicule, à la société de recouvrement qui l'acceptera certainement, ayant intérêt à recouvrer la dette à moindre frais.

L'intervention d'un avocat permet souvent de négocier au mieux même si cela coûte un peu.

Cordialement.

3 Publié par Maitre Anthony Bem
09/04/2016 08:23

Bonjour Fahmi,

Le document de "caution solidaire" pour le locataire doit être rédigé par écrit non dactylographié mais avec le cachet de la société et la signature du représentant légal de la société qui se porte garant.

Attention à ce que le gérant dispose bien des pouvoirs pour signer le cautionnement dans les statuts de la société ou à défaut par voie d'assemblée générale extraordinaire de la société.

A défaut, le cautionnement ne serait pas opposable à la société mais seulement au gérant à titre personnel.

Cordialement.

4 Publié par Maitre Anthony Bem
09/04/2016 08:24

Bonjour Jojo,

Afin de me permettre de prendre connaissance de votre situation personnelle en détail et de disposer de toutes les informations nécessaires pour vous répondre, je vous propose de me contacter en privé pour une consultation.

A cet égard, je vous invite à choisir l'une de mes différentes modalités de consultation en cliquant sur "services" en haut de cette page.

Cordialement.

5 Publié par Visiteur
19/04/2016 22:53

Bonjour maître .. Ma sas à contracté un prêt de 161000€ il y a qq mois.. J ai une garantie bpifinance à hauteur de 70% mais également avec mon associé une caution personnelle solidaire à hauteur de 104000€ .. En cas de dépôt de bilan, quelle garantie va être prioritaire ?? La banque va elle demander à bpifinance les 70 % et à nous le reste ou va t elle d abord s adresser a moi et mon associé ? Merci de votre expertise

6 Publié par Maitre Anthony Bem
20/04/2016 22:43

Bonjour Antoine,

Les banques de financement comme BPI
Finance, OSEO et ANVAR interviennent indépendamment de la mise en jeu de la caution.

Il existe une totale opacité des banques sur le moment de la mise en jeu de cette garantie.

Celle-ci ne profite en réalité qu'à la banque et la caution ne peut pas demander à intervenir après la BPI ou OSEO.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le cautionnement est nul à défaut d'information par la banque de la caution sur les modalités de mises en œuvre de la garantie BPI ou OSEO.

Cordialement.

7 Publié par Visiteur
25/05/2016 21:42

Bjr maitre'
Je me suis porter caution pour ma fille a hauteur de 10000 euros, ma fille n'a pas remboursé son prêt, dois je payé en entier et une seule fois cette somme ? , puis je demandé de payer en plusieurs fois où pas, merci de votre réponse.

8 Publié par Maitre Anthony Bem
25/05/2016 22:37

Bonjour Fab,

Les modalités d'apurement de la dette relèvent de la négociation et de l'accord entre les parties.

Cordialement.

9 Publié par Visiteur
31/05/2016 10:00

Bonjour Maître,
Nous nous sommes portés caution pour un emprunt pour fonder notre SARL avec deux autres associés en 2012. Nous sommes tous les trois sortis de l'actionnariat et avons revendu nos parts à de nouveaux associés (qui sont désormais co-gérants) et nous avons bien démissionné de nos fonctions de gérant en 2015. Or un an après je continue de recevoir à mon domicile les courriers de la banque indiquant que je suis toujours caution pour le restaurant. Que faire ? Dois-je contacter la banque pour obtenir des explications ?
Est-ce que cela peut me bloquer si je souhaite effectuer un crédit immobilier par exemple ?
Je précise que je ne suis plus en contact ni avec mes anciens associés ni avec les nouveaux gérants.
Merci infiniment pour votre réponse et pour la qualité de votre site.

10 Publié par Visiteur
14/06/2016 09:24

Maître,
Sur l'acte de caution signé en juin 2005, dans la case <>, Qualité du signataire, cachet et signature précédés de la mention manuscrite : "Lu et approuvé", mon frère a seulement signé et écrit "Lu et Approuvé" mais son nom, sa qualité, son tampon n'y figurent pas.
Il me paraît qu'il y a une anomalie, qu'en pensez-vous ?
De plus, en 2005, l'article du Code civil était 2021. Or après la réforme intervenue en mars 2006, la banque avait-elle l'obligation d'envoyer un avenant à la caution ?
Je vous remercie par avance pour vos réponses,
Bien cordialement
Catherine

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