La sous-location doit être distinguée de la location-gérance parfois utilisée pour contourner l'interdiction de sous louer.
A. LA LOCATION GERANCE.
La sous-location est distincte de la location gérance puisque dans le premier cas la jouissance ne concerne que les locaux. Dans le second, au contraire, elle porte sur la totalité des éléments composant le fonds et la jouissance des locaux n'est que la conséquence accessoire et nécessaire de la location-gérance.
En conséquence, et à la condition qu'il s'agisse d'une véritable gérance, cette jouissance ne peut être sanctionnée par le jeu de la clause résolutoire interdisant la sous-location (Cass. civ. 9 juillet 2003, n° 02-11141).
A l'inverse, il a été jugé que l'autorisation donnée par le bailleur de sous-louer les lieux loués ne peut valoir autorisation de conclure un contrat de location-gérance en présence d'une clause interdisant au preneur de concéder la jouissance des lieux à qui que ce soit et sous quelque forme que ce soit (Cass. civ. 10 octobre 2001, n° 00-13896).
En l'absence d'une clause de ce type, il ne semble donc pas possible de reprocher au sous-locataire la mise en location gérance de son fonds.
B. LE DEFAUT DE CONCOURS DU BAILLEUR.
Pour être régulière, la sous-location doit remplir les deux conditions cumulatives suivantes : elle doit avoir été autorisée par le bailleur et ce dernier doit avoir été appelé à concourir à l'acte (Code de commerce article L 145-31) .
Le défaut de concours du bailleur rend la sous-location inopposable à ce dernier. Le sous locataire ne pourra donc pas se prévaloir à son encontre du droit direct au renouvellement.
La sous-location irrégulière peut justifier le prononcé de la résiliation du bail principal (Cass. com. 20 mars 1963, Bull-civ. III n° 170 ; Cass. 3ème civ. 12 mars 2002 n ° 487).
La résiliation du bail principal entraîne nécessairement la résiliation du sous-bail, le sous-locataire devenant alors un occupant sans droit ni titre (Cass. 3ème civ. 19 juin 1970, Bull. civ. III n° 434).
L'irrégularité peut également être invoquée comme motif de non-renouvellement (Cass. com. 15 janvier 1962, Cass. civ. 17 octobre 1990, n° 89-12528, Cass. 3ème civ. 2 novembre 1982, Bull. civ. III n°210, Cass. 3ème civ. 13 mars 1991 n° 89-18164 ; CA Versailles 13 janvier 2001).
Le bailleur n'est pas tenu de mettre préalablement le locataire principal en demeure (Cass. 3ème civ. 13 mars 1991 n° 89-18164, Cass. 3ème civ. 9 juillet 2003 n° 02-11621) car il s'agit d'un « manquement instantané » qui ne peut ni se poursuivre ni se renouveler (Cass. 3ème civ. 2 novembre 1982, Bull. civ. III n° 210). En conséquence, aucune régularisation n'est possible (Cass. 3ème civ. 5 juillet 1983 : Bull. civ. III, n° 157 ; Cass. 3ème civ. 9 juillet 2003 n° 02-11621).
C. LES OPTIONS PROCEDURALES.
En présence d'une sous location irrégulière pour non-demande d'intervention du bailleur, le bailleur peut exercer plusieurs actions envers le locataire principal :
- Résiliation du bail sur le fondement de la clause résolutoire du bail ;
- Résiliation judiciaire de droit commun ;
- Refus de renouvellement du bail sans indemnité.
a. Clause résolutoire.
Il a été jugé que la clause résolutoire ne peut être mise en oeuvre que pour un manquement à une stipulation expresse du bail ce manquement doit être contractuellement sanctionné par la clause résolutoire (Civ. 3ème 24 février 1999 et 19 mai 2004).
Il arrive que le bail ne contienne pas de clause sanctionnant expressément le non-respect des formalités. Cette obligation ne résulte donc dans ce cas que de l'article L 145-31 du Code de Commerce.
La résiliation paraît difficlement envisageable sur ce fondement même si un arrêt de la Cour de cassation du 14 octobre 1980, critiqué par la Doctrine, semble l'autoriser.
b. Résiliation judicaire de droit commun.
Il appartient au juge du fond d'apprécier si l'inexécution de l'obligation de faire concourir le propriétaire à l'acte a assez d'importance pour que la résiliation soit immédiatement prononcée ou s'il y a lieu à allouer simplement des dommages et intérêts.
La Cour de cassation a approuvé des juges du fond ayant retenu que le défaut d'appeler le propriétaire à concourir à des actes de sous-location constituait une violation délibérée non régularisable des règles d'ordre public de l'article L 145-31 du Code commerce entraînant à elle seule la résiliation (Cass. civ. 12 mars 2002, n° 97-20472).
Mais dans d'autres hypothèses, la résiliation a été refusée :
- pour la seule sous-location de l'appartement dépendant de la location commerciale (Cass. Civ. 10 janvier 1996) ;
- à l'encontre d'un preneur qui avait consenti des locations de 24 mois alors que son bail n'autorisait que de simples domiciliations (Cour de Paris 20 février 1998) ;
- aux motifs que, d'une part, s'il avait été appelé à concourir à l'acte, le bailleur n'aurait pas pu s'opposer à la sous-location cette faculté étant prévue au bail et, d'autre part, que le bailleur n'a subi aucun préjudice (Cour d'appel de Paris, 12 octobre 2002) : le rapprochement du loyer principal et de l'ensemble des sous-locations démontrait qu'apparemment le bailleur n'avait pas été frustré de l'action en réajustement (Code de Commerce article L 145-31 alinéa 3).
En présence d'un loyer du sous-locataire conforme aux limitations fixées par le bail initial, le bailleur ne peut s'opposer à la sous-location.
c. Refus de renouvellement du bail sans indemnité.
Il s'agit de la mise en oeuvre de l'article L 145-47 du Code de commerce selon lequel le bailleur peut refuser le renouvellement du bail s'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant.
Il reste que, là encore, la gravité du motif relève de l'appréciation souveraine du juge.
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Isaac LOUBATON
Avocat à la Cour
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