L'employeur peut proposer au salarié une modification de son contrat de travail pour un motif économique par courrier écrit adressé en recommandé. Le salarié dispose alors d'un mois à compter de la réception du courrier pour se prononcer (c. trav. art. L. 12222-6). Mais comment se calcule ce délai d'un mois ?
Le délai prend fin à minuit le jour du mois suivant qui porte le même quantième que le jour de la réception de la lettre recommandée contenant la proposition de modification.
Par exemple, le salarié qui reçoit le courrier de l'employeur le 20 du mois d'avril a jusqu'au 20 du mois de mai à minuit pour se prononcer. Avant la fin de ce délai, l'employeur ne peut pas mettre en œuvre une procédure de licenciement dans l'éventualité où le salarié refuserait la modification proposée.
Cass. soc. 3 mars 2009, n° 07-42850 FD
« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen :
Vu les articles L. 122-14-3 et L. 321-1-2 codifiés sous les articles L. 1235-1 et L. 1222-6 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 1er septembre 1990 par la société Godineau Zolpan, aux droits de laquelle vient la société Zolpan Ouest, a reçu, le 20 novembre 2003, une proposition de modification de son contrat de travail pour motif économique ; qu'il a été convoqué le 20 décembre 2003 à un entretien préalable et a été licencié le 20 janvier 2004 après avoir refusé cette modification ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le délai d'un mois édicté par l'article L. 321-1-2 devenu L.1222-6 du code du travail était expiré depuis le 19 décembre 2003 au soir lorsque la procédure de licenciement a été engagée le 20 décembre, puisque les règles de calcul de l'article 641 du code de procédure civile ne s'appliquent pas à ce délai ;
Attendu cependant que le délai d'un mois prévu au deuxième alinéa de l'article L. 1222-6 du code du travail constitue une période de réflexion destinée à permettre au salarié de prendre parti sur la proposition de modification en mesurant les conséquences de son choix ; que le salarié devant disposer d'un mois entier pour se prononcer, il en résulte que le délai expire à minuit le jour du mois suivant qui porte le même quantième que le jour de la réception de la lettre recommandée contenant la proposition de modification ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que le délai n'était pas expiré lorsque la procédure de licenciement a été engagée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 avril 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;
Condamne la société Zoplan Ouest aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Zoplan Ouest à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir que le licenciement de Monsieur X..., prononcé à la suite du refus par ce dernier de modifications de son contrat de travail, reposait sur une cause réelle et sérieuse de licenciement et d'avoir, en conséquence, débouté ce salarié de ses demandes de paiement de dommages et intérêts.
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... invoque le non respect du délai impératif d'un mois édicté par l'article L 321-1-2 du Code du travail ; que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 18 novembre 2003, la société a notifié à Monsieur X... sa proposition de modification de contrat au visa de l'article L 321-1-2 du Code du travail ; que la lettre a été reçue par son destinataire le 20 novembre 2003 ; que par courrier en date du 18 décembre 2003, Monsieur X... va demander que soit revu le problème de sa rémunération ; que par lettre datée du 19 décembre 2003, mais expédiée le 20 décembre 2003, prenant acte du refus de la modification du contrat, l'employeur a engagé la procédure de licenciement en convoquant le salarié à un entretien préalable fixé au 5 janvier 2004 ; que le salarié soutient que le délai d'un mois n'a pas été respecté ; qu'une réponse dilatoire ou conditionnelle, comme celle exprimée dans le courrier du salarié, daté du 18 décembre 2003 constitue une réponse négative ; que le délai d'un mois expirait le 19 décembre 2003 au soir, puisque les règles de calcul du délai de l'article 641 du nouveau code de procédure civile ne s'appliquent pas à ce délai, qui a commencé à courir dès le 20 novembre 2003 ; qu'en engageant la procédure le 20 décembre 2003 date d'expédition de la lettre de convocation à l'entretien préalable, l'employeur a respecté le délai de réflexion de un mois ;
ALORS QUE la mise en oeuvre de la procédure de licenciement avant l'expiration du délai de réflexion d'un mois prévu à l'article L 321-1-2 du Code du travail pour permettre à un salarié de se prononcer sur l'ensemble des modifications qui lui sont proposées rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il résulte de l'article 641 du nouveau code de procédure civile, applicable au délai d'un mois prévu par le texte précité, que ledit délai, qui court de la réception par le salarié de la lettre de notification, expire le jour du dernier mois portant le même quantième que le jour de réception de ladite lettre ; que la Cour d'appel a constaté que la lettre de notification de la proposition de modification de son contrat de travail ayant été reçue par Monsieur X... le 20 novembre 2003, en sorte que le délai de réflexion imparti à ce salarié expirait le 20 décembre 2003 à vingt quatre heures et que l'employeur ne pouvait le convoquer à un entretien préalable à son licenciement avant le 21 décembre 2003 ; qu'en décidant néanmoins que le délai d'un mois expirait le 19 décembre 2003 au soir de sorte qu'en engageant la procédure de licenciement le 20 décembre 2003, date de l'expédition de la lettre de convocation à l'entretien préalable l'employeur avait respecté le délai de réflexion d'un mois, la Cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlaient au regard des articles L 321-1-2 du Code du travail, 641 du nouveau code de procédure civile et a violé lesdits textes.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué dit que le licenciement pour motif économique de Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, débouté ce salarié de ses demandes de paiement de dommages et intérêts.
AUX MOTIFS QUE le salarié fait valoir en premier lieu que cette réorganisation, opérant scission de ses fonctions, ne procédait pas de la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise ; qu'il fait valoir qu'il s'agissait, pour ses instigateurs , d'améliorer simplement la profitabilité de l'entreprise ; qu'il résulte des éléments produits, que pour rationaliser son réseau de distribution dans le grand ouest, la société a été amenée à prendre le contrôle de l'entreprise Macé qu'elle a absorbée ;
que l'intégration de cette entreprise a généré des difficultés dans la mesure où elle était déficitaire et où elle représentait un retard important en termes d'organisation et de logistique ; que de son côté, la société GODINEAU ZOLPAN était confrontée à une baisse sensible de son propre résultat d'exploitation de 2001 à 2002, en dépit d'une augmentation de chiffre d'affaires de la société ; que dans ces conditions, il existait bien un contexte économique sensible, obligeant l'employeur à intervenir pour rationaliser la logistique, parvenir à une rotation plus importante des stocks et réduire les délais de livraison ; qu'une telle réorganisation procède de la nécessaire sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise ; que le salarié conteste la nécessité de la réorganisation, en indiquant que l'organisation préexistante permettait de faire face aux nouvelles exigences ; qu'il indique qu'au moment où elle a été conduite, l'essentiel des tâches occasionnées par l'absorption de la société Macé avait été menée à bien ; que cependant par cette organisation, et la création d'un poste d'exploitation autonome, l'entreprise visait des objectifs, tels que informatisation de tous les points de vente, réorganisation logistique générale, réduction des stocks et des coûts, réduction des délais de livraison, informatisation de tous les stocks, dont l'ampleur justifiait à elle seule la réorganisation, étant précisé que la SAS GODINEAU ZOLPAN gérait alors onze établissements, disséminés dans tout le grand ouest ; qu'enfin le salarié fait valoir que l'activité de la société s'est redressée à partir de 2003, ce qui rendait la mise en oeuvre de cette réorganisation à la fin de 2003 injustifiée ; que l'amélioration des résultats ne vient pas contredire la nécessité de la rationalisation ainsi mise en oeuvre, dont l'étude a été conduite sur une bonne partie de l'année 2003, au vu des résultats précédents ; qu'en tout état de cause, les pièces établissent que la société pâtissait de différentes fragilités en terme d'organisation et de rotation de stocks qui ne pouvaient être laissées sans solution sauf à laisser perdurer des fragilités, parfaitement identifiées et constituant un risque ; que sur ce point de vue également, la mise en oeuvre de la réorganisation, à la date à laquelle elle est intervenue répond aux conditions et exigences de l'article L 321-1 du Code du travail ;
ALORS D'UNE PART QU' aux termes de l'article L 321-1 du Code du travail constitue un licenciement pour motif économique le licenciement consécutif soit à des difficultés économiques, soit à des mutations technologiques, soit à une réorganisation de l'entreprise, soit à une cessation d'activité ; que la réorganisation si elle n'est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise en prévenant les difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi ; que lorsqu'une entreprise appartient à un groupe, les licenciements économiques ne peuvent être justifiés par une mesure de réorganisation qu'à la condition que celle-ci soit effectuée pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité dont relève l'entreprise ou du secteur d'activité du groupe auquel elle appartient ; que la lettre de licenciement adressée à Monsieur X..., le 20 janvier 2004, par la société ZOLPAN OUEST, membre du groupe ZOLPAN, invoquait comme motif économique de licenciement la nécessité de réorganiser le secteur logistique pour sauvegarder la compétitivité de la seule société ZOLPAN OUEST ; que dès lors en décidant que la réorganisation engagée par cette société procédait de la nécessaire sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise et répondait aux conditions et exigences de l'article L 321-1 du Code du travail sans rechercher si la réorganisation qui servait de fondement au licenciement de Monsieur X... était nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité du secteur d'activité du groupe auquel appartenait la société ZOLPAN OUEST, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 321-1 du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART et subisidairement QUE la réorganisation de l'entreprise, susceptible de conférer un fondement économique au licenciement d'un salarié, si elle n'est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise en prévenant les difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi ; que dès lors en décidant que la réorganisation de la société ZOLPAN OUEST était justifiée par la seule ampleur des objectifs qu'elle visait tels qu'informatisation de tous les points de vente, réorganisation logistique générale, réduction des stocks et des coûts, réduction des délais de livraison, informatisation de tous les stocks, la Cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser la menace pesant sur la compétitivité de la société ZOLPNA OUEST et violé l'article L 321-1 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QUE la société ZOLPAN OUEST invoquait, pour justifier le licenciement économique de Monsieur X..., non pas ses difficultés économiques mais la nécessité de sauvegarder sa compétitivité ; que dès lors, en se bornant à relever, pour dire que le licenciement de ce salarié reposait sur une cause réelle et sérieuse, que l'intégration de l'entreprise Macé avait généré des difficultés dans la mesure où elle était déficitaire et présentait un retard important en termes d'organisation et de logistique et que de son côté la société GODINEAU ZOLPAN était confrontée à une baisse sensible de son propre résultat d'exploitation de 2001 à 2002 en dépit d'une augmentation du chiffre d'affaires de la société ce qui traduisait l'existence d'un contexte économique sensible, la Cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser la menace pesant sur la compétitivité de la société ZOLPAN OUEST et violé l'article L 321-1 du Code du travail.