Il est fréquent qu'un certain nombre de salariés intérimaires soient affectés de manière continue pendant plusieurs mois ou années, dans le cadre de missions successives, au sein de la même entreprise utilisatrice.
Or, l’article L.1251-5 du Code du travail dispose : « le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice ».
L’article L.1251-40 du Code du Travail définit les hypothèses de requalification d’un contrat de travail temporaire en contrat à durée indéterminée à l’encontre d’une entreprise utilisatrice:
« Lorsqu’une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d’une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l’entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission ».
Dès lors, l’action en requalification est ouverte au salarié intérimaire à l’encontre de l’entreprise utilisatrice notamment lorsqu’il est fait appel à un salarié temporaire pour pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice.
En effet, une entreprise utilisatrice ne peut avoir recours à l’intérim dès lors que celui-ci s’inscrit dans le cadre de son activité habituelle et prévisible.
Le contrat de travail temporaire ayant été conçu pour faire face à des absences inopinées, le recours au contrat précaire ne doit pas devenir un instrument de gestion destiné à pallier un sous-effectif permanent.
L’article L.1251-36 du Code du travail impose en outre le respect d'un délai de carence entre les contrats de mission. Si le délai n'est pas respecté et que les contrats "s'enchainent", il s'agit là d'un indice évident de l’emploi permanent au sein de l'entreprise utilisatrice.
Le salarié intérimaire peut alors dans ces conditions saisir le Conseil de Prud'hommes compétent dans le cadre d'une procédure rapide prévue à l’article L.1251-41 du Code du travail. En effet, il s'agit d'une procédure de saisine directe du bureau de jugement sans phase de conciliation au terme de laquelle le Conseil doit normalement statuer dans le délai d'un mois (en pratique en moyenne environ 6 mois).
Le salarié qui voit ses contrats de mission être requalifiés en CDI est alors susceptible de percevoir les indemnités suivantes:
- indemnité de requalification correspondant à un mois de salaire,
- indemnité compensatrice de préavis,
- indemnité légale ou conventionnelle de licenciement,
- dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ou licenciement sans cause réelle et serieuse.
A titre d'exemples, le cabinet a obtenu dernièrement pour ses clients, dans le cadre de négociations ou de décisions favorables du Conseil de Prud'hommes, les indemnités suivantes:
- pour un Technicien lumière ayant effectué 21 missions continues au cours de 8 mois: 15.000 € correspondant en tout à 7 mois de salaires bruts,
- pour un Soudeur ayant effectué 16 missions continues en 3 ans et demi: 28.000 € correspondant à 9 mois de salaires bruts,
- pour un Manutentionnaire ayant effectué 138 missions continues en 9 ans: 24.000 € soit 12 mois de salaires bruts.