CJUE- Question préjudicielle IP Translator- Précision du champ de protection des marques en Europe.

Publié le 28/08/2012 Vu 4 132 fois 0
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Réponse attendue et retentissante de la CJUE, elle se prononce sur la différence de pratique entre les Offices des marques en Europe. Si certains, dont l’OHMI, considèrent que la reprise de l’intitulé d’une classe dans la demande de marque emporte désignation et protection pour l’ensemble des produits et services de cette classe, d’autres comme l’INPI, considèrent que les produits et services pour lesquels une protection est revendiquée, doivent être expressément visés par le demandeur. La CJUE rappelle que la directive 2008/95/CE impose une exigence de clarté et de précision pour permettre aux autorités compétentes et aux opérateurs économiques, sur cette seule base, de déterminer l’étendue de la protection demandée, ce qui n’empêche pas à cette condition la désignation d’un intitulé de classe par une marque.

Réponse attendue et retentissante de la CJUE, elle se prononce sur la différence de pratique entre les Offic

CJUE- Question préjudicielle IP Translator- Précision du champ de protection des marques en Europe.

CJUE, 19 juin 2012, aff.C-307/10, Chartered institute of patents attorneys c/ Registrar of trade marks: http://curiaeuropa.eu 

1)      Le contexte

L’Office des marques britannique avait appliqué la communication n°4/03 du président de l’OHMI en date du 16 juin 2003 sur la portée de protection des marques communautaires selon laquelle « L’utilisation de toutes les indications générales de l’intitulé de classe d’une classe particulière constitue une revendication à l’égard de tous les produits et services relevant de cette classe particulière ».

Cette communication constituait donc la base de la pratique de l’OHMI appelée « méthode interprétative ».

Cette application avait conduit l’office à refuser l’enregistrement de la marque IP Translator désignant en classe 41 « Education ; formation ; divertissement ; activités sportives et culturelles » (ou l’intitulé de cette classe) au motif que la marque était descriptive des « services de traduction ».

L’office appliquait donc la méthode « interprétative » selon laquelle la désignation de l’intitulé d’une classe dans une demande désigne implicitement l’ensemble de ses produits et services.

Le déposant saisissait la juridiction d’appel de l’Office britannique concerné, arguant que sa demande visait les seuls services expressément énumérés et de l’illicéité de la communication n°4/03. 

Cette juridiction relevait que le libellé du déposant était incompatible avec l’exigence de clarté et de précision requise pour identifier les produits et services concernés, et ne saurait comprendre les « services de traduction » en classe 41.

Elle demandait dans un second temps à la CJUE de se prononcer sur l’interprétation des dispositions communautaire relatives à la portée de la désignation d’un intitulé de classe dans une demande de marque, ce qui constitue le fond de la décision.

2)      Le texte 

La CJUE, rappelle que selon les exigences communautaires, l’indication des produits et services répond à une exigence de clarté et de précision (pt 47-48), condition de désignation d’un intitulé de classe (pt 56) dont la précision et la clarté devra être appréciée au cas par cas par les autorités compétentes (pt 55). 

La Cour approuve donc la méthode interprétative appliquée par l’OHMI tout en la soumettant à l’expression de la volonté du déposant qui doit préciser si la reprise de l’intitulé d’une classe vaut revendication de la protection pour l’ensemble des produits et services répertoriés dans la liste alphabétique de la classe particulièrement concernée (pt 61). 

3)      Une modification immédiate des pratiques.

Le lendemain et suite à cette décision, l’OHMI adoptait la communication 2/12 abrogeant celle de 2003. Cette nouvelle communication reprend textuellement la décision commentée tout en  créant un système transitoire selon lequel :

-Pour les demandes d’enregistrement et enregistrements antérieurs au 21 juin 2012, le recours aux intitulés de classe est présumé refléter l’intention du déposant de revendiquer une protection pour tous les produits et services de la liste alphabétique concernée, en l’absence de limitation, de précision, où de renonciation partielle.

-Les demandes d’enregistrement postérieures au 21 juin 2012 seront remplies selon un nouveau formulaire de dépôt contenant une déclaration optionnelle par lequel le déposant qui désigne l’intitulé complet d’une classe déclare revendiquer une protection pour l’ensemble des produits et services de la liste alphabétique correspondante. Le cas contraire ces produits et services devront être spécifiés par le déposant.

4)      Une insécurité juridique persistante.

De premier abord, cet arrêt de la CJUE n’altère pas les divergences de pratique entre les différents offices d’enregistrement en Europe.

Bien au contraire, la méthode « interprétative » de l’OHMI se trouve confortée et confrontée à la méthode « littérale » de certains Offices Européen dont l’INPI.

 En France, cette méthode veut que les produits et services listés dans un dépôt soient suffisamment précis pour permettre à tous tiers de déterminer de façon immédiate, certaine et constante la portée du dépôt, et conduit à rejeter la désignations d’ intitulés de classe, pourtant acceptés par l’OHMI lors du dépôt d’une marque communautaire.

Cette divergence d’appréciation nuit gravement à la sécurité juridique du déposant (surtout dans les procédures inter partes) puisqu’il lui est possible d’enregistrer une marque communautaire comportant l’intitulé général d’une classe, sans pour autant que les Offices nationaux comme l’INPI ne reconnaissent une protection à l’ensemble des produits et services de la liste alphabétique correspondante, en raison de son imprécision, alors même que le déposant déclare revendiquer une telle protection. 

De surcroît et si le déposant court le risque précédemment exposé, il ne peut d’autre part limiter sa marque communautaire et la préciser afin qu’elle soit protégée par l’INPI ou un autre Office Européen appliquant la méthode « littérale », qu’en affaiblissant son champs de protection dans les autres pays membres qui appliquent pourtant la méthode « interprétative » plus protectrice.

La coexistence de ces deux pratiques est dangereuse et doit tendre le plus rapidement vers une harmonisation en faveur du déposant.  

La pratique voudra donc que le déposant ou son conseil précise le plus possible le libellé de sa marque, qui aura tendance à être exhaustif et long.

5)      Une tentative d’harmonisation à long terme.

L’INPI n’a pour le moment pas fait connaître ses intentions suite à cette décision, mais a engagé avec les offices nationaux, communautaire, et international, une réflexion portant sur les intitulés de classe qui devraient en raison de leur précision et de leur clarté, être considérés comme acceptables, et de nature à assurer la sécurité juridique des tiers.

Ainsi la conformité des intitulés des 45 classes sera examinée de concert avec les Etats-membres puis publiée dans le « manuel pratique des marques » de l’OHMI, qui représente une version actualisée des directives d’examen et d’opposition.

De même une base de données devrait contenir la classification hiérarchique où « taxonomie » des produits et services qui puissent se substituer où compléter les intitulés de classe imprécis.

Les progrès d’harmonisation entre instances nationales et Européenne sont pour l’heure très attendues.

 

                                                                       L.B.V

 

 

 

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