Usage sérieux de la marque – L’usage de la marque complexe vaut celui de ses éléments déposés seuls

Publié le 30/07/2013 Vu 4 230 fois 0
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Arrêt important et attendu de la CJUE, la réponse à la question préjudicielle apportée dans l’affaire Colloseum c/Levi Strauss le 18 avril 2013 continuait d’assouplir la notion « d’usage sérieux » de la marque, en l’espèce de la marque complexe dont les différents éléments sont enregistrés séparément.

Arrêt important et attendu de la CJUE, la réponse à la question préjudicielle apportée dans l’affaire C

Usage sérieux de la marque – L’usage de la marque complexe vaut celui de ses éléments déposés seuls

L’usage sérieux de la marque pendant un délai de 5 années ininterrompues est le seul moyen pour son titulaire d’en conserver le monopole, à défaut de quoi il s’expose à sa déchéance[1].

Par un arrêt récent en date du 25 Octobre 2012 que nous avions déjà commenté[2], la CJUE admettait déjà que l’usage d’une marque sous une forme modifiée puisse sauver de la déchéance, une marque dont elle diffère à condition qu’elle n’en altère pas le caractère distinctif.

La Cour estimait que le titulaire d’une marque enregistrée peut « aux fins d’établir l’usage de celle-ci (…) se prévaloir de son utilisation dans une forme qui diffère de celle sous laquelle cette marque à été enregistrée sans que les différences entre ces deux formes altèrent le caractère distinctif de cette marque, et ce nonobstant le fait que cette forme différente est elle-même enregistrée en tant que marque ».

Cette extension de l’ « usage » très rapidement assimilé par les praticiens devait cependant faire l’objet d’un développement ultérieur suite à une question préjudicielle posée à la CJUE concernant tout particulièrement l’application de ce principe aux éléments d’une marque complexe.

Il lui était demandé si l’usage d’une marque complexe pouvait valoir usage de l’un de ses éléments déposé séparément à titre de marque qui n’est pourtant pas utilisé seul.

En l’espèce, la société Levi Strauss titulaire de la marque Levi’s, possède une marque figurative portant sur le petit fanion rouge présent sur l’ensemble des jeans de la marque, mais n’utilise pas ce fanion rouge seul. Cette marque fut reconventionnellement attaquée en déchéance par une société commercialisant des jeans présentant le fanion rouge. La société Levi Strauss utilise pourtant sa marque semi-figurative comprenant l’élément verbal Levi’s sur le même fanion rouge, et revendiquait l’usage de ce dernier élément seul.

Le Bundesgerichtshof Allemand posait donc à la CJUE une question préjudicielle portant sur l’interprétation de l’article 15 du RMC.

Doit-il être  interprété en ce sens –qu’une marque qui constitue un des éléments d’une marque complexe et qui n’a acquis de caractère distinctif que par suite de l’usage d’une marque complexe peut faire l’objet d’un usage propre à assurer le maintien des droits de son titulaire lorsque seule la marque complexe est utilisée (Première question) et qu’une marque fait l’objet d’un usage propre à assurer le maintien des droits de son titulaire, alors qu’elle n’est utilisée que conjointement avec une autre marque, que le public considère les deux marques comme des signes distinctifs indépendant, et que la combinaison des deux marques est de surcroît, elle-même enregistrée comme marque (seconde question)?

La Cour de Justice avait déjà eu à répondre a une question similaire dans l’arrêt Nestlé[3] et avait reconnu que l’élément « have a break » de la marque complexe « have a break, have a kit Kat » devait acquérir un caractère distinctif propre dès lors qu’il remplit sa fonction d’identification d’origine à lui seul, et devait donc être acceptée à l’enregistrement.

Le caractère distinctif du fanion rouge était acquis dès lors que c’est son usage au sein de la marque complexe le représentant avec l’élément verbal Levi’s qui avait permis son enregistrement à titre de marque.

Reprenant le principe de l’arrêt Nestlé, la CJUE dans sa réponse importante en date du 18 avril 2013[4] considère que « lorsqu’une marque enregistrée, qui a acquis son caractère distinctif par suite de l’usage d’une autre marque complexe dont elle constitue l’un des éléments, n’est utilisée que par l’intermédiaire de cette autre marque complexe, ou lorsqu’elle n’est utilisée que conjointement avec une autre marque, la combinaison de ces deux marques étant, de surcroît, elle-même enregistrée comme marque », la condition d’usage sérieux peut être remplie dès lors que cette marque continue « d’être perçue comme une indication de l’origine du produit en cause ».

Les praticiens autant que les titulaires de marques complexes voient donc à leur grand bénéfice la notion d’ « usage sérieux » faire l’objet d’un nouvel assouplissement.

En pratique, les titulaires de marques renommées et complexes déposent  à titre de marque chacun des éléments de leur marque complexe, souvent très nombreux, sans pouvoir faire usage de chacun de ces éléments séparément ce qui rend leur défense plus difficile.

La solution nous semble particulièrement convenir aux titulaires de marques renommées qui pourront sans difficultés prouver la distinctivité de chacun des éléments de leur marques, déposés séparément et non utilisés seuls.

Ils n’ont plus à craindre les actions en déchéance qui pourront reconventionnellement leur être opposées en cas d’action en contrefaçon fondée sur ces éléments dont l’usage seul n’existe pas.

                                                                                                                                                                            L.B.V

 

[1] Article L.714-5 du Code de la Propriété Intellectuelle et 15, §1a) du RMC

[3] CJUE, 7 juill. 2005, n°C-353/03 Nestlé c/ Mars

[4] CJUE, 18 avr. 2013, n° C-12/12, Colloseum Holding AG c/ Levi Strauss & Co.

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