Je défendais une épouse qui était mariée durant 22 ans, elle percevait l'AAH ( allocation adulte handicapée) et n'avait pas travaillé (ou peu) durant le mariage, elle s'est occupée de l'éducation de ses enfants.
J'avais sollicité une prestation compensatoire en première instance, cette dernière a été refusée.
J'ai interjeté appel, la prestation compensatoire a été fixée à la somme de 10 000 euros, la Cour a autorisé l'époux à la régler de manière fractionnée comme le prévoit la loi, elle a tenu compte de l'incapacité de l'époux de la régler en capital.
Ci-dessous: l'arrêt rendu.
Pour en savoir plus sur le calcul de la prestation compensatoire: voir ICI et LA.
Contact: cabinet@michelebaueravocate.com 33 Cours Pasteur- 33 000 BORDEAUX tél 05 47 74 51 50
CA Bordeaux
CH. CIVILE 06
6 décembre 2011
n° 11/00241
Texte intégral :
CA Bordeaux CH. CIVILE 066 décembre 2011N° 11/00241
République française
Au nom du peuple français
COUR D'APPEL DE BORDEAUX
SIXIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
cp
ARRÊT DU : 06 DÉCEMBRE 2011
(Rédacteur : Anne Marie LEGRAS, Conseiller)
N° de rôle : 11/00241
Micheline Simone I. épouse S.
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2011/002997 du 03/03/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
c/
Alain Claude S.
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2011/11465 du 22/09/2011 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avoués
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 décembre 2010 par le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX (cabinet 25, RG n° 09/11308) suivant déclaration d'appel du 13 janvier 2011
APPELANTE :
Micheline Simone I. épouse S.
née le 24 Novembre 1961 à CENON (33150)
de nationalité Française
demeurant ...
...
représentée par la SCP LABORY MOUSSIE ANDOUARD, avoués à la Cour
assistée de Maître Michèle BAUER , avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉ :
Alain Claude S.
né le 08 Décembre 1960 à TARBES (65000)
de nationalité Française
demeurant ...
Restaurant Le Chalut
33510 ANDERNOS
représenté par la SCP BOYREAU Luc et M. Raphael, avoués à la Cour et assisté de Maître Jacques CAVALIÉ, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 25 octobre 2011 hors la présence du public, devant la Cour composée de :
Catherine MASSIEU, Présidente,
Danièle BOWIE, Conseiller,
Anne Marie LEGRAS, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Sylvie HAYET
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.
Alain S. et Micheline I. se sont mariés le 14 novembre 1987, sans contrat.
Deux enfants sont issus de cette union : Jonathan (22 février 1990) et Anthony (31 décembre 1992).
Le 26 octobre 2009, Micheline I. a présenté une requête en divorce.
Après une ordonnance de non conciliation en date du 16 février 2010, la femme a, par acte du 6 avril 2010, assigné le mari en divorce sur le fondement des articles 233 et suivants CC.
Par jugement du 2 décembre 2010, le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de BORDEAUX a notamment
- prononcé le divorce des époux,
- ordonné la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux,
- dit que Micheline I. ne conservera pas son nom d'épouse,
- débouté Micheline I. de sa demande de prestation compensatoire,
- supprimé à compter du 31 décembre 2010 la pension alimentaire due par le père pour les deux enfants.
Par déclaration remise au greffe de la Cour le 13 janvier 2011, Micheline I. a interjeté appel non limité de cette décision .
Aux termes de ses dernières conclusions déposées et signifiées le 5 août 2011, l'appelante demande à la Cour
- de lui accorder une prestation compensatoire d'un montant de 10 000 € payable sur 8 ans,
- de constater que les enfants communs sont toujours à sa charge et lui accorder une pension alimentaire mensuelle de 150 € par enfant soit 300 €,
- de lui accorder le droit de garder le nom de son époux pour garder un lien avec les enfants,
- de confirmer le jugement sur les autres dispositions,
- de laisser à la charge de chaque partie les dépens de l'instance.
Dans ses écritures déposées et signifiées le 7 juin 2011, l'intimé conclut au débouté de l'appelante et à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.
Il sollicite la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 CPC.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 11 octobre 2011.
SUR QUOI , LA COUR :
Seules les dispositions du jugement relatives à l'usage du nom marital, à la prestation compensatoire et à la pension alimentaire pour les deux enfants communs sont contestées.
Le surplus de la décision, non critiqué, sera confirmé.
Sur l'usage du nom marital,
Aux termes de l'article 264 CC, à la suite du divorce chacun des époux perd l'usage du nom de son conjoint.
L'un des époux peut néanmoins conserver l'usage du nom de l'autre soit avec l'accord de celui ci soit avec l'autorisation du juge s'il justifie d'un intérêt particulier pour lui ou les enfants.
En l'espèce, il n'existe aucun accord.
Micheline I. justifie sa demande par le fait « qu'elle souhaite garder le nom de son époux pour garder un lien avec ses enfants » .
Cependant, ni la durée du mariage, en l'espèce non exceptionnelle, ni le fait invoqué de souhaiter porter le même nom que ses enfants, aujourd'hui majeurs, ne constitue l'intérêt particulier visé à l'article 264 CC.
Le jugement sera confirmé.
Sur la prestation compensatoire,
L'article 270 CC dispose que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives des époux.
Cette prestation a un caractère forfaitaire et prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge.
Aux termes de l'article 271 CC, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce, soit le présent arrêt, et de l'évolution de celle ci dans un avenir prévisible.
Les critères à prendre en compte sont :
* la durée du mariage,
* l'âge et l'état de santé des époux,
* leur qualification et leur situation professionnelles,
* les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,
* le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial,
* leurs droits existants ou prévisibles,
* leur situation respective en matière de pensions de retraite ;
L'article 272 fait obligation aux parties de produire une déclaration sur l'honneur certifiant l'exactitude de leurs ressources, leurs revenus, leur patrimoine et leurs conditions de vie ;
Les articles 274 et suivants prévoient d'autres modalités de règlement de la prestation, sous forme d'attribution de biens, ou de rente temporaire ou viagère.
Pour la détermination des besoins et ressources il convient de relever les éléments suivants :
.mari né le 8 décembre 1960, femme née le 24 novembre 1961,
.mariage célébré le 14 novembre 1987 sans contrat, résidence séparée par ordonnance de non conciliation du 16 février 2010, soit une vie conjugale de 24 ans avec vie commune de 22 ans,
.ils ont eu deux enfants .
Micheline I. est âgée de 50 ans.
Elle perçoit une allocation adulte handicapé d'un montant mensuel de 711 €.
Elle a la charge d'un loyer mensuel de 669 € sous déduction de l'APL de 365 €.
Elle a du retard dans le paiement de ses loyers et, par ordonnance de référé du 24 juin 2011, le juge d'instance de BORDEAUX
- a constaté le jeu de plein droit de la clause résolutoire du bail,
- en a suspendu les effets et accordé un délai de 23 mois durant lequel Micheline I. devra rembourser sa dette par mensualités de 150 €.
Elle produit une correspondance de l'association ARI (association pour le réinsertion et l'intégration) en date du 2 mars 2011 adressée à son avocat , dans laquelle Madame C., assistante sociale, déclare notamment : notre service rencontre Madame S. depuis fin 2006. Les entretiens avec Sandrine F., psychologue clinicienne, nous ont conduit à ne pas poursuivre les démarches en direction d'un retour à l'emploi. En effet, l'état de santé de Madame S. nous semble contre indiquer toute démarche en ce sens.
Elle se trouve incontestablement dans une situation de précarité.
Alain S. est âgé de 51 ans.
De 2005 à 2009, il a travaillé dans la restauration à temps partiel, occupant un travail saisonnier.
Actuellement, il exerce une activité à temps plein pour laquelle il perçoit un salaire mensuel net de 1 481 € outre des heures supplémentaires non imposables à hauteur de 214 € mensuels.
Il a la charge d'un loyer mensuel de 460 €.
Il fait valoir que depuis le mois d'août 2010 il connaît de graves ennuis de santé (phénomènes allergiques sur son lieu de travail), a été en arrêt de travail à plusieurs reprises et de façon continue depuis le 13 décembre 2010.
Il perçoit des indemnités journalières d'un montant de 53,58 € par jour soit une moyenne mensuelle de 1 635 € (cf pièce 6 : attestation de paiement d'IJ en date du 15 avril 2011) . Sa situation postérieure n'est pas justifiée.
Il dit avoir été déclaré inapte au travail temporairement et devoir prochainement être déclaré inapte à titre définitif.
Il n'en justifie pas.
Les époux ne font état d'aucun patrimoine propre ou commun.
Ainsi, l'épouse a des revenus inférieurs et, d'une manière générale, une capacité de gains moindre que l'époux.
Ces éléments mettent en évidence une disparité telle que sus définie au détriment de l'épouse.
La prestation compensatoire devant prendre la forme d'un capital, la Cour dispose des éléments lui permettant d'en fixer le montant à la somme de 10 000 €.
Le débiteur n'étant manifestement pas en mesure de verser le capital autrement que de façon fractionnée, il convient en application de l'article 275 CC de l'autoriser à s'en libérer par le versement de 95 mensualités de 100 € et une dernière mensualité de 500 €.
Sur la pension alimentaire pour les enfants communs ,
Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant.
L'obligation des parents de subvenir à l'entretien des enfants ne cesse pas à leur majorité . Ils demeurent tenus, après cette date, de leur donner, à proportion de leurs ressources, les moyens de poursuivre les études correspondant à la profession à laquelle ils se destinent ou de leur permettre, dans un délai raisonnable, de faire face aux difficultés qu'ils peuvent rencontrer pour s'insérer dans la vie active.
En l'espèce, Jonathan est âgé de 21 ans et Anthony de bientôt 19 ans.
Leur situation actuelle n'est pas justifiée.
Micheline I. soutient avoir toujours les enfants à charge mais ne justifie ni qu'ils poursuivent des études, ni qu'ils exercent une activité professionnelle, ni même qu'ils sont en recherche d'un emploi.
La lettre de l'ARI dont il est fait état ci dessus mentionne des frais inhérents aux soins dont le fils aîné a besoin, dont on ignore la nature et le motif, mais également le fait qu'elle ne peut prétendre à certaines aides financières du fait des rémunérations perçues par ses fils.
Dès lors, en l'absence de justificatifs de la situation des enfants majeurs, le premier juge a exactement supprimé la pension alimentaire à la charge de Alain S..
La décision sera confirmée.
Sur les dépens,
Vu les articles 695 et suivants du code de procédure civile relatifs aux dépens,
La nature de l'affaire justifie que chacune des parties conserve la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS :
INFIRME partiellement le jugement du 2 décembre 2010 uniquement en sa disposition relative à la prestation compensatoire,
STATUANT A NOUVEAU, sur la seule disposition infirmée,
C. Alain S. à payer à Micheline I. une prestation compensatoire de 10 000 € payable par 95 mensualités de 100 € et une dernière mensualité de 500 €,
DIT que ces mensualités seront indexées sur les variations de l'indice des prix à la consommation des ménages urbains (sauf tabacs) publié par l'INSEE avec révision le 1er janvier de chaque année à partir du 1er janvier 2013,
CONFIRME le jugement pour le surplus,
Vu les dispositions de l'article 700 CPC,
DEBOUTE l'intimé de sa demande,
DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens .
L'arrêt a été signé par Catherine MASSIEU, Présidente, et par Sylvie HAYET, greffier, à qui il a remis la minute signée de la décision.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
Composition de la juridiction : Catherine MASSIEU, Michèle BAUER , Jacques CAVALIÉ, SCP BOYREAU
Décision attaquée : TGI Bordeaux, Bordeaux 2 décembre 2010