traitement comptable et fiscal d’un déficit en cas de changement d’activité

Publié le 21/04/2025 Vu 907 fois 3 Par
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18/04/2025 21:29

Bonjour à tous,

Je gère une SASU qui a clôturé l’exercice 2024 avec un déficit. À partir du 01/01/2025, la société change totalement d’activité.

Je cherche à traiter correctement ce déficit :

1/ Comptablement, est-il possible / conseillé de neutraliser le déficit dans une écriture de clôture au 31/12/2024, en le reclassant en produit exceptionnel (compte 771), pour qu’il ne soit pas repris dans les capitaux propres de 2025 (et éviter une confusion avec la nouvelle activité) ?

2/ Fiscalement, j’ai lu qu’un carry-back est possible, mais aussi qu’en cas de changement d’activité significatif, le droit au report en arrière est perdu (notamment selon la jurisprudence CAA Toulouse + CE 20/11/2017 n°397027).

Avez-vous une confirmation officielle ou pratique sur l’impossibilité de faire un carry-back dans le cas d'un changement d'activité ?

Et surtout, validez-vous le traitement comptable via une OD exceptionnelle pour solder le compte 129 sans l’affecter au report à nouveau ? Sinon comment traiter fiscalement et comptablement ce deficit.

Merci beaucoup à tous pour vos éclairages Dernière modification : 21/04/2025 - par martinyan

20/04/2025 19:38

Bonjour,

Comme vous l'avez évoqué, je rappelle que le changement d'activité réelle d'une société emporte cessation d'activité, en application de l'article 221-5 du CGI et les conséquences fiscales qui en découlent, à savoir, outre l'imposition immédiate des bénéfices d'exploitation non encore taxés, des bénéfices en sursis d'imposition et des plus-values latentes incluses dans l'actif social, sous réserve de l'application éventuelle de l'atténuation conditionnelle prévue àl'article 221 bis du CGI, la perte du droit au report des déficits subis, avant changement.

Comme vous l'avez observé également, la jurisprudence considère qu'en vertu de l'article 220 quinquies-II du CGI, l'option pour le carry back ne peut pas être exercée au titre d'un exercice au cours duquel intervient une cession ou une cessation totale d'entreprise, auquel le changement d'activité réelle d'une société est assimilé, en se fondant sur l'intention du législateur, lors de l'adoption de l'article 200 quinquies, à savoir favoriser le rétablissement rapide des résultats et la poursuite de l’activité, ce qui n'est évidemment pas le cas, lors d'une cessation d'activité ou d'un changement d'activité important, équivalant à une cessation d'activité.

Votre proposition de neutralisation du déficit 2024 (compte débiteur 129), à la clôture de l'exercice 2024, en utilisant un compte de produit exceptionnel, afin que la perte n'apparaisse pas dans le report à nouveau déficitaire au 01/01/2025, ne me semble pas conforme à l'orthodoxie, tant au point de vue comptable, qu'au plan du droit commercial ou du droit des sociétés, même si je précise que je ne suis, ni expert-comptable, ni conseil en droit des affaires.

Sur la temporalité de l'écriture comptable, je pense qu'il est prématuré de neutraliser le déficit constaté à la clôture de l'exercice, sans avoir approuvé les comptes de l'exercice 2024 et sans avoir procédé à l'affectation du résultat déficitaire, ces évènements ne pouvant intervenir qu'en 2025.

Je ne vois pas trop comment pourrait être justifiée la comptabilisation d'un produit exceptionnel (771) et quelle serait la contrepartie débitrice de l'opération, hormis le débit du compte-courant d'associé, pour autant que sa situation créditrice le permette. D'ailleurs, dans cette solution, au lieu de créditer le compte 771, on pourrait créditer, pour annulation, le compte 129, par le débit du compte-courant.

Personnellement, il me semble que le déficit 2024 devrait être repris dans le bilan d'entrée 2025 et après approbation des comptes 2024 et décision d'affectation, il pourrait être affecté au report à nouveau débiteur ou au compte-courant d'associé, si sa situation créditrice permet d'apurer la perte. Mais cette solution d'affectation au compte-courant a le défaut d'être coûteuse, en terme de trésorerie.

Pour conclure, je dirai que je n'ai pas de solution miracle à vous proposer.

Désolé,

Bien cordialement

21/04/2025 13:41

Bonjour et merci pour votre réponse détaillée,

Votre retour confirme plusieurs points importants que j’avais identifiés, et je me permets d’apporter quelques précisions, notamment suite à des recherches très approfondies ce week end.



1. Sur le plan comptable : maintien du déficit dans les comptes

Le déficit constaté à la clôture de l’exercice 2024 doit, en effet, être enregistré dans le compte 129 « Résultat de l’exercice ». Il n’est ni possible ni conforme aux principes comptables (notamment ceux de prudence et de régularité) de le « neutraliser » en le reclassant en produit exceptionnel (compte 771), comme je le suggérais initialement. Cette écriture reviendrait à fausser la représentation fidèle du résultat. La seule affectation possible du résultat, après approbation des comptes, est vers le report à nouveau, ou vers une autre réserve, selon la décision de l’organe compétent.



2. Sur le plan fiscal : abandon volontaire du déficit

La société va choisir de ne pas utiliser le déficit fiscal de l’exercice 2024. Cela signifie que le déficit ne sera pas inscrit dans la liasse fiscale 2033-D, cadre 1, en tant que déficit reportable. Ce choix est volontaire, irrévocable, et repose sur le fait que la société a connu un changement d’activité réel au sens de l’article 221, 5 du CGI (abandon complet de l’activité de conseil au profit de l’activité de marchand de biens, acté par PV du 4 octobre 2024).

Cette décision sera documentée par une note explicative jointe à la liasse fiscale, précisant que, bien que le déficit soit comptablement constaté et affecté au report à nouveau (qui reste largement créditeur dans mon cas), il ne sera pas utilisé fiscalement.

3. Sur la question du carry-back (article 220 quinquies du CGI)

Comme vous l’avez rappelé, la jurisprudence considère que l’option pour le carry-back est exclue en cas de cessation ou de changement réel d’activité, ce qui est cohérent avec l’intention du législateur de réserver ce mécanisme à la continuité d’exploitation. Ce point a donc été écarté dans mon cas.


Pour résmumer, la solution finalement retenue est la suivante :



Le déficit 2024 est constaté normalement dans les comptes et affecté en 2025 au report à nouveau.



Il est abandonné fiscalement, c’est-à-dire qu’il ne figure pas dans la liasse 2033-D, ni en report, ni en imputation.



L’approche vise à respecter la cohérence entre la comptabilité et le droit fiscal, tout en sécurisant la position face à un changement d’activité réel.





Merci encore pour votre réponse, qui m’a permis d’aboutir à une solution à la fois conforme et documentée.

Bien cordialement,

21/04/2025 14:32

Bonjour Martinyan,

Je ne peux que partager votre analyse et votre traitement comptable et fiscal de l'opération. Mon point de vue d'ancien inspecteur des impôts, ayant pour l'esssentiel exercé en brigade régionale de vérification, me conduit à privilégier le traitement fiscal des opérations. Les agents du fisc sont chargés de veiller au seul respect de la règlementation fiscale et pas des règles comptables, du moins tant que les pratiques comptables ne conduisent pas à enfreindre les règles fiscales.

Dans votre cas, l'essentiel est de ne pas imputer le déficit attaché à l'ancienne activité qui n'est plus reportable, ni en avant, ni en arrière, comme nous l'avons dit et comme vous l'admettez.

Vous faites bien de joindre une note à la liasse fiscale 2024, pour expliquer la situation et votre position que les services fiscaux ne peuvent qu'approuver. Cela devrait éviter les malentendus éventuels et les demandes d'informations qui auraient pu intervenir, par la suite, sachant que la situation de déficits en présence de changements d'activité fait l'objet d'une surveillance bien compréhensible de la part de mes anciens collègues. Je peux vous dire qu'il m'est arrivé, à plusieurs reprises, de remettre en cause l'imputation de déficits reportables, dans des situations comparables à la vôtre. Vous choisissez le respect des règles et donc, la tranquillité fiscale. Je trouve cela intelligent.

Je profite de l'occasion, pour saluer vos connaissances et vos recherches approfondies, pour essayer de règler convenablement une situation complexe ou peu commune, sur laquelle, de nombreux contribuables font l'impasse. Ce n'est pas courant sur les forums !

Je ne peux, désormais, que vous souhaiter bonne chance, dans votre nouvelle activité.

Je reste disponible pour partager avec vous, dans l'avenir, si vous aviez besoin.

Bien cordialement

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