Une image consultable sur Google images est-elle libre de droits ?

Publié le Modifié le 10/01/2020 Vu 12 052 fois 2
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Google images constitue un outil incontournable d’Internet, regorgeant de contenus visuels facilement accessibles. Sa simplicité d’utilisation ne doit pourtant pas faire oublier que des règles légales strictes encadrent leur utilisation.

Google images constitue un outil incontournable d’Internet, regorgeant de contenus visuels facilement access

Une image consultable sur Google images est-elle libre de droits ?

Qui n’a jamais été tenté de rechercher sur Google images une photo pour illustrer un contenu publié sur Internet ? Qui n’a jamais recherché des gif, ces images animées destinées à illustrer nos commentaires et autres articles de blog ? Tous ces contenus sont librement accessibles sur internet et automatiquement référencés sur Google images lorsque leurs propriétaires les publient. Perdant le contrôle de leurs données numériques, ces derniers alimentent sans toujours le vouloir une formidable banque d’images et de vidéos laissée à libre disposition du public.

Contenus publics et images privées insuffisamment protégées s’y retrouvent pêle-mêle. Les internautes peuvent alors, après avoir tapé un mot-clé permettant de trier un minimum le contenu, visualiser sous le sigle du moteur de recherche des centaines de données qu’ils peuvent légitimement croire libres de droits. La tentation est alors grande de se les approprier, de les détourner ou simplement de les utiliser à titre d’illustrations.

Pourtant, si visualiser ces contenus constitue une activité parfaitement légale, les utiliser peut, dans certaines circonstances, constituer une pratique illicite exposant l’internaute à des poursuites judiciaires.

 

Des images soumises aux droits d’auteurs

Contrairement à de nombreuses idées reçues, le référencement d’images par un moteur de recherche n’entraîne aucune conséquence sur les droits afférents à l’image. La possibilité de les consulter publiquement et à volonté ne signifie en aucun cas qu’elles seraient tombées dans le domaine public, ou que leurs auteurs ne pourraient plus se prévaloir de leurs droits de propriété intellectuelle.

Lorsqu’un visuel original est réalisé, son auteur bénéficie en France d’un droit de propriété intellectuelle, qui lui est reconnu par les articles L. 112-1 et L. 112-2 du Code de la propriété intellectuelle.

Cet ensemble de droits qui lui est reconnu, regroupé sous le vocable de droits d’auteurs, se divise en deux catégories : des droits moraux, d’une part, et des droits patrimoniaux, d’autre part. L’article L. 123-1 du Code de la propriété intellectuelle garantit à l’auteur la possibilité de jouir de ses droits jusqu’à sa mort, ainsi que celle de les transmettre à ses ayant-droits pour une durée de 70 ans. Au-delà, il est dit que l’œuvre tombe dans le domaine public, ce qui signifie qu’elle devient libre de tous droits et peut être utilisée sans contraintes spécifiques.

Selon l’article L. 121-2 du même code, l’auteur de l’œuvre « détermine le procédé de divulgation [de son œuvre] et fixe les conditions de celle-ci ». Autrement dit, seul lui peut décider de l’utilisation qui sera faite de son œuvre et à ce titre, il peut décider de renoncer à utiliser ses droits d’auteur si un tiers fait usage de son œuvre, ou fixer les limites de cet usage toléré. Cette tolérance doit toutefois être expressément stipulée par l’auteur de l’œuvre, ne pouvant être présumée. 

 

Des sanctions dissuasives

L’utilisation abusive de l’œuvre d’autrui peut donc être caractérisée par la récupération et le réemploi d’une image trouvée sur Google images, alors que celle-ci ne serait pas libre de droits. Dès lors que son auteur n’a pas expressément approuvé l’utilisation libre du contenu, celui qui le visualise doit partir du principe que celui-ci n’est pas disposé à renoncer à ses droits d’auteur, et qu’une utilisation de l’image doit donc être approuvée par son propriétaire.

A défaut, l’utilisation d’images sans autorisation expresse de son propriétaire constitue une contrefaçon, au sens de l’article L. 335-2 du Code de la propriété intellectuelle. Ce comportement peut être poursuivi devant les juridictions civiles, dans un délai de 5 ans, ou devant les juridictions pénales, dans un délai de 6 ans. L’article L. 331-1-3 du même code dispose que « Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement : 1° Les conséquences économiques négatives de l'atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ; 2° Le préjudice moral causé à cette dernière ; 3° Et les bénéfices réalisés par l'auteur de l'atteinte aux droits, y compris les économies d'investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l'atteinte aux droits. ».

C’est sur ce fondement que la Cour d’appel de Paris a pu condamner pour contrefaçon, le 13 juin 2017[1], une société de vente de cigarettes électroniques qui avait utilisé et détourné, sans autorisation, des images réalisées par un photographe indépendant. Le préjudice économique a été évalué à 50.000 euros, et à 25.000 euros, s’agissant du préjudice moral. Si ces sommes varieront en fonction de la notoriété de la photographie et la nature de l’exploitation qui en est faite, l’on perçoit tout de même l’aspect dissuasif de telles condamnations.

L’utilisation d’images laissées à libre disposition sur internet doit donc se faire avec prudence, l’usager étant invité à s’enquérir, avant d’agir, de l’étendue des droits protégeant, la plupart du temps, l’image.

 

Karim Jakouloff
Docteur en droit

 



Source :

[1] CA Paris, 13 juin 2017, n°15/10847.

 

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